La déclaration

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"Meriel, Meriel, réveillez-vous !"

La voix de Sheela lui parvenait difficilement, on la secouait avec détermination. Elle tenta d'ouvrir les yeux mais ses paupières lui semblaient formées de plomb.

"Par la magie d'Avalon, mais revenez donc à vous mercenaire !"

Décidément, l'idée qu'on lui en voulait fit son chemin dans son cerveau embrumé. Soudain, un liquide glacé entra en contact avec son visage, Meriel se redressa d'un bond avec un cri rauque, le visage dégoulinant d'eau que la cabaliste lui avait lancée à la figure.

"Voilà qui est mieux, j'ai cru que je n'arriverai pas à vous faire revenir..."

Sa tête lui faisait un mal de chien et le sol tournait et tanguait dangereusement. Elle ouvrit les yeux et fut aveuglée par le soleil de midi à son zénith qui pénétrait le feuillage des arbres sous le couvert desquels elle se tenait. Sans prévenir, son estomac se tordit violemment et elle n'eut que le temps de se pencher sur le côté avant de rendre le peu qu'elle avait grignoté à la va-vite ce matin avant de partir à la recherche de Sheela.

"Vous avez de la chance que votre maudite potion m'ai rendue malade", gronda Meriel à travers ses mâchoires crispées, "sinon l'eau m'aurait à peine touchée que vous auriez goûté à mes lames...
- Mais bien sûr
", rétorqua Sheela éclatant d'un rire cristallin. "Tenez, buvez donc cette eau fraîche pour vous remettre, il en reste encore au fond de la gourde", ajouta-t-elle malicieusement.

Meriel lança un regard noir en direction de la magicienne mais attrapa la gourde et prit une longue gorgée d'eau. Elle se sentit de suite revigorée, son mal de tête et ses maux d'estomac s'atténuant rapidement. Alors que la jeune fille se remettait de la transe, Sheela lui adressa la parole d'une voix douce.

"Il faut que je connaisse le contenu de votre rêve pour l'interpréter correctement. Mais pour cela je dois pénétrer votre esprit et votre coeur. Non, si vous me le racontiez ce ne serait pas suffisant", rajouta-t-elle prévenant la remarque de Meriel. "Vous devez me donner votre permission de sonder votre âme, mais je vous préviens, si tel est votre choix, je serais à même de connaître tout ce que vous ressentez, tout ce que vous cachez, même au plus profond de votre coeur. Acceptez-vous ?"

Meriel hésita longuement. D'un côté elle souhaitait comprendre ce qui lui arrivait, d'un autre se livrer toute entière sans exception la rebutait. Toutefois il n'y avait pas qu'elle qui était concernée, une autre vie, si on pouvait toujours parler de vie, était en jeu. Poussant un soupire, la jeune fille acquiesça.

L'Avalonnienne pris la main de Meriel dans la sienne et porta l'autre à son cou. Elle dégrafa le haut de sa robe, laissant apparaître un collier façonné dans un métal inconnu, orné d'une pierre d'une couleur indéfinissable qui changeait sans cesse, rappelant étrangement la couleur de ses yeux. Elle ferma les yeux tout en portant à la main au collier. Pendant de longues minutes, la cabaliste resta immobile, seul le léger bruit de sa respiration indiquait qu'elle était bien un être vivant et non une statue. Finalement, elle rouvrit les yeux et lâcha Meriel qui lui lança un regard interrogateur. Sheela regarda tristement la jeune fille à l'air anxieux et sa voix douce brisa le silence.

"Il n'est plus", murmura-t-elle.
"Il est...
- En quelques sortes oui, peut-être pas physiquement, mais son âme a presque complètement quitté notre monde. Voyez-vous, la potion qu'a concoctée cette sorcière est un charme très puissant. Elle sépare l'âme de l'enveloppe corporelle de la victime à qui on l'administre. La victime devient un zombie qui obéit aux ordres de son maître sans réfléchir. Visiblement, d'après ce que j'ai vu, votre Maître est devenu une machine à tuer pour le compte de l'homme aux tatouages.
- Mais c'est vraiment la réalité ? je n'arrive pas à croire que cela se soit réellement passé...
- Je pense que vous faites ces rêves à cause du lien qui vous unit.
- Quel lien ? Il n'y a aucun lien entre nous !
", s'exclama Meriel, secouant vigoureusement la tête de droite à gauche.

"Bien sûr qu'il y a un lien, sinon son âme et son coeur ne seraient pas restés sur cette terre pour vous prévenir de sa mort et vous dire adieu. Parce que ce rêve c'est un adieu, je parle du premier rêve bien sûr.
- Mais... je ne vous ai pas raconté mon premier rêve
", rétorqua Meriel.

La véritable signification de la phrase d'avertissement de Sheela prit enfin tout son sens dans l'esprit de Meriel et elle s'empourpra. Ainsi donc la cabaliste connaissait tous ses secrets même les mieux dissimulés.

"Mais pourquoi moi ? Il a un lien avec d'autres personnes au sein du clan, qui lui sont plus proches...
- Ça vous le savez mieux que moi
", lui répondit Sheela avec un air malicieux.

La jeune mercenaire devint encore plus rouge. Mais bientôt sa gêne fut supplantée par l'inquiétude.

