Big bang fiscal ou transition en douceur ?

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Les annonces fracassantes d'Ayault sur la remise à plat de la fiscalité m'ont remémoré une vieille question que je me pose depuis longtemps. Non pas que j'ai beaucoup d'espoir dans les capacités réformatrices du bonhomme, c'est donc une question purement rhétorique.

Lorsqu'on décide qu'une fiscalité est tellement mal fichue qu'il faut tout changer, vaut-il mieux procéder à un big bang fiscal ou effectuer une transition en douceur ?

Exempli gratia : en tant que dictateur bienveillant fraîchement élu, je décide la suppression totales des charges salariales, afin que chaque employé bénéficie d'une grosse augmentation de son salaire net (c'est 22% de mémoire). Ces cotisations, qui abondaient la sécurité sociale, sont remplacées par une hausse de la TVA, une hausse de la CSG, une hausse des droits de successions et la création d'une cotisation (le reliquat de l'ancien système) réservée exclusivement au financement des retraites et pensions.
Dans le même temps, les cotisations patronales (ça doit faire 42% du brut), subissent un sort similaire : la plus grosse partie (solidarité autonomie, allocations familiale, assurance vieillesse, CSG, aide au logement...on doit arriver à 30%) est remplacée par une nouvelle taxe assise sur le C.A. des entreprises. Ne resteraient assises sur le salaire que l'assurance chômage, éventuellement l'assurance maladie (là, j'hésite).

On part du principe que cette réforme est bénéfique, et si elle ne l'est pas, qu'il s'agit de la rendre la moins dévastatrice possible. Si mon exemple ne vous plait pas, prenez en un autre, tant qu'il est au moins aussi radical (dans le sens qu'il vous plait).

Question donc : vaut-il mieux pour les entreprises en général (seul l'intérêt général compte) effectuer la transition d'un seul coup (ex : au 1er janvier 20xx, tout change) ou progressivement (on effectue le transfert sur une durée de 5 ou 10 ans, par palier de 20 ou 10%) ? La seconde solution a l'avantage d'être moins brutale, mais elle est très complexe et ralentis les effets positifs de la réforme. La première solution est très brutale, risquant de provoquer nombre de faillites chez les importateurs par exemple, mais évite de conserver pendant des années un système hybride et bâtard, et permet ensuite une vraie stabilité fiscale.
Avec un big bang, les gens qui ont des prêts en cours peuvent "tout" perdre. Aussi bien les "entreprises" que les particuliers/classe moyenne. Il faut vraiment être sur de ses reformes. Et éviter les balles.
Pour moi, un gouvernement doit non seulement diriger, mais aussi choisir un chemin.
Citation :
Publié par Vanité
Avec un big bang, les gens qui ont des prêts en court peuvent "tout" perdre.
Tu veux dire, ceux qui doivent rembourser ou ceux qui doivent être remboursés ?
Je pense sincèrement que ça doit être réalisé en One Shot, à deux conditions :
- qu'on laisse aux entreprises ( car c'est sur elle que va peser l'essentiel du poids de la réforme, le contribuable lambda, pour lui, ça ne changera pas grand chose ) le temps de se préparer. Il faudrai donc au moins une année fiscale complète pour qu'ils se mettent à jour et pour que les arbitrages et équilibres soient trouvés et validés ( afin de permettre de gommer un maximum des effets de bord qui ne manqueront pas d'apparaître sur des cas particuliers ).
- que cette réforme massive soit précédée d'une stabilité fiscale totale.

C'est à ces deux conditions qu'il y aura à la fois une bonne acceptation, et une bonne préparation à cette réforme.

S'ils veulent la mettre en place pour la fin du quinquennat, c'est maintenant qu'il faut préparer le projet, le soumettre, le voter, et le mettre en application pour 2017.

Un tel projet, ne l'oublions pas, va avoir pour conséquence de modifier drastiquement la chronologie des rentrées fiscales. Il faudra s'y préparer, il y aura probablement l'année de mise en place un trou dans le budget, ou alors l'année sera précédée d'une vague d'avances, d'acomptes, de prélèvements d'anticipation qui en plus d'être d'une lourdeur incroyable, va entraîner une grosse incidence sur le pouvoir d'achat et les capacités d'investissement.

Il faudrai lisser cet impact. Pour moi, le meilleur moyen est, dès aujourd'hui, d'émettre à ces taux qui sont actuellement bas un maximum de titres de dette avec des échéances de 4 à 10 ans afin d'assurer sur la durée, et à moindre coût le trou budgétaire, sans avoir à générer une sur-imposition sur l'année N-1.

