Il était une fois un chêne et un roseau.
Le chêne, droit dans ses bottes savait où il en était. Il ne bougerait pas d’un pouce. Pas question de se laisser flotter au grès du vent. Ce n’est pas ça la vie. Où cela nous mènerait-il sinon ?
Le roseau, lui, fluctuait. Il gardait contact avec le vent. Il en était parfois secoué, tordu, changeant mais, que voulez-vous, c’était sa façon à lui de voir les choses. Il se laissait emporter…pas facile tous les jours.
C’est un peu comme de garder le contact avec ses émotions. Certains s’y refusent lorsque l’émotion ressentie est en opposition avec les principes de vie qu’ils se sont fixés une fois pour toutes.
Et l’amour dans tout ça ? Ou plutôt : et tomber amoureux dans tout ça ?
Tout d’abord, se séparer de quelqu’un ce n’est pas nécessairement cesser de l’aimer. Il peut rester quelque chose de cet amour, après tout, si cela a été vécu c’est que ça en valait la peine. Cet autre reste aimé. Différemment certes, mais aimé.
Et il est parfois plus sage de mettre fin proprement à une relation devenue routinière et insipide que de la poursuivre jusqu’au clash, jusqu’à trouver enfin suffisamment de défauts à l’autre, de tics quotidiens insupportables pour claquer la porte en ayant bonne conscience. C’est dur de se résoudre à ce que l’amour n’ait souvent qu’un temps. Plus sage mais plus douloureux ? Un stade "adulte" du rapport amoureux ?
Quant à ceux qui confondent encore tomber amoureux et avoir envie d’une bonne partie de jambes-en-l’air avec la dernière des salopes ou avec un brutus surmembré acéphale, ils sont un peu hors sujet (ou alors blessés d’avoir été un jour quittés sans trop savoir pourquoi ? Brrrrr que c’est horrible de se prendre un « j’ai besoin d’un peu plus d’espace » dans les dents quand on ne s’y attend pas… mais cela fait parti du jeu : on le fait subir, normal qu’on nous le fasse subir aussi un jour).
Tomber amoureux c’est certainement une des rares émotions qui vous font vous sentir vivant. Reste à savoir si l’on veut la vivre pleinement. Chêne ou roseau ?
Et la confiance dans tout ça ?
Bah, si l’on quitte pour vivre ce sentiment amoureux, il est sûr que cela peut se reproduire : après tout personne n’en est à l’abri. La roue tourne. Mais pas plus de raison de retomber amoureux avant que l’autre ne retombe, à son tour, amoureux d'un(e) autre... Et puis, tomber amoureux, ce n’est pas commun quand même, cela se saurait si ça ressemblait à ces emportements adolescents dont nous abreuvent les séries télé ineptes (en plus n'être entouré que de Brandon et de Kelly ...
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Alors, on le vit cet amour pendant qu’il est là ou on se regarde craindre de le voir s’enfuir ce salaud fugace ? On le vit, la peur au ventre, sachant qu’il pourrait n’avoir qu’un temps ou on le consume gaiement sans trop penser à la fin du désir et en se disant, qu’après tout, vivre sans rêve ce serait foutrement triste et qu'il y a, Dieu merci, des feux sans fin ?