"Ne peut-on rien faire pour lui ? C'est affreux de le voir ainsi, je suis persuadée qu'il préférerait qu'on le tue plutôt que de vivre de cette façon. Et moi aussi je le préférerais..."

La cabaliste ne répondit pas tout de suite à Meriel, elle semblait plongée dans ses pensées. Au bout d'un moment, le front soucieux, elle attrapa sa besace et l'ouvrit. Elle en tira un vieux grimoire dont la couverture en cuir témoignait de son âge. Elle se mit à le feuilleter avec application, s'arrêtant à certaines pages, continuant sa lecture après un hochement de tête. Elle en était arrivée à la moitié du livre quand elle redressa la tête d'un geste brusque, une étincelle au fond des yeux.

"C'est bien ce que je pensais !", s'exclama-t-elle triomphalement. "Il existe une potion inversant les effets de celle utilisée par la sorcière !"

Sous le couvert du bois, alors que la tranquillité de l'endroit n'était troublée que par le chant des oiseaux et le murmure de la brise dans les feuilles, Meriel apprit de la bouche de Sheela qu'il existait une sorte de contre-poison. Le seul problème était qu'il s'agissait d'une potion très puissante qui n'était pas sans danger. Avec de la chance la personne redevenait ce qu'elle avait été avec tous ses souvenirs, mais il arrivait que les effets escomptés ne se produisent pas et que la potion tue la personne. Le choix de tenter d'utiliser ou non la potion appartenait à Meriel.

Sheela lui expliqua aussi qu'il fallait aller vite pour administrer le contre-poison, car si plus de deux mois s'étaient écoulés depuis l'absorption de la première potion, ses effets devenaient irréversibles. La jeune fille remercia la cabaliste et lui demanda un délai pour lui apporter sa réponse, elle avait besoin de temps pour réfléchir mais elle viendrait voir Sheela pour lui annoncer sa décision avant la fin de la journée.
Message supprimé par son auteur.
Meriel retourna vers la demeure familiale du clan. La cour déserte du petit matin était maintenant envahie par une foule active comme autant de fourmis dans une fourmilière. Chacun vaquait à ses occupations et personne ne fit attention à la jeune fille qui s'engouffra prestement dans la demeure. Elle traversa la salle commune d'un pas vif et monta rapidement l'escalier qui menait à l'étage et aux chambres des membres de la famille McKeen. Sur le pallier, elle s'arrêta perdue dans ses pensées.

Dans ce couloir donnait la porte de la chambre de Panda, elle le savait car elle avait souvent attendu, dissimulée dans un recoin sombre, qu'il sorte pour partir à l'entraînement. Sans un bruit elle s'approcha de la porte. Elle n'était jamais entrée dans sa chambre, il ne l'y avait jamais invité.

Fréquemment, la curiosité de savoir à quoi ressemblait la tanière de cet ours mal léché l'avait tenaillé. Maintenant qu'elle pouvait le découvrir sans risque d'être surprise, quelque chose bloquait sa main sur la poignée de la porte. Non, elle ne rentrerait pas, si un jour ce que cachait cette porte lui était révélé, ce serait parce que l'occupant de la chambre la lui ouvrirait. Que découvrirait-elle alors ? un décor sobre et fonctionnel, confortable et agréable ? A l'image de l'homme qui l'habitait ou révélant peut-être le côté caché de sa personnalité ?

Meriel s'arracha brusquement au cours que prenaient ses pensées. Mais que faisait-elle donc là plantée devant une porte en se demandant si un jour elle en franchirait le seuil invitée par Panda ? Comme s'il allait revenir... Là était le point faible, il était peu probable que Panda revienne cette fois, la poussière allait s'accumuler, le lit ne serait pas défait, aucun feu ne brûlerait plus dans l'âtre de la cheminée... à moins que... Le souffle manqua à la jeune fille et elle eut l'impression que le sol s'effondrait sous ses pieds. Il fallait qu'elle sorte, elle avait besoin de respirer l'air frais.

La jeune fille descendit l'escalier rapidement et quitta la demeure pour reprendre ses vagabondages. Ses pas la menèrent à l'écurie puis dans la cour secondaire où elle avait l'habitude de s'entraîner avec son maître. A chaque tournant, où que son regard se posa, quelque chose lui rappelait celui qui, maintenant, lui manquait cruellement.

Le fait de connaître enfin, avec certitude, le destin de Panda ne faisait que renforcer le sentiment de manque ressenti par la jeune fille. Elle avait toujours refuser de admettre qu'elle se sentait abandonnée quand il quittait les terres McKeen sans elle. Mais maintenant elle ne pouvait nier ce sentiment tant il était fort. Ici elle se rappelait une de leurs disputes, là lui revenait le son de sa voix quand il lui avait fait une remarque sur sa façon de combattre. Fuyant ce tourbillon de souvenirs qui semblait vouloir l'emporter, elle franchit le mur d'enceinte et se retrouva marchant dans les plaines sans but.

Quand Meriel sortit enfin de ses pensées et regarda autour d'elle, quelle ne fut pas sa surprise de se trouver à la limite des terres McKeen, près du chêne millénaire ressemblant à une nuée de démons jaillissant du sol. Alors qu'elle s'en approchait lentement, elle ne put s'empêcher de tendre l'oreille tellement elle s'attendait à entendre la voix de Panda s'élever d'entre les racines énormes de l'arbre comme il y a quelques temps.

