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Le lendemain, je me suis réveillé sur les coups de midi. J’ai pris mon temps pour flâner dans la chambre, regarder ce qu’il y avait à la télévision. Puis j’ai passé un jean, un chemisier et je pris la direction du restaurant de l’hôtel. Le menu était vaste et j’ai pu à nouveau goûter à la qualité de la cuisine française. L’après-midi fut consacrée à la visite du Louvres. Je ne pensais pas que l’art puisse autant m’intéresser. Certaines œuvres arrivaient même à me parler. Pourtant je ne m’y étais jamais spécialement intéressée, trouvant que c’était de la perte de temps. Devant moi, il y avait un couple, qui flânait devant les tableaux. Alternant discussion sur ce qu’ils voyaient et bécotage. Ils semblaient heureux, pourtant ils n’avaient rien de particulier, un physique plutôt quelconque, leur connaissance sur l’art se restreignaient à des banalités que même moi je connaissais. Si je l’avais voulu, j’aurais pu les brûler vifs en moins de cinq secondes. Comment peut-on être si heureux alors qu’on est si fragile ? Des êtres si faibles ne valaient même pas l’intérêt que je leur portais. Que pouvait-il donc y avoir de si bien à être là ? Moi, j’étais en période de découverte de l’humanité, m’intéresser à l’art était donc une priorité, mais eux ? Au bout d’un moment, je senti que ma colère montait et je décidais de passer à une autre salle.
Il faisait presque nuit lorsque je suis ressortie, les musées fermaient tard ici, surtout l’été. Chez moi, les gens étaient déjà terrés chez eux, comme des cafards. Ici, les rues étaient bondées. A tous les coins de rues, il y avait des restaurants, de la musique, des gens qui riaient. Tout était si différent de ce que je connaissais. Etrange que la ville la plus représentée en super héros soit aussi vide. Je décidais de profiter d’une des tables libres pour m’installer et laisser courir mon regard. A peine cinq minutes plus tard, un jeune homme s’excusa de me déranger, plutôt beau garçon, je décidais de l’écouter. Il me proposa de se joindre à lui et ses amis afin de ne pas rester seul. Aucune trace de duperie, juste l’œil qui pétille, comme tous les hommes subjugués par la beauté d’une femme, mais suffisamment courageux pour venir l’aborder. Je décidais de me joindre à eux. Après tout, j’étais là pour apprendre, moi qui suis une solitaire, peut être que découvrir ce qui lie les Hommes serait intéressant.
La soirée passa étrangement vite, ses amis et lui-même étaient, comment dire… drôle. Oui c’est ça, au bout de cinq minutes, je n’avais déjà plus envie de les brûler vif. Après le repas, on passa de bar en bar, leur capacité à ingurgité de l’alcool m’impressionnait. On aurait dit Atmox avec sa foutue Vodka. Le soir, ils me raccompagnèrent jusqu’à mon hôtel, par prudence… S’il savait qu’à l’heure actuelle, j’étais sans doute la plus grosse menace de Paris. Ils me proposèrent de me faire visiter la ville, j’acceptais sans réticence, poussée par un désir étrange, une envie de les revoir. Etrange sentiment, il me rappelait ce que j’avais vaguement connu à la fac. Mais à cette époque, j’étais si obsédé par le pouvoir et mes recherches que j’ai utilisés cette faiblesse humaine pour arriver à mes fins. Attention, je ne suis pas en train de dire que tout d’un coup la gentille nature humaine me plaisait, non, mais au moins je commençais à comprendre ce qui poussait les gens à se lier, à espérer. Mais ce sentiment n’était rien en comparaison de ce que le pouvoir apportait. Aujourd’hui, mes recherches sur l’ADN combiné avec la machine portaient leurs fruits, j’avais mis au point des systèmes incroyables qui permettaient de modifier des organismes humains pour y incorporer des machines, de taille divers. Cela pouvait aller du remplacement d’un œil, très discret, à la création d’un exosquelette capable d’être connecté à une interface humaine, voir directement un cerveau. L’ADN était modifiée pour lui faire accepter les éléments mécaniques comme des ses propres éléments biologiques. Bien que peu intéressée par la création de machine à base de composé d’ADN, je préférais de loin partir de l’humain pour l’améliorer. Pour moi les machines étaient toujours limités, tôt ou tard, une meilleure machine apparaîtrait, l’Homme, lui, avait des ressources illimités, surtout nous, les méta-humains. Son ADN avait des millions de possibilité, c’était fascinant. Lorsque j’avais intégré la CYBERLEGION, mes études avaient connu un développement fulgurant. Ce groupe disposait d’un nombre de cobaye impressionnant et d’autres chercheurs m’avaient aidé sur des domaines dans lesquels j’étais moins à l’aise, comme la robotique. En contre partie, mes connaissances sur l’ADN avait permis d’avancer nombre de prototype. Certains que j’avais crée de moi-même, comme Monsieur Univers qui avait débarqué chez nous mal en point, après être passer entre les mains d’un charlatan, pour d’autres, j’avais aidé à améliorer des techniques, comme avec la fille de Recluse, Morgane, qui avait confectionné une technologie de pointe pour compenser son manque de pouvoirs, je l’avais aider à faire cohabiter plus efficacement son invention avec son ADN. Plus besoin de porter de gants, tout était maintenant intégré dans son corps. Elle avait gardé toute son humanité, bien que pour cette fille ce mot ne veuille plus dire grand-chose, tout en devenant encore plus performante. Sous ces apparences de jeune fille, se cachait un bijou technologique fait de chair et de robotique.
