Ys - Hibernia - Le retour du dragon

 
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La sentinelle banda son arc et visa d'un oeil exercé l'ombre sylvane. Le tir s'effectua, rapide, sûr, précis. L'ombre sursauta en hurlant de douleur et se précipita en courant vers Chegwidden qui dégaina rapidement sa faucille.

Le combat qui s'en suivit dura quelques minutes. La sentinelle évitait soigneusement les coups, parait à l'aide de son bouclier, utilisait consciencieusement tous les styles de frappe que lui avait enseignés Labhras le maître qui lui avait tout appris. Lame de feu, lame revancharde. Larme d'horizon, lame dansante. L'ombre sylvane n'avait aucune chance. Après quelques minutes de combat, elle mourut dans un râle d'agonie.

Chegwidden sourit en rengainant sa faucille, ferma les yeux quelques secondes, le temps de retrouver son endurance puis se baissa pour dépouiller l'ombre des quelques trésors qu'elle possédait certainement. La chasse des ombres sylvanes pouvait parfois rapporter des récompenses intéressantes. Celle-ci hélas n'avait rien d'autre sur elle que quelques pièces d'argent que Chegwidden s'empressa de glisser dans ses poches.

Elle reprit à nouveau son arc et partit en courant à la recherche d'une autre victime. Elle était en chasse depuis le début de la matinée et elle avait bien l'intention de passer plusieurs jours sur Hy Brasil. Elle pensait demeurer encore quelques heures dans les environs d'Aalid Feie et ensuite elle irait passer la nuit dans la région du Roc Vigilant, non loin de Necht. L'endroit était certes dangereux mais lors de sa dernière visite sur la terre des Sylvains, la jeune femme avait repéré une petite clairière accueillante non de loin du village habité par les sentinelles sylvestres. Chegwidden s’était fait des amis de ces imposants Sylvains. Ils demeuraient étrangement silencieux lorsqu'elle essayait de leur parler mais ils toléraient sa présence lorsqu’elle installait son bivouac à quelques pas de leurs huttes. Leur présence rassurait la jeune femme.

Jusqu'au soir, Chegwidden combattit les ombres sylvanes. Puis, lorsque la fatigue eut raison d'elle, elle se rendit dans la clairière et alluma un feu. Elle sortit ensuite quelques victuailles de son sac et mangea de bon appétit en regardant les flammes pétiller devant elle.

Le regard dans le vague, elle se détendit enfin. Toute la journée, elle avait été sur ses gardes, elle avait combattu avec détermination et concentration. Il semblait qu'elle avait toujours des choses à se prouver. Non, ce n'était pas une idée, elle avait toujours des choses à se prouver. De loin en loin, depuis qu'elle était jeune, elle avait eu besoin de ces instants de solitude, ces instants durant lesquels elle n'essayait de compter que sur elle-même. Pour savoir. Pour être certaine que… si un jour elle se retrouvait vraiment toute seule, elle saurait survivre…

Chegwidden secoua la tête, comme pour écarter ces pensées étranges. Pourquoi se retrouverait-elle toute seule ? Elle avait sa guilde, ses amis étaient là et elle savait qu'elle pourrait toujours compter sur eux. Mais alors pourquoi était-elle seule, perdue au milieu de la terre hostile d'Hy Brasil alors qu'elle aurait pu être près d'eux, à combattre ou à faire la fête ? Elle soupira. Elle savait bien que c'était elle qui recherchait ses instants d'isolement. Elle en avait besoin régulièrement, pour se retrouver, pour se souvenir de ce qui avait été, pour trouver ce qu'elle cherchait, pour tenter de savoir ce que lui amènerait l'avenir.

Depuis quelques mois, elle songea que toute sa vie ne tournait autour que d'une seule chose. La guilde. Elle avait mis toute son énergie, toute sa volonté au service de sa guilde. C'était la seule chose qui importait vraiment. Que les Anges Gardiens continuent à servir Hibernia, que les couleurs bleue et blanche de leur emblème soient reconnues dans toutes les régions d'Hibernia. C'était d'ailleurs en bonne voie, songea-t-elle. Elle ne comptait plus le nombre de fois où de grandes guildes avaient fait appel à certains Anges pour participer à de grandes batailles. La guilde se portait bien et Chegwidden savait que c'était un peu grâce à elle. Elle était fière de ça.

"Ne serait-il donc pas temps de penser un peu à toi?" lui souffla une petite voix dans sa tête. Penser à elle ? Chegwidden eut un petit rire ironique. Mais pour faire quoi ? Elle n'avait pas besoin de penser à elle, à ses envies, à ses besoins, elle n'en avait pas. Elle ne vivait que pour la guilde… La petite voix dans sa tête lui souffla encore : "tu sais que c'est faux… tu aspires à autre chose…"

La sentinelle ferma les yeux et se laissa envahir par la douce chaleur des flammes. Oui c'était vrai. Elle aspirait à autre chose. Mais ce qu'elle voulait, ce qu’elle désirait, au plus profond d’elle, elle savait pertinemment qu'elle ne l'aurait jamais… Quelque chose de si proche mais tellement inaccessible en même temps… C’était un rêve qu’elle avait et ça demeurerait à jamais un rêve qu’il valait mieux ranger au plus profond de son cœur…

Alors... Alors son destin serait à jamais lié à celui de SA guilde. Contre vents et marées, elle défendrait les couleurs des Anges… Et si un jour, les Anges Gardiens devaient disparaître d’Hibernia, alors… elle s’en irait.

C’était ainsi. C’était la vie qu’elle s’était choisie. C’était sa vie.

Sur cette pensée douce-amère, elle s'enroula dans sa cape et plongea rapidement dans un sommeil sans rêves.

***********

Le lendemain matin, Chegwidden se rendit en ville de Necht afin de vendre le butin qu'elle avait accumulé la veille en chassant les ombres sylvanes. Elle allait repartir en chasse, cette fois contre les botonides lorsqu'elle fut interpellée par un messager lurikeen qui venait juste d'arriver en ville.

- Dame Chegwidden, des Anges Gardiens ?
- Oui c'est moi.
- J'ai un message pour vous. Il vient de Tir Na Nog.

Le lurikeen lui tendit un rouleau de parchemin et Chegwidden lui remit quelques pièces d'argent pour la peine.

Elle décacheta le rouleau et le parcourut rapidement. C'était un message de Sylus, l'avertissant qu'Albion, encore une fois, allait tenter de s'emparer du reliquaire de Dun Lamfhota. Elle était attendue, comme tous les autres Anges pour aller combattre les ennemis du royaume. Chegwidden soupira. Cette maudite guerre n'aurait-elle donc jamais de fin ? Elle déchiffra le reste du message et fut surprise de constater que Mugathdem les attendait à Druim Cain… Pourquoi Druim Cain ? Le reliquaire de Dun Dagda était vide… le chaudron était en possession des ces maudits Trolls et si le second reliquaire était attaqué, il eut été plus judicieux de se retrouver à Druim Ligen… Bah après tout Mugathdem avait certainement de bonnes raisons de les attendre à Druim Cain.

Elle rangea le parchemin dans sa tunique et se dirigea vers le palefrenier. Le chemin de retour sur le continent allait être très très long… Elle n'était pas sûre de pouvoir arriver à temps, elle espérait que oui.

Après deux jours d'un voyage épuisant, Chegwidden arriva enfin à la forteresse de Druim Cain. En sautant à bas de sa monture, elle sentit tout de suite que quelque chose d'anormal se passait.

La forteresse était vide. Totalement. Chegwidden pénétra par la grande porte et fut forcée de constater qu'il n'y avait plus âme qui vive dans la citadelle. Les gardiens du fort, les maîtres guerriers, magiciens ou ovates qui y officiaient avaient disparu également. Il n'y avait non plus pas la moindre trace des maîtres Eldritch qui surveillaient habituellement le défilé des Mont Collory. L'endroit était totalement désert mais le plus étrange, c'est qu'il n'y avait aucune trace de bataille, ou de preuves d'une lutte quelconque. Les résidents de la citadelle semblaient avoir tout simplement disparu.