...

"Un pas de plus et je vous tue, Meriel.
- Voilà donc où se cache la Merveille des Highlands...
- Partez, laissez-moi... seul.
- Etrange, j'aurais cru que vous rechercheriez ma présence pour que je vous cède.
- Laissez-moi...
- Et moi qui allait succomber à votre charme...
- Partez...
- Non, vous devez honorer une promesse que vous m'avez faite.
- Laquelle ?
- Vous m'aviez promis que si je devenais une guerrière, j'aurais droit à une faveur.
- Oui, j'ai promis, vous pouvez rentrer chez vous, votre enseignement est terminé.
- Je n'ai pas encore choisi ce que je voulais.
- Vous souhaitez rentrer chez vous, loin de l'entraînement de fou que je vous fais subir.
- C'est ce que je voulais, mais j'ai changé d'avis.
- Que voulez-vous ?
- Vous honorerez votre promesse quelle qu'elle soit ?
- Oui.
- Parlez-moi de l'Orient.
"

...

La jeune mercenaire se fraya un passage entre les racines et s'installa à l'endroit même où elle avait trouvé Panda ce soir là, au beau milieu des racines. Elle se sentit tout à coup plus proche de lui, comme s'il était là avec elle. A l'époque elle avait eu l'impression que les racines étaient comme les barreaux d'une cage autour de l'homme, maintenant qu'elle était à sa place, elle se rendait compte que loin de constituer une cage, ces racines formaient plutôt une espèce de berceau, de nid, qui semblait offrir une protection à toutes épreuves. Elle posa sa joue contre l'écorce rugueuse et laissa le calme et la sérénité de l'endroit l'envahir.

L'après-midi s'achevait lorsqu'elle se releva. Elle avait pris sa décision, elle trouverait Panda et lui donnerait le contre-poison. Elle ne pouvait pas continuer ainsi, ne rien faire alors qu'elle connaissait la situation. Si elle n'agissait pas elle ne pourrait plus se regarder dans un miroir. Son coeur n'arrêtait pas de lui crier de partir, qu'elle perdait du temps à réfléchir alors les hésitations n'étaient pas de mises.

Elle se mit rapidement en marche pour retourner faire part de sa décision à Sheela. Elle était tant éprouvée physiquement et émotionnellement que l'idée de faire appel au clan pour l'aider dans sa tâche ne l'effleura même pas. La vision du regard sans vie de Panda hantait son esprit et son coeur, l'empêchant de réfléchir posément et d'analyser froidement la situation.
Elle trouva Sheela dans son potager et lui apprit sa décision. Cette dernière l'informa que pour préparer la potion, elle devait aller à Camelot chercher certains ingrédients qu'elle ne possédait pas et il fut décider que Meriel l'accompagnerait à la capitale. Elle en profiterait pour glaner des informations à la Confrérie des Ombres sur la mission dont Panda avait été chargée. Meriel était persuadée qu'elle pourrait apprendre dans quelle contrée il avait été envoyé, ce qui l'aiderait dans ses recherches.

C'est ainsi que, le lendemain, Meriel se retrouva de bon matin à attendre la venue du Capitaine Rhodri dans une pièce humide et froide meublée en tout et pour tout d'une table et d'une chaise. Elle avait eu de la chance, il était justement en visite à Camelot à ce moment alors que d'habitude il ne quittait pas la forteresse de Snowdonia. Quand elle avait appris cette nouvelle, elle avait décidé de demander à le voir directement. Après tout pourquoi s'adresser aux saints lorsque dieu était disponible ?

Elle attendait donc depuis un certain temps, enveloppée dans sa pèlerine grise qui ne portait pas les armoiries du clan. Elle s'était dit que la discrétion était de mise. Un froid vif régnait dans la pièce, à tel point que de la buée s'échappait de la bouche de la jeune fille à chaque fois qu'elle expirait. Plus l'attente durait et plus son impatience grandissait. Quand enfin, le Capitaine Rhodri daigna lui accorder un peu de son temps, ce fut une boule de nerfs qui l'accueillit derrière la porte qu'il ouvrit.

Sans même lui laisser le temps de réagir, la jeune fille avait bondi sur lui et malgré sa carrure, son expérience et sa force, il se trouva allongé le dos contre la table, deux lames croisées contre sa gorge. Meriel avait souvent entendu Panda parler de cette attaque et lui avait demandé à l'occasion de la lui montrer. La chance avait été de son côté, le Capitaine ne portait pas son armure en plate, sinon la mercenaire n'aurait pas pu utiliser cette technique.

Pris en défaut par l'attaque de Meriel, Rhodri ne tarda pas à recouvrer sa contenance. Malgré le froid des lames sur sa peau, il esquissa un sourire narquois.