Pour la nature des changements profonds que tu établis Aloïsius, je suis plutôt en accord avec le "toi-dictateur", à quelques notables exceptions près.

Tout d'abord, une taxe sur le CA me semble dangereuse. Le CA est une chose, le résultat une autre. Beaucoup d'entreprises ont un CA important et un résultat faible. Ceci est dû à des marges très basses. Le meilleur exemple est la grande distribution, puisque la marge brute globale est inférieure à 3%.
Il en va de même pour toutes les entreprises ayant un gérant non salarié. Un impôt important sur le CA abaisserai mécaniquement le résultat net d'une manière importante. Or ce résultat net, c'est pour une grande partie les revenus de l'entrepreneur, qui partent ensuite en impôts et dans la consommation.

La TVA fait déjà office de taxe sur le CA, il me semble incohérent d'en rajouter une nouvelle.


Pour moi, la réforme fiscale doit s'axer autour des éléments suivants :
- hausse du taux de TVA à 25%.
- réforme de l'IR : prélèvement à la source, meilleure progressivité, hausse de l'assiette avec pour ambition de de porter le taux de contribution à 80% des ménages.
- réforme des charges sociales salariales et patronales. La Sécurité Sociale doit être financée par une charge extérieure à la valeur "travail". Ce sont les impôts à assiette large qui doivent intervenir à ce niveau, à savoir TVA et CSG.
Pour les entreprises, la problématique est plus pénalisante. Je pense, à mon avis, le choix de l'imposition sur le CA ne peut pas se faire sur les entreprises dont l'activité et le bassin d'emploi sont essentiellement franco-français.
Je verrai bien une distinction selon le siège social, et donc la nature de la structure de remontée des bénéfices :
- siège social en France et CA réalisé essentiellement en France : taxe sur le résultat.
- siège social à l'étranger : taxe sur le CA réalisé en France. Majoration des amendes avec saisie des avoirs bancaires à hauteur de 150% des montants dûs en cas de déclarations non sincères.
- siège social en France et CA réalisé essentiellement à l'étranger : j'aurai tendance à dire qu'il faudrai taxer le CA réalisé en France, ou majorer la taxe sur le résultat. Mais c'est une question qu'il faudrait analyser d'une manière approfondie.

A noter qu'il me semble également important de faire une réforme essentielle de la Sécurité Sociale. Son financement passant réellement par l'impôt, la gestion paritaire par les "partenaires sociaux" doit disparaître. La Sécurité Sociale doit revenir de plein droit dans l'exercice du pouvoir politique et soumis au contrôle réel de l'Assemblée Nationale. Les partenaires sociaux n'auront plus qu'un pouvoir de consultation et d'alerte et de saisie de la Cour des Comptes.

L'objectif de la réforme doit être facile à chiffrer : passer d'environ 3500 pages du code des impôts actuel à moins de 100 pages ( le code des impôts suisse en fait 60 ).
Pour répondre à ma propre question, j'aurai tendance à penser comme Aratorn.
Avec un calendrier de ce style (je pars du principe qu'il y a urgence, d'où certaines phases assez courtes) :
1) consultations : 3 mois.
2) propositions : une heure en conférence de presse.
3) négociations : 6 mois.
4) décision et vote par le parlement : 3 mois. Si le débat est intense, référendum.
5) préparation des entreprises et des services fiscaux : 18 mois.
6) application : 1 journée

j'ajouterai : pour les rigolos qui s'amusent à incendier les portiques ou les préfectures après que la décision ait été prise : 6 mois fermes minimum.

