[Lycan]

Le Vagabond I

"Danse là sur le rivage
Car pourquoi te soucierais-tu
Du vent ou de l'eau qui gronde ?"
Yeats

Eclats et fumées
Que sont nos vies
Dans les Eclats piégées
Sinon folles ancolies ?

Le vent courbe les joncs
Le temps plie nos âges
Joncs et âges sont de plomb
Où est la fête, où est le page ?

L’Enclave est une femme lascive
Mais ses promesses anticipent la nuit
Le noir tourbillon de l’inconnu, le puits
Qui tord ses seins et chante une autre rive

Sans le sous et chemise usée
Je suis l’oreille qui recueille
Les envies, les espoirs, vos pensées
Au fond du verre avec vous attablé

Tout va si vite, là-bas sur Parlement
La pluie fait naître la graine
Dans le vert fourré d’antan
L’aube, l’aube, à perdre haleine !

Je suis un enfant des chemins
Je suis un esclave devenu homme
Je file dans les tempêtes d’airain
Chaque goulée élégiaque m’assomme !

Feuille d’herbe et rire du Beffroi
Les ancrages ne sont pas pour moi
Dérivant ma vie sous des cieux attendris
Je ris et danse dans l’envers infini.

Liberté ! Liberté !
Dérive et errance
Qu'importe l'affamé !

[Shep | Tekto]

Ceci est bien beau et suave à l'oreille.
Mais en temps que veilleur, je me vois à regrets obligé de reporter votre oeuvre qui peut pousser à la débauche et à l'oisiveté les plus faibles d'entre nous.
N'était-ce pas vous déjà qui teniez ces consternants propos d'empathie à l'égard de nos frères perdus à jamais ? Oui, ceux que nous appelons - à juste titre et pour la sécurité de l'Enclave - Expulsés...

Evander, Maison Torque.

[Ikkilerme]

Belle entrée en la matière, félicitations

[ckiltolier]

Chapeau bas, tu mets la barre très haute ! Je vais essayer de faire de même ... je ne promet absolument rien, je dirais même que cela va être une écriture beaucoup moins suave et délicate à l'oreille. mais j'essayerai tout de même !

[Lycan]

Le Vagabond II

Je suis de glaise et de feuilles
L’œil vif et la chemise défaite
Si rarement je franchis de seuil
Les prés sont seuls bonnets à ma tête

De si peu je vis, libre, de tout je ris
Une lettre contre un poulet, des chants
Et des tours, voici ce que j’accomplis
Aucune prétention que la vie à pleines dents

Je suis le vagabond, frais de bruyère
Et de pluie et de pain dans l’étable volé
Garde l’œil sur ta femme, beau militaire
Des fleurs, une passade, demain envolée

Mon couteau ne coupe que le chaud lard
Et ne ferait peur ni en futaie ni en plaine
Je chemine dans l’ombre, souvent tard
Et me garde des expulsés et de leurs hyènes

Toi, voyageur ou recrue, fais–moi l’aumône
Je t’échange des chansons au goût d’orge
Et ai mille récits en poche, qui rien ne prônent
Tue-moi et c’est la liberté que tu égorges.

Chantent les rimes et cours les routes
Gite dans l’herbe une nuit, perd trace toute
Du vagabond qui marche dans le ciel
Et glane l'enfance et la vie et le miel.

[Lycan]

Le Vagabond III

Les éclats d'or et d'ambre extirpés du monde d'antan
Se mêlent et mélangent noms, bêtes, lieux, péripéties
Tant est-il vrai que la mémoire ne comprend pas le temps
Hier - pareil à avant-hier - se love dans les mêmes replis

Je me souviens de bribes, sépare et invente des paires
De ce vivant magma étrangement intime, pulse enkystée
La première origine du conte, fragile soufflure de verre
Ecoutez-la susurrer aujourd'hui entre tablées et bière !

Les fabulistes sont ses enfants, ils creusent de nouvelles galeries
Dans des mines aussi âgées que l'âme humaine a d'embranchements
Vauriens - oui ! traine-savate - qui déjouent l'horizontalité du temps
Ils chérissent leurs filons comme des rêveurs ébouriffés de suie

Les chemins qu'empruntent les récits ne sont jamais les mêmes
Mais sur les marches de granit, familiers descendent mes pas
La somnolence des cristaux garde et enfouis ceux que j'aime
Dans le grand chant du monde, les bruyères, elles, ne vieillissent pas.