Elle grimpa rapidement les marches menant sur le chemin de ronde et alla jeter un œil sur le défilé menant aux Monts Collory. Tout semblait calme et normal. Mis à part l'absence des gardiens de la forteresse, elle ne voyait rien d'étrange. Elle allait redescendre lorsque son regard fut attiré par quelque chose se déplaçant dans l'immobilité du paysage.

En fait, ce n'était pas seulement une chose mais deux, puis dix créatures qui se dirigeaient en grimaçant et en hurlant vers la forteresse. Chegwidden demeura figée sur place en reconnaissant les monstres qui se dirigeaient de plus en plus nombreux vers elle. Elle voulut hurler mais aucun son ne réussit à sortir de ses lèvres. Tout ce qu'elle réussit à faire, ce fut de se retourner et de fuir. Fuir le plus loin possible…

A suivre...
Elle courut à perdre haleine sur ce qui devait être plusieurs lieues et se retrouva sans trop savoir comment non loin du camp des empyréens de la vallée de Bri Leith.

Elle se retourna pour constater qu'elle semblait être en sécurité. Plus personne ne la poursuivait et elle s'assit dans l'herbe fraîche afin de reprendre son souffle.

Elle avait dû rêver… Les créatures qu'elle avait aperçues ne pouvaient pas vivre, encore moins survivre sous le soleil brûlant des Mont Collory… Et pourtant elle était certaine que ses yeux ne lui avaient pas menti.

Elle avait vu des blafards.

Mais que faisaient donc des blafards, ces habitants des dangereuses collines de Sheeroe en plein Mont Collory ? C'était impossible. Ces créatures étaient les serviteurs de Cuuldurach, le roi blafard, le dragon. Jamais il ne leur aurait permis de quitter les collines… Ils étaient sous sa domination et il aurait été étonnant qu'ils aient réussi à s'enfuir… A moins que…

Chegwidden ne pouvait pas croire ce que lui soufflait son esprit. Elle regarda au loin, les nuages qui glissaient paresseusement dans le ciel, au-dessus des Monts Collory et crut y voir glisser une ombre immense…. Sa réflexion était si intense qu'elle ne se rendit pas compte qu'elle parlait à haute voix :

- Se pourrait-il que Cuuldurach… ?
- Oui Sentinelle. Le dragon est sorti de son enclos.

La jeune femme se retourna pour tomber nez à nez avec Déliana, la magicienne eldritch à la verte chevelure. Chegwidden ne pouvait pas en croire ses oreilles.

- Déliana ? Toi ici ? Le dragon ? Le dragon a quitté les collines de Sheeroe ? Mais enfin c'est…impossible… c'est impensable.
- Rien n'est impossible pour celui qui détient le pouvoir de la magie, ma chère.
- Mais… Cuuldurach ne peut pas franchir la frontière des collines. Tout le monde le sait. Tout le monde sait que lui et ses blafards ne peuvent pas vivre à la lumière du jour…

L'elfe magicienne s'appuya sur son bâton.

- Un grand malheur est arrivé Dame Chegwidden. Suis-moi jusqu'au camp des Empyréens et je t'expliquerai.

Chegwidden se releva et emboîta le pas à la magicienne. Celle-ci commença à parler lentement, en détachant bien chaque mot.

- Tu sais sûrement, Chegwidden que Cuuldurach le roi blafard, celui qu'on nomme le dragon d'Hibernia n'a pas toujours vécu dans son enclos, au plus profond des collines de Sheeroe. Voilà bien des années, bien avant le règne d'Arthur sur les trois royaumes, il semait la terreur et la désolation sur toute la verte Hibernia. Un jour pourtant, mon peuple, les elfes réussirent à lancer un sort assez puissant pour l'emprisonner définitivement dans l'enclos qu'ils créèrent dans les collines de Sheeroe. Ces elfes étaient tous des magiciens très puissants et ils avaient passé des mois et des mois à élaborer la formule magique qui permettrait de lancer ce sort. Lorsqu'ils l'eurent lancé, Cuuldurach cessa de survoler Hibernia et ne dut se contenter que de ses patrouilles dans les collines. Plus jamais il ne devrait voir la lumière du soleil. La magie qui l'emprisonnait là-bas ne devait jamais cesser et afin que le secret de la formule de ce sort soit préservé à jamais, les elfes magiciens renoncèrent à leur immortalité. Ils moururent quelques années plus tard, emportant leur secret avec eux.
- Alors l'un d'entre eux n'est pas mort et a rompu le sort.
- Non. Mon père, le grand sorcier Elvar les a tous bien connus et côtoyés. Il était présent le soir où ils ont renoncé à leur immortalité.
- Alors qui ?

Déliana soupira et regarda d'un air hautain la Sentinelle.

- Ces humains… vous ne réfléchissez jamais décidément… Qui donc aurait intérêt à ce que Cuuldurach se promène à nouveau en liberté dans le royaume d'Hibernia ?
- Je ne sais pas. Nos ennemis ? Albion ? Midgard ?
- Tiens, tu es moins bête que je ne le pensais. Oui Chegwidden, Albion ou Midgard. Ou peut-être même que les deux royaumes se sont alliés pour nous détruire. Quoique je suppose le peuple troll encore trop inculte pour pouvoir imaginer un stratagème aussi diabolique. Non… je pense qu'Albion a manigancé tout ça.
- Et que peut-on faire ?

Déliana haussa les épaules alors qu'elles approchaient du camp des Empyréens.

- Même moi je n'en sais rien. Et pourtant, je suis la sagesse incarnée. Mais les Empyréens sont un peuple savant. Ils pourront certainement nous aider.
- Je l'espère. Il faut que j'avertisse les Anges… Je devais les retrouver à Druim Cain. J'espère qu'il ne leur est rien arrivé de grave…

A suivre...
La jeune sentinelle s'interrompit en découvrant le village empyréen où régnait une intense et anormale agitation. Déliana et elle descendirent en courant la pente et découvrirent que tous les occupants habituels de Druim Cain s'étaient retrouvés dans le camp empyréen. Les gardiens de la forteresse faisaient le guet tandis que les différents maîtres guerriers, ovates et magiciens étaient réunis près d'une hutte en compagnie de la gardienne Rasa, la cheffe du village. Les deux Anges Gardiens se dirigèrent vers ce dernier groupe.

La discussion était vive et elles eurent du mal à comprendre ce qui se passait vraiment. Après quelques minutes néanmoins, elles purent avoir confirmation de ce qu'avait affirmé Déliana. Cuuldurach et ses blafards avaient réussi à s'échapper des collines de Sheeroe et s'étaient retrouvés grâce à une puissante magie dans les Mont Collory. Cuuldurach avait élu domicile dans le reliquaire de Dun Dagda et ses blafards patrouillaient toute la région des Mont Collory. Dans le brouhaha qui régnait, Déliana réussit tout de même à se faire entendre. Elle dit d'une voix forte :

- Mais taisez-vous donc mécréants que vous êtes tous ! Au lieu de geindre et de vous lamenter, pourquoi ne demandez-vous pas aux grandes guildes de venir le déloger de là ? Elles ont montré leur savoir-faire non ? Equinoxes, Fear Moniëo et les autres en sont capables !

Un gardien firbolg répondit sèchement à Déliana :

- Avec tout mon respect, Dame Magicienne, les grandes guildes sont toutes parties se battre en Albion. Le temps qu'elles reviennent, Cuuldurach aura tout détruit sur son passage et réussira à revenir semer la terreur sur le royaume.
- Très bien, dit Déliana sans se démonter, alors j'irai moi-même ! Je ne crains pas Cuuldurach !

Chegwidden posa une main sur l'épaule de la magicienne.

- Euh… Déliana je ne suis pas sûre que ça soit une bonne idée… Non, dit-elle en s'adressant à la gardienne empyréenne. Je crois que notre Alliance Pax Hibernia en est capable. Je crois que nous pourrons nous en charger.

L'un des grands maîtres ovates eut un rire cynique à l'adresse de la Sentinelle.

- Vous parlez d'eux ? dit-il en désignant de nombreux corps allongés au milieu de la place du village. Eh bien non ! Ils n'en sont pas capables non plus apparemment.