Citation :
L'objectif de la réforme doit être facile à chiffrer : passer d'environ 3500 pages du code des impôts actuel à moins de 100 pages ( le code des impôts suisse en fait 60 ).
Je ne peux que plussoyer. Mais la comparaison est un peu biaisé, la Suisse est un état fédéral et je si on ajoute les règles de chaque canton, ce n'est plus la même.
Il faudrait aussi et surtout veiller à ce qu'on ne crée pas des exceptions en cascade, comme c'est le cas actuellement. Et que, derrière l'impôt, on ne crée pas des dispositifs pour rendre l'argent aux personnes ou aux entreprises qui ont payé : il ne sert à rien de prélever pour rendre aussitôt.
Message supprimé par son auteur.
Citation :
Publié par Prootch
Malheureusement, je pense qu'ils n'auront pas les couilles
Note que ce n'est pas la question. On est dans l'hypothèse, l'expérience de pensée, où le pays serait dirigé d'une main de fer par une femme ou un homme doté d'une colonne vertébrale rigide et du charisme suffisant pour éviter de finir suspendu à un croc de boucher par une alliance incongrue de marins bretons, de camionneurs lyonnais et de fiscalistes suisses.
Une sorte de Juppé droit dans ses bottes mais qui aurait la sympathie du peuple et qui ne serait pas affecté par cette terrible maladie qu'on appelle la scoumoune. (Encore une fois, on ne parle pas de l'opportunité de quelques réformes que ce soit, ni de savoir si celui qui veut les mettre en place est compétent ou pas. Seule chose qui rentre en ligne de compte : ce sont des réformes massives qui changent plein de trucs. Celles que j'ai cité ne sont que des exemples donnée pour "simuler" l'ampleur du genre de trucs dont il serait question)
Pour moi tous changements majeurs favorise les forts/adaptables et laisse sur le carreau les plus faibles.

Bien sur on ne peut pas rester dans l'immobilisme, mais se soucier des plus faibles favorise la confiance nécessaire justement pour conduire ses changements.

Bref pour moi c'est une question d'équilibre. Ensuite si l'urgence est la, le choix ne se pose pas forcement ....
Le problème de la hausse de la TVA à travers la TVA sociale pose deux problématiques :

- Comment s'assurer que la baisse des charges salariales et patronales aille dans le salaire et non dans la maximisation des bénéfices ? Une baisse de x% des charges doit indure une augmentation de x% des salaires et pas un centime de moins, sinon c'est, une fois encore, une captation de la richesse par les entreprises.

- Comment les "revenus" fixes ne seront pas lésés par un augmentation de la TVA ? Leur revenu étant fixe, leur revenu réel diminuera. Je pense notamment aux retraités, à ceux qui touchent des aides sociales, etc. Une augmentation de la TVA doit induire une augmentation de la valeur factuelle de notre système de solidarité sous peine d'accroître les inégalités et la précarité. D'un niveau au moins équivalent pour assurer leur revenu réel.

Si, on arrive à assurer ces 2 points je serai plus d'avis alors, d'un big-bang fiscal mais il faudra y aller franco et non pas faire des éternels rafistolages parce qu'on se rend compte que les réformes ne fonctionnent pas sur certains points.
Citation :
Publié par Carminae

- Comment s'assurer que la baisse des charges salariales et patronales aille dans le salaire et non dans la maximisation des bénéfices ? Une baisse de x% des charges doit indure une augmentation de x% des salaires et pas un centime de moins, sinon c'est, une fois encore, une captation de la richesse par les entreprises.
Parce qu'en France, l'objet de la négociation salariale est le salaire brut, qui ne peut être réduit unilatéralement et dont le refus de renégociation ne peut être un élément justificatif de licenciement. Donc, le salaire brut restant le même, et la part de prélèvements sociaux diminuant, le salarié se retrouve mécaniquement avec un net utilisable supérieur.

Citation :
- Comment les "revenus" fixes ne seront pas lésés par un augmentation de la TVA ? Leur revenu étant fixe, leur revenu réel diminuera. Je pense notamment aux retraités, à ceux qui touchent des aides sociales, etc. Une augmentation de la TVA doit induire une augmentation de la valeur factuelle de notre système de solidarité sous peine d'accroître les inégalités et la précarité. D'un niveau au moins équivalent pour assurer leur revenu réel.
Ca reste à voir. Je ne suis pas persuadé que la hausse de la TVA ne serait pas absorbée par un recalcul de l'impôt chez ceux-ci.
Après, j'ai personnellement une philosophie très différente. Je ne pense pas que la finalité de l'impôt soit la redistribution. Je pense que l'impôt est là pour financer le fonctionnement de l'Etat et des services publics.
Le financement de la solidarité nationale doit se faire par la contribution sociale. Et comme je l'ai indiqué, on n'évitera pas une hausse de la CSG ou d'un dispositif similaire qui pour ces personnes compensera la hausse de la TVA.
Et cette contribution sociale doit être mieux répartie qu'elle ne l'est actuellement, car reposant très largement sur les salaires et les entreprises, ce qui me ne me semble pas normal.
Je pense qu'une réforme de la fiscalité est un chantier gigantesque. De plus elle n'est pas du ressort des politiciens, mais des fiscalistes. Malheureusement on entend toujours les uns et jamais les autres.

