Exils [3 textes imaginés à partir de l'oeuvre de Camus]

Répondre
Partager Rechercher
Partie I : Exil


La Terre est un espace de l’Univers dans lequel vit un animal particulier : l’Homme.

Si l’on veut bien admettre que l’univers est soit aléatoire soit réglé par « quelque chose » de supérieur, on admet du même coup que ses régularités, même si on les constate, sont dans leur essence imperméables à l’Homme, c’est à dire qu’en aucun cas l’Homme ne pourrait « régler son esprit sur la fréquence de l’Univers pour le « comprendre » ». Pourtant, si l’on néglige un instant l’éventualité de l’existence de Dieu (dont les voies seraient, de toutes manières, comme on dit, « impénétrables », ce qui dépasse d’emblée notre problème), que nous reste-t-il ? Des évènements. Des gens. Des paysages. Notre esprit, la plus dérisoire des armes, mais également la seule dont nous disposions.
Il est tout d’abord important de voir que si la Terre et ce qu’on y trouve n’est PAS absurde, mais que le Monde (puisque le Monde, c’est la Terre appropriée par les Hommes) l’est. Pourquoi ? Parce que l’absurde est une invention de l’Homme, c’est le cri de frustration le plus primordial qui puisse sortir de ses entrailles. Le désespoir de voir que « ça ne marche pas .. la Terre reste insaisissable »

L’esprit humain est différent de l’esprit de l’animal. Dire si c’est par les moyens ou pas la manière dont il les utilise, personne ne le peut sans doute. Il est par contre évident que l’Homme, plus que d’observer des régularités (quand les nuages sont bas, c’est que …. ), il est aussi capable de se demander « pourquoi ?». Et voilà où son esprit va s’achopper. Ceci, des milliers de pages extraites de centaines de livres l’ont déjà dit, mais c’est un point particulier qui m’intéresse. Son esprit se bloque, arrivé à ce point, lorsque, tel un enfant, il se retrouve face à face avec quelque chose qui le dépasse et ne peut s’empêcher chercher la cause, ou lorsque ce qui arrive est contraire ou éloigné de ce qui aurait « normalement » du se produire. Ceci est à la fois sa gloire et son fardeau. Il s’agit de sa gloire car, dépassant l’analogie, il est capable de créer des systèmes, d’agir en conséquence de régularités qu’il observe, de prédire certaines choses, de chercher encore et cette recherche constamment l’entraîne à dépasser son état. Voilà pourquoi il a la gloire d’être un humain, voilà pourquoi son imagination en fait un être infini, illimité, et libre. Mais on peut parler de fardeau si l’on pointe le fait que ceci est la condition exclusive de son bonheur sur Terre. Or celle-ci (cette Terre) est inhumaine et, comme il a été dit plus haut, essentiellement inaccessible à son esprit. Aux prises avec ce qui dépasse ses sens (Autrui, les causalités qu’il ne peut pas observer … ) , l’Homme compare deux éléments :
Ce qu’il avait établi et ce que le monde lui apporte comme éléments. Inutile d’épiloguer sur le fossé qui peut exister entre ces deux éléments. Il est abyssal. Le Monde de l’homme n’est qu’une simulation. En permanence, celui-ci vit dans un système autonome qu’il fait fonctionner car seul celui-ci est vivable alors que la Terre ne l’est pas, car pour l’homme, en vertu de son obligation d’unifier et de connaître, elle est absurde. Etant absurde elle n’existe pas et est remplacée par un automate du Monde, fonctionnel mais imparfait en qualité comme en quantité, puisqu’il ne peut en aucun cas contenir ce qui est inaccessible à la raison humaine (l’infinité des causes, la totalité du système, ses évolutions incalculables). Voilà pourquoi nous vivons tous dans un monde différent et c’est bien ceci qui m’intéresse. Remarquable … Et tout aussi remarquable de constater que l’illusion est adhésive, à savoir qu’on en vient à se cacher le fait qu’elle n’est qu’une illusion, auquel cas l’humiliation serait totale. Pour la parer, chaque jour, l’être humain tente de se prouver que c’est la Terre qu’il voit devant lui : ceci a été appelé « La Connaissance ». Le but ultime devient non pas de connaître et de comprendre, mais d’assurer la pérennité de l’illusion. Nous voilà donc de mauvaise foi pour l’éternité.
Simplement, peut-être, dans l’idéal, on pourrait imaginer un monde où notre manière de se confronter aux autre
Le cri de l’absurde, surgi de l’abysse entre le désir de comprendre , d’unifier et la Terre ébranle l’esprit au point de pouvoir le tuer.
D’ailleurs, ce désir d’unifier, de comprendre, de maîtriser, ne peut-on pas le considérer comme l’aveu implicite du mensonge ? L’Homme veut prouver sa simulation du Monde, simplifier les contradictions et les diversité jusqu’à ne plus avoir qu’Un être, qu’Un ensemble au sein du quel régnerait forcément l’harmonie. Ainsi ses douleurs et la fièvre qui souvent envahit son esprit seraient calmées …