"Un seul appel de ma part et vous êtes morte très chère.
- Vous mourrez avant moi.
" répondit Meriel du tac au tac. "Et ne me sous-estimez pas... J'ai un très bon professeur... le meilleur.
- J'en ai entendu parler effectivement, quelle idée de...
- Trêve de bavardages
", interrompit la jeune fille d'un ton sec. "Je ne suis pas ici pour cela, je veux des informations, j'ai déjà perdu trop de temps à vous attendre !
- Qui vous dit que je vous donnerai quoi que ce soit ? Vous faites partie de la Confrérie, vous devez savoir que nous ne divulguons pas les informations si facilement.
"

Son sourire pâlit légèrement lorsque Meriel resserra l'étau de ses lames autour de son cou. Il sembla réfléchir quelques secondes puis reprit en soupirant.

"Très bien, de toutes façons sa mission est achevée et a été couronnée de succès."

Comme elle semblait prête à l'écouter sans bouger et qu'il commençait à avoir mal au dos dans cette position il ajouta calmement.

"Convenez jeune fille qu'il m'est difficile de vous répondre dans cette position."

Meriel se redressa et relâcha sa prise, s'éloignant un peu pour laisser l'homme se relever. Elle se positionna entre lui et la porte pour être sûre d'obtenir ce qu'elle était venue chercher. Le Capitaine se releva et se massa légèrement le cou puis alla s'asseoir sur la chaise près de la table avec une lenteur étudiée qui énerva Meriel au plus haut point. Mais il tint sa parole et lui donna les renseignements qu'elle recherchait.

Sans le laisser paraître il avait été impressionné par l'attitude de la jeune fille, par son audace. Elle ferait un bon élément plus tard, d'ailleurs elle l'était déjà. Normal avec le maître qu'elle s'était choisie pensa-t-il avec un petit sourire en coin. Comment avait-elle réussi à convaincre le Highlander d'être son instructeur ? Cela relevait du mystère. Hélas, songeait-il, elle ne se contentait visiblement pas d'apprendre le métier avec la Merveille, elle semblait bien partie pour avoir le même caractère insoumis et irrespectueux. Alors que la jeune fille quittait sans un bruit la pièce, le Capitaine Rhodri se dit qu'il aurait sûrement bientôt un nouvel agent efficace.
Quelques jours plus tard, dans l'écurie se déroulait à nouveau une scène de départ. Cette fois, cependant, c'étaient deux femmes qui murmuraient dans le silence du petit matin et le ton de la discussion était moins tendu.

Meriel avait scellé son cheval et finissait de d'attacher son bagage tandis que Sheela attendait patiemment. Quand la jeune fille se retourna, la cabaliste lui tendit une besace qui semblait bien pleine. La mercenaire fixa le sac d'un regard sans expression. Elle hésitait à prendre le sac comme si ce dernier allait la brûler.

Dans ce sac se trouvait la chance de revoir l'homme qu'elle aimait ou sa mort définitive. Aurait-elle le courage suffisant pour accomplir sa tâche ? Alors qu'elle en parlait avec Sheela, tout ceci ne lui avait paru que projets, planification d'une chasse particulière mais encore irréelle. Maintenant la réalité de la chose la frappait de plein fouet.

Sheela observait la jeune fille en proie à l'hésitation. Elle se disait qu'elle était bien jeune pour porter le poids d'un tel fardeau sur ses frêles épaules. Cependant, la jeune mercenaire se ressaisit et, d'une main ferme, prit le sac des mains de la cabaliste. Il n'y avait pas de choix vraiment, elle n'avait pas à hésiter. Elle ne pouvait laisser Panda dans cet état. Et elle ne devait pas craindre non plus sa mort... après tout n'était-il pas déjà dans un état pire que la mort ? Perdu pour elle et pour les siens de façon irrémédiable ?

Meriel passa la besace en bandoulière, s'assurant qu'elle ne risquait pas de la perdre ou d'en briser le précieux contenu. Sheela prit la parole pour lui donner d'ultimes recommandations.

"Retrouvez le vite et donnez lui la potion rapidement, le temps joue contre vous.
- Je sais. J'espère réussir à trouver le camp de l'homme aux tatouages le plus vite possible. Grâce aux indications du Capitaine Rhodri, je sais déjà par où commencer.
- Oui mais faites attention tout de même. Vous allez quitter les terres du royaume d'Albion, vous ne serez plus en terrain connu.
- Ne vous inquiétez donc pas, j'ai un bon maître... Il m'a appris à me débrouiller, je lui ferai honneur !
- Je n'en doute pas. Je demanderai quand même à ce que vous soyez protégée par les divinités.
- Je vous remercie.
- Prenez garde à vous, à partir de maintenant vous êtes seule.
- Non je ne le suis pas…
"

A cette phrase un sourire se dessina sur les lèvres de Meriel. Non elle n'était pas seule, quelque chose lui disait que Duncan ne serait pas loin d'elle. Sheela sourit en réponse au sourire de Meriel. Un brouillard épais avait envahi la cours de la demeure familiale des McKeen quand Meriel enfourcha finalement son cheval et le lança au galop. La cabaliste la regarda disparaître en quelques secondes, la cavalière et sa monture happées par la brume dense.

Meriel chevaucha longtemps. Chaque jour l'éloignait un peu plus des terres du clan et de toutes les personnes qu'elle avait appris à connaître et à aimer. Les paysages se succédaient, le sol changeant sans cesse sous les sabots de sa monture. Plus Meriel avançait et plus la contrée lui devenait étrangère, inconnue. Bientôt, plus rien ne lui rappela Albion, elle avait dépassé la frontière du royaume.