L'enjeu est considérable car le pays ne peut se permettre ni une contestation sociale, ni une perte sur les rentrées fiscales.

Je pense donc que quand Hollande dit qu'une telle réforme prendrait tout le quinquennat, il est optimiste. Il n'y a pas de solutions simples. Des arbitrages seront nécessaires pour chaque disposition d'un nouveau code.
Hors sujet
Citation :
Publié par Carminae
Le problème de la hausse de la TVA à travers la TVA sociale pose deux problématiques :
- Comment s'assurer que la baisse des charges salariales et patronales aille dans le salaire et non dans la maximisation des bénéfices ? Une baisse de x% des charges doit indure une augmentation de x% des salaires et pas un centime de moins, sinon c'est, une fois encore, une captation de la richesse par les entreprises.
La baisse des charges salariales est automatiquement accompagnée d'une hausse des salaires net, puisque le brut est inchangé. Aratorn l'a très bien expliqué.
La baisse des charges patronales n'a pas pour objectif de faire augmenter les salaires, mais de favoriser les entreprises qui emploient en France au détriment de celles qui importent depuis je ne sais où.
Citation :
- Comment les "revenus" fixes ne seront pas lésés par un augmentation de la TVA ? Leur revenu étant fixe, leur revenu réel diminuera. Je pense notamment aux retraités, à ceux qui touchent des aides sociales, etc. Une augmentation de la TVA doit induire une augmentation de la valeur factuelle de notre système de solidarité sous peine d'accroître les inégalités et la précarité. D'un niveau au moins équivalent pour assurer leur revenu réel.
Oui mais non. J'assume. Les retraités sont ceux qui ont été épargnés par les hausses de cotisations et l'allongement de la retraite. Pas de raison qu'ils ne participent pas un peu à un système dont ils sont les principaux bénéficiaires (au travers de leurs retraites, des remboursements de la sécu, des loyers que leur paient les jeunes etc.). On peut à la marge revoir le minimum vieillesse pour ceux qui sont vraiment pauvres (les locataires ou les proprio qui n'ont pas fini de rembourser alors que leur retraite est ridicule).
C'est valable aussi, d'une certaine manière, pour les rmistes : si les salaires nets augmentent d'un coup de 22% pendant que la TVA augmente de 5% et que les différents minima sociaux ne sont pas revalorisés, l'incitation à bosser deviendra beaucoup plus forte. Et quitte à passer pour un affreux droitiste, il y a effectivement bien des cas où ça semble nécessaire pour motiver certains. Seule exception qui me semble logique : les parents isolés. Mais ça nous entraînerait sur la politique familiale, les crèches et les maternelles, ce qui serait un HS dans le HS.

Fin du HS.
Citation :
Si, on arrive à assurer ces 2 points je serai plus d'avis alors, d'un big-bang fiscal mais il faudra y aller franco et non pas faire des éternels rafistolages parce qu'on se rend compte que les réformes ne fonctionnent pas sur certains points.
Je n'oppose pas "y aller franco" et "faire du rafistolage", mais "y aller franco" et "y aller par paliers successifs". A lire la plupart des réflexions sur ce fil, il me semble que c'est la première approche qui est favorisée.

Dernière modification par Aloïsius ; 24/11/2013 à 13h54.
Je ne crois pas du tout à une réforme fiscale d'envergure. Trop long à mettre en place, le PS aura le temps de se faire battre en 2017 avant. Il aurait fallu s'y lancer tout de suite.
En plus, on est pas à l'abri d'une nouvelle crise majeure d'ici là qui remettra tout en cause.
Imo, c'est de la pure tactique politicienne visant, d'un côté, à calmer la grogne de l'opinion, de l'autre, à donner des gages à l'aile gauche du PS.
Citation :
Publié par Aratorn
Parce qu'en France, l'objet de la négociation salariale est le salaire brut, qui ne peut être réduit unilatéralement et dont le refus de renégociation ne peut être un élément justificatif de licenciement. Donc, le salaire brut restant le même, et la part de prélèvements sociaux diminuant, le salarié se retrouve mécaniquement avec un net utilisable supérieur.
J'entends bien cet argument mais il ne s'applique que pour les salariés déjà en poste. Quid des nouveaux salariés ? De même, qu'est-ce qui n'empêchera pas, à terme, un lissage du brut vers le bas sous prétexte que le salaire net a déjà augmenté ?

