Des feuilles poussées par le vent

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Nuit et jour, Pepper Park baignait dans cette atmosphère teintée de rouge. Les néons irradiaient non-stop les rues de leurs chaudes lumières, les silhouettes élancées enchaînaient sans cesse leurs mouvements explicites.

Nuit ou jour, il n'était pas aisé de le deviner lorsqu'on traversait ces rues mal famées. En ces lieux, les yeux parcouraient plutôt les coins sombres, ces étroites ruelles, à l'affût du moindre danger, du premier runner aux intentions malveillantes...

Il était en effet très rare que les gens lèvent les yeux vers le ciel... Il n'était pas courant que le regard se porte au sommet de ces tours de bétons et de lumières, cherchant à percer la fumée crachée par les ventilations, cherchant à discerner le peu de bleu qui paraissait tant bien que mal au milieu de ces colosses froids et impersonnels...

Mais cela arrivait...

Cette femme les voyait, ces malheureuses mouettes, perdues au-dessus du centre ville... Elle voyait aussi les derniers rayons de soleil, teinte orangée par delà le rouge criard du quartier... Elle voyait ces nuages s'effilocher sous le coup du vent du soir...

Allongée sur le sol, elle observait fixement ces animaux qui virevoltaient... libres, au-delà de tout souci, de tout état d'âme...

Pour elle, l'agitation de la rue n'était à présent plus qu'un vague souvenir, seul comptait cette sensation d'évasion... Elle était un de ces oiseaux, elle flottait loin au-dessus de toute cette fange. Elle côtoyait ces créatures vivantes...
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Jour 1
Qu'est-ce que nos vies ? Que laissons-nous derrière nous après notre passage ?

Je ne m'étais jamais posé la question avant, occupée que j'étais à essayer de gérer mon quotidien...

Mais maintenant, je regarde derrière moi et l'état de ma situation me saute aux yeux...

Je ne suis qu'un grain de sable dans le désert du nord, un brin d'herbe au milieu des steppes. Si je viens à disparaître, mon absence ne se remarquera même pas. Quoi que je fasse, mes actions seront noyées dans le flot de la collectivité... Et lorsque je disparaîtrai, le manque que je laisserai sera vite bouché par mes semblables...

Et alors, retiendront-ils quelque chose de moi ? Aurai-je encore une place dans leurs esprits ?

Non, car comme tout, le temps effacera le souvenir fugace de cette anonyme que je suis. Je disparaîtrai de leurs yeux, de leur mémoire... Et même ces amas de un et de zéro qui me caractérisent seront retirés des serveurs de la City Administration.

Il ne restera rien de mon existence, alors pourquoi croire que j'ai existé ?

C'est peut-être pour cela que je me décide aujourd'hui à lâcher quelques mots sur ces pages crasseuses, pour laisser un héritage, une trace de ma mémoire, de ce que je suis... de ce que j'étais...

Des pages et un stylo... Choses assez comiques dans ce monde moderne... Tout le monde parle de réseaux, d'informatique, de données... Mais les datacubes vierges sont chers, et de toute façon, mon misérable appartement ne possède pas de HomeTerm...
En fait si, il est là, sur la table... Carcasse poussiéreuse à l'écran perforé, souvenir d'une antique dispute en ces lieux, bien avant que je m'y installe. Le propriétaire n'a jamais jugé bon de le faire remplacer.

Je m'applique donc à écrire, à retrouver cette archaïque habitude, à remarquer qu'il est difficile de rester lisible au fur et à mesure que les lignes s'entassent...

Et déjà la fatigue me gagne, le poignet est endolori.

Mais qu'importe, le temps ne joue pas contre moi... Du moins, que je sache...
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Jour 2
Parler de moi, certes, mais pourquoi ?

J'ai déjà dit que c'était pour laisser une trace de moi, mais pourquoi maintenant ?

Peut-être que ce que j'ai vu au début de la semaine y est pour beaucoup...

Je travaille dans une fabrique de la zone industrielle de Neocron, un travail certes ingrat mais qui paye au moins ma nourriture et mon loyer... Pour rentrer chez moi, j'ai deux solutions : soit je traverse l'Outzone à pied, soit je passe par Pepper Park pour y prendre le métro.

J'ai choisit les rues rouges. Quitte à dépenser une importante part de mon salaire pour pouvoir emprunter le métro, cette méthode a le mérite de m'éviter le fait de traverser ces ruines infestées par les mutants.

