La pierre naine

Répondre
Partager Rechercher
Lorsque, il y a presque deux cent ans, avait retenti l'Heure des Héros, le grand Roi sous la Montagne Jalis Martelfer s'était levé et à la tête des armées de Deldrimor il avait repoussé la menace venu des entrailles du monde.
Mais ce n'est qu'au prix d'une terrible rançon que les Nains acquirent en ces temps d'extrême péril une gloire sans fin. Car bientôt chacun d'entre eux se vit changé en pierre, et ainsi disparu le peuple de Deldrimor, ne laissant derrière lui que des statues de nains, cadavres de roche devant désormais affronter l'éternité. Et bien peu d'humains connaissait l'origine de ces statues et leur rendait les honneurs qu'elles méritaient.
Aladran était de ceux-là.

Tout petit, son grand-père lui avait conté les exploits de Jalis et de son peuple et Aladran avait pleurer sur leur triste sort. Aujourd'hui encore il gardait un souvenir ému du sacrifice des Nains.
Dès son plus jeune âge, Aladran avait prix goût aux actions d'éclats et aux hauts faits d'armes, et c'est tout naturellement qu'ayant atteint la stature d'homme, il s'engagea dans l'Avant Garde d'Ebon.
Autrefois petite troupe d'élite dépêchée derrière les lignes ennemies, elle constituait aujourd'hui le fer de lance des armées d'Ascalon, fortes de plusieurs dizaines de milliers de soldats.
C'est lors de ses nombreuses garnisons dans la glorieuse citée qu'Aladran put enrichir ses connaissances des Nains et de leur histoire. Il lut avec avidité les chroniques de L'Oeil du Nord et bien d'autres ouvrages. Mais il ne put poser ses yeux sur le Rubicon, dont la lecture était réservée au seul Roi d'Ascalon et à son héritier.
Cependant Aladran fut bientôt l'un des hommes les plus versé dans la civilisation naine d'autrefois.

Lorsque l'armée ne requérait pas ses services, Aladran regagnait son village natal, situé dans la vallée de Sacnoth. Il y formait les villageois au combat et les avait organisé en milice afin qu'ils assurent eux mêmes leur protection.
Car si une paix vigilante régnait, le danger était omniprésent. Le grand Capitaine Pyre Fietir n'était plus et son fils essayait encore en vain de réunir les tribus Charr sous sa bannière, mais beaucoup avaient choisi une vie de brigand, faite de vols et de pillages, aussi Aladran gardait ses yeux ouverts et il patrouillait souvent dans la région.

C'est lors d'une de ses rondes en forêt qu'il fit une étrange rencontre: il tomba nez à nez avec la statue d'un nain qui semblait prêt au combat. Les jambes solidement plantées dans le sol, le petit guerrier brandissait une hache énorme et affichait un regard noir de colère, fixé sur un adversaire aujourd'hui disparu. Son visage était barbouillé d'inscriptions de railleries faites par des charr qui aimaient se moquer ainsi de leur anciens ennemis.
Aladran s'étonna de ne pas trouver d'autres statues car il savait que les nains partaient rarement seuls au combat.
Il dit alors à vois haute: "Voilà un courageux guerrier, et je me propose de t'emmener avec moi dans mon village où tu sera traité avec plus d'honneur que par les oiseaux ou ces cruels charr."

Ainsi Aladran apporta la statue dans son village et la restaura, lui nettoyant le visage et lui affûtant même sa hache. Il la disposa ensuite au centre de la place du village et les enfants en furent heureux, se pourchassant autour de la pierre et s'émerveillant aux récits d'Aladran leur contant les exploits des Nains de jadis.