Prenons un exemple, un salarié est pris à 20k brut l'année. Qu'est-ce qui empêche ensuite les entreprises de faire entrer des nouveaux salariés à 18k brut ? L'argument, serait facile à trouver pour les entreprises : "vous gagnez plus qu'avant". C'est vrai, mais une part de la richesse est aussi captée par l'entreprise.

Le climat social est tel que l'on accepte déjà des salaires, qu'on devrait pas accepter mais parce que la situation économique l'impose. Là, ouvrir une brèche fiscale, c'est aussi ouvrir la brèche des abus. Entendons bien que je suis pas contre la réforme, mais je pense que les salariés sont en droit d'exiger des garde-fous et un système de contrôle efficace.

Autrement dit, et on revient à ma question de départ, comment s'assurer efficacement que les entreprises vont jouer le jeu ?


Citation :
Publié par Aloïsius
Oui mais non. J'assume. Les retraités sont ceux qui ont été épargnés par les hausses de cotisations et l'allongement de la retraite. Pas de raison qu'ils ne participent pas un peu à un système dont ils sont les principaux bénéficiaires (au travers de leurs retraites, des remboursements de la sécu, des loyers que leur paient les jeunes etc.). On peut à la marge revoir le minimum vieillesse pour ceux qui sont vraiment pauvres (les locataires ou les proprio qui n'ont pas fini de rembourser alors que leur retraite est ridicule).
C'est valable aussi, d'une certaine manière, pour les rmistes : si les salaires nets augmentent d'un coup de 22% pendant que la TVA augmente de 5% et que les différents minima sociaux ne sont pas revalorisés, l'incitation à bosser deviendra beaucoup plus forte. Et quitte à passer pour un affreux droitiste, il y a effectivement bien des cas où ça semble nécessaire pour motiver certains. Seule exception qui me semble logique : les parents isolés. Mais ça nous entraînerait sur la politique familiale, les crèches et les maternelles, ce qui serait un HS dans le HS.
Tu trouves le propos HS, je le trouve au contraire, au centre du débat. On ne peut pas décemment créer une nouvelle fiscalité qui, in fine, augmenterait les inégalités. Les minimaux sociaux doivent suivre l'augmentation de la TVA. Que l'on soit contre tel ou tel aide sociale, je comprends (je suis même d'accord pour les retraités) mais si un dispositif existe, il doit être pérennisé sinon, il s'agit d'une "casse" du dispositif sous couvert de réforme fiscal. Et pour ma part, c'est clairement non.
Citation :
Prenons un exemple, un salarié est pris à 20k brut l'année. Qu'est-ce qui empêche ensuite les entreprises de faire entrer des nouveaux salariés à 18k brut ? L'argument, serait facile à trouver pour les entreprises : "vous gagnez plus qu'avant". C'est vrai, mais une part de la richesse est aussi captée par l'entreprise.
Je ne vois pas en quoi la modification du taux de prélèvement sur les salaires remettrai en cause les accords de branche sur les salaires ou la valeur du SMIC ?

Ces accords existent, ils sont basés sur le salaire brut, et ils le resteront. Faut arrêter de voir le mal partout. Si les salariés ont une augmentation du pouvoir d'achat à coût constant ( voir à coût inférieur avec l'abaissement des charges patronales ) c'est tout bénéf pour les entreprises qui vont pouvoir retrouver et de la marge, et une certaine sérénité avec une remise à plat de la problématique des accords salariaux annuels.

Citation :
Tu trouves le propos HS, je le trouve au contraire, au centre du débat. On ne peut pas décemment créer une nouvelle fiscalité qui, in fine, augmenterait les inégalités.
Faut savoir ce qu'on veut : soit on ne fait rien sous prétexte que ça va peut être augmenter les inégalités, et auquel cas je te rassure, dans 10 ou 15 ans, la protection sociale telle qu'on la connaît n'existera plus et les mesures de solidarité entre travailleurs et chômeurs et entre générations seront à terre, soit on se prend en main, quitte à accepter qu'en effet la solidarité/assistanat soit réduite, avec pour vocation de créer plus d'emplois et plus de possibilité d'insertion.

Depuis 20 ans, on a choisi la solution du revenu social au détriment du revenu salarié, parce qu'il est plus simple pour un gouvernement qui cherche des résultats rapides de créer 100 000 emplois aidés et de distribuer des dizaines de milliards de subvention que de rechercher les causes du chômage et d'y répondre.