Mais cette semaine, un événement particulier a eut lieu.

Alors que je traversais la zone, j'ai croisé un léger attroupement. En dehors de l'habituelle odeur d'urine et d'ordures flottait une répugnante odeur de chair brûlée. Un homme était au milieu, affalé contre un mur. Ses yeux étaient terrifiants, grands ouverts, vide de vie. Quoi de plus normal à la vue de son torse encore fumant. Un garde du Syndicat Tsunami riait à côté, discutait avec d'autres tout en désignant le corps de temps à autres.

Je savais le spectacle commun en ces lieux, mais c'était la première fois depuis longtemps que je voyais un cadavre... C'était depuis
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Jour 3
J'ai encore pleuré. J'ignorais que ce souvenir était toujours aussi présent en moi.

Mais il faut que je sois forte. Et il arrivera bien vite le moment de coucher par écrit ce jour maudit.

Revenons en à Pepper Park.

Le lendemain, la rue avait repris son rythme normal, comme si rien ne s'était passé. A l'endroit où la veille jonchait ce corps sans vie, il ne restait qu'une trace sombre et quelques sacs poubelles.

Les gens allaient et venaient, comme si de rien n'était. Les panneaux d'information divulguaient informations futiles et propagandes rodées.

Aucun écho sur qui il était, qui avait fait ça, si le coupable avait été arrêté ou encore pourquoi...

Rien... Comme si cet homme avait tout bonnement disparu de cette terre, comme s'il n'avait jamais existé.

Je peux dire que cette idée m'a fait froid dans le dos. C'est cette vision des choses qui m'a poussé à me procurer ces antiques ustensiles pour noter mon histoire, laisser quelque chose derrière moi.

Peut-être que quelqu'un trouvera ce misérable héritage. Je n'y crois pas trop...

Mais à écrire ce que je ressens, j'avoue me sentir exister.
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Jour 9
C'est donc ce soir là que j'ai décidé que la situation n'avait que trop durée...

Mon monde s'écroulait, je ne savais plus vers qui me tourner. J'ai donc fait la seule chose qui me semblait raisonnable, c'est à dire le fuir.

C'est ce que j'ai fait un soir : j'ai rempli un petit sac avec quelques affaires et j'ai doucement quitté ma chambre. Comme j'étais trop petite pour atteindre le panneau de contrôle de la porte, je me suis servi de l'une des chaises.

Je me souviens de ce moment là comme si c'était hier. Ces chaises de métal étaient très lourdes, surtout pour quelqu'un de mon âge. Le frottement des pieds contre le sol produisait d'horribles grincements. A chacun d'eux, je sursautais et me recroquevillais sur moi-même, convaincue que le bruit les avait réveillés.
Mais les adultes ne se sont jamais réveillés, et après un temps qui me parut une éternité, je put grimper sur le meuble et taper le code d'ouverture.

Ce soir là, je quittai à tout jamais cet appartement de Plaza pour me diriger au hasard dans les rues de la ville.

Même quand j'y repense aujourd'hui, je ne saurais dire si c'était la bonne solution ou pas.

Bien entendu, avec le recul, je me doute qu'il aurait put m'arriver bien pire dans ces rues étrangères. Mais rester avec ce malade était décidément hors de question.

Par contre, je ne peux toujours pas pardonner ma mère pour avoir fermé les yeux sur ce qu'il me faisait...
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Jour 12
Un de ces menus larcins a pourtant faillit très mal se finir...

Ce vendeur avait sa boutique du coté de la zone industrielle. Je passe de temps à autre devant cet endroit, mais depuis, la bâtisse a été rasée et remplacée par un entrepôt. Cependant, à l'époque, l'immeuble possédait une sorte de vide-ordures rudimentaire qui donnait sur une ruelle sombre. Je m'étais rendu compte qu'avec ma petite taille, il m'était tout à fait possible d'entrer là dedans pour remonter jusqu'à la réserve.

Oh, l'homme ne vendait rien de bien important pour moi, aucun objet de valeur aux yeux d'une fillette qui n'a même pas dix ans... Mais pour certains soirs pluvieux, ça faisait office d'abris tranquille. Surtout que cet homme avait l'habitude de se cacher un peu de nourriture dans l'arrière boutique, réserve où il m'arrivait de puiser lorsque j'avais faim.

