Kyra, une jeune femme aux gestes délicats, un corps frêle à la peau d’une extrême douceur, des cheveux noirs de jais, soyeux tombant sur ses épaules, elle était un mystère réfugié dans le silence. Ne parlant que de rare fois, s’exprimant par énigmes ou analogie, elle était la prophétesse du village.
Elle porta ses yeux sur celui qui se tenait dans l’encadrure de la porte, un sourire naissant à ses lèvres, ses yeux brillant de bonheur en le voyant. Marcus, le seul à qui elle parlait simplement. Elle se leva doucement pour aller à sa rencontre tandis qu’il entrait, s’avançant vers elle pour la prendre dans ses bras, des bras de guerrier dans lesquels elle se lova.
Te souviens-tu de ce paysage de Neige où nous nous sommes perdus ? Te souviens-tu de ce jour de Neige où nous nous sommes aimés ? Te souviens-tu de la Neige qui tombaient sur le toit de la demeure où nos corps se sont unis ? Te souviens-tu mon aimé, mon âme sœur ?
Ils étaient partis sur sa demande vers les terres de Cimmérie, elle l’avait mené dans un lieu isolé. Une étendue blanche s’ouvrait à leur regard et elle s’était dirigée vers une petite cabane. La bas, ils s’étaient aimés, totalement pour la première fois, elle s’était offerte à lui, entière.
Il se souvenait très bien, comment aurait-il pu oublier ce moment, l’intense bonheur ressenti. Il ferma les yeux, acquiesçant. Le souvenir revenait à lui sans difficulté, il se souvenait très bien. Elle leva ses yeux vers lui, il ouvrit les siens et la regarda avant de l’embrasser, la tenant tendrement dans ses bras.
Elle posa délicatement sa tête sur son torse, se laissant aller contre lui et parla d’une voie douce. Elle annonça ce qu’elle avait vu dans ses rêves : deux êtres naissaient, deux êtres innocents. Il sourit à cette annonce, la serrant encore plus contre lui. Le père de Marcus n’avait jamais accepté cette relation, il lui avait interdit de la voir, il s’inquiéta soudain, craignant pour celle qui l’aimait et ses enfants qu’elle portait. Elle perçut le changement en lui et sourit doucement, posant sa main sur son bras.
Il sera en colère, une colère rouge car tu as défié son autorité, il me fera chasser et je partirai avec nos filles. Tu dois rester auprès de lui, accepter et lui pardonner, promet-moi, car, comme tous, il va partir.
Il la sera un peu plus contre lui, gardant dans le creux de ses bras ce corps frêle qu’il aimait tant, embrassant sa chevelure. Il ne pouvant aller contre ses propos, il le savait, ce qu’elle disait n’était que vérité, parfois difficile à cerner mais si claire à d’autre moment.
Comme elle le lui avait dit, elle partit quelques semaines plus tard, seule en direction du Nord.
(Illustration de Luis Royo)