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Acte 3 :
Sur la route de Camelot
Cela faisait 2 jours que je marchais en direction de Camelot, décidée à trouver les réponses à ces questions qui me torturaient.
C’était une journée calme, ensoleillée, une légère brise soufflait sur les collines environnantes. Midi approchait et j’avais grand faim. Heureusement, les auberges ne manquaient pas dans la région, et il se trouvait justement un relais a quelques pas de la ou je me trouvais. La fumée qui s’échappait du conduit de la cheminée m’indiquait que cette auberge était sûrement ouverte.
Je poussais la lourde porte d’entrée, et je m’asseyais à la table du coin, une petite table ronde en bois, sculptée à la hâte pat un ébéniste qui devait avoir autant de talent pour le travail du bois que j’en avais pour la cuisine. L’atmosphère était chaleureuse, bien que l’auberge était presque vide. Le feu de la cheminée chauffait agréablement l’endroit, et le crépitement du bois léché par les flammes me tenait éveillée. Je n’avais pas dormi de la nuit, n’ayant pas trouvé de logis pour coucher. Sa serveuse s’approchait de moi, et me demanda ce que je désirais.
« Donne moi donc un verre de vin du tonneau et une volaille grillée quelconque, je me moque bien du raffinement des mets, tout ce que je souhaites, c’est repartir au plus vite ».
« Bien Mademoiselle, laissez moi le temps de préparer tout cela »
La serveuse disparu aux fourneaux.
Je levais les yeux et je me mis à observer les lieux d’un peu plus près. Il y avait trois autres clients. Un homme, d’une cinquantaine d’année, sûrement le palefrenier du coin pensais-je à la vue de ses bottes souillée par le crotin et du fouet lacé à sa ceinture. Il était accoudé au zinc, semblait perdu entre ses rêves et la vie réelle.
Je voyais aussi deux femmes assises non loin de lui, l’une, les cheveux grisonnant, ne devait plus être très jeune pensais je. L’autre femme semblait plus jeune, et plus vive.
Je fouillais mon sac, faisant un rapide inventaire de ce qui me restais e mes années d’apprentissage. Mon regard se posait tout naturellement sur une petite icône peinte par mon Maître. Dessus, y étaient dessiné une représentation de la Chimère, bête légendaire, fruit difforme du monstre Echidna, femme et serpent tout à la fois, et de Typhon, un monstre effrayant, au corps couvert d'écailles, et dont les cent gueules vomissaient du feu.
Cette Chimère, avait la tête d'un lion et d'une chèvre et la queue d'un dragon. Je contemplais cette icône, plongée dans la réflexion, lorsque la servante fit son apparition et posa sur la table un verre de vin et une perdrix cuite sur le feu de la cheminée.
« J’espère que vous serez satisfaite de la cuisson, j’ai pour habitude de ne pas laisser totalement la cuisson aller à son terme, la chair de la perdrix n’en est que plus tendre. »
Ecartant la serveuse du bras, j’entamais mon repas, et le crépitement du feu repris son règne dans l’auberge…
Je mangeais goulûment la perdrix que m’avait préparée la gouvernante de l’auberge. La boisson, mauvaise, représentait a elle seule la morosité d’Albion. La terre autrefois féconde ne donnait plus aux hommes que des vignes malades, la robe du vin, jadis rouge passion avait virée au mauve pâle. « Une vraie piquette », grommelais-je entre deux bouchées. La perdrix était de facture acceptable, la serveuse n’avait pas mentie sur la qualité de la cuisson. Une fois le repas terminé, je me levais et me dirigeais vers le zinc pour payer. Sortant ma bourse, quelle ne fut pas ma surprise de voir que mon or avait disparu !!! D'abord gênée, je me repris et annonça à la serveuse que je n’avais pas de quoi la payer. A mon grand étonnement, cette dernière ne m’en tint pas rigueur, et me demanda un service en échange. Je devais apporter une grande hache ancienne près de Camelot, au cimetière d’Humberton, la ou reposait son propriétaire. Je pris la hache dans mes mains, et commença à l’observer. Le manche, en bois, s’était fissuré, et la lame, bien qu’un peu rouillée, était toujours tranchante. Soudains, mon regard se figea. Sur la hampe de la hache était gravée une chimère, la même chimère que celle que je transportais dans mon sac sur un carré de bois !
