Double perspective

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Des changements sur le background d'Aeriths ont été effectués.
Il n'est plus question d'un programme mais d'une humaine.
Les récits qui vont suivre marqueront les autres changements de son passé, de son histoire et de sa personnalité.






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Elle avait reçu cette lettre sur le bureau, qui lui avait redonnée le sourire. Il ne fallait plus compter désormais sur l'inspectrice, mais sur l'agent Rush. Ses collègues la félicitaient pour cette promotion, ce qui la rendait d'autant plus enthousiaste. Elle plaçait ses affaires personnelles avec précaution dans une petite boite en carton, prête à emménager dans un nouveau bureau. Elle allait quitté Richland pour la grande ville, Downtown, dans le quartier général des agents fédéraux. On pourrait s'attendre à ce que cette mutation l'attriste, partir loin des siens et de tout ce qu'elle aime. Mais en réalité, elle avait toujours détesté cet endroit. La mort de ses parents, les scènes dramatiques qui s'y sont déroulées durant son enfance l'avaient rendue insensible, presque indifférente dans ce quartier où elle avait grandi. C'est comme ça qu'elle est devenue flic. Non pas pour faire respecter la loi mais pour se venger, et elle prenait un malin plaisir à s'acharner sur les délinquants qui avaient la malchance de tomber sur elle. Elle séquestrait parfois ces prisonniers dans le seul soucis d'obtenir ce qu'elle cherchait: des aveux. Ces méthodes d'investigations peu orthodoxe et ses agissements parfois brutaux avaient néanmoins le mérite d'être efficace. D'ailleurs personne ne lui reprochait, si ce n'est quelques envieux, jaloux de la voir si vite monter en grade.
Après de nombreux serrages de mains, et quelques accolades, elle prit le taxi qui l'attendait pour quitter les quartiers de Richland et s'installer dans l'appartement tout neuf qu'elle s'était louée au coeur de Center Park.
Elle n'avait aucun regrets.
Elle patientait dans l'ascenseur. Son coeur battait à mesure que les étages se succédaient. La nuit lui avait été courte et le sommeil lui manquait. Elle avait accumulé le stress au fil des heures écoulées. Son premier contact avec son nouveau employeur la mettait mal à l'aise, à commencer par les nombreux contrôles et fouilles vestimentaires.
Elle ajusta une dernière fois son uniforme, s'examina dans le reflet de la vitre et lorsque les portes s'ouvrirent, elle expira une dernière fois. Elle traversa l'immense couloir protégé par une dizaine d'agents de sécurité. L'un d'eux s'approcha d'elle, lui barrant l'accès vers la prochaine salle.

« Papier d'identité s'il vous plaît. »

Elle les lui présenta et après confirmation auprès de la direction, il inspecta une dernière fois son badge.

« Agent Spécial Sarah Rush. Félicitations pour votre promotion. Il vous attend. »

Le garde lui céda le passage et un autre vint lui ouvrir la porte. Elle scruta la pièce. Le bureau était grand et studieux, offrant une vue imprenable sur la ville. Un homme, grand et imposant de carrure, se leva.

« Mademoiselle Rush, par ici je vous prie. »

Il désigna la chaise en face de son bureau.

« C'est un plaisir de travailler pour vous Monsieur Gray.
»

Après qu'elle lui ait serré la main, elle s'assit et scruta attentivement les faits et gestes de son employeur. Ce dernier examina son dossier. Après quelques minutes passées, il rompit enfin son silence.

« A ce que je vois, vous avez eu de très bonnes appréciations de la part de vos supérieurs Mademoiselle Rush. »

Elle ne put s'empêcher de sourire. L'agent Gray lui tendit des papiers et lui prêta son stylo.

« Veuillez remplir le formulaire et signez ici je vous prie.
»

La toute nouvelle recrue s'empressa de satisfaire cette demande mais elle s'interrompit à la sonnerie du répondeur de bureau.

« Monsieur Gray, il est arrivé. Demande autorisation de laisser passer.

- Bien, faites-le entrer.
»

Elle remit les papiers à son nouveau patron et tous les deux se levèrent.

« Mademoiselle Rush, laissez-moi vous présenter l'Agent Spécial Renton, votre nouveau associé. Il vous guidera dans notre institution et sera un excellent conseiller pour vos premiers jours.
»

Un homme entra dans la salle, uniforme impeccable, s'avançant vers eux et donna une poignée de main.

« Monsieur Gray, puis se tournant vers la nouvelle gradée, Mademoiselle Rush, c'est un plaisir de collaborer avec vous. »

Son sourire narquois trahissait ses pensés. Son regard s'attardait sur ses jambes et remontait jusqu'au bassin.

