Tu te trompes. Ce mouvement est en marche depuis longtemps et commençait à porter ses fruits, quand soudain boum, connerie de point médian à la place des parenthèses, du tiret suisse, de l'énumération des flexions et de la préférence aux graphies épicènes.
Tout le reste était en train d'entrer dans les usages tranquillement, maintenant, c'est une polémique stérile qui polarise aux extrêmes. Bref, on a perdu des dizaines d'années de travail de fond parce que le mieux est l'ennemi du bien, ça n'a pas l'air de super bien imprimer chez les aficionados de la cyprine.
Ton mouvement de fond, c'est trois connards en mal de notoriété à Saint-Germain en train de se croire les héritiers de Sartre, pas de quoi réveiller un volcan sous-marin.
Évidemment que le mouvement est en marche depuis longtemps, je n'ai jamais dit le contraire. Dès les années 80 cette question était posée largement, et à bien y regarder, le sujet existe depuis… bah… depuis que la règle « le masculin prend le dessus » s'est imposée, autant dire que ça date.
En revanche (quand on dit « par contre » on ne parle pas le bon français, d'après l'Académie
), je vois mal comment on peut estimer que ça commençait à vraiment porter ses fruits et que tout est niqué à cause du point médian. Il faut attendre 2019 pour que l'Académie se positionne en faveur de la féminisation, sous la pression et la montée en charge du sujet, et encore, pour eux ça ne doit pas être systématique.
En plus, on dirait que c'est le point médian qui pose problème d'après toi, alors que ça n'est qu'une forme de l'écriture en doublet abrégé (ouais du coup notre discussion m'a questionné, je suis allé chercher et c'est comme ça que les québécois nomment le fait de mettre les deux genres dans un même mot, contrairement au doublet qui est le fait de mettre les 2 genres dans la même phrase, mais je n'ai pas encore vu cette expression en « français de France »).
En soit, que les gens écrivent un point médian (ce que personne ne fait ou presque, puisque effectivement c'est un caractère difficile), en point, en parenthèses ou en tiret c'est la même chose. Sauf que le point (à défaut de point médian) s'impose plus facilement car c'est plus lisible que les parenthèses et prend moins de place que les tirets.
C'est donc bien la systématisation du doublet abrégé qui fait grincer des dents, et ça, c'est pas nouveau, et ça tient en général du même combat que la féminisation des noms de métier, puisque même dans le guide pratique du Haut Conseil à l'Égalité de 2016, au-delà des 10 recommandations faites (comme éviter les expressions sexistes et avoir recours à la féminisation des noms de métiers et titres), on retrouve également le doublet abrégé comme une forme acceptable quand on doit limiter la place ou qu'on ne peut pas recourir à des mots épicènes ou des mots englobants.
Bref, au-delà d'une petite frange réactionnaire qui ne supporte pas l'idée de féminiser les noms, c'est surtout pour les autres le fait qu'on touche à la façon dont on écrit les mots, et ça chez nous, ça ne passe jamais. Souvent sous l'idée que « c'est moche » ou « une aberration », mais qui vient en fait masquer l'idée que nous, on sait écrire, on en a chié pour apprendre, faudrait pas que ça soit pour rien non plus. On retrouve la même chose avec la réforme de 90.
[edit d'ailleurs c'est particulièrement visible sur les propositions de néologismes qui permettent justement d'éviter les sexismes et les doublets abrégés, comme iels, celleux, toustes, qui ont le mérite d'être lisibles et dicibles, et qui pourraient tout à fait entrer dans l'usage comme en Suède avec l'apparition d'un pronom neutre il me semble. Si ça n'accroche pas tant pis, mais que ce soit pour une bonne raison, pas une raison bidon du genre « c'est moche » ou « le français c'est comme ça et pas autrement ».]