Un matin, des gens sont arrivés dans cette boutique plus tôt que prévu. Ils ressemblaient à des voyous. Tous portaient des vestes noires frappées du même motif dans le dos, un horrible monstre à la gueule ouverte. Ils avaient défoncé la porte et fouillaient rageusement dans les armoires.
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Jour 14
C'est dans cette fuite éperdue au milieu des bas fonds de l'Outzone que je les ai rencontrés, ceux qui allaient devenir ma nouvelle famille.

Je suis quasiment tombée à ses pieds alors que j'essayais d'éviter un groupe de mutants. Le père Dust semblait assez âgé, ses yeux étaient d'un bleu profond. Quand il posa son regard bienveillant sur moi, je n'ai eut aucun désir de fuite. La douloureuse rencontre avec ce gang quelques heures plus tôt avait arrêté d'obnubiler mon esprit.

Ce n'est que quand il m'aida à me relever que j'aperçus les autres : un groupe de trois enfants se tenait derrière lui, en silence. Ils étaient à peu près de mon age et portaient des vêtements modestes, rapiécés. L'adulte leur fit signe et ils s'approchèrent de moi en courant. Mille questions furent posés et je n'osais répondre à aucune.

C'est entouré de cette joyeuse troupe que je fus amenée à ce qu'ils appelaient leur refuge. Sur le chemin, je fis connaissance avec Eddy, William et Alice. Ils voulaient tout savoir sur moi, ils parlaient tous en même temps, racontaient diverses choses que je ne comprenais pas toujours... Et le père Dust marchait doucement près de nous, en silence.

Nous arrivâmes assez vite à leur demeure, une maison en piteux état qui avait été décorée avec des accessoires de fortune. D'autres enfants étaient barricadés à l'intérieur. Lorsque nous furent tous à l'abri de ces murs, ils se joignirent aux autres comme si j'étais une bête curieuse, une sorte d'attraction...
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Jour 18
Un des jours suivant, le père Dust ramena un nouveau venu au refuge. Il devait être légèrement plus jeune que moi. Je ne l'avais encore jamais vu, mais son air perdu me rappela où j'étais il y avait à peine quelques jours auparavant.

C'était ce que faisait le père, rassembler les enfants perdus dans l'Outzone. Seuls, ils y mouraient tôt ou tard. Ensemble, ils s'entraidaient et avaient plus de chance de survivre.

A cette époque, je ne savais pas exactement de quoi vivait cet homme. Je savais juste qu'il faisait partie de l'Eglise de Crahn, basée dans un quartier voisin.

Eddy m'expliqua un jour que le rôle de Dust était d'aller de maison en maison pour essayer de convaincre les gens de rejoindre l'Eglise de Crahn. Il lui arrivait aussi de participer à de longues réunions au sein de l'abbaye qui se trouvait dans les quartiers de l'Outzone ou plus rarement à l'église qui avait été construite dans les quartiers de Pepper Park.

Mais même si le père Dust semblait être un fervent croyant de ce Crahn, jamais il ne chercha à nous influencer pour le rejoindre dans son groupe religieux...
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Jour 24
Ce genre de chose se répéta bien souvent par la suite. Lors de ses visites au nom de l'église, il repérait les lieux, il se renseignait sur les habitants. Et au moment qu'il jugeait le plus opportun, il nous y envoyait.

Je me rends compte aujourd'hui que c'était mal, que nous n'aurions jamais dû le suivre là dedans.

Mais nous étions jeunes, nous avions confiance en lui. Et nous avions une certaine part de haine envers ces gens qui vivait dans des maisons mieux que notre taudis, ces personnes qui avaient la chance de posséder des choses dont nous n'osions pas rêver...

Alors nous le faisions sans remords, nous nous emparions de ces butins pour les ramener à Dust. Il devait sûrement les revendre, je ne sais trop à qui... Mais après chacune de ces opérations, il nous ramenait de quoi nous nourrir. Il lui arrivait même d'y joindre une babiole, un truc abîmé sans importance pour un quidam moyen, mais qui à nos yeux avait l'allure d'un trésor inestimable.
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Jour 26
Même si notre univers se résumait à notre refuge et aux sorties furtives pour le compte du père Dust, le monde extérieur n'avait jamais arrêté de tourner. Et de temps à autres, d'autres enfants s'égaraient et Dust les ramenait à nous.

