[Orcanie] Une mort... une Beauté.

 
Partager Rechercher
Le soleil disparaissait seulement au loin derrière l’océan que déjà le port s’endormait. Le ciel, sous ses teintes des plus belles couleurs était calme, laissant prévoir une belle journée au lendemain. Rares étaient les habitants qui étaient éveillés, seuls les quelques voyageurs de passages remplissaient encore l’auberge.

Le jeune homme était là, tapis dans les ombres, à observer. Il attendait. Nul mouvement, nulle parole, simplement un léger souffle qui se perdait avec les vents légers. Voici plusieurs jours qu’il restait en ce lieu, à écouter. Voici plusieurs jours qu’il patientait, dans l’espoir du sourire de celle qui était toujours là pour lui. Il savait qu’elle viendrait, en cette soirée. Nulle lumière n’éclairait les ruelles, car même les étoiles n’étaient venues depuis le repos du soleil. Il attendait… et elle vint.

Une jeune femme s’était approchée de lui, vêtue d’une simple robe, ses longs cheveux châtains lâchés sur son épaule. Son regard laissa Dimithil sans réaction au premier abord, puis lentement il se releva, pour s’incliner devant elle. Celle qui s’était présentée à lui l’observait déjà depuis quelques jours, probablement attirée par le silence du jeune homme. Elle venait à lui pour comprendre, pour savoir, apprendre ce qu’il était. Il était lié à elle, mais elle ne savait comment.

Dimithil l’invitait à s’asseoir à ses cotés, lui caressant la main d’un simple geste, pour à nouveau regarder vers cette auberge qui semblait être seule vie du port. Quelques minutes s’écoulaient, sans que mot ne soit prononcé. Quelques instants qui semblaient être une éternité… puis sa voix se fit entendre, il parlait d’une façon claire, comme s’il savait ce qu’il se dirait.


« Votre regard est bien triste… sans doute est cela qui en fait sa beauté. Pardonnez moi, mais pourquoi être venue à moi ? Rares sont ceux qui m’adressent ne serait ce qu’un regard, et vous êtes là à mes cotés. »

Il ne la regardait pas… et cependant, il savait tout d’elle, son regard, son sourire… il connaissait ses émotions, par le simple contact de sa main. La jeune femme hésitait à se retirer, mais elle répondit. Elle n’était sûre des raisons qui la poussaient à venir ici, mais elle resterait…

« Je… il me semblait que vous aviez quelque chose à m’apprendre. Je ne sais comment l’expliquer, sans doute cela paraît il bien stupide, mais je devais venir à vous. C’est comme si je n’avais à décider, je devais en cette soirée être à vos cotés.

-C’est elle qui vous a guidé… vous lui ressemblez étrangement. Votre peau est douce, et comme le sien, votre sourire reflète les rayons de lune. Rares sont celles qui ont droit à sa beauté, c’est une grâce qu’elle vous accorde, je ne suis que son messager.

-Elle ? De qui donc parlez vous ? Vous êtes une personne bien étrange je le conçois, mais pourquoi se terrer dans le mystère ? »

D’un simple geste, Dimithil indiqua la porte de l’auberge d’où quelques personnes sortaient. La nuit bien avancée commençait à se faire froide, il reprit la parole en regardant les personnes les unes après les autres…

« Elle… qui nous accompagne en notre dernière demeure. Regardez les et vous comprendrez. Pour cet homme d’arme présent, elle sera griffe d’une charogne, qui lui déchirera les viscères. Elle l’emmènera une nuit d’automne alors qu’il aura été vainqueur d’un long combat. L’unique blessure qui lui sera faite le rongera, jusque dans les plaines où il s’écroulera.
Elle est celle qui accompagnera cet enfant sur la falaise, et qui ce matin de printemps l’offrira à la mer. Il est jeune… trop jeune peut-être. Son visage sera préservé, car il est douceur, mais maintes blessures lui auront déchiré le corps.
Ne tremblez point, nulle cruauté en elle, juste une vérité. Fermez les yeux, et contez ce que vous voyez… il y a là devant vous une dame, aux riches vêtements, contez ce qui sera sa fin.

-Un lit de pétale, pour celle qui a longuement été aimé. La brise est légère, elle caresse son visage. Une dernière larme coule sur sa joue, telle une perle cristallisée par les temps. Elle est tombée de cheval, son visage en est abîmé, mais cela ne gâche en rien sa beauté. L’on dirait qu’elle dort, un simple repos bien mérité. Son enfant est là, il lui tient la main, pleurant une peine bien grande. Il ne comprend pas, il se sent coupable, il ne sait pas… »

Elle avait réouvert les yeux, offrant un regard brillant de désespoir à Dimithil. Sa parole s’était faite légère mais distincte. Aucune fois elle n’avait hésité sur ses mots, comme s’ils lui étaient dictés. Sa main s’était resserrée sur celle du jeune homme, comme dans l’espoir d’oublier. Elle l’écouta à nouveau parler, ne sachant si elle devait sourire ou pleurer…

« Elle est belle… beaucoup craignent comme vous de la voir, ils ne désirent savoir, sans doute par peur de l’aimer. Pourtant ses caresses sont les plus douces, elle vous offre chaleur et bien être. Elle ne regarde qui vous êtes, peu lui importe que l’on soit pauvre ou riche, elle nous protège tels des enfants. Je suis en ses bras depuis bien longtemps déjà, il me tarde le jour où enfin je pourrai l’aimer comme désiré. Ce regard qu’elle porte sur nous, cette attention délicate, ce baiser avant le repos. Il me tarde de la serrer en mes bras, de frôler sa peau, de la sentir contre moi…

-Je… je veux la voir… montrez la moi… »

Sa phrase était hésitante, mais Dimithil se stoppa. Il la regardait, un sourire triste aux lèvres.

« Elle vous attend… »

Sa main droite caressait le visage de la jeune femme, le pouce dessinant un sourire sur ses lèvres. Lentement, cette même main glissait le long de son épaule, pour finir par lui prendre la main. Telle la femme qui a froid elle tremblait, et contre Dimithil elle se serra, pour sentir cette chaleur promise.
Nulle douleur réelle se fit sentir, elle conservait son sourire alors que le trait fin lui déchirait le corps. Son souffle s’était fait rapide, le goût du sang lui venant aux lèvres du plus beau rouge. Dimithil continuait à la serrer contre lui, sas mot dire. Ses larmes silencieuses continuaient à couler pour elle.
Le dernier souffle vint, telle une délivrance pour les deux. La jeune femme fermait les yeux pour son dernier sommeil. Dimithil l’allongeait sur la dalle où ils étaient assis, lui offrant un baiser.


« Vous êtes bien belle sous cette lune… dormez bien, et découvrez celle qui vous reçoit en cette heure. Je vous en prie, rappelez lui que je l’aime. »

Il se relevait, regardant une nouvelle fois le ciel. Il repartait parmi les ombres, le cœur triste, sans mot ni bruit.
 

Connectés sur ce fil

 
1 connecté (0 membre et 1 invité) Afficher la liste détaillée des connectés