Chegwidden réprima un cri d'horreur en reconnaissant l'emblème des Anges sur de nombreuses capes et boucliers. Elle se précipita vers les corps étendus sans connaissance et son visage perdit toute couleur en reconnaissant la plupart de ses amis.

A suivre...
Avec effroi, Déliana et Chegwidden découvrirent les corps ensanglantés de Kylaan le finelame, de la douce et blonde Seylune. Un peu plus loin gisaient les deux ancêtres firbolgs, Sylus et Gorael ainsi que la jeune Mannera et son frère Gerwin. Kalkydra, Dyonisos, Eriu et Stumpweill… elle n'arrivait plus à les compter tellement il y avait de membres de sa guilde allongés parterre.

Chegwidden sentit ses yeux se mouiller de larmes. Tous ses amis… ses amis étaient…

- ils ne sont pas morts Dame Chegwidden, lui assura Déliana. Mais ils ont besoin de nombreux soins.
- Et mon pouvoir de régénération n'est pas assez puissant. Holà maître druide ! cria-t-elle. Pourquoi ne soignes-tu pas tous ces blessés ? Nous avons besoin d'eux pour combattre !

Le maître druide haussa les épaules et passa son chemin sans daigner répondre, au grand dam de Chegwidden qui se fâcha. Elle allait partir étrangler le maître druide mais en fut empêchée par Déliana qui pour une fois tempéra la situation.

- Tout doux ma chère ! Il ne sert à rien de s'énerver. Je crois que le pouvoir de guérison des druides ne peut rien pour eux. Réfléchis ! Tu as déjà attaqué Cuuldurach ? Tu sais qu'on ne peut utiliser aucun sort de soin. Si le dragon le ressent, il soufflera son haleine brûlante et tout sera fini. S'ils étaient morts, on pourrait leur redonner vie grâce à notre magie mais là… on ne peut rien faire. Il faut attendre.
- Mais le dragon n'est pas là pour le moment.
- Peut-être bien. Mais à la lumière du soleil, les forces de Cuuldurach sont décuplées. Il ressentirait nos magies de régénération à des lieues à la ronde.

Découragée, Chegwidden s'assit au côté de Sylus étendu sans connaissance et lui prit la main.

- Nous allons trouver une solution, mon druide bourru préféré. Je te promets que nous allons tous vous sortir de là….

Oui mais comment ? Elle regarda autour d'elle, l'agitation, l'affolement qui semblait régner dans le village empyréen. Elle ne savait pas quoi faire. Si seulement….

Elle fut interrompue dans ses réflexions en apercevant flotter au loin la cape bleue et blanche d'un Ange Gardien qui arrivait en courant. Elle soupira de soulagement en reconnaissant la silhouette familière de son ami de toujours, le chef de la guilde, le champion Mugathdem en personne. Elle se précipita à sa rencontre. Il devait certainement être porteur de nouvelles un peu plus fraîches.

- Mugathdem ! Je n'ai jamais été aussi contente de te voir ici. Nous avons plus que besoin de toi !

Muga avait le visage grave et s'assit parterre près de Déliana et Chegwidden.

- Vous avez vu nos Anges ? dit-il en désignant d'un air triste leurs amis étendus non loin d'eux. Et je n'ai rien pu faire pour eux…
- Mais que s'est-il passé ?
- Nous étions entrain de partir en direction de Dun Scathaig lorsque que Cuuldurach nous a attaqués. J'étais resté en arrière, je t'attendais Chegwidden, comme tu étais à Necht, je savais que tu aurais du retard sur notre rendez-vous. Son attaque a été brutale et soudaine. Pour ma part, j’ai réussi à échapper à son souffle destructeur mais ne me demandez pas comment.
- Mais comment ont fait les Anges pour revenir jusqu'ici ?
- La magie des Empyréens nous a grandement aidés, je crois qu'ils ont pu les ramener dans leur village par la seule force de leur esprit. Heureusement que nous sommes en bonne relation avec ce peuple. Leur sagesse et leur magie sont très puissantes et ils doivent en savoir plus que nous sur Cuuldurach. Allons leur parler.

Et Mugathdem se releva vivement pour se diriger vers la hutte de la gardienne Rasa. Chegwidden et Déliana lui emboîtèrent le pas.

A suivre...
Les trois Anges rejoignirent les nombreuses personnes qui s'étaient regroupées autour de Rasa la cheffe du village empyréen. Celle-ci leva les bras pour que le silence se fasse.

-Ecoutez-moi, peuples d'Hibernia ! L'heure est grave ! Cuuldurach le roi blafard est de retour !
- Oui ça on a remarqué, siffla Dame Déliana d'un ton sec, ce qui lui valut un regard noir de la part de Mugathdem. Mais encore ?
- Je pensais que les Elfes étaient des êtres moins impatients, rétorqua Rasa, Laissez-moi parler et je vous expliquerai tout ce que je sais.

Les murmures cessèrent et Rasa commença son récit.

- Beaucoup d'entre vous savent qu'il y a de nombreuses années, Cuuldurach fut emprisonné dans les collines de Sheeroe grâce à la magie du peuple elfe. Le sort qu'ils lancèrent ne devait jamais être brisé. Or il semble que des apprentis sorciers du peuple d'Albion aient réussi à briser cette magie et maintenant Cuuldurach a recouvré la liberté. Pour le moment il semble avoir élu domicile sur votre reliquaire de Dun Dagda. Mais nous le connaissons… nous savons qu'il ne restera pas longtemps au même endroit et bientôt il viendra semer le chaos sur notre vallée de Bri Leith et notre bonne ville de Caille… Ensuite il se dirigera sur la région de Lough Derg et atteindra Tir Na Nog… Bref, il faut l'arrêter.
- Mais on dit que les guildes les plus importantes, celles qui ont déjà mené plusieurs assauts sur Cuuldurach dans les collines, ces guildes-là se trouvent en ce moment sur Albion.
- Absolument. Dame Brigit vient de m'envoyer un message me le confirmant. On ne pourra pas compter sur ces forces-là. Et de toute façon, leurs plus fins stratèges ne pourraient rien contre Cuuldurach. Lorsqu'il voit la lumière du soleil, il est cent fois plus fort encore que lorsqu'il se trouve dans son enclos.

Déliana sourit d’un air satisfait à Chegwidden. Rasa venait de confirmer tout ce qu’elle avait affirmé. Décidément elle était toujours suprêmement intelligente.

- Alors nous allons tous mourir !, gémit un jeune lurikeen, perché sur une table.
- Non ! Il n'est pas trop tard… mais le temps presse. Ceux qui ont réussi à annuler le sort d'emprisonnement ne savaient pas toute l'histoire… Tant mieux pour nous et tant pis pour eux, continua Rasa. Les magiciens elfes avaient aussi prévu que si le sort était annulé, certes Cuuldurach prendrait son envol sur Hibernia… mais le dragon Golestant ferait de même sur Albion et celui de Midgard également. Il est donc fort probable que règne la plus grande des paniques sur l’ensemble des trois royaumes.
- Quoi ? Vous voulez dire que sur les trois royaumes, les dragons sont en liberté ? demanda Chegwidden
- Oui jolie celte. En ce moment, les trois royaumes doivent être à feu et à sang. Et dans les trois royaumes, il existe pourtant un moyen bien simple de les faire retourner dans leur prison…

Toute l'assemblée était suspendue aux lèvres de Rasa. Cette dernière avait l'air de prendre plaisir à tenir en haleine son auditoire… Après quelques secondes de silence, elle continua :

- Oui bien simple. Il suffit de tirer dans le coeur de Cuuldurach une flèche enduite d'une potion bien spécifique. Cette potion contiendra des ailes d'une libelle géante et celles d'une mygga.
- Et c'est tout ? demanda Déliana. Pourquoi ne le disiez-vous pas plus tôt ?
- Parce que, jeune elfe stupide, les libelles géantes et les mygga n'existent pas dans notre royaume.