Au fur et à mesure qu'elle avançait, les nuits se faisaient plus fraîches et plus sombres. Malgré le feu de camp qu'elle allumait chaque soir, Meriel se sentait plus transie chaque matin à son réveil. Elle avait également l'impression que l'aura de lumière diffusée par les flammes allait en diminuant à chaque fois. Les arbres aux pieds desquels elle établissait son campement pour la nuit étaient étranges, d'une espèce inconnue. Le vent dans leurs branches faisait naître une plainte étrange qui lui faisait froid dans le dos. Même son cheval partageait son malaise. Certains soirs il piaffait nerveusement, les oreilles dressées, à l'écoute des bruits de la nuit.

Malgré cela, la jeune fille continuait d'avancer. Les journées s'écoulaient lentement, la distance parcourue lui semblant toujours trop courte. Autant la journée, son voyage lui paraissait interminable, autant la nuit, son temps de sommeil lui paraissait trop court, malgré l'atmosphère angoissante qui s'installait avec le coucher du soleil. Quand on connaît le bonheur le temps passe toujours trop vite...

Pendant la course de l'astre de lumière dans le ciel bleu, Meriel était effectivement seule comme l'avait prédit Sheela. Mais une fois l'obscurité tombée et qu'elle était plongée dans son sommeil, elle ne l'était plus. En effet, dès la première nuit, Duncan lui avait rendu visite. Au départ, furieux, il avait rapidement fait place à Panda. Ce dernier avait tout fait pour faire renoncer Meriel au projet périlleux qu'elle avait entrepris. C'était inutile, stupide, beaucoup trop dangereux, elle n'y arriverait jamais, elle était bien trop inexpérimentée. Ce à quoi la jeune mercenaire avait rétorqué vivement qu'elle avait pris sa décision, que cela ne le regardait pas, qu'elle faisait ce que bon lui semblait, bref qu'il ne la ferait pas changer d'avis quoi qu'il puisse dire ou faire. Devant son entêtement, le Highlander avait fini par s'incliner.

Ces altercations ressemblaient tant à celles que la jeune fille avait coutume d'avoir avec son professeur que, souvent, elle avait beaucoup de mal à contenir sa tristesse quand, au matin, elle s'apercevaient qu'elle avait encore rêvé. Meriel avait été surprise car, d'habitude, il ne baissait pas les bras si vite. Mais après tout il s'agissait d'un rêve, ce n'était pas le véritable Panda, cela expliquait peut-être ceci. Maintenant il se contentait de lui tenir compagnie et Meriel découvrit rapidement que, bien que tout aussi taciturne que le modèle original, il pouvait être différent.

En fait elle se rendait compte que celui qui lui rendait visite la nuit était ce qu'il aurait pu être s'il avait nourrit les mêmes sentiments à son égard qu'elle vis-à-vis de lui. Et pour son malheur pensait-elle, cette image de lui la séduisait incontestablement. Elle découvrait la face cachée de l'homme que le Panda en chair et en os s'évertuait à lui cacher coûte que coûte. Il avait beau se dire mort à l'intérieur, elle avait déjà surpris, quand il baissait sa garde en sa présence, des éclairs de vie : une esquisse de sourire, une lueur malicieuse dans le regard, et surtout ce regard énigmatique qu'elle avait entr'aperçu lors du dernier banquet. Dans ses rêves il était tout cela et même bien plus.
Merci à ceux qui m'encouragent à continuer, merci à ceux qui me lisent même s'ils ne laissent pas traces de leur passage, cela me touche beaucoup, plus qu'ils ne peuvent le penser.



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Une bonne quinzaine de jours s'était écoulée et Meriel commençait à désespérer de trouver le moindre indice, malgré le soutien et l'aide que lui prodiguait Duncan par le biais de ses rêves. Enfin, un soir, elle arriva à l'entrée d'un défilé bordé de pierres. Son pouls s'accéléra lorsqu'elle reconnut le paysage où elle avait assisté, témoin impuissant, à l'agression de Panda. A la faible lumière du soleil couchant, elle tenta de trouver des traces, mais peine perdue. La nuit tombait trop rapidement. La mort dans l'âme, elle se décida à passer la nuit non loin de là en espérant que le lendemain, à la lumière du jour, ses recherches seraient plus fructueuses.

Cette nuit là, Meriel dormit d'un sommeil agité. Elle ne rêva ni de Duncan ni de Panda mais cauchemarda. Elle revivait sans cesse la scène de l'assaut, cent fois elle voulut crier pour avertir le mercenaire du danger imminent, cent fois elle le vit succomber sous le nombre de ses ennemis. Parfois elle était simple spectatrice, parfois elle avait l'impression de se battre aux côtés de l'homme. Vers la fin de la nuit, elle vécut la scène comme si c'était elle qui était agressée, les pensées de Panda au moment où il s'était rendu compte que tout était perdu se bousculèrent dans sa tête. Une multitude d'images se succédèrent devant ses yeux à une vitesse incroyable, des moments de la vie du mercenaire, peu de moments heureux, beaucoup de moments sombres, vers la fin elle fut étonnée de voir que c'étaient surtout des images d'elle qui revenaient : en train de s'entraîner, en train de lui hurler dessus, les deux baisers qu'ils avaient échangés, le moment qu'ils avaient partagés entre les racines du chêne millénaire.