Ce big bang fiscal a pour but de faire table rase des pratiques antérieures. Oui, ça entraînera probablement de la casse à court terme, oui il est possible que des gens sans activité et dont les revenus dépendent exclusivement de la solidarité nationale morflent encore plus pendant quelques années.
Mais le but, c'est de recréer de la croissance, de recréer de la consommation, d'avoir un impact sur l'investissement à travers la refabrication de marges pour nos entreprises. En gros, de créer un cercle vertueux en lieu et place du cercle vicieux que nous alimentons depuis des décennies et que nous rebouchons à coup de dette que les politiques et les électeurs laissent à notre génération et aux suivantes depuis les 40 dernières années.

Mais le big bang fiscal ne sera qu'un four s'il se limite au plan national. C'est toute la construction de l'Etat qu'il faut revoir. Car sinon, ce sont les collectivités locales qui vont tout saborder.

Je suis contre l'hyper-centralisation de tous les pouvoirs à Paris. Il n'empêche, la décentralisation est un échec total et absolu, notamment car on a laissé des collectivités irresponsables lever l'impôt et l'employer n'importe comment.

Le big bang fiscal devra aller de paire avec une réforme territoriale massive ( "lui-dictateur Aloïsius en a déjà parlé ailleurs et je suis en total accord avec lui ).

Il nous faudra accepter en parallèle une modification sans précédent depuis 150 ans de la construction territoriale de la nation française, la disparition de 25 000 communes, la création de 5 ou 6000 communes nouvelles de plus grande taille, la suppression des cantons et départements, la mise en place d'un exécutif régional puissant assis sur une légitimité électorale forte, la remise à plat des effectifs de la fonction publique territoriale et la réaffectation des inévitables centaines de milliers de postes en surplus sur des fonctions de services publics qui font actuellement défaut.

En gros, pour que changer l'impôt change le destin de la France, il faut aussi changer la France dans ce qu'elle a de plus conservateur : sa structure administrative.
Et j'aurai tendance à dire que c'est déjà trop tard. Le PS avait toutes les clés en main il y a un an et demi pour lancer ces réformes : communes, départements, régions, assemblée nationale, quasi sénat, gouvernement, présidence de la république, proximité historique avec les syndicats et la fonction publique ( qui sont les deux plus gros éléments conservateurs de la nation de part leurs capacités de blocage incomparable avec les autres forces vives de la nation ). Ils avaient tous les leviers de pouvoirs pour faire des réformes massives.

La seule grande réforme que ce pouvoir omnipotent a réussi à pondre en 18 mois, c'est l'adoption du mariage gay.
Tant mieux pour ceux qui en bénéficient, mais ça reste un résultat on ne peut plus consternant.

Et avec la terrible défaite électorale qui s'annonce aux municipales et aux européennes, c'en sera la fin de la fenêtre d'opportunité de réforme de l'Etat et de la Nation.

Voilà comment la plus incroyable fenêtre de tir de la réforme de l'Etat va se refermer, et avec elle l'espoir de voir la présidence Hollande rentrer dans les livres d'histoire à une page autre que celle des rois fainéants aux côtés de Dagobert II, Thierry IV et Jacques Chirac II.
Une telle réforme est une tâche administrative et non un enjeu politique. C'est donc aux fonctionnaires concernés de la mettre en oeuvre, de faire tous les calculs nécessaires et de proposer le nouveau modèle. C'est un travail très impressionnant.

Elle relèverait de la politique si elle visait à diminuer ou à augmenter les impôts. Mais ce n'est pas là son but annoncé. Si le pouvoir veut avoir la sérénité nécessaire pour atteindre cet objectif, il devrait se contenter d'avaliser les travaux des fiscalistes. Ces travaux devraient bien entendu ne pas être interrompus au cas où une nouvelle majorité sortirait des urnes. Ils devraient donc pouvoir s'effectuer en toute indépendance et ne pas être soumis à des délais.

En France les choses sont très curieuses. Si on prend le discours des politiciens à la lettre, on pourrait croire que ce sont eux qui font le travail. Cette idée qu'il puisse y avoir des petits génies à la tête de l'Etat est assez amusante.