Partant de là, n’est-il pas clair que lorsque nous voulons « changer », il s’agit d’une vaste fumisterie ?
Il ne s’agit par de clamer haut et fort que la vie est absurde, ici, mais de tirer quelques remarques de ce point particulier, sur le « changement ». Voilà donc l’hypothèse selon laquelle le changement est plus que douteux..
En effet, si l’on a envie de changer (et je pense surtout là au fait de « plaire à ses proches » ou de « changer son comportement pour se sentir plus en harmonie », ou encore de « changer d’apparence » ou de « changer sa manière de voir… », en fait il s’agit de changer la configuration (comme sur un ordinateur, quoi..) de notre simulateur afin de prévoir « ce qui se passera, vu comment les choses sont réglées, si je … ». Là, dans cette illusion, nous pourrons étudier les conséquences d’un changement et choisir le meilleur. C’est une action d’ailleurs très réconfortante, mais cette illusion en reste une. Le monde n’est pas un simulateur.
De là, il ne découle pas que tout changement soit illusoire lui aussi , que toute amélioration soit improbable.
De même il ne s’agit pas de regarder enfin l’absurdité de monde en face (personne ne pourrait, ensuite, vivre)s comme au monde serait …
« Bonjour. Je suis ceci. Bien que je ne le sache pas tout à fait… En face de moi, il y a ce monde qui est ma demeure, mon ennemi et ma joie.
Respectons la distance qui nous sépare. Et toi, qui es-tu ? Je t’écoute, de toute manière je n’en saurai véritablement rien »
Se considérer dans son importance face au monde, mais aussi dans le fait que jamais nous ne pourrons y avoir accès. Et sourire … Nous sommes plongés dans l’inhumain, à la dérive dans l’Espace sur une immense balle de sable. Être en dehors du monde et des autres fait de nous un être unique, mais aussi isolé de tout et à jamais seul …


Partie 2 : Retour d’Exil

Ma terre qu'au loin j'entends chanter
Si longtemps, si longtemps, ô infortune
Que je ne t'avais pas vue.
Une éternité s'achève ..
Mystique ou affaibli,
Quelques lucioles (belles..) ce soir ont veillé la lune
Dans les herbes elles fêtaient mon retour
Mais la tête enfoncée dans les mains,
Au coeur de la nuit, je n'ai pu que pleurer
Pleurer, mourir pour enterrer une vie ...

La nuit,
Dans son ventre doux, ses ombres molles
M'a accueillie
Larmes et rosées de mon coeur
Versées sur la Terre ou j'ai grandi !

Aujourd'hui me voilà, au sommet d'une dune
Voilà tes paysages, voilà ta magie
De cette terre mon esprit endolori
A toujours conservé les plus beaux contours.
Voilà mon visage, me reconnais-tu ?
Je l'offre aux eaux calmes, elles me montrent
A leur tour les années passées … Loin d'ici..

Le temps a laissé ses traces, je le sais
Mais au fond, je n'ai jamais, à travers ma vie
Quitté un moment cette terre, en songe

Les blés qui dansent, ici, devant moi
Dansaient également en rêve, toutes ces nuits..

Tout me parait magie, incroyable féerie
C'est si simple, mais dans mon âme,
Chaque teinte et chaque note
De ce paysage
Brûle et brille comme l'or
Du souvenir passé, éternel
Délavé, aux couleurs pâles et tendres
Les plus belles que savent retenir
Les yeux d'enfants..
Ô mon dieu ...

Un tournesol qui se penche sur mon retour
Ma Terre! je sens ici reposer les cendres
De mon enfance endormie ...

Je marche sur un de tes chemins,
L'âme embrumée, le coeur plein
Plus près aujourd'hui du présent, plus près de ma vie
Les eaux claires descendent de la montagne
Que ne puis-je les devancer jusqu'à la plaine!
Courir comme un enfant, rattraper le temps
L'herbe perle, au loin j'aperçois d'autres routes
Vers mon avenir, sous un ciel lourd






Pour un si grave instant ...
Que sera la vie ?
Que sera la mienne ?