Le matin la trouva plus fatiguée que la veille. Elle avait des cernes sous les yeux et un voile de pessimisme avait recouvert son coeur. Elle chercha sans grand enthousiasme quelques traces, fouilla les alentours, mais ne trouva rien. Trop de temps s'était écoulé. Ça et là subsistaient quelques preuves du passage des hommes embusqués derrière les roches, mais rien n'était exploitable. Le désespoir la gagnait petit à petit et des larmes de colère lui montèrent aux yeux.

Alors qu'elle refaisait une inspection en haut des rochers, son attention fut soudain attirée par le bruit de pas d'un cheval venant du passage. Elle s'aplatit prestement sur un rocher, à l'endroit même où les assaillants de son maître s'étaient embusqués, et fixa attentivement la portion du chemin qu'elle pouvait voir de sa position, attendant patiemment que le cheval et son cavalier apparaissent. L'animal émergea en premier de derrière le rocher, c'était une bête massive, à l'allure imposante, une monture qui, en son temps, aurait pu supporter un paladin et son armure sans broncher. Mais il était dans un piteux état, sa crinière et sa queue ainsi que son poil montrait que son propriétaire n'en prenait pas grand soin. Il se mouvait lentement, choisissant prudemment son chemin, le sabot lent mais sûr. Ce n'était pas un cavalier mais une cavalière qu'il portait sur son dos, une jeune fille vêtue d'une robe rapiécée à plusieurs endroits.

De là où elle se trouvait Meriel observait avec intérêt. Un détail attira son attention, la chevelure de la jeune fille était d'un blond éclatant qui tranchait avec l'aspect général du tableau que faisait la monture et la cavalière. Autant le cheval et la robe de la jeune fille faisaient négligés et misérables, autant la longue chevelure brillant au soleil faisait naître l'admiration. Quelque chose attira le regard de la jeune fille qui tourna la tête révélant ainsi son visage à Meriel. Le choc fut tel que cette dernière ne put retenir un cri d'exclamation. En contrebas, la cavalière stoppa net son cheval et se mit à observer avec attention les hauteurs. Meriel se colla à la roche, retenant sa respiration, se fondant le plus possible dans le décor.

Alors qu'elle attendait que la jeune fille blonde reparte, Meriel sentait son coeur battre à tout rompre. Le visage de la jeune fille avait fait ressurgir en elle un sentiment de jalousie ainsi que les paroles de Panda :

"Je vous présente Lorianne... C'était ma seule alliée en ce lieu, elle est digne de confiance."

La Sainte Lumière n'avait donc pas détourné son regard de Panda et de Meriel, c'était encore un signe du destin. La jeune mercenaire aurait donc une chance d'accorder la vie ou le dernier repos à l'homme qu'elle aimait. Dès que Lorianne repartit, Meriel bondit et se précipita vers l'endroit où elle avait laissé sa monture et son bagage. Elle se dépêcha de la mener dans le défilé et se mit à suivre les traces laissées par Lorianne.

La traque avait commencé. Au début, Meriel tenta de se repérer, notant certains détails qui lui permettait de s'orienter et de se retrouver, mais bien vite elle se rendit compte que Lorianne suivait un chemin confus, brouillant les pistes, tournant sans cesse, faisant des détours qui semblaient totalement inutiles. La jeune mercenaire se rendit bientôt compte que cet itinéraire n'était pas du au hasard il avait été conçu pour tromper un éventuel pisteur, pour égarer tout suiveur inopportun. Et il était diablement efficace, s'avoua-t-elle après être passée pour la troisième fois devant le même arbre tordu à la suite de Lorianne.

Décidément elle aurait du mal à revenir songea Meriel, mais encore faudrait-il avoir une raison de revenir ce qui n'était rien moins que sûr. A cette pensée, son humeur s'obscurcit et la joie d'être tombée sur Lorianne se dissipa. Meriel poursuivit son chemin, concentrée sur l'itinéraire, toutes pensées heureuses envolées, l'angoisse avait de nouveau envahit son esprit et son coeur. La mercenaire avait pris le pas sur la jeune fille.
Meriel avait pris Lorianne en chasse depuis plusieurs heures lorsqu'elles débouchèrent enfin près d'une cascade. Sans hésiter, Lorianne dirigea son cheval vers la cascade. Pensant qu'elle allait sans doute abreuver sa monture, Meriel quitta sa proie des yeux un instant pour observer les environs. Elle se trouvait dans une sorte de cul-de sac. L'eau tombait du haut d'une paroi rocheuse qui faisait le tour de l'étendue d'eau. Il n'y avait que des rochers, aucune issue à part le chemin que les deux cavalières avaient emprunté. Ça et là, des buissons poussaient entre les rochers, agrémentant la façade couleur gris pierre de quelques touches de vert.

Reportant son attention sur l'endroit où elle avait aperçu pour la dernière fois sa proie, Meriel poussa une exclamation de surprise teintée de mécontentement. Lorianne, ainsi que sa monture, avait disparue comme par magie.