Déliana ne sut que répondre à cela et l'un des maîtres guerriers firbolgs lança :

- Voilà donc la grande magie du peuple elfe ! Inventer des potions avec des ingrédients qui n'existent pas ! La belle magie en vérité !
- Espèce d'être inférieur ! Je ne te permets pas d'insulter mon peuple ! s'écria Déliana.
- Du calme, du calme ! Nous n'allons pas diviser nos forces à notre tour, interrompit Rasa. D'ailleurs vous ne m'avez pas laissé finir. Les libelles géantes et les mygga existent. Mais on les trouve seulement en Albion et Midgard. Les libelles géantes vivent dans les marais de l'Ile de Verre. Quant aux Mygga, on peut les trouver non loin de la ville d’Aegirhamn. Nous avons donc besoin d'une personne courageuse pour aller dénicher ces ailes.

Le silence régnait sur toute l'assemblée et tous les visages étaient fixés sur Rasa qui promenait son regard d'une personne à l'autre.

- Alors ? Qui pourra le faire ? Qui en sera capable ?
- Moi ! J'accepte cette mission !!

A suivre...
C'était le champion Mugathdem qui avait parlé et Chegwidden se tourna vers lui avec l'intention de lui demander s'il avait perdu l'esprit. Elle n'en eut toutefois pas le loisir, car Rasa l'en empêcha.

- Je te connais, Mugathdem des Anges Gardiens. Ta vaillance est grande et ton courage à toute épreuve, j'en ai entendu parler. Mais tu devras rester ici hélas.
- Et pourquoi s'il te plaît ?
- En ces heures sombres, Hibernia a besoin d'un autre de tes talents. Tu es forgeron légendaire et la forge de Tir Na Nog n'attend que toi pour la fabrication des armes qui serviront à défendre notre peuple contre Cuuldurach.

Mugathdem allait rétorquer que cette idée était ridicule mais finalement se tut. Rasa devait certainement avoir raison. Déliana, qui voulait se proposer à son tour n'eut même pas le temps d'ouvrir la bouche.

- Toi aussi, belle Déliana ! Je sais que tu ne crains rien, ni personne. J'ai connu ton père, le sorcier Elvar et si tu as le même caractère fier et orgueilleux que lui, je ne donne pas cher des guerriers d'Albion et de Midgard qui croiseront ton chemin… Seulement il me faudrait quelqu'un possédant un peu plus de tact, de finesse et de doigté. Toi sentinelle, dit-elle en désignant Chegwidden, tu seras parfaite !

Chegwidden sentit tous les regards de l'assemblée peser sur elle. Elle hocha la tête.

- Moi ?... Non… Non ne comptez pas sur moi, je n'en suis pas capable.
- Allons voyons ! Je suis sûre du contraire. De toute façon, tu es notre seul espoir. Regarde autour de toi ! Ici il n'y a que des blessés, des gardiens et des maîtres instructeurs qui devront repousser bientôt les attaques du dragon. Belle Chegwidden, nous avons besoin de toi.
- Mais enfin… je serai plus utile ici… je…
- Je te laisse dix minutes pour te préparer et dire au revoir à tes amis. Viens me retrouver dans ma hutte ensuite, rétorqua Rasa d'un ton qui était sans appel.

La foule se dispersa et Chegwidden regarda Mugathdem, cherchant un soutien dans les yeux de son maître de guilde.

- Muga, essaie de la convaincre… Je ne vois pas ce que j'irais faire en Albion et Midgard toute seule. Je ne suis qu'une sentinelle…
- Non Cheg, moi je sais que tu en es capable.
- Quoi ? Tu ne vas pas t'y mettre toi aussi ? Je ne connais pas Albion, je n'ai jamais été plus loin que Caer Benowic…

Mugathdem prit les mains de Chegwidden dans les siennes et la regarda d'un air grave.

- Tu peux le faire, et tu vas le faire Chegwidden. Parce que tu es notre seul espoir. Parce je crois que tu réussiras cette mission comme j'ai cru en toi lorsque je t'ai demandé de partager ma tache. Fais-le Chegwidden, fais-le pour moi puisque je ne peux pas le faire moi-même. Fais-le pour les Anges, fais-le pour Hibernia. Je suis convaincu que tu réussiras.

La jeune femme demeura silencieuse un instant, les mains toujours dans celles de Mugathdem. Elle essaya encore de trouver des arguments, des excuses pour échapper à cette mission qui la dépassait…

- Mais comment feras-tu pour la guilde ? Pour les Anges ?
- Ne te fais pas de soucis, Déliana m'aidera.

Cette dernière observait ses deux maîtres de guilde d'un air ironique.

- Evidemment. Muga d’ailleurs je te rappelle que si tu m'avais nommée à la place de Chegwidden comme je te l'avais demandé, les choses se passeraient différemment…
- Tais-toi Déliana, dit Muga d'un ton sec. Alors ? Chegwidden ?
- Très bien, j'accepte. Je n'ai pas vraiment le choix je crois.
- Tout ira bien, j'en suis certain. Allez venez toutes les deux. Allons rejoindre Rasa dans sa hutte. Le temps presse.

A suivre...
Chegwidden pénétra dans la hutte de la gardienne Rasa, suivie de Mugathdem et Déliana. L'endroit était chaud et confortable. Dans la cheminée un feu brûlait et au-dessus de l'âtre était suspendu un chaudron dans lequel mijotait une potion à la couleur indéfinissable. Rasa les attendait.

- Je vois que tu as pris ta décision, sentinelle. Je t'en remercie.
- Je n'ai guère le choix de toute façon Dame Rasa.
- Non tu as raison. On vient de m'annoncer que Cuuldurach a attaqué tous vos forts frontière. Il sera bientôt sur la vallée de Bri Leith.
- Très bien, je suppose que je devrai me rendre à Druim Ligen pour être envoyée sur Albion et Midgard ?

Mugathdem, l'esprit toujours aux aguets, demanda :

- Mais comment va-t-elle faire pour franchir la forteresse du Château sauvage ? Chegwidden est celte et même avec un déguisement, elle ne réussira jamais à pénétrer dans le royaume d'Albion. Elle sera repérée et tuée par les gardes bien avant d'arriver à la forteresse.
- Tu as absolument raison, jeune Champion. C'est pourquoi je vais lui faire boire cette potion qui sera bientôt prête. C'est une potion à la magie très puissante qui te fera renaître en Albion.
- Vous voulez dire que… tout ce que je possède ici, mon armure, mes armes, mon pouvoir de croissance ne servira à rien là-bas ? demanda Chegwidden.
- Exactement. Quand tu auras bu cette potion, tu deviendras quelqu'un d'autre. Tu deviendras Eolphyne, jeune apprentie moniale. Tu devras t'entraîner afin de pouvoir tuer la libelle géante et lui prendre ses ailes. Lorsque tu auras réussi cette première épreuve, tu boiras à nouveau cette potion et là, tu partiras renaître sur Midgard où tu seras une jeune viking nommée Olvarine, apprentie thane. De même que sur Albion, tu t'entraîneras afin d'être capable de tuer une mygga. Lorsque tu auras réussi, tu boiras encore de cette potion qui te ramènera ici. Ma magie n'est hélas pas assez puissante pour te faire renaître directement sur l'Ile de Verre ou à Aegirhamn, tu devras peut-être voyager longtemps. Il se peut aussi que… que tu ne souhaites pas revenir….
- Comment ça ?
- Si tu tardes trop dans ton entraînement, petit à petit tous tes souvenirs de ta vie sur Hibernia s'estomperont. Tu oublieras ta vie ici, tes combats, tes amours, tes amis, ta guilde.

Chegwidden pâlit à cette idée.

- Il te faudra donc être sur tes gardes, sentinelle. Voilà, la potion est prête, dit la gardienne Rasa en tendant une gourde en peau de varan féerique à Chegwidden. Que nos dieux t'accompagnent.

La jolie sentinelle respira profondément. Elle s'empara de la gourde. Elle regarda Mugathdem et Déliana.

- Veillez bien sur les Anges mes amis. Je reviendrai, je vous le jure.

Elle but deux gorgées de la potion magique et dans un rayon de lumière disparut purement et simplement de la hutte de dame Rasa, sous les yeux ébahis des deux Anges Gardiens.

- Que Lugh lui vienne en aide, dit Rasa. Sa tache sera difficile.