Mais un jour vinrent des temps moins heureux et la guerre gronda à nouveau. Les Charr s'étaient trouvé un nouveau Hierophante et ils marchaient en grand nombre vers Ascalon.
Aladran n'attendit pas la convocation et il mobilisa tout les hommes valides du village pour rejoindre l'Avant Garde. Les femmes, bien que tristes, éprouvaient une immense fierté de voir ainsi leur époux en parfait ordre de bataille, sous la conduite d'Aladran. Celui-ci fit ses adieux à son épouse et à ses fils puis il mit la cohorte en marche. Avant de partir lui même il alla vers la statue et s'adressa à elle dans le langage archaïque des seigneurs Nains d'autrefois: "Salut à toi mon frère ! Je te tiens en effet pour mon frère car comme tu le sait tout les guerriers du monde sont unis par un lien de fraternité qui subjugue les races ou les allégeances. Aussi ais je une requête à formuler, mon frère (et sa voix se fit plus chaude): veille sur ma femme et mes fils, protège les en mon absence car je dois partir pour la guerre aux multiples épreuves et tu dois cependant demeurer, tes jambes étant aujourd'hui de pierre."
Puis il salua la statue à la manière des Nains "Que le Grand Nain fasse couler l'or entre tes doigts et la bière sur ta barbe, à jamais longue" et il s'en alla.

Aladran dut affronter bien des dangers et il fut longtemps absent, mais enfin vint le jour ou les Charr furent défaits. Leur Hierophante tomba aux portes mêmes d'Ascalon et les Hommes furent victorieux.
Aladran et ses amis allaient pouvoir regagner leur cher village, soulagés mais inquiets car voilà presque un an qu'ils étaient en campagne.

La veille de son départ, Aladran fit un étrange rêve: il voyait son village plongé dans l'obscurité et rien de venait troubler le sommeil de ses occupants. Pourtant en y regardant de plus prêt, il vit de menaçantes formes noires se glisser d'une maison à l'autre et bientôt une torche fut allumée et Aladran comprit le sens de ces va-et-vient. Des Charr s'étaient introduit dans le village et avaient bloqué les portes des maisons depuis l'extérieur pour ensuite entasser du bois le long des murs et ils se proposaient maintenant d'incendier le village en commençant par la maison d'Aladran.
Un charr jeta la torche sur les bûches imbibées d'huile et déjà le feu léchait le mur quand soudain un cri se fit entendre: "Kilroy Pierraiiillle !" et ce crie semblait provenir de sous une montagne mais capable cependant de déchirer le ciel.
Une petite silhouette se jeta alors sur eux et décapita un premier charr avec son arme puis fracassa le crane d'un second d'un simple coup de poing pour ensuite ramasser la torche et en enflammer ainsi un troisième. Ensuite la petite forme se rua sur le feu et éparpilla les bûches à grands coups de pieds, puis elle piétina les braises restantes, empêchant ainsi tout risque d'incendie.
Les charr se regroupaient en rang serrés sur la place et la courte silhouette explosa en un rire dément: "ah vous voilà mes gaillards, à nous !" et elle se jeta dans la mêlée.

Aladran se réveilla alors en sursaut et vit que l'aube approchait. Il commença aussitôt les préparatifs du départ car son âme était inquiète et quelques heures après il était sur la route avec ses hommes.
Les questions se bousculaient dans son esprit. Mais si il ignorait qui avait pu pousser ce cri, le nom invoqué ne lui était certes pas inconnu.

Kilroy Pieraille était un héros de la nation Naine, champion de Deldrimor et vétéran de bien des campagnes du roi Jalis. Cet illustre nain avait semble t-il fait le tour du monde et partout avait laissé son empreinte. Car kilroy était un personnage très colérique, même pour un nain, et les anecdotes à son sujet ne manquent pas.
On raconte qu'il avait un jour incendier une auberge et décapité son tenancier pour la simple raison qu'on y servait une bière trop tiède à son goût. La rumeur disait aussi que Kilroy avait autrefois raser une ville entière car un passant ne l'avait pas saluer à sa convenance. Plus étrange encore, il avait été consigné dans les annales de Deldrimor que Kilroy avait déclaré la guerre au peuple des loups, car un jour qu'il chassait dans un bois, un loup s'était emparé du faisant qu'il venait de tirer, le privant ainsi de son repas et depuis ce jour, Kilroy pourchassait de sa terrible colère le moindre loup qu'il croisait...

