[Souffre Jour]

Il fait nuit sur Château Sauvage.
La lune est haute dans le ciel et baigne de sa sépulcrale lumière l’anneau de pierre ou je suis assise.
Je ne suis pas seule, des dizaine d’autres guerriers sont rassemblés ici même avec moi, mais aucun ne me remarque.
Ils discutent, rient et s’interpellent, mais aucun ne me remarque.
Ils sont de toutes origines et de toutes confessions, mais aucun ne me remarque.
Je distingue certains de mes semblables, assis, qui bercent leur solitude en évaluant les personnes autour d’eux.
Tout comme moi.
Je crois même apercevoir fugitivement le visage de héros dont les hauts faits ont bercé mon enfance mais cette image est tellement floue que je pense peut-être me tromper.
Je m’emmitoufle dans ma pèlerine.
Enfin Maître Visur apparaît, entouré des maîtres des apprentis. Il lance la phrase rituelle « Par delà les terres sombres… » mais déjà je n’écoute plus. Je ferme les yeux et repense à tous les sacrifices que j’ai fait pour en arriver là. Tous mes amis qui sont tombés durant l’entraînement, la peur dans les donjons des collines de Camelot et dans ceux de la forêt de Campacorentin.

Mes yeux s’ouvrent… Il pleut sur le val de Quartz. C’est le temps des derniers préparatifs. Je m’isole sous un escalier pour enduire mes deux lames du poison que j’ai fabriqué. Près de moi, une femme clerc embrasse passionnément un paladin qui, souriant, enfile son heaume. Un cabaliste flatte son simulacre et un mercenaire bande ses muscles devant une assemblée de moniales.
Je ne sais pas pourquoi, mais j’ai un mauvais pressentiment… je sais qu’aucun d’eux ne reverra Albion et ses vertes vallées.
Je les regarde, puis je les oublie.
Je sors du fort.

La vue qui s’offre a moi est décevante de prime abord. Quartz, morne plaine.
Puis par delà la pluie j’aperçois nos ennemis, une troupe de midgardiens qui nous empêchent de sortir du fort. Il y a quelques échanges de sort, mais rien de vraiment léthal. Je me dissimule dans les ombres et décide de partir en éclaireur.
Ils sont nombreux. Plus nombreux que nous. Je les observe et, malgré mon dégoût, je leur trouve quelque chose de ridicule, de pataud dans leur démarche.
Soudain je décèle une ombre dans celle d’un troll. Je me rapproche et cela ne fait plus aucun doute. Là, devant moi se tient une ombre hibernienne. C’est une magnifique elfe aux longs cheveux blonds dont le regard est hypnotisant.

Elle me dégoûte elle aussi. Mon maître m’a toujours mis en garde contre cette engeance qui fait partie de nos pires ennemis. Elle se déplace. Elle cherche une proie facile, isolée, à l’écart du groupe.
Je la suis. Elle ne me voit pas.
Enfin elle a trouvé une cible à son goût : un clerc occupé à ressusciter un malheureux maître d’armes.
Elle s’approche de lui, sans se douter qu’en fait, c’est elle la proie. Je m’approche d’elle par derrière.
Je la ceinture.
La première lame s’enfonce entre deux côtes tandis que la seconde fore un passage dans sa poitrine.
Elle lève la tête et je croise son regard, chargé d’incompréhension, et qui se voile déjà sous l’effet du poison.
J’extrait mes deux lames.
Son regard s’éteint et elle s’effondre.

Mon intervention a galvanisé les troupes. Les guerriers chargent, appuyés par un feu nourri de nos sorciers.
Une percée se forme, les forces de Midgard s’enfuient, et se font massacrer dans la débandade.
Je m’assoie à côté du corps de ma victime. Je n’aperçois pas le visage de ceux qui me sourient pour me féliciter.
Je pleure.
Non pour ce rejeton d’Hibernia, mais pour moi.
Car je sais qu’un jour, mon tour viendra.

[Partaille Emondeur]

tres zouli souffre jour! a quand une aventure avec souffre nuit?

[Soir]

Bon début, jeune sicaire

[Llys]

super