Pour mes nouveaux amis, toutes ces évolutions semblaient appartenir à la science fiction, ils étaient tout ce qu’il y a de plus normaux et fiers de l’être. Leur vie se résumait donc à profiter de ce qui était à leur porter. Et je commençais à mieux comprendre de quoi il s’agissait. Bien que ridicule, ce bonheur simple était ce qui leur procurait de la joie et leur personnalité s’était donc façonnée de manière à maximiser ces sensations pour en profiter le plus possible individuellement mais aussi collectivement. C’est ça qui leur apportait de l’espoir. Si on leur retirait, alors il perdait tout. C’était ça que défendaient les supers héros et c’est ça que je n’avais pas compris. Pour garder ça, il était capable de mourir. C’était pathétique, de vouloir mourir pour si peu, mais en même temps c’est ce qu’ils pouvaient avoir de mieux. Si on leur supprimait ça, c’est toute leur individualité et leur volonté qui s’écroulerait, faisant disparaître avec eux leur capacité d’être plus intéressant que des machines.
J’arrivais mieux à comprendre aujourd’hui, ce qu’ils pouvaient en retirer, ce besoin d’être en groupe, de partager des choses, de rire, d’avoir de l’espoir, du soutient, d’imaginer un monde meilleur, les faisait tout simplement exister. C’est sans doute ce qui s’était passé l’autre jour, lorsque sur le point d’exterminer une super héroïne, je dû battre en retraite sous peine d’exterminer tout un quartier de la ville. Je n’avais pas compris que cette jeune fille représentait un symbole pour eux et que bien que ces symboles soient souvent entachés, ils permettaient au peuple de continuer à croire.
Lorsque j’avais été surprise par ces deux héros alors que j’effectuais une fouille dans un bâtiment de la « Heros Corps », le combat avait rapidement tourné à mon avantage. Visiblement les deux héros étaient tombés sur moi par hasard alors que le premier, un ravageur n’était qu’au tout début de son apprentissage. Même avec le soutient sans faille de la défenseuse qui l’accompagnait, je m’étais facilement débarrasser de lui. Pour l’autre ce fut très différent. Heureusement, il s’agissait d’une empath et ses pouvoirs offensifs étaient trop faibles pour m’inquiéter, mais je ne parvenais pas à m’en débarrasser, très maligne elle arrivait toujours à m’échapper. Ma base de donnée m’avait facilement permis de l’identifier, il s’agissait de Dandrane, une jeune femme qui avait déjà prouvée plus d’une fois sa valeur. Notre combat dura plus d’une quinzaine de minute, tout le quartier était en flamme, les gens hurlaient. C’est à ce moment que Dandrane a aperçu un enfant qui cherchait sa maman. Il était juste à côté d’un immeuble en feu qui menaçait de s’écrouler. Le piège parfait. Elle se précipita sur l’enfant et le protégea contre elle juste à temps. Une partie du bâtiment leur tomba dessus, mais elle réussit à se dégager, le dos complètement carbonisé. Elle avait trop tiré sur ses réserves pour sauver cet enfant, elle ne parvenait plus à se soigner. Elle remit l’enfant à sa famille en titubant, puis tomba à genou. Le moment était venu de l’achever. Je me suis donc rapprochée d’elle, une boule de feu prête à jaillir lorsque soudain toute la population du quartier se dressa devant moi, me lançant des briques et me criant de la laisser tranquille. J’aurai pu, j’aurai dû tous les faire rôtir, mais je ne sais pas ce qui s’est passé, incapable de comprendre cet élan de courage, ce qui les avait poussé à se dresser contre moi, je me suis enfuie.
Aujourd’hui, c’est beaucoup plus clair. Cette gamine symbolisait l’espoir, son acte à fait naitre un profond sentiment d’héroïsme et les habitants n’ont pas supporté que cet acte soit un sacrifice, qu’il permette que je l’emporte. C’était sans doute trop dur pour eux de constater que leurs petites vies insignifiantes allaient disparaître. Plutôt mourir que de perdre l’espoir. J’ai observé de loin, je les ai vus ramasser les deux super héros et les conduire à l’hôpital. Je suis rentrée aux insoumises perturbée par ce que mes actes avaient déclenché chez ces gens.
Ce soir, j’avais compris une chose importante, d’où naissait ce sentiment et qu’il faudrait dorénavant que je compte avec. Je comprenais aussi pourquoi certains d’entre nous choisissaient de les défendre et de faire le bien. Cette sensation pouvait être si forte, proche de l’amour. Elle ne trouvait pas son explication dans la génétique, mais bien dans la personnalité de chacun. Le choix du bien ne pouvait donc pas être contrôlé, il dépendait de la sensibilité à la nature des Hommes. Sensibilité dont j’étais vraisemblablement dépourvue.
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