"C'est pas vrai !" gronda la jeune mercenaire. "C'est moi qui le mérite là le bouclier en pleine tête..."

La jeune mercenaire mit pieds à terre et commença à explorer les environs de la cascade là où elle avait vu Lorianne pour la dernière fois. Ce faisant elle se maudissait intérieurement pour sa négligence. Elle avait bel et bien perdu la trace de sa proie. Visiblement la jeune fille avait bien fait boire son cheval puisqu'il y avait des traces juste au bord de l'eau. Mais de là, point de traces montrant que l'animal avait continué son chemin. S'ils avaient fait demi-tour elle les aurait forcément vu passer... où donc avaient-ils disparus ?

Meriel examina encore attentivement la rive, nulle trace de portail magique qui aurait pu permettre à sa proie de se téléporter. Après tout, ces étrangers connaissaient peut-être cette magie pratiquée par les mages des trois Royaumes en guerre. L'eau était sombre et peu avenante. On ne s'y serait pas baigné en toute tranquillité. Réflexion faite, Meriel n'aurait pas laissé sa monture boire de cette eau. Lorianne l'avait-elle vraiment fait ?

Alors qu'elle s'était accroupie sur la rive pour mieux observer les traces laissées par le cheval de Lorianne, son attention fut attirée brusquement par le bruit de quelqu'un ou quelque chose pataugeant dans l'eau. La jeune fille releva vivement la tête mais n'aperçut rien de particulier. Le bruit se fit entendre sur sa droite puis sur sa gauche. Son cheval piaffa d'impatience, poussant un hennissement de nervosité.

"Montrez-vous ! Je sais que vous êtes là !" lança Meriel, la main sur la garde d'une de ses armes.

La jeune fille se tournait de tous côtés pour tenter d'apercevoir la présence qu'elle ressentait près d'elle mais ne voyait pas. Au fur et à mesure, sa tension et son énervement montaient crescendo. Soudain elle sentit quelque chose d'humide contre sa main et sursauta. Baissant les yeux, elle découvrit un énorme loup qui la fixait de ses yeux verts émeraude. Son pelage était d'un gris argenté magnifique, sa fourrure brillait. Tout dans sa stature, sa posture transpirait la force et la puissance. De sa truffe il donnait de petits coups à la main de Meriel.

La beauté de l'animal était telle que la jeune mercenaire ne pensa pas un instant à s'écarter de lui. Comment avait-il pu s'approcher si près d'elle sans qu'elle le voit ? Mystère, mais cette pensée effleura à peine l'esprit de Meriel. Elle était sous l'emprise de la bête. Sa monture, par contre, n'était aucunement à l'aise et tentait de s'éloigner, tirant sur les rennes que la jeune fille tenait en mains. Cela ramena la jeune fille à la réalité. Elle quitta le loup des yeux comme on semble sortir d'une transe et se tourna vers son cheval.

D'une main elle resserra son emprise sur les rennes pour ne pas qu'il lui échappe et de l'autre, entreprit de lui caresser les naseaux en murmurant à son oreille des mots réconfortant. Alors qu'elle tentait ainsi de calmer son cheval, elle sentit qu'on la tirait pas la cape. Elle baissa le regard et vit le loup, un morceau de la cape dans la gueule. Manifestement il voulait qu'il la suive ce qui semblait fortement déplaire à son cheval qui se remit à piaffer nerveusement et à souffler bruyamment.

Instinctivement Meriel sentit qu'il fallait faire vite, l'apparition soudaine de ce loup se comportant presque comme un chien n'était pas anodine. Depuis le début des rêves étranges qui l'avaient assaillie, elle était beaucoup plus ouverte aux phénomènes qui auparavant auraient aussitôt réveillée sa méfiance naturelle. D'un mouvement souple la jeune fille enleva sa cape et tout en parlant doucement à l'oreille du destrier elle se débrouilla pour lui masquer les yeux. L'animal d'abord méfiant continua de piaffer nerveusement, ses sabots soulevant une fine couche de poussière, puis encouragé par la voix de sa maîtresse et par les caresses qu'elle lui prodiguait pour l'apaiser, il se calma peu à peu.

S'étant assurée que le cheval s'était calmé, Meriel remonta en selle. Le loup la voyant prête partit au petit trot, se retournant de temps à autre pour s'assurer qu'elle suivait bien. Il suivit les traces de l'autre cheval jusqu'à l'endroit où elles s'arrêtaient. Là il marqua une pause jusqu'à ce que Meriel le rejoigne. Puis il entra résolument dans l'eau. La jeune mercenaire hésita un instant puis dirigea sa monture à la suite du loup. Après tout elle n'avait rien à perdre, elle n'avait trouvé aucun indice, aucune trace.
Je cherchais mon pauvre post dans les dernières pages (j'ai fait les pages 13 à 40) et miracle je le trouve en page 11

Merci de l'avoir empêché de descendre en dernière page, mais faut pas me faire des surprises comme ça sans prévenir, j'ai failli avoir une attaque

Donc après tout ça, vala la suite, j'espère que la lecture sera bonne.

