Je suis assez ravi de voir que ce fil ne comporte que très peu d'interventions vraiment trollesques. Comme quoi, le bon sens reprend un peu le dessus, une fois les esprits un peu plus sereins après les évènements récents.
Ca me touche, d'une certaine façon.
J'interviens donc pour essayer de donner mon point de vue interne.
Et pour ceux qui ne voient que par le petit bout de la lorgnette, je rappelle que les grèves n'ont pas été motivées par de quelconques revendications "personnelles" (salaire ou autre...).
Je vous invite à relire les thread précédents pour vous en rendre compte.
I)
D'ailleurs concernant la paye : les profs n'ont jamais dit, je crois, qu'ils étaient mal payés (globalement en tout cas).
Le hic, à mon sens, c'est que tous les profs sont payés de la même façon, quel que soit leur lieu de travail, les difficultés rencontrées et leur motivation.
Je ne dis pas qu'il faut faire du cas par cas ni du flicage, mais cette disparité existe bel et bien. Et mes amis qui travaillent en banlieux rencontrent certainement des difficultés que je ne connais pas, moi qui suis dans un petit collège tranquille. Pourtant, on gagne à peu près la même chose (sauf qu'ils ont quelques primes, habitants sur Paris).
Personnellement, je serai pour des primes aux profs enseignants dans ces endroits là, pour essayer de faire venir des gens motivés...
II)
Les "branleurs" ne sont pas si nombreux que ce que les anti-fonctionnaires veulent bien faire croire. Il en existe, comme partout, mais personnellement dans ma carrière, des vrais branleurs, j'en ai rencontré qu'un (enfin, une, même. Elle était à gifler et à assommer à coup de batte..).
La grande majorité des profs sont sérieux, et d'autres sont plus que sérieux, pour eux c'est un sacerdoce.
Malheureusement, les médias et certains ministres (Allègre par exemple) ont véritablement stygmatisé l'opinion sur ces cas particuliers, ce qui a considérablement terni une image déjà écornée.
Faites le test, dites à un quidam dans la rue "je suis prof", il va vous dire "ah vous avez plein de vacances et vous faites rien alors !".
Personnellement, je ne démens même plus, je dis "oui oui" et c'est fini...
C'est rageant, vraiment, et je pense que la radicalisation des profs durant la grève vient de là : on veut bloquer les examens ; le grand public râle ? Franchement, rien à foutre du grand public, ils nous prennent déjà pour des cons..
Je suis assez violent, mais c'est l'idée. Si on continue dans ce sens, de plus en plus de profs se ficheront totalement de ce qu'on pourra dire d'eux ! Ils en ont ras la casquette de toute façon ! (c'est peut-être aussi ce que ressentent les cheminots d'ailleurs).
Evidemment certains ministres, qui voient que tout ça va un peu trop loin, reviennent carrément en arrière et sont démagos dans l'autre sens (Lang, Ferry) : les profs, faut les plaindre, ils sont tout cassés de partout, ils sont tous fatigués.. Pauvres hères...
On ne veut ni de l'un ni de l'autre, juste de la considération, comme tout le monde... Mais apparement, personne ne sait en faire avec ce métier.
III)
Au niveau horaire de travail, comme déjà dit, un prof du secondaire qui a le capes doit faire 18 heures de cours (celui qui a une aggrégation, c'est 15h).
En fait, ce chiffre qui peut paraitre très petit (certains tombent dans le piège, comme sur ce thread), cache beaucoup de chose.
Les horaires de travail varient déjà beaucoup avec la matière enseignée. Je vis avec une prof de français qui bosse énormément, plus que moi de part sa matière (je suis en maths moi), et je ne compte plus les soirs où elle vient se coucher à 2h30 du matin (alors que je suis couché depuis 1h..).
Il est difficile de faire une moyenne sur les heures travaillées comme dans un métier classique, car c'est très variable : une semaine je ferais mes 18h sans trop de choses à côté parce que j'aurais de l'avance dans mes cours, une autre je dépasserais les 50 heures parce que j'ai des tas de copies, j'ai des cours à préparer parce qu'on change de chapitre...
A cela il faut rajouter les stages, les réunions, les formations..
Sur l'année, même en ne comptant que 5 semaines de vacances, on doit facilement parvenir à 35 heures par semaine.
IV)
Quand à la pénébilité du travail, il est vrai que c'est assez éreintant, on ne l'imagine pas vraiment tant qu'on ne l'a pas fait au moins une fois. Imaginez un instant comme ça peut être fatiguant de gérer une classe de 25 élèves, dont 15 sont moyens, et 3 s'en foutent totalement (vous avez été élève, vous avez surement des anecdotes où votre classe a été pénible : ben imaginez ça, chaque jour)...
Je n'irai donc pas répondre à ceux qui compare ce métier à un travail physique : ça n'a rien à voir, et il faut essayer pour comprendre. C'est inutile donc de rabâcher ça.
Mais encore une fois, ça dépend vraiment des endroits où l'on enseigne...
V)
Enfin concernant le livre de Luc Ferry : je serai le dernier à prétendre qu'il est bien écrit. C'est simpliste à mon gout, et il se plante (encore à mon avis) sur pas mal de chose concernant sa vision de l'école.
Un exemple tout bête, dès la préface : pour lui les 3 missions de l'école sont (je ne me rappelle plus les termes exacts, mais ce sont les idées):
- éduquer
- enseigner un savoir
- préparer au monde du travail.
Ben non, la 3ème phrase est fausse, il n'a jamais été question de ça dans les missions de l'école (pour info, la 3eme, qui normalement est la première d'ailleurs, c'est "accueillir").
Ceci dit on voit, dès ce lapsus, la vision qu'à de l'école un homme de droite, à mon gout : la marchandisation de l'enseignement commence.
Mais bon, là il s'agit de vision politique de l'enseignement.
Et je conçois que des profs puissent avoir la même que lui (j'ai dit que je le concevais, pas que je comprenais !!!).
Voilà ce que je voulais rajouter / préciser