Bon, je précise, parce que les gens n'ont pas l'air de bien comprendre ce que j'entends par là .... d'ailleurs, la phrase n'est même pas de moi ....
Donc, "l'amour est le contraire de la peur" est la conclusion d'une réflexion que mène un des personnages du livre dont je parlais.
Tout d'abord, il faut que je rappelle ce qu'il appelle la peur. Il fait référence à "la peur de la mort, la plus élémentaire de toutes" celle qui circule dans notre sang comme dans tout être vivant, homme ou bête". De la même façon, étant guerrier, il parle fréquemment du daimon , un état de folie qui s'empare des plus faibles esprits lors d'une mêlée et les fait fuir.
Pour lui, la peur n'est pas quelque chose de fondamentalement mauvais, puisqu'elle est "naturelle". Toutefois, il cherche à comprendre ce qui pourrait être le contraire de la peur : ce qui fait que dans une phalange, par exemple, chacun reste à son poste, défendant son voisin de droite avec son bouclier, et avançant malgré la peur.
Au cours d'une discussion avec les jeunes gens sous sa responsabilité, ils confrontent leurs idées ... les rejettent ... s'élancent sur de nouvelles pistes ....
Ainsi, tout d'abord, leur vient à l'esprit "la peur du déshonneur". Mais n'est-ce pas là dire que le contraire de la peur est le contraire du contraire de la peur ?
Puis, ils parlent d'un autre guerrier, un champion, qui fait figure d'égérie du courage ... Mais, le maître dit que son courage est "imparfait" puisqu'il ne s'agit que d'un "désir de gloire".
Enfin, ils pensent trouver la réponse en disant que "le courage supérieur réside dans ce qui est féminin". En effet, par opposition au mâle qui ne respire, halète et désire que meurtres, pilleries et viol, la femme ne fait que donner la vie. Or, ce sont de ces femmes, ces vasques de vie, que l'on demande de faire le sacrifice de ceux qu'elles aiment pour aller faire la guerre : on leur enlève mari, père, enfant, frère ... et elle ne peuvent que se conformer à l'usage. D'autant plus , que "ce qui prête de la noblesse à leur comportement est qu'elles agissent ainsi au nom d'une cause plus élevée, plus noble".
Mais pourtant, alors que le sujet était de savoir ce qu'était le contraire de la peur, les interlocuteurs n'ont fait que de parler des différentes forme de courage ... ce qui ne peut évidemment pas convenir comme contraire de la peur.
C'est donc, plus tard, dans le livre et dans les évènements que l'instigateur du débat leur fait part de sa conclusion. Elle lui vient après entendre deux autres personnes parler.
L'une d'elle est un marchand qui décide de mourir sur le champ de bataille aux côtés des spartiates alors que rien ne l'y force. Et pourtant, rien ne l'y force. Seulement "comment pourrais-je partir alors que ces enfants sont ici ?" dit-il en désignant des spartiates à peine sortis de l'adolescence sur le champ de bataille ( dont tout le monde sait que les spartiates ne sortiront pas vivants ).
L'autre personne, est également un étranger de Sparte, mais qui combat aux côtés des pairs depuis son plus jeune âge. C'est un Scythe. Il explique que dans son pays, sa culture, ce qui se rapproche le plus du "divin" sont les sentiments, "ce qui est invisible". Il explique alors que pour lui, la façon de se battre des Grecs lui avait tout d'abord paru stupide. Puis, il rappelle à Dienekès, son ancien maître, qu'ils avaient vu une phalange adverse prendre la fuite sur un champ de bataille. "Existe-t-il quelque chose de plus bas, de plus dégradant sous le soleil qu'une phalange qui se désintègre de peur ? Cela donne honte d'être un mortel, d'être aussi ignoble en face de l'ennemi. Cela viol les lois suprêmes des dieux. Ah, mais à l'opposé, une ligne qui tient ! Qu'est-ce qui est plus beau, plus noble !"
Le Scythe explique ensuite avoir compris que la manière brutale de s'entraîner des spartiates n'avait pas pour but de durcir les jeunes gens au combat, mais avant tout de créer un "ciment". C'est ce 'ciment' qui fait que la phalange tient. C'est ce "ciment"' qui fait vivre la nation spartiate.
Puis, il déclare : "Qu'est-ce qui est plus noble que de se tuer ? Pas littéralement, pas avec une épée dans le ventre, mais de tuer le moi égoïste à l'intérieur, cette partie de soi qui ne vise qu'à sa conservation, qui ne veut que sauver sa peau. C'est la victoire que vous, Spartiates, avez remporté sur vous-mêmes. C'était le ciment, c'était ce que vous aviez appris et qui m'a fait rester".
Il précise enfin que pour lui, si les spartiates admirent tant le chant et les arts lui étant associés, c'est qu'ils ont compris que "les vertus sont comme la musique, elles vibrent sur des registres plus élevés, plus nobles", des registrent qui "touchent le coeur".
C'est donc après tous ces échanges que Dienekès qui avait posé la question initiale, vint à déclarer :
"L'opposé de la peur, c'est l'amour".
Vous n'êtes pas obligé d'adhérer à ce point de vue, mais il m'a semblé que vous n'aviez pas très bien saisi les nuances à apporter à la phrase sortie de son contexte, et c'est pour cela que j'ai senti le besoin de donner ces détails.
De plus, il faut bien comprendre qu'il s'agit là de la notion de l'amour la plus large qui soit. Elle s'étend à la patrie, la famille, les frères de combat, les idéeaux de liberté et de démocratie. Bref, pas de sauver la vie d'une donzelle que l'on a croisé la semaine d'avant.
Merci à ceux qui auront lu et surtout compris ce texte ...
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