Mugathdem soupira puis regarda Déliana.

- Allez Dame Magicienne… En l'absence de Cheg, je te nomme maîtresse de guilde, car je ne saurai m'occuper de tout cela tout seul. Et tu es priée de ne pas abuser de ce privilège. Il ne durera pas, sois-en bien sûre…
- On ne sait jamais Mugathdem… Chegwidden pourrait ne jamais revenir…
- Je t'interdis de parler comme ça, Déliana. Ton pessimisme ne m'encourage pas.
- Nous verrons bien, Messire Muga… nous verrons bien.
- Oui. En attendant, je pense que tu seras ravie d'utiliser ton pouvoir du vide contre les blafards. Va donc à Druim Cain user de tes sorts. Pendant ce temps, je rejoindrai Tir na Nog et sa forge. Que Lugh te protège Déliana.
- Et qu'il te protège aussi Mugathdem.

A suivre...
Elle ouvrit les yeux.

Elle se trouvait dans l’enceinte d’un château qu’elle n’avait jamais vu. Autour d’elle, se trouvait une foule bigarrée, des marchands, des guerriers, des magiciens, des grand maîtres… Pas très différent de l’agitation qui régnait à Tir Na Nog. Sauf que les vêtements étaient différents, qu’il n’y avait ni elfe, ni lurikeen, ni firbolg. Seulement des êtres humains comme elle.

En face d’elle se trouvait une jeune femme qui lui sourit.

- Bonjour. Je suis sœur Gwendolyn. Qui es-tu ?
- Je m’appelle Chegwid… Elle s’interrompit. Non, c’est vrai, elle n’était plus Chegwidden… Elle regarda ses vêtements. Elle n’était vêtue que d’une pauvre tenue en lin et portait une pauvre masse et un vulgaire bouclier en bois…

Elle reprit rapidement ses esprits.

- Je me nomme Eolphyne, sœur Gwendolyn. Et je souhaite consacrer ma vie à l’Eglise d’Albion en devenant moniale.
- Tu frappes à la bonne porte, ma sœur. Je peux te former dans cette voie mais il faudra être courageuse car c’est un chemin difficile. Mais Dieu est avec toi, ma sœur. Il pourvoira à tous tes besoins.

Chegwidden ou plutôt Eolphyne puisque c’était là son nouveau prénom écouta soigneusement les instructions que lui donnait Sœur Gwendolyn, au demeurant fort sympathique pour une ennemie, songea-t-elle. Elle apprit qu’elle se trouvait au Château Prydwen, non loin de la ville de Camelot. Camelot… Chegwidden avait toujours rêvé de visiter un jour la cité du Haut Roi Arthur. C’était décidément trop grisant.

Quelques minutes plus tard, elle partait à la découverte des collines de Camelot. Elle savait qu’elle devait prendre des forces et s’entraîner rapidement afin de pouvoir tuer et ramener les ailes d’une libelle géante. Elle descendit de la colline sur laquelle était construit Château Prydwen et fit connaissance avec son premier monstre d’Albion. Un brownie. Un brownie qu’elle eut toutes les peines du monde à tuer. Elle se sentait si faible… Elle essaya d’utiliser les styles de Maître Labhras mais c’est comme si ses membres ne répondaient pas à ce que leur ordonnait son cerveau. Elle était redevenue aussi faible et sans expérience que lorsqu’elle avait débuté sa formation de sentinelle, sur les plages de Connla, voilà bien des lunes.

Elle s’assit parterre après avoir finalement réussi à tuer le brownie et éclata en sanglots. Jamais elle n’y arriverait. La tache était trop lourde, trop longue et Mugathdem avait eu tort de lui faire confiance cette fois-ci. Mieux valait boire la potion encore une fois et rentrer directement en Hibernia. Tant pis, elle serait plus utile là-bas, avec toutes ses capacités de sentinelle accomplie…

Bien décidée à cela, elle descendit du côté sud du château pour aller laver son visage baigné de larmes et ses yeux rougis. En se penchant sur l’eau claire, elle aperçut le reflet du visage d’Eolphyne. En fait elle avait conservé les traits de Chegwidden, mais les tatouages bleus de son visage avaient disparu et ses cheveux étaient plus longs et plus foncés. Alors qu’elle passait de l’eau sur son visage, elle songea de nouveau à son royaume Hibernia, à sa guilde… aux Anges Gardiens en train de se battre entre la vie et la mort… aux blafards qui devaient être maintenant aux portes de Druim Cain. Elle revit le visage de Mugathdem, ses yeux plongés dans les siens…

« Tu es notre seul espoir…tu réussiras cette mission….j'ai cru en toi lorsque je t'ai demandé de partager ma tache.., fais-le pour moi… Fais-le pour les Anges, fais-le pour Hibernia… »

Chegwidden releva fièrement la tête. Non, elle ne décevrait pas tous ceux qui comptaient sur elle. Elle réussirait. Il le fallait. Comme elle l’avait redouté lorsqu’elle était à Necht, elle se retrouvait seule, elle ne pourrait compter que sur elle-même. Mais elle réussirait. Coûte que coûte. Il le fallait.

Elle remonta en courant vers le château Prydwen après avoir attaqué trois brownies qui passaient par là et qui n’eurent aucune chance. Puis au garde albionnais qui faisait le guet devant l’entrée du château elle demanda :

- Dis-moi l’ami saurais-tu où je pourrais trouver des libelles géantes ?

A suivre...
Pendant ce temps, à Druim Cain, la défense s’organisait. Tous les gardiens avaient déjà rejoint leurs postes à la forteresse sous la direction de Déliana. Elle s’était postée sur le toit du chemin de ronde et lançait de toutes ses forces, ses sorts de vide sur les blafards. Malheureusement ceux-ci étaient toujours plus nombreux et plus forts et la magicienne savait qu’elle et les gardiens du fort n’allaient pas pouvoir les contenir bien longtemps.

De nombreux Hiberniens avaient rejoint la vallée de Bri Leith. La nouvelle que Cuuldurach avait quitté son enclos s’était répandue rapidement dans tout le royaume et tous ceux qui avaient les moyens de se battre étaient arrivés dès que possible. Malheureusement la plupart d’entre eux ne connaissaient pas la façon de combattre le dragon et de plus en plus souvent, l’air dans toute la vallée devenait aussi brûlant que la lave qui coulait dans les régions reculées de Midgard, signe que Cuuldurach avait une fois de plus soufflé son haleine de feu. Personne ne le voyait, il devait toujours se trouver sur Dun Dagda mais sa force et sa puissance semblaient encore s’être décuplées.

Au village empyréen, l’un après l’autre, les Anges Gardiens ainsi que leurs compagnons de Pax Hibernia revenaient à eux. Leur rétablissement et leur convalescence seraient longs et ils se sentaient tous aussi faibles que des nouveaux-nés. Le druide Sylus, fut le premier à se réveiller.

- Gnark ! Mais que se passe-t-il ici ?
- Nous sommes attaqués par Cuuldurach et ses blafards. Il est sorti de son enclos, lui expliqua la sentinelle empyréenne qui veillait sur les blessés.
- Mais bien sûr… Et moi je suis la Reine Siabra… railla Sylus d’un ton sec.
- Mais je vous jure que c’est vrai Messire Druide…

Sylus tenta de se lever mais n’y réussit pas, il était trop faible. Il commença à tempêter tel un beau diable :

- Mais qu’est-ce qui se passe ici ? J’exige de voir la gardienne du village !
- Oui elle va venir de suite. Mais je vous en prie restez calme. Ca ne sert à rien de s’énerver.

Pendant que la sentinelle tentait de calmer Sylus, les autres Anges Gardiens se réveillèrent également l’un après l’autre. Seylune réussit à sourire à Stumpweill et Eriu, Mannera et Gerwin, tous les autres alliés revenaient péniblement à eux.

