On a récemment fêté l'anniversaire des élections, et l'agacement que j'avais ressenti à l'époque m'étreint à nouveau.
Qu'est censée être la démocratie, qu'est-ce qu'on me vend sous cette étiquette et quels étaient les buts de ceux qui l'ont mise en place ?
La base fondamentale de la démocratie, c'est le dialogue. La démocratie n'est pas la domination de la minorité par la majorité, mais la recherche du consensus. Le but est que toutes les voix soient entendues, tous les avis pris en compte, afin d'arriver à une solution qui satisfasse tout le monde.
Le problème de la mise en pratique de la concertation a conduit au système de la représentation. Toute personne ayant goûté aux joies des AGs, des réunions de tout poil, sait à quel point il est difficile de gérer un débat comportant plus d'un seul participant.
Donc on donne sa voix à quelqu'un. Sémantiquement, ce n'est pas rien. Celui à qui je donne ma voix va parler pour moi.
Quand on a posé la question aux français la question "qui voulez vous comme président de la république ?" 5 millions de personnes ont répondu Jacques Chirac, soit environ 14 % des votants. On a entendu ces 5 millions de voix là, et aujourd'hui, Jacques Chirac peut parler de la voix de 5 millions d'hommes et de femmes qui l'ont choisi pour porter leurs voix.
Mais qu'est-il arrivé aux voix des 35 autres millions de votants, des 86 % restants ? Eh bien pas grand chose. On a beaucoup critiqué les abstentionnistes, mais entre être allé à la pêche ce fameux dimanche, ou avoir voté Lionel Jospin, au final, le résultat est le même. Ces voix là sont perdues, ne seront jamais entendues.
On est donc clairement dans le cas d'une oligarchie : une minorité, même si elle est importante, gouverne la majorité.
Quand en plus, on nomme un premier ministre (dont la fonction est en fait bien plus importante que celle de président) issu de Démocratie Libérale, parti ayant obtenu moins d'1 million de voix, on est en droit de s'interroger sur le produit qu'on nous vend.
Et au regard des déclarations de José Maria Aznar et de Jean Pierre Raffarin concernant le pouvoir qui sort des urnes et pas de la rue, je comprends qu'en fait de démocratie, on nous refourgue des TCM, des tyrannies à choix multiple.
Mais ce n'est pas réellement nouveau. Déjà Rousseau critiquait le système d'élections anglo saxons : pour lui, les anglais votaient pour élire un tyran ; mais même élu serait quand même un tyran, et qui, contrairement à un roi, pourrait se targuer d'être mandaté par le peuple. ( Un peu le même problème qu'avec les trafiquants de drogue et les spéculateurs financiers, les deux sont de graves nuisibles, mais il n'y en a qu'un qui a la décence d'être un criminel incarcérable.)
La France est un pays éminemment difficile à gouverner : sur cette fameuse réforme des retraites, on a environ 50 % de pour et 50 % de contre, comme sur pratiquement tous les sujets sensibles. Quand sur un référendum aussi essentiel que celui de Maastricht, le résultat est de 51 % de oui, avec donc 13 100 000 voix pour, ça implique qu'il y a 12 600 000 voix contre. 51 à 49, en basket c'est une victoire, en politique c'est un constat d'échec.
La politique est " l'art du vivre ensemble". Tous ensembles. Il serait temps de trouver des alternatives à ce système qui commence à sentir le brun.
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