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L'eau était si sombre que le regard de Meriel n'arrivait pas à percer la surface et elle ne parvenait pas à apercevoir le fond. Le sol suivait une pente douce et son cheval s'enfonçait inexorablement dans l'eau. Tout d'un coup la jeune fille réalisa que le loup, lui, ne s'enfonçait pas. Il continuait à avancer sereinement sans se mouiller les pattes, effleurant à peine la surface de l'eau qu'aucune ride ne troublait à son passage.

Troublée la jeune fille arrêta son cheval. Sa méfiance naturelle qui avait été mise en veille refit surface. Comme s'il avait senti la suspicion envahir la mercenaire, le loup se retourna et la fixa de ses yeux clairs. Meriel plongea son regard dans ces deux étoiles. Ces yeux étaient bien trop vifs, bien trop intelligents pour être ceux d'une simple bête. A y regarder de plus près on aurait dit qu'il s'agissait de yeux humains. Elle connaissait ce regard, où donc avait-elle déjà vu ces reflets ?

Que faisait-elle donc ainsi ? Suivre un loup mystérieux, peut-être un esprit comme celui qu'invoquaient les ennemis d'origine Hibernienne... Avait-elle perdu tout bon sens ? Etait-elle à ce point désespérée ? Pourtant la bête n'avait manifesté aucune agressivité, au contraire elle avait plutôt l'air amical, était-ce une ruse pour mieux la berner ? L'entraînerait-il jusqu'au fond de l'étendue d'eau là où elle se noierait ?

Le duel du regard entre la cavalière et la bête dura quelques minutes. Ni l'un ni l'autre ne bougeait, chacun soutenant le regard de l'autre. La main de la cavalière tenant les rennes se crispait de temps à autres. Finalement le loup ouvrit la gueule la langue pendante, dans un rictus qu'on aurait pu interpréter comme un sourire, et laissa échapper un petit jappement, sa queue battant l'air. Cela sembla vaincre les dernières incertitudes de la jeune fille qui, d'un geste sec, remit sa monture en marche.

Le cheval s'enfonça davantage et bientôt l'eau frôla les pieds de sa cavalière. L'eau sombre ne laissait toujours rien deviner de ce qui se trouvait sous sa surface dérangée par les remous causés par la chute d'eau qui se rapprochait. Suivant toujours son étrange guide, Meriel s'aperçut que curieusement que la pente que suivait sa monture s'était aplanie. Le chemin qu'elle suivait semblait continuer au même niveau mais personne n'aurait pu le deviner sous la surface sombre de l'eau, à moins de faire partie des initiés.

Comment cela était-il possible ? Etait-ce le travail de l'homme, de la nature ou de la magie ? Meriel n'en avait aucune idée et ne se posait même pas la question. Tout ce qu'elle savait c'était que le loup l'emmenait près de Panda. Une apparition mystérieuse, manifestation d'une force qu'elle ne connaissait ni ne comprenait. Mais malgré ses doutes et sa méfiance, elle lui avait confié sa vie et sa destinée.

Arrivée à mi chemin entre la cascade et la rive, la mercenaire se retourna et s'aperçut qu'un espèce de voile brumeux se dressait entre elle et la rive. Etrange, elle ne l'avait pas remarqué avant pendant qu'elle cherchait les traces laissées par Lorianne. Ainsi donc c'était comme cela que la progression de Lorianne lui avait été dissimulée, la magie semblait être du côté de ses ennemis, il faudrait redoubler de prudence. Le coeur de la jeune fille ne fut pas trop assombri par cette constatation car la vision du loup gris qui la guidait la conforta dans son idée qu'apparemment une autre magie oeuvrait pour l'aider.

Le loup la mena d'un pas tranquille jusque devant la cascade, là il marqua une pause puis entreprit de la contourner par la droite, et disparut derrière la chute d'eau, Meriel toujours derrière lui. A partir de cet endroit, le chemin remontait et bientôt la jeune fille se retrouva dans une grotte sombre et humide, les oreilles emplies du bruit de la cascade qui semblait emplir complètement l'espace. Un sourire désabusé se dessina sur les lèvres de la jeune fille tandis qu'elle secouait doucement la tête de droite à gauche.

"Le coup du chemin derrière la cascade," pensa-t-elle. "Mais je suis vraiment trop stupide de ne pas y avoir pensé ! Quelle idiote je fais ! Panda a bien raison quand il dit qu'il me reste beaucoup à apprendre..."

Elle chercha le loup des yeux mais celui-ci avait disparu sans bruit. Ainsi elle se retrouvait de nouveau livrée à elle-même. Aucune importance, un chemin s'enfonçait vers le fond de la grotte, éclairé par des torches, les hommes qui empruntaient ce passage devaient avoir tellement confiance en leur stratagème précédent que la prudence ne leur avait plus sembler de mise passé cet obstacle. Sans descendre de cheval, Meriel ôta sa cape qui masquait les yeux de sa monture et dirigea cette dernière vers le fonds de la grotte.

Après quelques minutes, elle déboucha sur une ouverture qui laissait la lumière aveuglante du soleil entrer à flot. Le bruit de la cascade qui tombait derrière elle n'était plus qu'un léger bruit de fond. Elle fit avancer son cheval prudemment et se retrouva surplombant un ensemble de bâtiments d'architecture inconnue, entouré par un mur de pierre naturelle. Elle avait trouvé le camp de l'homme aux tatouages.
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