En fait, plus j'y réfléchis, et plus je me dis que la retraite retardée, mettons à 70 ans (n'allons pas jusqu'à 75, comme certains des lycéens de ce thread le voudraient) aura de grandes chances d'être bien plus intéressante financièrement pour les vieux. Trois cas de figure :
1 - Le vieux est fonctionnaire. Comme chacun sait (lire les épisodes précédents, pour ceux qui penseraient encore qu'il existe des fonctionnaires qui bossent), il ne foutait déjà pas grand chose avant. Ce sera encore bien pire, évidemment. Il sera même rarement là, les arrêts maladie à cet âge étant monnaie courante, voire les incapacités de travail, encore plus courantes. Les 3/4 du temps, il n'aura donc même plus à venir bosser, mais touchera sa paye complète, bien plus intéressante qu'une modeste retraite. Et quand il viendra, ce sera pour ne rien faire. Du tout. L'état, donc les contribuables, paiera ses mois de longue maladie ou son séjour dans son bureau à téléphoner à sa femme, son médecin ou son bookmaker.
2 - Le vieux est dans le privé. Le pur et dur, celui où on l'on se retrouve licencié tous les 5 à 10 ans (stats demain pour ceux que ça intéresse). Il a 80 chances sur 100 de se retrouver au chômage à un moment ou à un autre entre l'âge de 55 et 65 ans. Il ne retrouvera bien sûr pas de boulot, étant considéré comme improductif par rapport à un trentenaire et bien trop cher par rapport à un petit jeune. Qui plus est, il sera largement sous-diplômé pour son époque, et pour tout dire assez défraîchi. Il vivra donc tranquillement sur les ASSEDIC en attendant la retraite officielle, en priant pour qu'elle n'arrive pas trop vite, puisqu'il touchera plus en étant au chômage (étant en fin de carrière, ses indemnités mensuelles seront conséquentes). L'état, donc les contribuables, paiera son chômage, et il pourra tranquillement regarder la télé.
3 - Il est dans une grande boîte privée, le genre où l'on fait toute sa carrière ou presque. Pas vraiment de risque de se retrouver à la porte. Mais évidemment, comme dans toutes les grandes boîtes de ce genre, il aura réussi à atteindre une place où il n'aura plus grand chose à faire (de toute façon, il sera complètement dépassé, malgré les stages de remise à niveau tous les 5 ans) ou si ce n'est pas le cas, on l'aura volontairement mis au placard. Il aura aussi un salaire confortable, augmenté de primes substantielles (dans les très grandes boîtes, les syndicats ont du pouvoir). Sa productivité sera quasi-nulle, il coûtera cher à l'entreprise. Evidemment, il faudra bien compenser quelque part, l'ensemble des employés en pâtira donc d'une manière ou d'une autre (heures sup' infernales, primes ridicules, augmentations rares et chiches). Tout le monde, de la direction aux employés, comptera les jours qui le séparent de la retraite (et surtout le 30/35 ans qui fait le plus gros de son boulot pour la moitié de son salaire pendant que l'autre se tourne les pouces). Pas de chance, il faut le garder jusqu'à 70 ans.
Oui, finalement, repoussons l'âge de la retraite. Ce sera une calamité pour le budget de l'état, mais une bonne affaire pour 95% des vieux (j'excepte avec beaucoup d'optimisme et de générosité 5% de vieux qui seront productifs, dynamiques et jamais malades).
P.S. : Pour ceux qui sentiraient la présence de quelques morceaux de vécu dans le très cynique et tongue-in-cheek raisonnement ci-dessus, j'ai pu étudier en détail les cas 2 et 3 durant mes 28 années de salariat exercées au sein d'une quarantaine d'entreprises de toutes tailles. Et dans la boîte où je suis actuellement, qui correspond à peu près au cas 3, bien qu'elle n'emploie que 65 personnes hors stagiaires, CDD et autres intermittents, il y a 6 personnes de plus de 55 ans dont le profil correspond assez bien à ma description (en fait, c'est même encore pire, mais brisons là).