Alors que j'allai fêter ma première année complète au sein de ma nouvelle famille, cette fille vint compléter le groupe. Elle était plus jeune que moi et s'appelait Sacha. Elle fut très bien accueillit, plus particulièrement par les garçons, comme d'habitude... Je me souviens que Tom et Eddy faisaient les pitres.

La fille était au début assez effrayée, mais l'ambiance eut vite fait de la mettre en confiance.

Elle ne nous raconta pas de suite son passé, mais nous nous en moquions, finalement. Le plus important pour nous était que nous héritions d'un nouveau membre dans notre petite famille soudée. Et pour elle, le fait de ne plus être livrée à soit-même dans la jungle de la ville.

Nous avons donc joué, rie, et même mangé plus que de coutume au risque de devoir faire ceinture dans un proche avenir.

C'était le bon temps... Une époque révolue...
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Jour 29
Je crois que c'est après ce jour là que je me suis rendue compte que le père Dust, padre comme aimait l'appeler Luis, avait changé depuis le jour où il m'avait trouvé.

Il n'avait pas de raison de nous avoir parlé de la sorte, nous étions quand même encore très jeunes... Le plus âgé d'entre nous, Joe, devait alors avoir dans les quatorze ans... Il était après tout normal de faire pareille erreur...

Mais la manière dont il nous avait parlé était vraiment sans équivoque. Nous ne l'avions pas remarqué, mais nous étions devenus à ses yeux des petits soldats, juste bon à aller dérober ces babioles, ces précieuses reliques qui étaient censés nous aider à vivre.

Les temps étaient durs, d'après Dust, et il avait soi-disant du mal à revendre la marchandise... Alors, il fallait toujours voler plus pour au final ne recevoir que peu de choses... Et quand nous avons fait remarquer que nous avions moins à manger, que ce que nous devions faire était vraiment trop dur, Dust nous répétait que les temps étaient durs.

Le bleu de ses yeux était devenu glacial, l'homme bon s'était éclipsé au profit d'un être avide... Il lui arrivait de temps à autre de raconter des choses sans queue ni tête tout en caressant un vieux livre qu'il avait trouvé dans des ruines de l'Outzone.

Il nous expliquait souvent que nous pouvions partir si nous le désirions, qu'il se saignait à blanc pour nous aider à vivre et que nous n'avions aucune reconnaissance pour ses efforts continus.

Qu'oser répondre à ça face à un homme qui vous avait sorti d'une mort certaine ? Comment oser se rebeller quand le monde extérieur vous terrorisait ?

Nous avons donc continué à suivre ses ordres, persuadés qu'il savait mieux que nous, jeunes sots, ce qu'il faisait...
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Jour 36
Son plan était pure folie. Imaginez une bande de gamins envoyée dans des lieux aussi surveillés !

Dust avait beau nous assurer que tout allait bien se passer, brandir ses croquis grossiers censés être les plans des lieux, nous nous doutions que ce serait suicidaire... Il n'y avait vraiment que Sands pour croire sincèrement que le vol se passerait sans anicroche...

Mais ses explications avaient été claires, il lui fallait cette chose...

C'est donc en pleine nuit sans lune que nous partîmes pour ce laboratoire. Nous passâmes d'abord par les toits décrépis, manquant bien des fois de traverser la charpente pourrie par le temps et la pollution.

Nous finîmes par arriver à cette fameuse bouche d'aération dont Dust n'avait pas arrêté de nous parler, le défaut dans la cuirasse, l'opportunité à saisir...

Avec le recul, je comprends que la situation ne pouvait pas se finir autrement... Mais nous étions jeunes et naïfs... Et Dust avide et insensible...

Le conduit était en effet bien trop large pour un adulte, mais nous autres pouvions y progresser sans trop de soucis. Les plans chiffonnés de Dust s'avérèrent même plutôt exact et nous réussîmes finalement à arriver non loin de la salle sans rencontrer un seul de ces moines.

Derrière les grilles, le spectacle nous remplissaient d'effrois : des colonnes de verres remplies d'un liquide étrange. Dans certaines de ces cuves flottaient des choses à la forme presque humaine. Je crois même que Karen manqua de vomir dans les conduits d'acier...

Les machines faisaient des bruits divers, mécanismes dédiées à des opérations qu'aucun de nous n'était capable d'expliquer.