Je levais les yeux sur la patronne, et lui lançais un regard noir. Je posais la hache sur le zinc, et, d’un mouvement vif, je sortis mon épée courte de son fourreau et la plaçais sous le menton de la serveuse. L’homme que je pensais palefrenier se leva, paniqué, et sorti à son tour une petite dague en bronze. Un rapide coup d’œil dans sa direction, et je savais qu’il n’aurais jamais le cran de tenter quoi que ce soit. Il n’était pas rompu au combat, et tuer était, de toute évidence, un acte demandant bien trop de courage pour un homme qui passait son temps a récurer des écuries. Les deux femmes assises non loin de la se gardaient bien d’intervenir.
Je serrais fort le col de la serveuse, pour la forcer à se mettre sur la pointe des pieds.
« Que représente cette chimère !!! Pourquoi est elle gravée sur cette hache, hein, pourquoi !!!
Parle ou je t’égorge sur le champ ! »
« Lâchez moi… j’ai..du mal a…respirer !! »
Je relâchais un peu l’étreinte autours de son cou et la laissait reprendre son souffle avant d’exiger la vérité sur cette gravure.
« Ce sont les armes de ma famille » Lâcha-t elle.
« Tu mens !!! Une femme pauvre comme toi ne peux pas avoir des origines nobles, c’est impossible ! » Rétorquais-je froidement.
« Je…je ne suis pas pauvre, ou du moins… je ne l’étais pas, jusqu'à la mort de mon mari.
Il est mort il y a trois ans, à Camelot, sur le chantier d’une construction. Un sceau de briques posé en haut des fondations lui est tombé dessus. Il est mort sur le coup… Cette hache était pour lui sa fierté, il avait fait graver dessus ses armes. Sa famille était une ancienne sommité a Camelot, mais lui s’était toujours refusé a se plier au code, et il était parti a Humberton, servir Albion en tant que garde du fort de la ville. Il me disait souvent que cette hache était pour lui le seul lien qu’il conservait avec sa famille. »
Je rangeais mon épée et sorti de mon sac l’icône représentant la chimère. Je la plaquais violement sur le zinc, et la mit en évidence devant la serveuse.
« Et ça, qu’est ce que c’est ?!! Ce ne sont sûrement pas vos armes, vu qu’elle ne provient pas de vous ! Alors cessez de mentir, et dites moi la vérité ! »
La serveuse, troublée de voir cette représentation en ma possession, mit quelques instants avant de me répondre.
« Je…je ne sais pas…ou vous êtes vous procurée cette icône ?!! Seule ma famille possède ces armes, vous ne devriez pas les posséder ! A moins que…. »
La vieille femme me regarda longuement, et, tandis que je perdais patience, elle recula brusquement et se reposa contre la poutre qui soutenait en partie le toit du relais. Son attitude avait changée. Elle ne semblait plus craintive, son teint n’était plus blanc. Non pas qu’elle semblait sereine, mais la peur avait totalement disparu de son visage, pour laisser place à une sorte d’émotion mal contenue. Elle finit cependant par articuler ces quelques mots :
« Je vous en prie, ne me posez plus de question, vos réponses ne se trouvent pas ici, mais sur la tombe de mon mari… Je vous en prie, allez à Humberton avec cette hache, donnez la au gardien du fort, et dites lui de tout vous dire sur cet homme. Et surtout, de vous montrer sa tombe, n’oubliez pas d’aller sur cette tombe… »
Je songeais un instant a tuer cette femme, car je sentais bien qu’elle en savait plus que ce qu’elle voulait bien me dire. Cependant, je n’en fis rien, et je repris la lourde hache.
« Très bien, je vais amener cette hache a Humberton, je parlerais au gardien, mais si vous avez mentie… mieux vaut pour vous que vous que je ne vous retrouves pas ici, quand je reviendrais... »
Je tournais les talons, laissant derrière moi une partie de mon histoire, mais je sentais bien que j’avançais a grands pas vers la lumière sur ma vie.
Passant le pas de la porte, je lançais, froidement, au palefrenier :
« Je vous emprunte un cheval, si cela vous pose un problème, je vous enverrais discuter avec mon épée… »
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