Bienvenue sur JeuxOnLine - MMO, MMORPG et MOBA !
Les sites de JeuxOnLine...
 

Panneau de contrôle

Recherche | Retour aux forums

JOL Archives

Il me faut reprendre la plume.

Par Jeanne de Vaal le 19/4/2002 à 17:36:24 (#1312398)

Onzième jour du mois des vents, cent septantième année du calendrier de Scorche :

Dix jours que j’ai quitté Goldmoon et je consens enfin à reprendre mon journal. Ici, tout est différent, une fois de plus. Ici, le mal rôde aux portes de la ville et bien plus au-delà. Ici, la frénésie est à fleur de peau, les réactions sont vives, les discussions sont brèves et il n’est pas rare de voir éclater une rixe en ville, brusquement, parfois même devant le saint Temple. Ici, le sauvage est tangible et pèse sur chacun de nous. Ici, c’est Stoneheim, et la cité humaine de Stonecrest.

L’exploration de l’île me rappelle mon arrivée en Goldmoon. Un an déjà, et mon exil qui me semble toujours aussi proche. C’est le dépaysement qui me pousse au rapprochement, car les terres sont très dissemblables. Là où Goldmoon est paix, Stoneheim est tourmente. Ce qui paraît hostile le jour est monstrueux la nuit. Hier, j’ai fait mon premier retour d’expédition après le couchant et je ne suis pas prête de l’oublier. L’aubergiste m’avait mise en garde. Mais cet homme n’a pas la trempe de l’aventurier et voit le danger partout. Ce n’est pas un tort : le danger est partout. Pourtant, on ne peut pas s’arrêter au premier risque et j’ai fait montre de la témérité que je me devais en affrontant la nuit.

Je revenais de je ne sais où, je n’ai pas encore commencé à cartographier mes sorties, je préfère errer à mon humeur pour m’imprégner de l’atmosphère de l’île. J’ai commencé, d’abord, par entendre les plaintes des loups. L’appel monotone à la meute, plaintif, glaçant, animal. Et les réponses, puissantes, sauvages : l’appel à la chasse. J’avais répandu les entrailles d’une bête isolée dans la matinée, et je m’étonnais encore de cette agressivité qui les pousse à attaquer, même seules. Je me suis décidée à ne pas couper leur territoire, bien que celui-ci avançât pour une bonne partie sur ma route vers Stonecrest. Les vents soufflaient du sud, j’ai donc pris le parti de contourner par le nord-est.

Les quelques chasseurs loin du reste de la meute n’ont pas eu l’occasion de revenir signaler ma présence. L’obscurité était déjà épaisse et les nuages orageux m’ont vite fait renoncer à la lune et à ses étoiles. Je me suis frayé un chemin, tant bien que mal, à travers une zone de basse broussaille et d’arbres faméliques, auxquels la lumière argentée de ma relique donnait des ombres sinistres. Dans ces circonstances, la première des choses est de mémoriser son orientation, car une fois perdue, aucun repère ne permet plus de retrouver sa route. L’accident du terrain me faisait cheminer beaucoup plus vers le nord que vers l’est, et je n’avais que trop conscience de m’écarter de ma destination.