De temps en temps, un homme vêtu d'une longue toge passait en revue les écrans clignotant. Dans ces moments là, chacun de nous se blottissait dans le conduit en tentant de faire le moins de bruit possible. Mais mon coeur battait si fort que j'avais l'impression que le bruit allait résonner dans toute l'installation.

Petit à petit, la progression nous amena à la salle où siégeait ce que convoitait Dust. L'endroit était à première vue démuni de gardes, personne pour surveiller ces choses. L'un de nous ouvrit la grille d'aération et nous nous engouffrèrent dans la pièce. William pris comme convenu une des fioles de la table centrale et la rangea précieusement dans son thermos.

Avec le recul, je sais que nous étions vraiment trop bêtes. Si cette chose était si importante, comme le soutenait Dust, comment une bande de gamins ont-ils put s'en emparer si facilement ?

Nous sommes repartis par le conduit comme si de rien n'était. L'étape suivante était de rejoindre Dust pour lui remette la chose. Et jamais nous nous serions doutés de ce qui nous y attendait...
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Jour 38
Cette course folle se calma au milieu des montagnes. Dust affichait toujours cette rage, ses yeux foudroyaient de haine tout ce qu'ils croisaient, que ce soit l'horizon, nous ou la moindre araignée. Darf pleurnichait, et Sacha n'était pas loin de le faire. Nous étions tous exténués, affamés.

Encore et toujours, le père ressassait ses désirs de vengeances. Il y ajoutait d'autres paroles incongrues, gardant serré contre lui ce vieux bouquin.

J'avais l'impression que par moment, il ne nous voyait même pas. Et à d'autres, il nous observait comme si nous étions ses ennemis.

Si la plupart d'entre nous pouvaient encore tenir sur ses jambes, je pense qu'il nous aurait guidés encore plus au nord. Mais nous devions alors afficher un air vraiment misérable car il concéda qu'il était inutile de fuir plus loin.

Neocron était bien assez loin, d'après lui... Et l'endroit lui paraissait propice à prendre un nouveau départ.
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Jour 43
Après Crest, ce fut le tour des gens de Calida de nous chasser de leurs terres. Nous retournâmes dont dans les montagnes.

Au début, nous ne comprenions pas pourquoi Dust évitait autant de poursuivre vers l'ouest. Nous ignorions encore que Tawkeen se dressait par là bas...

Traînant derrière nous les maigres rations que nous avions subtilisé ici et là, nous remontions dans les montagnes. L'hiver approchait, nous sentions le froid devenir tous les jours plus mordant.

Dust s'en moquait assez. Il grognait toujours ses fabulations mystiques et ne se souvenait de notre existence que lorsqu'il avait besoin de nous. Sa barbe était hirsute, ce qui accentuait son allure de prêcheur fou. Ce n'était plus sur un ton amusé que Luis le surnommait padre, mais avec une pointe de crainte.

Mais nous le suivions toujours, car il était l'adulte, et nous autres que des enfants...
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Jour 56
Je ne suis pas sortie de chez moi, aujourd'hui. Les annonces en ville nous l'ont d'ailleurs formellement déconseillé...

A ce qu'on raconte, le Dôme n'est plus. Une bombe vient d'y être envoyée, ordre d'un membre du gouvernement. Je me demande s'il y a eut des survivants... Je me demande si ceux d'entre nous qui étaient allés s'y réfugier sont toujours de ce monde...

Plus aujourd'hui encore, je me rends compte que ce temps béni est tout à fait révolu. Plus jamais nous ne pourrons être réunis ensemble, être heureux ensemble...

Des jours comme ce jour de Noël ne resteront que des souvenirs.

Je me souviens bien que notre vieille masure n'avait jamais eut aussi fière allure qu'en ce jour de fête. De vieux rubans d'emballage avaient été tressés par Alice et Sacha. Shelby avait ensuite aidé les garçons à les accrocher partout dans la pièce. Certains avaient même fait des figurines en boues qui trônaient sur certains meubles.

Il n'y avait pas eut de cadeaux, pas de festins, mais nous étions quand même heureux. Ce soir là, une quinzaine d'enfants, Kurt compris, avaient chanté en une joyeuse cacophonie sous le regard amusé du vieux GenTank. Même Soria avait semblé avoir oublié son mal dans cette allégresse.

