Ce raisonnement n'a de valeur que si :
1) le niveau de production et de communication autour de chaque jeu est resté proportionnellement le même.
2) le marché est capable d'absorber l'intégralité des jeux quel que soit leur nombre.
3) ces jeux se vendent mieux lorsqu'ils sortent chez la concurrence.
4) (insérer ici d'autres interactions auxquelles je n'ai pas pensé)
La condition numéro 2 n'est pas remplie et à priori (je n'en ai donc pas la certitude), les points 1 et 3 non plus.
Tu tires une conclusion hâtive parce qu'elle correspond à ce que tu as envie de croire, pas parce qu'elle correspond à la réalité.
Je ne comprends pas la pertinence du 3. Imaginons que tu détiennes le seul magasin de la ville (ce qui est pratiquement le cas de Steam, en tout cas jusqu'à l'année passée, en-dehors des boutiques ne vendant que des jeux first party). Si un jour les ventes des nouveaux produits baissent, quelle pertinence de constater comment se vendent ces produits ailleurs ?
Pour le 2, c'est le contraire justement : à mon avis, le marché n'a la capacité d'absorber qu'un certain nombre de jeux. Je fais même une hypothèse plus poussée : plus il y a de jeux, plus le chiffre d'affaires de Steam grimpe, mais cette croissance est moins marquée que celle du nombre de jeux, donc le revenu médian de chaque jeu baisse. Donc plus il y a de jeux, plus Steam gagne, mais moins chaque éditeur gagne (c'est ce sur quoi est basé l'article).
C'est une hypothèse, dont on peut discuter. Les seuls éléments dont je dispose pour l'étayer sont :
- La corrélation entre l'augmentation du nombre de jeux, la croissance de Steam et la baisse du revenu médian (montrée par les différents graphiques de l'article.
- Le fait qu'en 2019, la première année pendant laquelle moins de jeux sont sortis que l'année précédente, le revenu médian a diminué.
En fait, la baisse du revenu médian, c'est une donnée assez indiscutable, de même que sa corrélation avec l'augmentation du nombre de sorties. Néanmoins, les questions suivantes sont plus ouvertes :
- Est-ce qu'un jeu A aurait rapporté moins d'argent s'il était sorti en 2018 plutôt qu'en 2017 ?
- Est-ce qu'un jeu sortant sur Steam a moins de chances d'être rentable s'il sort en 2018 qu'en 2017 ?
- Est-ce que les réponses aux deux questions précédentes nous dérangent ?
Le 1 n'est pas certain et il est de toute façon indémontrable. Je pense que oui, mais je ne pense pas qu'il soit possible de l'affirmer de manière certaine, même si toutes les données étaient disponibles.
Le 2 dépend d'une information que nous n'avons pas : quel est le coût de production des jeux sortant sur Steam ? Ce serait une information super intéressante, mais elle n'est pas disponible.
Le 3 est purement subjectif. Je n'ai aucun problème avec la vision selon laquelle il vaut mieux laisser le choix au consom'acteur, c'est en soi un point de vue purement libéral, qui se défend. Ce qui me gêne personnellement, c'est que si le revenu médian baisse, cela ne laisse que trois possibilités :
- La rentabilité des bons jeux baisse.
- La rentabilité des bons jeux demeure stable (voire progresse), mais il y a davantage de mauvais jeux (voire carrément des arnaques), qui font baisser le revenu médian.
- La rentabilité des bons jeux demeure stable (voire progresse), mais leurs revenus diminuent. Pour compenser cela, leur budget est réduit, ce qui leur permet de demeurer rentables.
Je ne vois aucune solution positive, en fait. Si les bons jeux sont moins rentables, cela me pose un problème. Si tout un tas de mauvais jeux sortent, je ne vois pas quel est leur apport pour Steam ; au contraire, je pense que cela peut diminuer la confiance du consommateur. Enfin, si les bons jeux sont obligés de réduire leur budget pour demeurer rentables, cela m'ennuie autant que la première possibilité.