La Gardienne Rasa vint les voir et leur expliqua les derniers événements en cours. Pour terminer, elle leur annonça

- Votre dame Chegwidden est partie sur Albion et votre maître Mugathdem se trouve en Tir Na Nog où il a été requis pour fabriquer des armes pour la défense du royaume. En leur absence, c’est Déliana qui s’occupe de la guilde.
- Quoi ? aboya Sylus. Mais ils ont perdu l’esprit ? Bravo les chefs de guilde, je dis bravo !
- Je crois qu’ils ont dû agir dans l’urgence. En attendant essayez tous de vous rétablir comme vous le pouvez. On m’annonce que Druim Cain va tomber sous peu, nous allons devoir tous partir pour Caille. Cuuldurach et ses blafards avancent vite.

Sylus regarda ses compagnons d’un air sombre. Tout ça allait très mal se terminer. Cuuldurach et ses blafards qui envahissaient le royaume… et pire que tout…. Cette peste de Déliana qui avait l'avenir de la guilde entre ses mains… Il avait un très mauvais pressentiment…

A suivre...
En passant le portail magique qui l'avait amenée à l'Ile de Verre, Chegwidden demeura béate d'admiration devant le splendide paysage qui s'offrait à elle. La citadelle de Gothwaith était perchée sur un immense éperon rocheux vers laquelle montait un chemin en pente douce. Derrière, les vagues de la mer venaient se briser avec fracas sur les rochers.

Chegwidden regarda autour d'elle. Elle venait de commencer sa véritable formation de moniale et était vêtue maintenant d'une robe de bure ainsi que de vêtements en cuir. Elle commençait à manier son bâton avec une certaine agilité. Elle avait enfin réussi à économiser quelques pièces d'argent afin de louer un cheval pour se rendre dans les marais d'Avalon. De là, elle avait passé le portail magique qui l'avait amenée à l'Ile de Verre. C'est là qu'elle allait trouver des libelles géantes, tous les gens à qui elle avait demandé, lui avaient assuré qu'elle devait se rendre ici.

Perdue dans ses pensées, Chegwidden ne se rendit pas tout de suite compte que quelqu'un lui tournait autour depuis un petit moment. Au bout d'un moment elle se retourna brusquement et tomba nez à nez avec une représentante du peuple des Nécrites. Elle en avait déjà vus au combat mais jamais d'aussi près. La nécrite s'adressa d'un ton guilleret à Chegwidden.

- Bonjour moniale. Je m'appelle Nécra.
- Bonjour, moi je suis Eolphyne.
- Cela fait un moment que je t'observe. Je suis prêtresse d'Arawn. Voudrais-tu te joindre à moi et mon amie Gwilianne une jeune ménestrelle qui va arriver sous peu du continent. Nous voulons aller chasser les créatures qui peuplent les marais de l'Ile de Verre.
- Avec joie Nécra, je suis enchantée de te connaître.
- Voilà Gwilianne. Alors allons-y.

Gwilianne était une jeune bretonne blonde et enjouée qui jouait de son luth d'une façon ravissante. Les trois apprenties trouvèrent rapidement leur rythme et leur chasse fut plus que fructueuse. Elles atteignirent vite toutes les trois leur prochain cercle de formation et retournèrent à la citadelle afin de voir leurs maîtres respectifs. Elles se retrouvèrent quelques minutes plus tard, à l'entrée de la forteresse.

- Je viens d'apprendre un nouveau sort, s'écria Nécra d'un ton joyeux. Il faut tout de suite que je l’essaie. Venez les filles !

Elles coururent à nouveau dans les marais. Nécra se concentra un lança un sort bleuté qui eut pour effet d'attirer vers elle toutes les créatures qui se trouvaient autour d'elle. Chegwidden et Gwilianne n'eurent d'abord aucune peine à se débarrasser des monstres qui les attaquaient. Nécra était ravie.

- Regardez, c'est splendide ce sort ! C'est moi la plus forte ! Je suis la maîtresse du monde !
- Oui eh bien la maîtresse du monde… tu peux l'arrêter ton sort maintenant s'écria Gwilianne qui commençait à faiblir sous les attaques des monstres.
- Euh… mais euh… comment on fait pour l'arrêter ce sort ? gémit Nécra.
- Fuyez ! s'écria Gwilianne en pinçant les cordes de son luth.

Les trois apprenties guerrières réussirent à atteindre le village de Caifelle, poursuivies par un troupeau de monstres de toutes sortes. Fort heureusement, les gardes réussirent sans peine à se débarrasser de leurs assaillants.

Chegwidden essoufflée s'assit parterre pour récupérer ses forces. Elle observa Nécra et Gwilianne puis se mit à rire à gorge déployée, bientôt accompagnée par ses deux nouvelles amies. Elle se sentait bien avec elles. Elle se sentait bien sur cette terre d'Albion. Elle commençait à oublier les souvenirs de sa vie sur Hibernia.

Elles repartirent en chasse quand soudain Chegwidden aperçut au loin plusieurs créatures étranges qui volaient en groupe au-dessus du cadavre d'un chien des mers. Elle fronça les sourcils et demanda :

- Qu'est-ce que c'est ?
- Ce sont des libelles géantes, dit Gwilianne. La légende dit qu'on utilise leurs ailes pour la fabrication de potions contre les piqûres de lézards venimeux.
- Ah oui ? tiens donc…

Un déclic se fit soudain dans le cerveau de Chegwidden-Eolphyne. Elle entendit la voix de la gardienne Rasa dans sa tête. Tout de go, elle dit à Nécra et Gwilianne :

- Il me faut leurs ailes…
- Pourquoi ? Tu n'as pas été piquée.
- Je sais. Mais j'en ai besoin.

Et la jeune apprentie moniale fonça tout droit vers l'essaim de libelles, suivie de la jeune ménestrelle et de la prêtresse d'Arawn.

Le combat fut long et difficile mais les trois filles se battirent avec courage. Finalement, sans trop savoir comment, Chegwidden se retrouva avec deux paires d'ailes. Soudain tout lui revint en mémoire. Elle avait réussi la première partie de sa mission. Elle fouilla dans sa besace et en sortit la gourde en peau de varan féerique. Elle se tourna vers Nécra et Gwilianne.

- Nos routes se séparent ici les filles. Ne me demandez pas pourquoi mais je dois vous quitter. Que Lugh vous protège toutes les deux.
- Lugh ?
- Oui enfin Dieu, si vous voulez… Merci pour tout et si un jour vous partez combattre le royaume d'Hibernia, tachez d'éviter les sentinelles.

Et sous le regard surpris de Nécra et Gwilianne, Eolphyne but sa potion et disparut encore une fois dans un rayon de lumière.


A suivre...
Sur la place de la forge à Tir Na Nog, Mugathdem lança rageusement une brassée d'épées et une pile de boucliers aux pieds du Grand-maître forgeron. D'heure en heure, la quantité d'armes qu'il avait fabriquées augmentait. Tout comme la colère du jeune champion d'ailleurs.

Cela faisait maintenant près de deux jours qu'il n'avait pas quitté la forge de Tir Na Nog. Comme plusieurs autres forgerons, il était coincé dans la capitale à fabriquer des armes. Et ça ne lui convenait pas du tout ! Lui, maître de la guilde des Anges Gardiens aurait dû être au front en train de combattre et au lieu de ça, on le forçait à fabriquer des armes dont il savait pertinemment qu'elles ne serviraient pas à grand-chose contre le souffle brûlant de Cuuldurach.