De son coté, Dust n'avait évidement pas bougé de sa terrasse, sûrement toujours à fomenter un quelconque plan pour mettre en place sa vengeance envers ceux qui l'avaient chassé...
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Jour 59
Il y eut enfin "le" souvenir marquant de cette période, cet événement qui a détruit tout ce fragile équilibre qu'on avait eut tant de mal à instaurer...

Je m'en souviens comme hier.

Ce soir là, il y eut un terrible orage. Je n'en ai jamais vu de tel, et je crois que jamais je n'ai revu son pareil... Le vent soufflait puissamment, nos rideaux de fortunes battaient et claquaient dans l'air. Des gouttes d'eaux glaciales tombaient jusqu'à l'intérieur, par la moindre fissure, par la moindre ouverture. Des éclairs lumineux éclairaient rapidement nos murs avant de s'éteindre dans une détonation assourdissante.

Nous étions tous blottis contre un mur, les uns à côté des autres. Aucun n'arrivait à fermer l'oeil. Nous nous serrions, autant pour résister au froid que pour se rassurer. Durant ces deux années passées entre ces murs, jamais cette bâtisse ne nous avait semblé aussi lugubre qu'en cette nuit là.

Je ne sais plus trop combien de temps la tempête dura. A chaque seconde, nous pensions que le vieux toit allait être arraché. Shelby cherchait à nous rassurer du mieux qu'il le pouvait. Quelques-uns uns d'entre nous pleurnichaient dans leur couverture. Je pense que pas un seul ne dormait.

De temps en temps, on entendait un rire dément venir de l'autre coté du couloir. Il y en avait au moins un qui prenait bien ce déchaînement de la nature. Je m'imaginais bien ce vieux fou de Dust, les bras dressés vers le ciel, psalmodiant un autre de ses charabias mystiques...

Mais le fait est que nous ignorions ce qu'il faisait exactement. Nous nous en moquions, à vrai dire. L'important était alors que ce chaos cesse.
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Jour 60
Quand cet enfer s'est finalement arrêté, Dust proposa d'aller visiter les environs pour voir l'ampleur des dégâts. Quand j'y repense aujourd'hui, je crois plutôt qu'il espérait tomber sur les dépouilles de voyageurs surpris par la tempête...

Quoiqu'il soit, nous sommes partis dans les montagnes. Nous avancions, les pieds dans la boue. Autour de nous, beaucoup d'arbres étaient dévastés, brisés.

C'est là que l'un de nous l'a aperçut.

A première vue, c'était un amas de ferraille émergeant de la terre. Cette chose était de toute évidence très ancienne. D'après Shelby, la pluie avait provoqué un glissement de terrain, révélant cette antiquité au grand jour.

La partie émergeante était une sorte de cabine de Troop Carrier déformée. La boue remplissait le réceptacle de métal, mais une masse blanchâtre en sortait. Kurt essuya doucement le corps étranger et nous constatâmes avec effroi qu'il s'agissait d'un crâne humain. Quand cet homme était-il mort ? Ce n'était sûrement pas durant cette nuit... Et au vu de l'aspect bizarre de l'engin dans lequel il trônait, ce n'était visiblement pas durant ce siècle là.

Cette macabre découverte motiva Dust à fouiller plus minutieusement le carcan de terre qui enfermait l'antique structure. A l'aide de bâtons, de morceaux de tôles ou de nos propres mains, nous avons creusé ici et là. Mais personne n'osa libérer le squelette de son sarcophage bourbeux.

Après quelques heures d'acharnement et deux ou trois effondrements, les garçons mirent à jour une inscription sur une des parois qui devaient composer l'arrière de la machine. Protégée par la terre sous laquelle elle avait été ensevelie, la marque était restée relativement intacte. A sa vue, Shelby ne put réprimer un des ces jurons typiquement mercenaire. De son coté, le visage de Dust arbora un sourire éclatant, aussi sinistre qu'inhabituel.

Ce n'est que plus tard que le GenTank nous expliqua ce que signifiait K
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Jour 64
Peu de temps après, nous rencontrions pour la première fois Tremens. Il était grand et maigre, presque squelettique. Une partie de son crane était recouvert d'une sorte d'implant cybernétique, comme s'il avait eut un tragique accident.

Nous ne l'avions encore jamais vu, mais Dust semblait bien connaître cet étrange personnage.

Il l'amena auprès des engins que nous avions ramenés. L'homme les a minutieusement inspectés, son expression changeant continuellement à mesure qu'il fouillait les entrailles boueuses.