Dernière modification par blackbird ; 24/11/2013 à 16h33.
Citation :
Publié par Aloïsius
On part du principe que cette réforme est bénéfique, et si elle ne l'est pas, qu'il s'agit de la rendre la moins dévastatrice possible. Si mon exemple ne vous plait pas, prenez en un autre, tant qu'il est au moins aussi radical (dans le sens qu'il vous plait).
Cool, un sujet où l'on peut écrire nos propositions !

Je ne pense pas qu'une réforme fiscale soit pertinente si elle n'est pas animée par un objectif à atteindre et des choix clairs. L'ensemble des propositions ci-dessous s'inscrivent dans l'objectif de créer de l'emploi en France, de favoriser l'activité économique et de sauvegarder l'essentiel de notre modèle social.

- IRPP par personne (et non plus par foyer) à :
10% sur la tranche 10-20 KEUR
20% sur la tranche 20-30 KEUR
30% sur la tranche 30-50 KEUR
40% sur la tranche 50-70 KEUR
50% sur la tranche 70KEUR et plus
Pour financer l'Etat. Avec une assiette large, sans quotient familial et sans abattement spécifique pour les choix d'investissements ou les dépenses engagées sauf en matière de financement des PME, de l'innovation et de la R&D.

- ISF à 0,5% du patrimoine net non professionnel supérieur à 250000 euros. Pour financer l'Etat.
- Impôt sur les sociétés au taux de 10% avec une assiette très élargie pour financer l'Etat.
- Impôt sur les dividendes versés (donc non réinvestis dans l'entreprise) pour financer l'Etat.
- Impôt minimal assis sur [à définir] pour appréhender des recettes fiscales sur les multinationales ayant une activité commerciale en France sans payer un montant suffisant [à définir] de prélèvements obligatoires. Sert aussi au financement de l'Etat.
- TVA à 33,33% sans taux réduit pour financer l'Etat et une partie de l'assurance maladie.

- Suppression des cotisations patronales sauf pour le financement des accidents du travail et de l'assurance chômage.

- Suppression des cotisations salariales sauf pour l'assurance vieillesse. Changement du fonctionnement des systèmes de retraites pour avoir un système unique qui verse les pensions dans la limite des cotisations perçues pour empêcher tout déficit et toute remise en cause du système.

- Suppression de l'essentiel des petites taxes fiscales et parafiscales : redevances audiovisuelles, taxes pour le cinéma, taxe sur les bureaux, etc. et suppression des éventuelles affectations budgétaires correspondantes (exemples : suppression du financement public de France Télévision ou du Centre National du Cinéma).

- CSG à 15% pour financer la dette sociale (CRDS actuelle), le reliquat de l'assurance maladie et un revenu minimum citoyen remplaçant l'ensemble des allocations familiales (RSA, minimum vieillesse, parent isolé, APL, etc.).

- Pour financer les régions et les communes : Taxe foncière assise sur valeur vénale moyenne dans la commune (à la place de la valeur locative cadastrale) pour les propriétaires, Taxe sur l'énergie (reprenant la TIPP actuelle élargie à la consommation d'électricité), Taxe sur les plus-values mobilières non professionnelles, Cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, Taxe sur les activités et produits nuisibles pour l'environnement ou la santé, Taxe sur les mutations (dont successions) à taux fixe élevé sur l'ensemble des biens non professionnels, Taxe d'équipement pour les entreprises et les particuliers assise sur le nombre de m² occupé (en remplacement de la CFE et de la taxe d'habitation), Taxe sur les plus-values immobilières. L'affectation du produit de ces taxes dépend des compétences allouées soit aux régions, soit aux communes.

- Taxe carbone assise sur le km parcouru en mer ou dans les airs et Ecotaxe assise sur le km parcouru sur terre pour financer les transports publics, les infrastructures routières et ferroviaires et pour financer le développement des énergies non polluantes.

- On garde les aides fiscales pour financer les PME, l'innovation, la recherche fondamentale, la recherche appliquée, le développement de nouveaux produits et l'emploi à domicile. Le reste passe à la trappe.

- On supprime la monnaie fiduciaire et on généralise le paiement traçable (smartphone, CB et virements).

- Suppression du RSI, de l'URSSAF et des autres organismes sociaux collecteurs au profit de la seule administration des Finances publiques.