Dans la capitale, on n'avait reçu que peu de nouvelles du front. Mugathdem ne savait pas vraiment ce que devenaient ses Anges. Il avait entendu dire qu'ils avaient réussi à rejoindre Caille en compagnie des Empyréens mais n'avait aucune idée de leur état de santé. Etaient-ils rétablis ? Et Déliana ? Comment s'occupait-elle d'eux ? Il fronça les sourcils et se prit à regretter la décision qu'il avait eue de confier provisoirement la guilde à la magicienne eldritch. "Advienne que pourra" se dit-il. Sylus, Kalkydra, les autres officiers, Sylderon, Eriu et Polariz, auront tôt fait de s'occuper de Déliana si celle-ci commençait à avoir des rêves de grandeur.…

Il se mit à faire les cent pas devant la forge. Cette inaction… cette attente, c'était insupportable… Non loin de lui, il vit passer deux sentinelles de la guilde de la Meute et ses pensées revinrent sur Chegwidden. Où était-elle, Cheg en ce moment ? Serait-elle capable de revenir ? Il fallait bien y croire. Il fallait qu'elle revienne. Ils avaient tous besoin d'elle. Il se prit également à regretter d’avoir poussé la sentinelle à cette mission. Saurait-elle la mener à bien ? Et si elle ne parvenait pas à revenir en Hibernia ? Et si, comme l'avait dit Dame Rasa, elle ne souhaitait pas revenir ? Et si…

Il fut interrompu dans ses sombres pensées par l’arrivée de la jeune Mandolyne, la barde de sa guilde. Elle arriva en courant vers lui :

- Mandolyne ? Alors quelles sont les nouvelles ? Comment vont les Anges ?
- Les nouvelles ne sont pas bonnes, pas bonnes du tout Mugathdem. J’arrive de Caille…. Cuuldurach a changé de domicile, il campe maintenant à Druim Cain, la forteresse est une vraie ruine. Quant aux Anges… la plupart des blessés ont retrouvé leurs forces et ils sont prêts au combat. Mais…

La jeune barde hésita :

- Mais quoi ? Parle !
- Eh bien… ils sont prêts au combat mais euh… nous avons perdu la trace de Déliana.
- Quoi ?
- Elle a dit qu’elle voulait affronter seule le dragon. Qu’elle s’en sentait capable. Elle est restée à Druim Cain… On ne sait pas ce qu’elle est devenue… Muga… attends !

Le champion avait jeté au loin son marteau de forgeron pour se saisir de son dernier chef-d’œuvre, un superbe marteau de guerre capable selon ses dires, de réduire en tas de gravier un troll adulte. Il passa en trombes devant le grand-maître forgeron, suivi de Mandolyne. Le grand-maître hurla :

- Mugathdem AngeCeleste ! Vous devez demeurer sous mes ordres ! J’en informerai Lovernios en personne ! Vous serez jugé pour traîtrise et désertion !

Mais le champion aux cheveux roux n’entendait plus. Il venait déjà de franchir le portail de la capitale en direction de Mag Mell.

A suivre...
La jeune apprentie thane, Olvarine rejeta dans son dos ses deux tresses blondes avant de s'attaquer avec concentration à un osseux. Armée d'une hache presque deux fois plus grande qu'elle, qu'elle avait encore un peu de mal à manier, elle terrassa l'osseux en trois coups brusques et bien sentis.

Elle s'était retrouvée voilà quelque temps dans le petit village de Vasudheim. Elle ne savait pas pourquoi elle était là. Tout ce qu'elle savait, c'est qu'elle voulait guerroyer, mener la vie dure à tous ces monstres qui peuplaient cette terre de Midgard. Tous les nains, trolls et autres kobolds qu'elle avait croisés jusqu'à maintenant semblaient paniqués. Ils parlaient tous d'un dragon qui avait envahi la région frontalière et dans tous les villages qu'elle traversait, elle avait vu les grands guerriers trolls comme les magiciens kobolds réunis devant les forges et les tables d'alchimie. Tous ils se préparaient à la guerre.

Olvarine rejoignit Louargent, le compagnon Viking qu'elle avait rencontré quelques jours plus tôt dans la forêt de Myrkwood. Charmant viking blond aux yeux bleu des glaciers, il se destinait à la carrière de guerrier. Ils avaient rapidement sympathisé et Olvarine avait suivi Louargent dans son voyage et son entraînement. L'apprenti guerrier était séduisant et le coeur de la petite thane n'était pas insensible au charme de ce valeureux et courageux viking.

Ils étaient partis tous deux voilà deux jours vers la cité d'Aegirhamn. Sans trop savoir pourquoi Olvarine adorait s'attaquer aux Mygga, ces drôles de bestioles volantes qui infestaient la région. Elle avait recueilli dans sa besace une quantité non négligeable de leurs ailes qu'elle vendrait afin de gagner de l'argent et progresser ainsi dans l'art de la guerre.

Lorsque la nuit tombait et qu'ils s'endormaient tous les deux devant le feu allumé pour éloigner les bêtes sauvages, Olvarine faisait des rêves étranges… Elle rêvait de grandes et vastes prairies et d'un lac en forme de lune, de créatures étranges qui n'existaient pas dans les contrées de Midgard, d'arbres qui bougeaient et qui parlaient, de lynx et de loups apprivoisés. Elle rêvait de créatures qu'on aurait dit en bois, dotées de la parole et qui faisaient pousser des sortes de champignons qui semblaient leur obéir… Elle se voyait au milieu d'une assemblée composée d'hommes et de femmes dont le visage était peint de tatouages bleus, de personnages longs et élancés d'une beauté mystérieuse, de petits êtres vifs et enjoués, encore plus petits que le plus petit des kobolds vivant dans son pays, et d'immenses guerriers imposants à la voix gutturale. Et tous ces gens qui portaient sur leur cape le même emblème bleu et blanc sur lequel figuraient deux serpents entrelacés…

Cette nuit-là, Olvarine rêva encore. Elle rêva d'une grande bataille. Elle était perchée sur les murailles d'un fort assiégé. Elle était habillée d'une armure d'écailles rouge, armée d'une faucille et d'un bouclier. La bataille fut terrible et quand tout fut terminé, elle rêva de la pluie qui tombait sur les corps ensanglantés, et des larmes de désespoir qui coulaient sur son visage. Puis elle rêva d'un homme, un guerrier celte à l'armure resplendissante qui la prenait tendrement dans ses bras, qui l'apaisait, qui la rassurait, qui la consolait. Alors qu'elle séchait ses larmes, la tête appuyée contre son épaule réconfortante, elle l'entendit murmurer doucement à son oreille :

- Reviens, belle Chegwidden, nous avons tellement besoin de toi…

Olvarine se réveilla en sursaut, le rêve encore vivace à son esprit, la voix de l'homme encore vibrante à ses oreilles. La nuit était noire, le feu était éteint et Louargent dormait paisiblement à ses côtés. La petite thane se leva vivement pour tenter de rallumer le feu. Elle fouilla dans sa besace et en sortit une gourde à l'aspect étrange dont elle ignorait la provenance. Elle la déboucha afin d'en sentir le parfum mais il n'y en avait aucun…

Elle secoua doucement l'épaule de Louargent qui se réveilla rapidement.

- Je dois m'en aller, mon beau viking.
- Là ? Tout de suite ? Mais il nous reste encore beaucoup de chemin à parcourir, ma jolie petite Thane…
- Je sais Louargent mais je crois que ce n'est pas mon destin. Me pardonneras-tu de te laisser ainsi continuer seul ?
- S'il en est ainsi, va. Mais je te regretterai ma douce.

Olvarine déposa un baiser sur la joue du beau Louargent. Puis elle but deux gorgées de la potion contenue dans sa gourde et dans un rayon de lumière orangée, disparut aux yeux du viking guerrier.

A suivre...
La petite ville empyréenne de Caille, d'habitude si calme et paisible débordait d'agitation. C'était la panique. Les guerriers hiberniens, les magiciens, les ovates et les rôdeurs tentaient de regrouper leurs forces afin d'aller combattre le dragon Cuuldurach. Mais en l'absence des plus grands chefs de guerre qui n'étaient malheureusement pas encore revenus d'Albion, il était impossible de faire régner l'ordre et la discipline. Tout le monde parlait en même temps. Tout le monde avait une tactique différente, tout le monde n'en faisait qu'à sa tête. Et pendant ce temps-là, les démons blafards avançaient toujours, pendant ce temps-là, l'haleine de Cuuldurach soufflait de plus en plus souvent.

La guilde des Anges Gardiens s'était regroupée un peu à l'écart au nord de la tour de Caille. Livrés à eux-mêmes en l'absence de Chegwidden et Mugathdem, la discussion était vive parmi les Anges.