Suite à cela, les deux hommes semblaient être dans un état débordant d'excitation. Je me souviens qu'ils sont allés converser à l'écart sous le regard inquiet de Shelby.

Suite à cette première visite, Dust nous assigna diverses taches visant à nettoyer et réparer les antiques systèmes. Les rapineries et autres cambriolages nocturnes cessèrent pour entièrement se consacrer à cette tache. Il nous arrivait toutefois de procéder à une rapide expédition à Redrock dans le but d'y subtilisé des outils dont nous avions besoin...

Régulièrement, l'autre homme revenait avec un véhicule chargé de nourritures et de pièces détachées. Les cartons portaient divers emblèmes, Tangent, NEXT, Anges Déchus, ... Il inspectait aussi notre travail et vérifiait scrupuleusement certains montages.
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Jour 73
Notre groupe prit donc la direction de Neocron. La progression fut assez lente, ralentie par le poids du mécanisme. Et comme nous savions qu'un choc malencontreux signerait tout simplement notre disparition à tous sans la moindre chance de survie, nous redoublions de précaution au moindre passage critique...

Nous étions tous très anxieux. Nous nous inquiétions pour l'autre groupe, nous nous demandions si nous allions réussir, nous nous interrogions sur les conséquences de nos actes. Même Shelby semblait avoir perdu son habituelle assurance. Il scrutait continuellement l'horizon ou posait un regard inquiet sur nous, regard qu'il détournait aussitôt si jamais il croisait le nôtre.

En fait, comme si son instinct de guerrier pressentait le malheur qui suivit...

Nous les rencontrâmes aux pieds des montagnes. Ce fut d'abord deux éclaireurs qui se présentèrent à nous, deux hommes lourdement armés, visiblement très entraîné d'après leur manière de bouger, de parler...

Nous étions terrifiés. Dust avait insisté sur le fait que certains essaieraient de nous arrêter, qu'il fallait réussir coûte que coûte. Mais nous n'étions pas des combattants, juste une bande d'adolescents chapardeurs...

Un des hommes s'approcha en nous maintenant en joue de son imposante arme. D'une voix forte, il nous demanda de nous identifier.

Même si mes souvenirs son aujourd'hui encore très confus, je pense que c'est à ce moment là que Joe paniqua.

Il brandit sa vieille pétoire et fit feu sur l'éclaireur.

Je pense que je me souviendrais toujours de cette scène. La mort faisait certes partie de mon passé : l'homme de l'Outzone, William, ... Mais c'était la première fois que je la voyais directement à l'oeuvre.

Encore aujourd'hui, je me souviens de chaque détail. La mémoire est vraiment quelque chose d'étrange, de capricieux... Me souvenir si bien de ça alors que d'autres souvenirs si cher ont tendance à s'estomper.

L'arme de Joe n'était pas puissante, mais l'homme avait fait l'erreur de retirer son casque en espérant que cela l'aide à ne pas effrayer les enfants auxquels il avait à faire. Du coup, la volée de plomb lui ravagea la face. De son visage carré et buriné par le soleil, il ne restait plus qu'une large
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...
Leur chef finit par se faire entendre, mais c'était déjà trop tard. Les cris hystériques d'Alice furent vite les seules choses à se faire entendre dans cette plaine.

J'étais toujours dos contre le chariot renversé, mon arme inutilisée sur les genoux. Je tremblais tellement...

Je ne sais plus trop quel a été le déclic.

Peut-être de voir Randy courir à toute vitesse vers les montagnes... A moins que ce ne soit Sacha...

Je ne sais plus... Mais quoi qu'il en soit, je me suis redressée et j'ai couru. Je ne saurais vraiment dire pour où, ni pourquoi. La seule chose qui importait alors était de quitter le coin, cet endroit qui empestait la poudre, le feu et la mort...

Je n'ai arrêté de courir que lorsque mes jambes refusèrent de me porter d'avantage. Et même à partir de cet instant, je ne sais pas combien de temps il s'est encore écoulé avant que je ne prenne conscience de l'endroit où j'étais...