..
..


Les lucioles s'envolent, à présent,
C'est assez pleuré, me voilà revenu
Les souvenirs sont terminés, la vie
Bientôt voudra reprendre le dessus
Gonflé de joie, et je me tais
Et je respire

Ma Terre!
Quelques pas dans la rosée
Mon exil est terminé
Et voilà enfin, pour moi,
La Paix...
Être, Paraitre, Disparaitre

Ma bonne étoile ce soir m'a interpellé pour me demander si je l'aimais encore .
J'ai une frénétiquement envie d'écrire, à cet instant,
car dans ma tête, la réponse avait été "non"
...


Assis, depuis trois heures
Fixant un mur, en face de moi
Qu'y voir ? Rien. Rester ici
Et attendre encore.

Assis, depuis trois heures
Dans l'ombre, tapie, sournoise
Me fixant, en face de moi
Désespoir, mon cher ennemi
Que faire ? Rien. Rester ici
Et attendre encore.

Assis, entre colère et langueur
La densité de l'air qui m'étouffe
N'a d'égale que celle de ma torpeur
Fixant la mort, en face de moi
L'appellant délivrance ou repos
Qui voir ? Des ombres, des fantômes
Comme moi un jour broyés
Par l'implacable main du destin ?
Entre ses phalanges, un animal
Il est faible, et on l'appelle Homme.

Et maintenant ? que faire ? Rester ici pendant des heures ? Cela est possible. L'agitation de mes sens a fait place au silence de la mort. Ces instincts que jadis je louais de conserver la vie en nous semblent pour moi réduits à ce faible murmure poussé par mon spectre dans la nuit silencieuse. Mais Rien. Ce silence oppressant qui fait espérer que quelque chose, à portée de nous explose. Enfin un peu d'affolement. Une folie, que sais-je ? Une mort cruelle, mais du panache !
Mais ... une fois encore, le destin a les yeux clos.
Ami, mon frère ! Montre-toi. Qu'attends tu
Pour glacer mes os ?
Je dis :
"Chagrin d'amour, scène de famille, la coupe est bien pleine, mon ami ..."

*silence*
(Détruire, saigner, briser, écorcher, cruauté, plaisir, malsain, désir
Chacun de ses mots apporte à mon âme un sentiment particulier
Seul, isolé, oublié, perdu, ignoré, maltraité, injuste, hasard, destinée
Quelques gouttes sur mes tempes, (l'esprit lui même a ses larmes))
Attendre encore ..
Des cendres encore
Des corps encore
Une tendre mort
Attendre ...
Attendre ...

*silence*

L'air se raréfie insupportablement...
Et je réalise que la vie se joue dans ces instants.
En songe ce poing révolutionnaire
Vient hanter mon esprit dément
Si souvent tendu et brisé en plein élan
Le cri du peuple, cet espoir, cette énergie..
Faut-il se lever et aller combattre dehors ?
Je le pourrais, certes .. je le pourrai encore ..
Mais pour qui ? Contre quoi ? Je ne sais .
Carcasse désillusionnée, tu ne mérites que la mort.

Un instant cependant, l'air se fait plus sain
D'autres heures ont passé et avec elles leur cortèges
D'illusions, de doutes et de troubles que rien n'allège
Quelle est donc, dans ce corps, ce mouvement soudain ?

Me surprenant à penser que le temps décidera
Mais qu'au loin, la lumière pleut encore.
Être là et attendre toujours ?
Non, je ne suis pas un héros, et leur destin m'échappe
Mais la foi m'appelle et me pousse à crier
Qu'un instant comme celui-là en vaut des milliers
Quand dans l'être, tous les visages se révèlent
Pour porter un peu plus loin leur fragile bannière
L'inhumaine Terre est un bien pauvre asile
Mais c'est en son sein que j'ai grandi
J'en veux pour preuve cette envi de vivre
Désesprerée, cruelle, mais belle aussi

Et elle brûle et traverse et investit
Une âme soudain vivante
Une maison rendue aux siens
L'air vibrant, mes veines sanguines
Pour mourir, j'avais forgé ce mot: "Destin"
Doux rêver, mystique, assassin ?
Rien ne se passe encore ..
Bonimenteur, dément ou conteur d'histoires,
Je ne sais .. mais appelez moi, seulement, "être humain"!
Répondre

Connectés sur ce fil

 
1 connecté (0 membre et 1 invité) Afficher la liste détaillée des connectés