Et bien moi j'aime le mesh.
Je ne veux plus voir des arbres à 4 faces et ne veux plus d'un tourne-disques à 48 prims.
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La Moderne
Poème dédié à Moon The Loon
Regrettera qui veut le bon vieux temps,
L'époque des prims, et le règne des sculpties,
Et les beaux jours de Ruth et de l'apparence cloudy,
Et les cubes de nos premiers parents.
Moi, je rends grâce à SL si sage
Qui, pour mon bien, m’a fait connaître en cet âge
Les mesh tant décriés par nos tristes frondeurs :
Ce temps meshé est tout fait pour mes mœurs.
J’aime le luxe, et même la paresse,
Tous les plaisirs, les mesh de toute espèce,
Les fitted, les rigged, les ornements :
Tout avatar honnête a de tels sentiments.
Il est bien doux pour mon cœur très immonde
De voir ici les meshes à la ronde,
Pères des arts et des heureux travaux,
Nous apporter, de leur source féconde,
Et des besoins et des plaisirs nouveaux.
Tout le mainland et les sims du monde,
Leurs habitants, les peuples qui y crèchent,
Tout sert au luxe, aux plaisirs de ce monde.
O le bon temps que ce siècle de mesh !
Le mesh, chose très nécessaire,
Réunit les newbies et nos meilleurs builders.
Voyez-vous pas sur leur clavier ces habiles doigts
Qui, du Caire, de Londres, de Courbevoie,
S’en vont chercher, sur SLmarketplace,
De nouveaux biens, des bodymesh, créés dans Blender?
Regrettent-ils sculpties, shapes, skins, vieilles espèces,
Cones, torus, cubes et tubes, et vieux prims de loser?
Quand notre SL était dans son enfance,
Nos bons aïeux vivaient dans l’ignorance,
Ne connaissant ni le sculpt ni le mesh.
Qu’auraient-ils pu connaître? ils n’avaient rien,
Ils étaient nus ; et c’est chose très claire
Que qui n’a rien n’a nul partage à faire.
Sobres étaient. Ah ! je le crois encor :
Le bodymesh n’est point du siècle d’or.
D’un bon mesh frais ou la forme ou le smooth
Ne releva point les seins de Ruth ;
La soie et l’or ne brillaient point sur eux,
Admirez-vous pour cela nos aïeux ?
Il leur manquait l’industrie et l’aisance :
Est-ce vertu ? c’était pure ignorance.
Quel idiot, s’il avait eu sur sa sim
Un lit de mesh aurait couché sur de la prim ?
Mon cher Philip, mon gourmand, mon bon père,
Que faisais-tu dans tes jardins d'Eden?
Travaillais-tu pour ce sot genre Linden ?
Caressais-tu madame Ruth, ma mère ?
Avouez-moi que vous aviez tous deux
Les pieds ronds, un peu noirs et crasseux,
La chevelure un peu mal ordonnée,
Le teint bruni, la peau bise et tannée.
Sans mesh l’amour le plus heureux
N’est plus amour, c’est un besoin honteux.
Bientôt lassés de leur belle aventure,
Dans une sandbox ils soupent galamment
Avec des prims et des particules d'antan.
Le repas fait, ils dorment sur une prim dure :
Voilà l’état de la première nature.
Or maintenant voulez-vous, mes amis,
Savoir un peu, dans nos jours tant maudits,
Soit à Paris1900, soit à Kékéland, le soir
Quel est le train des jours d’un honnête avatar ?
Entrez chez lui : la foule des beaux-arts,
Enfants du goût, se montre à vos regards.
De mille mains l’éclatante industrie
De ces beaux mesh orna la symétrie.
L’heureux sourire, la superbe photo
De Doudi et le script du savant Momo
Sont encadrés dans l’or d’une bordure ;
C’est Taikogo qui fit cette figure,
Et cet argent fut poli par Redpat.
De Chloé la citrouille et la voiture
Dans cette sim surpassent la peinture.
Tous ces objets sont vingt fois répétés
Dans l'eau Linden toute brillante de clartés.
A Kékéland je vois par la fenêtre,
Dans des jardins, des myrtes en berceaux ;
Je vois jaillir les bondissantes eaux.
Mon char scripté, de meshes orné,
Par deux chevaux rapidement traîné,
Paraît, aux yeux, une maison roulante,
Moitié dorée, et moitié transparente :
Nonchalamment j'y suis promenée.
Je cours au bain : les parfums les plus doux
Rendent mon bodymesh plus frais et plus joli.
Le plaisir presse ; je vole aux rendez-vous
Chez Maxwell, chez Darcy, chez Doudi ;
Je suis comblée d’amour et de faveurs.
Il faut se rendre à ce palais magique
Où les beaux mesh, la danse, la musique,
L’art de tromper les yeux par les couleurs,
L’art plus heureux de séduire les cœurs,
De cent plaisirs font un plaisir unique.
Je vais découvrir quelque lieu nouveau,
Où, malgré lui, j'aimerais tant voir Worstbobo.
Allons danser. Que ces meshes lisses,
Que ces body ont pour moi de délices !
Qu’un mesheur est un avatar divin !
C’est bien en vain que, par SL séduits,
Les forumeurs dans leur savante audace,
Du paradis ont recherché la place :
Le paradis est mon body.
D'après Voltaire (1736)