L’événement alors a été doublement horrible, et je n’ai manifesté aucune peur. Je pense que vous auriez été fier de mon sang-froid, mon père. Par grappes, les pattes se mêlant aux pattes, des arachnides ont coulé des arbres et jailli des bosquets. Il y en avait devant moi, mais également derrière, et, autant que les bruits m’ont permis d’en juger, non loin sur mes côtés. Je n’escomptais pas rentrer sans heurts, ce combat était attendu et normal, je m’y suis lancée avec résolution. Mon fléau a volé pour battre les carapaces rêches, écraser les têtes bourgeonnant d’yeux, broyer les pattes velues ou hérissées de dards, faire gicler des sangs noirs et nocifs. Rien que l’ordinaire chorégraphie de la guerre, appliquée à ces créatures sans âme. Sauf que. La terre a tremblé, sans bruit qui surmonte le tumulte du combat, sans signe précurseur que m’avait caché la nuit. Et le faible éclairage m’a rapidement permis de voir ce que j’aurais préféré ne connaître que par vibrations. Manifestement, les araignées ont très bien compris de quoi il s’agissait et m’ont immédiatement préféré cette chose qu’elles devaient tenir en ennemi héréditaire. Un ver, si monstrueux que l’idée de « ver » m’a tout de suite semblé dérisoire, émergeant du sol comme un nageur émerge de l’eau, arborant une gueule qui comptait autant de dents que de crocs, que des pieux, que de rasoirs. Je l’ai vu broyer la première tarentule ainsi qu’une grenouille aurait gobé un moucheron. De cette façon, je me suis retrouvée alliée avec mes anciennes ennemies, pour venir à bout d’un prédateur contre lequel, l’une sans l’autre, nous ne pouvions rien. J’ai profité de son manque de mobilité pour lui ouvrir le dos, à l’abri de sa gueule, et ses autres assaillantes ont fait leur possible pour l’achever, lui immunisé à leurs venins.

J’avais bien l’intention d’éliminer les arachnides jusqu’à la dernière, une fois que les chairs de notre importun avaient rendu leur ultime spasme. Elles en ont décidé autrement. Peut-être parce qu’elles ne me considéraient plus comme ennemie, plus probablement parce que leurs rangs comptaient trop de pertes, elles se sont effacées dans la nuit, aussi subrepticement qu’elles avaient surgi. S’il n’en avait tenu qu’à moi, il n’y aurait eu aucun pardon, et j’aurais fait de cet endroit un charnier. La conclusion de l’échauffourée m’a permis de reposer ma jambe blessée et de me faire prendre conscience que j’étais bel et bien désorientée. J’ai tourné un peu, comptant sur mon sens naturel de l’orientation, sans retrouver le moindre repère. Mais j’ai trouvé autre chose. Une vieille bâtisse, quelque chose comme un chalet, dépouillé de toute idée d’esthétique et de confort. J’ai envie d’écrire qu’il était en ruines, mais ce n’est qu’une impression : il tenait encore debout et son état avancé de délabrement ne l’empêchait pas de remplir encore sa fonction d’abri, incluant le principe d’un toit étanche et d’une porte verrouillée. Cette dernière m’a contrainte à pénétrer par l’unique fenêtre du rez-de-chaussée (la bâtisse comptait même un étage !), qui fort heureusement ne devait pas avoir connu de vitre depuis des années.

L’intérieur était dément. Non seulement tous les murs étaient couverts de signes, symboles, dessins, runes et autres marques à la fonction moins évidente, mais c’était aussi le cas du plafond, du sol et –semble-t-il– de chaque gravat jonchant la pièce unique, en tant que seul mobilier. Le tout avait un caractère plus que mystique –je dirais occulte– et assez incommodant. Mais vous savez qu’il en faut bien plus pour m’incommoder, mon père. C’est dans cette chaumière de démonistes (je ne vois pas comment l’appeler autrement) que j’ai pansé mes blessures et que j’ai pris repos jusqu’à l’aube.

A présent, la magie a presque refermé la plaie et je vais pouvoir poser ma plume et quitter l’auberge pour une nouvelle journée. Dès que possible, je chercherai le sens des quelques runes que j’ai mémorisées et je ne manquerai pas de questionner sur cette étrange bâtisse.

Par Kyriane Feals le 19/4/2002 à 17:40:26 (#1312432)

:lit:

Très très très... intéressant.
C'est la mode des journaux intimes. Encore!

Par Ezaathe le 20/4/2002 à 11:16:51 (#1316064)

Hop la première partie pour la peine :merci:

Par Ancoly Enslaved le 20/4/2002 à 12:14:53 (#1316313)

:lit: sympathique le style :)

JOL Archives 1.0.1
@ JOL / JeuxOnLine