Mais malgré ce tempérament belliqueux, que certains assimilaient à de la folie (bien que personne n'ai jamais osé le lui dire en face), on trouvait cependant en lui un formidable combattant, ne le cédant, disait-on, qu'à l'ancien roi Droknar lui-même. Les soldats de Deldrimor partaient au combat l'esprit serein quand Kilroy se joignait à eux, car sa seule présence sur le champ de bataille vous assurait une véritable hécatombe dans le camp adverse malgré quelques "incidents". En effet, Kilroy entrait parfois en conflit avec ses propres hommes en plein combat pour des raisons assez étranges: il lui arrivait de raccourcir quelques cous de nains qui lui avaient "volé" son adversaire ou qui lui auraient écrasé un orteil.
Mais même si il chargeait seul les rangs ennemis sans tenir compte des ordres et refusait obstinément d'effectuer une retraite stratégique, le roi Jalis l'honorait régulièrement. Et à l'Heure des Héros, il fit même don à Kilroy du Marteau du Grand Nain, puissante arme que seul Kilroy pouvait manier avec aisance au combat, hormis le roi lui même.

Se remémorer ses histoires avait chassés les soucis de l'esprit d'Aladran, qui se proposait des les conter à ces fils sitôt rentré.
Après deux jours de voyage il trouva son village en fête, ce qui le surpris car leur arrivée n'était pas annoncée. Il alla trouver sa femme qui veillait sur ses fils, se chamaillant en criant "Kilroy Pieraille." Aladran en conçut un étonnement plus grand encore et il questionna sa femme: "Je me demande, ô mon épouse, pourquoi mes fils ont ce nom à la bouche et ma stupeur est grande car voilà trois nuits, je l'entendait moi même dans ce qui ressemblait à un étrange rêve."
-Et tout le village l'a pareillement entendu, mon époux. lui répondit sa femme.
Voilà trois nuits que ce cri résonna à nos oreilles et voulant sortir pour voir de quoi il retournait, nous vîmes que les portes de nos maisons étaient bloquées. Mais nous entendions qu'on se livrait un combat au dehors et lorsqu'enfin nous pûmes forcer les portes et sortir, le calme était revenu. Nous trouvâmes seulement du bois entassé sur nos murs et des corps de charr, privés de leur tête, jonchaient le sol. Mais un curieux spectacle nous attendait sur la place, et il t'attend encore, à ce que me semble.

Intrigué par cet étrange récit, Aladran alla sur la place du village et vit que la statue du nain avait changé de position. Elle se tenait maintenant bien droite et semblait rire aux éclats, caressant du pouce le tranchant de sa hache, noire de sang. Tout autour du nain étaient disposées les têtes des charr vaincu, plantées sur des pics.
Aladran restait interdit et contemplait ce prodige, observant la statue de haut en bas et il vit alors que les bottes du nains étaient noircies, comme si elles avaient marché sur des braises ardentes.
Aladran fit alors une profonde révérence au guerrier nain et dit simplement:
"Merci Kiroy, merci mon frère."

http://img181.imageshack.us/img181/2417/nain1hq6.jpg

Références:

Certains trouveront quelques éléments narratifs similaires au conte des Pukel-Men, qui a inspiré ce RP. En esperant qu'il vous donnera envie d'en savoir plus sur le peuple des Drùedain.
[hrp]
Félicitations pour ce récit, j'ai adoré le parcourir... Me donneriez-vous un exemplaire dédicacé ?

Est-ce à cela qu'on voit le le RP de GW n'est pas ce qu'il pourrait-être ? Que depuis le 6 octobre, personne n'a eu aucun commentaire à faire sur ce texte ?

Donc encore toutes mes félicitations, et à bientôt...
Thumbs up
Quelques toutes petites fautes (insignifiantes ) mais une très bonne histoire qui nous laisse nous poser des questions
Continue comme ça ce style est pas mal
Répondre

Connectés sur ce fil

 
1 connecté (0 membre et 1 invité) Afficher la liste détaillée des connectés