- Que faisons-nous pour Déliana ? demanda la gentille sentinelle Eriu. Je suis d'avis qu'il faut essayer de la retrouver.
- Je suis d’accord, dit Sylderon.
- Déliana est morte ! Je suis à peu près certain que nos dieux et déesses lui ont rendu la vie et que sa tombe orne maintenant la forteresse de Druim Cain. Qu'elle se débrouille ! Nous n'avons pas besoin d'elle ! s'écria Noreg le firbolg protecteur.
- Je suis d'accord ! tempêta Dyonisos. Je ne sais pas ce que Mugathdem a mis dans ses crêpes le jour où il a nommé Déliana ! Que l'âme de cette magicienne scélérate aille pourrir au plus profond des Abysses ! Non, ce qu'il faut maintenant, c'est trouver une stratégie contre Cuuldurach !
- Et Chegwidden ? Est-ce qu'elle rentrera un jour ? On n'a toujours aucune nouvelle d'elle, demanda Kylaan.
- Le temps presse mes amis. Il nous faut absolument agir ! lança Kalkydra. Nous avons envoyé Mandolyne chercher Mugathdem. Mais nous ne pouvons pas être partout, il faut qu'on s'organise…
- Je suis quand même d'avis qu'on devrait partir à la recherche de Déliana, insista Eriu.
- Non ! Le plus urgent, c'est Cuuldurach.
- Nous ne pouvons rien faire tant que Chegwidden n'est pas revenue…
-Silence tout le monde !

Les Anges Gardiens cessèrent leurs cris et le silence se fit d'un coup autour de Mugathdem qui venait d'arriver vers eux, suivi de Mandolyne. Le maître de la guilde avait le regard sombre et la mâchoire serrée. Muga s'énervait très rarement mais quand cela arrivait, chaque Ange savait qu'il fallait se taire… et écouter ce que le maître avait à dire.

- Bon ! L'heure est grave, récapitulation de la situation : Je viens de déserter la forge et je risque d'avoir ma tête mise à prix par Lovernios pour traîtrise. Nous n'avons aucune nouvelle de Chegwidden… je ne sais même pas si elle reviendra un jour parmi nous. Déliana a disparu et Cuuldurach s'approche toujours plus de nous.
- A part ça, tout va bien, lança Sylus d'un ton ironique.
- J'ai besoin de vous tous, membres de la guilde des Anges Gardiens ! Je veux que vous rassembliez tous les membres de la guilde, ici à Caille. Je veux que vous retrouviez Déliana, s'il le faut, j'irai la chercher moi-même ! Et où se trouve Ajalon ? Ca fait quelques semaines que nous ne l'avons pas vu. Retrouvez-le moi également !
- Il doit traîner quelque part à Lough Gur, dit Kalkydra, sûrement en train de faire la conversation aux pookas.
- Alors faites le nécessaire pour qu'il nous rejoigne, dès que possible. Mandolyne, cours jusqu’à Innis et ramène-le moi, je vais avoir besoin de lui. Maintenant formez les groupes nécessaires. Nous allons essayer de contenir un peu ces blafards.
- Mais nous avons déjà essayé, dit Pekromis. Ils avancent trop vite pour nous.
- Eh bien, nous continuerons bon sang ! Nous n'allons pas mourir sans combattre !

Pendant que Mugathdem supervisait la formation des différents groupes, une sentinelle empyréenne arriva en courant vers les Anges :

- Messire Mugathdem, j'ai une bonne et une mauvaise nouvelle pour vous.
- Je t'écoute ! Mais fais vite ! Et commence par la bonne nouvelle !
- Votre dame Chegwidden est de retour.

Un grand sourire illumina le visage du champion.

- Enfin ! Où est-elle ?
- En compagnie de Dame Rasa. Mais… La mauvaise nouvelle, c’est que dame Chegwidden est inconsciente pour le moment… La Gardienne Rasa ne sait pas si elle se réveillera un jour.

A suivre...
Non loin d’Innis Carthaig, Ajalon AileAzur, protecteur au grand cœur, observait d’un œil attentif l’évolution d’un superbe pooka.

L’homme et l’animal se jaugeaient, s’examinaient. Ils se connaissaient tous les deux. Cela faisait des jours qu’Ajalon traquait le magnifique étalon. Le plus grand chasseur de pooka de tout le royaume d’Hibernia connaissait par cœur le moindre mouvement de l’animal, le moindre frémissement de ses naseaux. Depuis le temps qu’il le traquait, Ajalon savait lire dans les yeux du splendide étalon, il commençait à comprendre le langage des pooka.

Le pooka hennit d’une façon un peu moqueuse puis baissa la tête pour brouter quelques herbes. Ajalon choisit ce moment pour attaquer mais à cet instant, l’étalon noir releva brusquement la tête et Ajalon, surpris, entendit une voix dans sa tête :

- Ne m’attaque pas celte ! Ce serait ton dernier combat et ton destin n’est pas de mourir sous mes sabots !

La première surprise passée, Ajalon fut ravi de constater qu’enfin, après des mois et des mois de chasses au pooka, il savait enfin communiquer avec eux. Sa tendre Nesmériré serait fière de lui lorsqu’ils se reverraient. Le jeune protecteur éclata d’un rire gai en face de l’étalon noir.

- Moi ? Mourir ? Et tué par toi ? Allons, tu présumes trop de ta valeur Pooka. N’as-tu jamais entendu parler de moi ? Je suis Ajalon AileAzur, protecteur de Nesmériré et du royaume, chasseur de pookas. Tu mourras de ma main, il faut t’y faire.
- Non Ajalon AileAzur, tel n’est pas mon destin. Ni le tien d’ailleurs. Il n’est plus temps pour toi de chasser mes pairs. N’entends-tu donc pas les murmures de toutes les créatures d’Hibernia ? Le royaume est en grand danger et toi, pauvre inconscient, qui te dit protecteur de ton royaume, tu t’acharnes encore sur nous !
- Quel est le danger qui pèse sur Hibernia ? A part les incursions de ces chiens d’Albionnais et de ces bâtards de Trolls, je ne vois pas ce que….

L’étalon noir hennit de plus belle.

- Toutes les créatures d’Hibernia parlent entre elles, Ajalon AileAzur. Pendant que vous autres, celtes, elfes, lurikeens et firbolgs vous vous acharnez à nous combattre, nous nous murmurons des histoires. Nous savons tout ce qui se passe, partout sur la terre d’Hibernia. Le royaume est grand danger et toutes les créatures vivantes de la belle Hibernia vont disparaître…
- Mais que se passe-t-il donc ? Vas-tu me enfin me le dire ?
- Cuuldurach est sorti de son enclos, celte. Il a pris son envol suivi de son armée de blafards et si personne ne l’arrête, vos terres, vos lacs, vos arbres, votre flore et votre faune, tout disparaîtra. Ne feras-tu rien pour empêcher ça ? Continueras-tu encore et toujours à t’acharner sur nous ?

Ajalon serra les poings. Cuuldurach le roi blafard… Il se souvint de la promesse qu’il avait faite un jour à sa douce et tendre Nesmériré, l’amour de sa vie, sa belle, son âme sœur. Il avait juré que pour elle, il mènerait le plus grand des combats, qu'il trouverait la force de mener la plus grande des quêtes. Et il avait engagé sa parole. Il avait juré sur son âme éprise de combattre le dragon. Il regarda le pooka.

- Tu as raison Pooka. Il n’est plus temps pour moi de te combattre. En tout cas pour le moment. Je me dois maintenant à mon royaume. J’irai donc combattre Cuuldurach. Mais n’oublie pas une chose… Je reviendrai terminer cette conversation.
- Nous verrons bien Ajalon AileAzur, nous verrons bien.

Pour la première fois depuis bien longtemps, le protecteur s’inclina respectueusement devant le pooka puis tourna les talons pour se diriger vers la ville d’Innis Carthaig. Il y trouva là-bas Mandolyne qui était venue le chercher. Ensemble ils louèrent un cheval pour se rendre le plus vite possible à Caille.

Pendant ce temps, Cuuldurach, le roi blafard, le dragon d’Hibernia déploya ses ailes et s’envola de la citadelle de Druim Cain. Il était temps pour lui d’avancer. Sa prochaine étape serait Caille la capitale du peuple empyréen. Ces chiens d’elfes l’avaient emprisonné à Sheeroe depuis des années. Il était temps pour lui de se venger. Il était enfin temps pour lui de régner en maître sur Hibernia la verte.

A suivre...
 

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