Finalement, mon esprit se calma, je put enfin recommencer à respirer normalement, mes membres n'étaient plus parcourut de tremblements incontrôlables... Lorsque je sentis que j'avais à nouveau pleinement le contrôle de moi-même, je sortis ma tête de l'herbe dans laquelle je l'avais plongée et regardai autour de moi. Apparemment, j'étais revenue au beau milieu des
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Jour 78
Mes errances m'ont finalement ramené devant les lourdes portes de Neocron.

Je m'étais juré de ne jamais revenir dans cette ville, de rester loin de ses rues. Mais je n'avais finalement nulle part où aller.

Je suis donc entrée, passant devant les Storm Bots comme si j'avais toujours été la bienvenue par ici.

Je n'ai pas pris le métro, j'ai préféré prendre la direction de l'Outzone, cet endroit que je connaissais le mieux. J'ai erré dans ces ruelles désolées, j'ai évité quelques tribus de mutants. Je me suis même rendue compte que l'un d'eux avait élu domicile dans notre ancien refuge.

Au fil du temps, j'ai effectué une série de petits boulots. Les hommes me regardaient d'un drôle d'air. Je devais non seulement me méfier des rebuts génétiques, mais aussi de mes semblables...

Petit à petit, j'ai réussit à mettre de coté un modeste butin qui me permit de m'installer dans l'appartement que j'occupe toujours aujourd'hui.

Pourquoi chercher mieux ? Je suis à l'abri, relativement au chaud...

Et je refuse de m'approcher trop de Plaza. Je crains toujours de rencontrer mes parents, s'ils sont toujours en vie... s'ils se souviennent toujours de moi...
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Jour 86
J'ai décidé d'aller à sa rencontre.

Peut-être est-ce aussi pour cela que j'ai rempli ce tas de feuilles jaunies...

Peut-être qu'elle ne se souvient en effet pas de moi, peut-être cherche-t-elle juste à aussi oublier tout ça.

Peut-être que nous avons grandit, mûrit, et que nous ne ressemblons plus à ces jeunes crédules que nous étions.

Quoiqu'il en soit, j'ai pris ma décision.

Je l'aperçois régulièrement du coté de Plaza, je ne devrais donc pas avoir trop de mal à l'interpeller. Et là, je lui montrerai tout ça, mes écrits. Je lui demanderai de le lire ce modeste journal.

Et alors que peut-être se souviendra-t-elle de moi.

Je ne sais pas si renouer avec une partie de mon passé, de ce passé, est une bonne idée, mais en parler avec quelqu'un me soulagerait, surtout avec une personne qui sait par quoi je suis passé, tout ce que nous avons enduré... Etre à égalité avec une autre me ferait du bien, m'ôterait un grand poids de la conscience.

Si jamais je réussis dans cette entreprise, si jamais elle m'écoute, je ne serai plus seule dans ce monde. Je serai alors enfin quelqu'un aux yeux d'au moins une personne.
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Epilogue
La femme était allongée sur le sol, au milieu de cette rue pourtant fort fréquentée. Les passants pressaient le pas en l'apercevant ou faisaient simplement demi-tour.

Ses yeux grands ouverts fixaient toujours le ciel, comme si elle cherchait à y apercevoir quelque chose. Mais son regard était désormais une vitrine vide témoignant de l'absence de toute vie.

Ce n'est que lorsque la flaque de liquide poisseux fut assez large pour dégouliner sur la largeur de la rue que les autorités décidèrent de faire quelque chose.

Ils enfermèrent le corps dans un sac et l'expédièrent avec les autres mendiants et miséreux décédés. Qui elle était, qui l'avait abattu et pourquoi, ils s'en moquaient assez. Leur rôle était de maintenir le calme dans ce quartier dédié au plaisir, à la joie. Et la présence d'un cadavre n'était pas pour plaire au client. Faire des enquêtes et arrêter des coupables n'étaient pas dans leurs attributions, ils n'étaient après tout pas du NCPD...

Lorsque le corps fut soulevé, nul ne fit attention au tas de feuilles qui glissa de la veste de la victime. Ces papiers couverts d'une maladroite écriture manuscrite furent piétinés avant d'être dispersés ici et là par les vents.

Quelques pages furent ramassées par un des gardes qui s'en servit pour essuyer ses bottes tachées par le sang du cadavre. D'autres furent récupérées par un clochard qui supportait mal le fond de conserve ingurgité quelques heures plus tôt.

Et de l'endroit où une vie s'était achevée, il ne resta bientôt qu'une tâche brune qui allait vite se confondre avec la couleur du béton.
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