Il se tenait au bar, tranquillement accoudé au comptoir en train de siroter un petit hydromel, prêtant l’oreille aux ragots et autres fariboles courants dans ce genre d’endroit lorsqu’une conversation attira son attention plus particulièrement :
« - Ah, moi si j’avais un anneau magique, je serais riche et puissant ! »
« - Tu dis n’importe quoi Prosper, les anneaux magiques, c’est réservé aux mages, pas aux pauvres roturiers comme nous ! »
« - Même pas vrai d’abord ! J’ai entendu dire qu’il était possible d’en acheter, voir même d’en trouver dans certains tombeaux elfiques ! »
Le barde secoua la tête tristement.
Grand, légèrement voûté, une crinière blanche cachant des oreilles pointues, des yeux bleu, sans âge, une lyre pendue dans son dos, il s’agissait vraisemblablement d’un elfe très âgé, même selon les critères de cette noble race.
« - Messieurs, » dit-il en se retournant, « - les anneaux magiques ne sont point à prendre à la légère. Souvent leurs utilisations entraînent des conséquences, disons… inattendues. »
« - Et qu’est-ce qu’il en sait çui-là d’abord !? »
« - Laissez-moi vous compter l’histoire d’une jeune vestale de Sharess, qui trouva un anneau sur un marché de Memnon.
Il s’agissait d’un bel anneau. Oh, rien d’extraordinaire, juste un anneau. Rien qui puisse exciter la convoitise d’un seigneur du mal ou d’un puissant magicien. Juste un anneau d’argent gravé d’étranges runes issues d’un langage depuis longtemps oublié.
Un anneau magique ?
Oui, certainement.
Mais également maudit.
L’avoir à son doigt ouvrait maintes et maintes perspectives… à courte échéance. Le porter signifiait en effet que l’on bénéficiait d’une incroyable chance et que ses vœux les plus chers pouvaient être exhaussés. C’était aussi la certitude d’une mort rapide. Et pas forcément sans douleur…
Mais la jeune vierge l’ignorait. »
« - Et alors, qu’est-ce qui s’est passé ? » l’interrompit celui qui se nommait Prosper.
Le vieux barde se saisit de sa lyre, gratta quelques notes, accorda l’instrument et commença à chanter :
Alors qu’une lune rousse illumine les marches,
Que la nuit étoilée assombrit l’escalier,
Une vestale s’avance, et passe sous les arches,
Du temple de Sharess, à peine illuminé.
Parcourant la salle de son regard embué,
La belle dont les yeux sont inondés de larmes,
Recherche l’autel de sa Déesse pour prier,
Cinglante litanie qu’aucun souhait ne désarme.
Lorsqu’enfin la fatigue eut embrasée la belle,
La faisant choir sur le sol blanc immaculé,
Et que ses longs bras cuivrés, lâchèrent l’autel,
Sharess en personne apparue pour l’enlacer.
« Tu es belle ô ma servante, pourquoi donc pleurer ? »
« - Las, cette beauté n’est pour moi que servitude !
Et nul amour dans ma vie ne vient l’égayer ! »
« - Si je te rends laide, changeras-tu d’attitude ? »
« - Par pitié non, je ne recherche que l’amour ! »
« - Alors ma douce, il est temps de partir en quête,
Abandonne ta peine, voici un nouveau jour,
Qui je te le promets, mettra ton cœur en fête ! »
Et la belle vestale descendit l’escalier,
Le soleil levant illuminant son visage,
La rendant désirable, pleine d’une grâce éthérée,
Tel un bel oiseau d’or, inaccessible et volage.
Le premier homme qui vint ne fut pas rejeté,
Pas plus que le suivant et tout son régiment,
Car de corps à corps, la belle était assoiffée,
Et ne pouvait plus mettre fin à ses élans.
Un doux souhait qui fut hélas trop vite exaucé,
Transforma donc notre chaste et pure en furie,
Donnant lieu à quelques épouses fort courroucées,
Haïssant et maudissant Sharess et Sunie…
Alors que les quelques rares applaudissements s’éteignaient, Prosper demanda :
« - Ben j’vois pas où est le problème. Elle a eu ce qu’elle voulait non ? »
Son ami lui donna une claque sur la tête.
« - Résidu de bouse d’orque ! t’as pas écouté ! Elle voulait l’amour et n’a eut que du sexe ! »
Grommelant en se tenant la caboche, Prosper marmonna dans sa barbe :
« - C’est bien ce que je dis, elle a eut de la chance ! »
Nouvelle claque.
« - Excusez mon ami noble sire, mais il ne vaut pas mieux qu’un troll décérébré. Comment l’histoire se finit-elle ? »
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Les Nitrox et les Trimix, ne sont que des froussards qui ont peur de la narcose !
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