Post écrit par Ezoniroel (le 18 juin 2003)
< Le coeur lourd ... Oui sans nul doute aurait on pu user de ce terme ... L'esprit emplit d'un insondable vide très certainement aussi ... >
< Le mage avait pris un cheval au relais pour rejoindre la Maison des Enfants de Ceridwen, tout du moins pour y loger cette nuit, mais quelques heures d'un pas nonchalant de l'animal avait finit de l'abattre, lui et ses moribondes pensées. Il avait fait tourner bride à l'animal et avait galopé jusqu'à ce que la pauvre bête, toute de sueur et d'écume, n'en puisse plus et réclame repos ou mort. >
< Finissant la route bride à la main il était arrivé en haut de la petite colline qui surplombait Sunderland par le Nord. Un monticule de terre et de roc battu par un vent froid venant des monts plus hauts et plus glacials.
Il s'était assis là, voulant simplement laisser à l'animal le temps de souffler un peu se mentit-il a lui même. Il se releva quand le vent commença a cingler son visage, le lardant d'une myriade de minuscules coups d'épingle. Il se releva mais ne fit pas un pas ...>
< Il étendit les bras, leva les mains paumes vers les cieux et appela a lui son compagnon d'infortune. >
"- Gorky ... Gorky, fidèle ami, prête moi a nouveau tes yeux ... Laisse moi apercevoir la nuit se lever sur une terre qui m'est étrangère mais qui porte en son sein ma bien aimée ..."
< Le Mage posa ses mains sur les épaules du Simulacre et ouvrit ses yeux blanc sur blanc, plongeant dans l'esprit de l'être de pierre pour percevoir ce que voyait ses yeux >
< Un petit village de bois et de tourbe séchée, de toits de chaumes fraîchement coupées et savamment liées, une ruelle, un chemin de terre encore meuble d'avoir vu peu de chariots passer, quelques maisons, récentes constructions, sur lesquelles des paniers de fleurs avaient été accrochés pour égayer un peu les façades grises ... >
<La nuit tombant doucement et voyant les mères au perron héler leurs enfants tardant a rentrer, lançant un dernier assaut dans leur joute de chevaliers rêvés, frappant de taille et d'estoc protégé par un bouclier d'écorce. Les derniers artisans quittant leur échoppe, le maréchal ferrant enfournant bûche sur bûche espérant retrouver sa forge encore chaude au matin, un menuisier, peut être Elhystan, mais impossible de le savoir avec les ombres croissantes, rentrant quelques planches et madriers pour leur éviter une possible pluie, là un fermier tirant nonchalamment sur la corde d'une vache peu pressée de regagner l'étable ... et là une jeune femme au bord d'une fontaine ... >
< Ezoniroel lâcha les épaules de Gorky, rompant d'un seul coup la vision trop dure, étouffant des larmes qui n'arrivaient pas à rendre flou cette image mentale qui meurtrissait son coeur ... Thea ... Sa robe sombre et sa cape bleu rejetée sur ses épaules ... >
< Il n'eut même pas la force de s'asseoir et se laissa choir au sol, ses mains couvrant son visage, mordant ses lèvres au sang pour retenir un hurlement de désespoir ... >
< Gorky hésitait, ne comprenait pas, tournait et virait cherchant désespérément l'ennemi ayant blessé son maître ... Poussant un grognement de rage il s'approcha pour relever son Maître, le porter n'importe ou mais loin d'ici ... en sécurité ... et se vit rejeter comme une vulgaire pierraille que l'on jette au fond d'un lac ... >
< Le temps s'écoula lentement. Gorky s'était assis et regardait son Maître, recroquevillé au sol comme un bête blessée, le visage tourné vers le sol et enfouie dans les herbes qui ruisselaient de ses larmes comme elles recueilleraient bientôt la rosée de l'aube. Quelques brins d'herbes courbées par l'eau de la vie, pliées par le poids d'un visage, écrasées par d'humaines émotions ... >
< Ezoniroel chercha un long moment en lui la force de quitter cet endroit, de lever son visage qu'il aurait voulut enterrer au plus profond de ce sol qui lui prenait son aimée, de plonger au coeur de cette terre ou il aurait voulut s'enfermer ... pour enfin ne plus penser ... Ne plus souffrir ... et dans le silence, mourir ... >
< Le Simulacre, après tant d'années d'errance avec son maître, après tant de luttes et tant de marches ou ses yeux avaient été siens et ses mains de pierre sa seule défense se leva et doucement souleva celui qui l'avait appelé, qui l'avait façonné de sa pensée. Il remit le Mage debout et, au contact de son Maître puisa dans ses pensées l'origine de sa douleur. Aider, protéger ... Là était sa seule vocation. Il prit Ezoniroel dans ses bras, pantin désarticulé et descendit la colline. Il contourna les maisonnettes pour n'éveiller aucun soupçon, les quelques rares torchères encore allumées projetaient un halo sinistre sur les ornières boueuses du chemin et les façades des murs grises de n'avoir encore été peintes de chaux. >
< Il gravit la petite colline sur laquelle trônait la maison de la Maîtresse et se tint un moment devant la petite fenêtre donnant sur la pièce a vivre, regardant danser les flammes et se refléter leur couleur chaude et ambrée dans les cheveux d'argent de sa Maîtresse. >
< Ezoniroel releva la tête, le contact de Gorky lui transmettait chaque image qui le frappait comme un bélier a tête d'acier, fracassant le cristal de ses yeux, brûlant sa rétine d'un fer rouge comme si elle avait été à même les flammes de l'âtre. Il serra la main sur l'épaule du Simulacre, se cramponna a lui puis, doucement, reprenant le contrôle de son esprit se laissa remettre debout par son compagnon >
