Broc - Hibernia - Un regard

 
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En parcourant ces contrées immenses, je croisai un jour ce regard sombre et pénétrant que je pensais alors ne plus jamais voir. Ce moment si intense de la fusion de deux âmes en un court instant qui semble alors une éternité me hanta pendant des mois. Je me remémorais les perles de ces yeux que je ne connaissais point, ce frisson qui m’avait parcouru le corps et ce sentiment inconnu, plein de plénitude qui depuis perdurait. Pourtant, nous étions de deux mondes si différents, en perpétuelle opposition.

Je ne l’avais plus jamais croisé, celui dont je ne connaissais même pas le nom. Son souvenir s’estompait avec le temps, devenant un rêve éveillé dont je n’étais même pas sûre qu’il se fut produit.
Un jour pourtant, errant dans ma solitude dans cette nature apaisante que j’aimais tant, j’aperçus au milieu d’un bosquet une ombre familière. Je me rapprochais, n’étant pas sûre que ce ne soit pas mon imagination qui me jouait des tours. A ce moment, le soleil se leva, illuminant de ses rayons une épée qui brilla alors de mille feux. Je ne le reconnus pas tout d’abord et tirai mon épée en réponse à cette provocation. Dans le feu de l’action, nos armes s’entrechoquant sous un effort de survie, je ne pus saisir l’expression de son visage si déterminé. Je le blessai gravement et en voyant la surprise qui se peignit alors dans ses yeux, je reconnus mon homme.

Je reculais alors, pour ne point finir cette histoire sur une vision sanglante et morbide. En voyant la souffrance défigurer son visage, je ne pus empêcher des larmes de couler le long du mien, doucement, sans bruit, jusqu’à la commissure des lèvres. Je me sentais si impuissante à ne rien pouvoir faire pour apaiser sa douleur, alors je m’assis face à lui tout en pleurant pour lui signifier ma sympathie. Quand je compris qu’il ne partirait pas, tellement sa fierté était exacerbée pour tourner le dos à l’ennemi, je le saluai avec respect et je partis lentement, encore sous l’emprise de la culpabilité.

Je ne sentis le poison me parcourir que lorsqu’il fut trop tard, son coup avait été direct et sans appel. Je n’eus que le temps de me retourner pour voir mon meurtrier crier sa victoire. Cette image fut la dernière, mes yeux encore humides de larmes se fermèrent à jamais.
 

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