- Même si c'est partiellement hors-sujet, l'idée est bien de moderniser notre appareil administratif, fiscal et économique : Plafonnement des rémunérations publiques à 100KEUR par an et par bénéficiaire, Obligation de se syndiquer pour les salariés, Suppression des conventions collectives et négociation obligatoire d'accords par entreprise, Libéralisation du marché du travail avec un contrat unique inséré dans le code du travail, Suppression des abattements pour frais professionnels pour les retraités, Réduction des rémunérations publiques ou allongement de la durée du travail dans le secteur public, Suppression des départements et des communautés de communes comme échelon administratif, Concentration des communes pour avoir des collectivités de 10000 habitants minimum, Création de 7 régions avec un poids économique conséquent (IDF, Nord, Ouest, Centre, Est, Sud-Est et Sud-Ouest), Interdiction du cumul des mandats et des fonctions publiques, Création de commissions citoyennes pour contrôler l'activité des élus et de l'usage des deniers publics dans tous les domaines, Publication sur internet de l'ensemble des pièces comptables, factures, dépenses et documents des communes et régions afin de faciliter le contrôle par les citoyens, Assemblée Nationale entièrement élue à la proportionnelle, sénateurs élus dans les départements à la majorité simple à un tour, Impossibilité d'être reconduit dans un même mandat politique, Un seul régime d'assurance maladie, Un seul régime de retraite, Un seul régime d'assurance chômage, Mise en place d'une répartition stricte des compétences de l'Etat, des régions et des communes, Suppression de la claude compétence générale.

Je m'arrête là, mais je pourrai en coller des pages entières.

Idéalement, une réforme fiscale doit se faire vite, mais dans la pratique aller vite signifie s'asseoir sur les intérêts des uns ou des autres... avec les risques que cela comporte au regard de l'ordre public.
Ce que je trouve interessant sur ce fil c'est l'accord tres fort entre un type de droite "a la francaise" moderee (Aratorn) et un type assez fortement de gauche (Aloisius). Plutot qu'une dictature, je propose un binome de consuls a la romaine (antique). Au taf.

Plus serieusement, ca donne une idee de ce qu'une politique bipartisane saine pourrait donner (et que c'est tout a fait possible).
La compta j'y comprends rien, mais j'espère vraiment qu'ils vont simplifier le truc.
Y a aussi les 50 couches administratives (Villes, ComCom, dpt, régions ..) à simplifier.
Et tout ça est lié à mon humble avis.

Allez Hollande, fais le.
Et pour répondre à la question de base, je suis partisan du Big Bang bien fait.
Ca va grincer ici ou là, mais faut vraiment faire bouger les choses.

Edit: Je suis d'accord avec Aratorn, c'est toute l’organisation de l'Etat qu'il faut revoir.

Dernière modification par Compte #362935 ; 25/11/2013 à 02h31.
Message supprimé par son auteur.
Citation :
Publié par Prootch
Le tout en trois ans... comment vous dire... rofl.
Ils ont tous les leviers du pouvoir en main.
Faut juste la volonté de le faire.

Je serai éternellement (dans la limite de ma vie disponible) reconnaissant à un Président qui fout un coup de pied dans la fourmilière plutôt que de constater encore et encore l'immobilisme ambiant.

Ont-ils la volonté de le faire ?

Dernière modification par Compte #362935 ; 25/11/2013 à 03h08. Motif: Il manquait des mots
Je suis bien d'accord : quand on n'est pas capable de faire en 3 ans, on n'est pas non plus capable de faire en 30 ans. Et ils le prouvent depuis 30 ans, et davantage.
Règle quasiment mathématique, au ressort fort simple : quand on n'a pas de courage politique aujourd'hui, il ne tombera pas tout cru du ciel demain, surtout quand on a été formaté dès la naissance par la berceuse systémique du ni oui ni non.

Edition : Tiens, par pure pédanterie, je m'en vais coller une citation. Non, pire, 2 citations, la première de Nietzsche et la seconde d'Aragon :

Citation :
L’histoire nous met en présence du plus étrange phénomène : les forces réactives triomphent, la négation l’emporte dans la volonté de puissance ! Il ne s’agit pas de l’histoire de l’homme, mais de l’histoire de la vie, et de celle de la Terre au moins sur sa face habitée par l’homme. Partout, nous voyons le triomphe du « non » sur le « oui », de la réaction sur l’action. Même la vie devient adaptative et régulatrice, se réduit à des formes secondaires : nous ne comprenons même plus ce que signifie agir.
Citation :
La stéréotypie des gestes, des actes, des mensonges de l’Europe a accompli le cycle du dégoût.

Dernière modification par baai ; 25/11/2013 à 03h09.
Message supprimé par son auteur.
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