< A nouveau la magie opéra. Peut de gens avait pu voir ou entre-apercevoir cela mais quand il était proche de Théalin, agissant comme un exorcisme, le démon reculait plus loin encore en lui et le laissait recouvrir la vue. Ses yeux se teintaient de nouveau de ce vert d'eau, reprenait lentement leur éclat originel et l'autorisait a contempler et à puiser dans le sourire de sa douce épouse. >
< Il laissa son regard s'attarder sur la forme endormie au pied de la cheminée, une dernière bûche luttait désespérément contre les petites flammes refusant de mourir et courant sur le dos noircit du morceau de bois. Une fine pluie se mit a tomber, sortant Ezoniroel de sa rêverie amoureuse et le ramenant à la réalité. >
< Eteignant les torchères extérieur pour plonger le perron dans les ombres il laissa Gorky sur le pas de la porte et le chargea de veiller puis il entra doucement, sans faire un bruit, pour s'asseoir au côté de sa Mie endormie. Il releva une mèche de cheveu qui lui mangeait le visage. Thealin avait les traits tirés et son sommeil semblait emplit de fantômes qui tiraillaient ses muscles et griffaient ses songes. Il regarda ce visage si doux, si frêle. Laissant sa main glisser en une légère caresse sur ces doigts si fins que l'aménagement de la maison avait meurtrit, il regarda les siennes que nulle écharde n'avait marquée et se sentit le coeur rongé des remords de n'avoir été là et du dégoût qu'il s'inspirait.>
< Avec infinie douceur il prit Thealin dans ses bras, petite plume de noir et d'argent ou battait un coeur pur. Elle s'agita une seconde, repoussant un nouveau fantôme d'un geste à peine esquissé et d'une crispation des lèvres puis retomba doucement la tête alourdie sur son épaule. Avec précaution et lenteur Ezoniroel monta la volée de marche menant à la chambre, poussa de la pointe du pied la porte qui dégageait une odeur de bois tendre et avança jusqu'au lit. Un drap de coton écru, un édredon épais de lin emplit de plume recouvert d'une couverture de laine drue et épaisse recouvrait la couche. Pas de jonchée de paille, pas d'herbe humide sentant la terre et l'humus mais une douce odeur de bois jeune, de plume légère et de coton parfumée. Il écarta couverture et édredon d'un geste hésitant puis déposa son trésor au creux du nid douillet puis referma sur ses épaules le cocon de plume. >
< Assis sur le bord du lit Ezoniroel resta auprès de son aimée. La regardant simplement dormir, passant une main emplit de tendresse sur sa joue ou dans ses cheveux ou lui murmurant des mots doux. >
< Le visage de Thealin avait repris mine plus sereine et un sommeil réparateur s'était emparée d'elle comme l'oiselet sous le couvert d'une aile maternelle et protectrice ferme les yeux et se laisse bercer. >
< De chaudes larmes avaient marbré le visage du Cabaliste, de ses yeux rougis il contemplait comme l'aurait fait un illuminé ce qui était pour lui toute sa Lumière. Les sanglots s'étranglaient au fond de sa gorge mais il continuait a lui murmurer a voix basse >
"- Thealin ... Ma douce et belle amie. Me pardonneras tu jamais cela.
Thealin ... Toi qui ouvre mon coeur et brûle mon âme plus sûrement que toutes les ferveurs de ce monde de fou, qui emplit ma vie de joies de t'avoir prêt de mon coeur et de craintes de te voir t'envoler au loin.
Thea ... qu'ai-je fait là ... ?
Je serais toujours prêt de toi ma Déesse ... à jamais ... Où que je sois, je répondrais a ton appel. Je supplierais les vents de me porter à toi, je gagerais ma vie pour que les oiseaux m'emportent prêt de toi ...
Pardonne moi de t'aimer ... "
< L'aube Impertinente pointa ses premières lueurs, laissant filtrer aux travers des toiles de chanvres teintées d'ocre pâle qui masquaient la fenêtre les rayons lumineux d'un soleil jamais tant honnis que ce jour ou il aurait souhaité que la nuit dura. >
< Doucement il se leva du bord du lit, déposa un doux baiser au coin des lèvres de sa belle et redescendit dans la grande salle. Il raviva les quelques braises survivantes et déposa de nouvelles bûches qui crépitèrent à leur tour laissant s'échapper une douce chaleur qui envahissait lentement la pièce. Il remplit la marmite d'eau, l'accrocha sur la crémaillère du foyer ... et sortit >
< L'air était frais. Une brise sifflante vint se faufiler dans son vêtement lui piquant les bras et lui extirpant un long frisson. Il rajusta son manteau, tourna le regard vers la maison, mais déjà sa vue se brouillait et ses iris reprenaient leur couleur terne et laiteux >
< Il posa une main sur l'épaule du Simulacre et, mentalement, lui demanda de le ramener à sa monture >
< Gorky ne prêta pas attention à la route qu'il empruntait, il ressentait la fatigue de son Maître et voulait le ramener au plus vite. Il s'avança sur le chemin de terre traversant le village. >
< Ils n'avaient fait que quelques pas sur le chemin quand une pierre venue de nulle part frappa le Mage au coin du front. Ezoniroel serra de sa main l'épaule de Gorky, lui intimant l'ordre de ne pas en faire cas et continuèrent leur chemin. >
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