« Mes félicitations pour votre promotion. On en attend beaucoup de vous. »
Cela faisait six mois qu'elle exerçait son nouveau job, à traquer ces « terroristes ». La pression était constante et la plupart des opérations étaient sans succès; ils leur filaient entre les doigts. Parfois elle doutait même de leur existence.
Elle se redressa du lit et inhala quelques uns de ses comprimés posés sur son chevet. Elle avait du mal à trouver le sommeil depuis cette descente... Ce soir-là, un rendez-vous avec l'un de ces « terroristes » avait été arrangé et elle avait été choisie pour le liquider.
Elle était postée dans l'ombre à guetter sa proie, prête à bondir sur elle. Et lorsqu'elle se retrouva en face de l'un d'eux, elle ne s'attendait pas à tomber devant une jeune fille, à peine la majorité. Elle n'eut pas le temps de réaliser ce qu'elle faisait qu'elle pressa la détente et lui donna plusieurs balles à bout portant. La « terroriste », inoffensive, accula sur le sol comme un de ces chiens victimes de combats acharnés. Peu de temps après, elle finit par ne plus bouger. L'agent Rush en tremblait. Depuis ses quinze années de loyaux et bons services, elle n'avait jamais eu à servir de son arme. Mais elle n'était plus cette simple inspectrice d'un petit quartier, et certaines contraintes de son nouveau poste l'obligeaient à commettre des choses contre son plein gré. Mais ce qui l'effrayait et la culpabilisait encore plus, c'est que sa victime avait souffert.
Son visage venait la hanter chaque nuit. Parfois en plein milieu de son sommeil, son téléphone sonnait. Au bout du fil, le souffle saccadée d'une personne. Au début elle pensait à une blague de mauvais goût mais les appels se répétèrent, comme si on la dévisageait. Comme si la présence au bout du fil était au courant de ce qu'elle avait fait ce soir-là. Sarah agonisait. Cette présence la suivait partout, même lorsqu'elle dormait à l'hôtel pour fuir ses peurs.
Le téléphone sonnait toujours.
Elle sonna trois fois à la porte de l'immeuble.

« Qui est-ce?
demanda une voix féminine sortit de l'interphone.

- Mademoiselle Rush
, répondit l'ex-inspectrice sur un ton hésitant, j'ai un rendez-vous pour une consultation à 14h30.

- Ah bien mademoiselle Rush, le Docteur Lilly vous attend. Vous pouvez entrer. »


La porte se déverrouilla. Elle suivit les indications sur les murs du couloir pour rejoindre la salle d'attente, et à son arrivée, elle fut surprise de voir qu'elle était la seule patiente. Elle prit un de ces magazines empilés sur la table que les médecins ont l'habitude de déposer pour leurs clients. Elle ouvrit et tournait les pages, faisant mine de lire. En réalité, Sarah était plongée dans ces pensées, plus préoccupée par ses rêves qui la hantaient que par l'actualité socio-culturelle de MegaCity. Elle avait hésité à venir ici, de peur qu'on la surprenne à faire une visite médicale chez la psy du coin. Cela pourrait avoir un effet négatif sur son CV. Qui voudrait d'une flic prise de crises d'angoisse et se goinfrant de pilules à longueur de temps? Cette idée-là de se faire capter lui donnait des crampes d'estomac. Mais ses pensées s'envolèrent rapidement lorsqu'elle entendit résonné le ton grave de ce qui semblait être un homme derrière la porte du cabinet de la psy.

« Whao ! Whao ! Whao ! Qui vous a parlé de dépression ici? J'ai juste dit que je tombais dans les vapes quand il fallait pas, ok?! »¹

Elle était persuadée d'avoir déjà entendu cette voix quelque part. Elle avait beau chercher, mais elle n'arrivait pas à coller une photo dessus. Soudain, les pas se rapprochèrent à vive allure. Prise de panique, elle cacha son visage avec le magazine qu'elle tenait. Elle regarda scrupuleusement l'homme qui sortit du cabinet et le reconnut immédiatement : c'était Mark Renton, son collègue de travail. Ses émotions reprirent de plus belles, sa gorge se noua et pria qu'il ne la dévisagerait pas. Mais le type était déjà partit avant même qu'elle releva la tête une seconde fois. La violence avec laquelle la porte avait claqué lui donna des frissons. Elle n'eut pas le temps de s'interroger sur le comportement inhabituel de son équipier que la psy l'interpella :

« Sarah Rush? »


Cette dernière se leva et s'empressa de redéposer l'hebdomadaire dans la pile. Elle lui donna une rapide poignée amicale, entra dans la nouvelle pièce après que le docteur prit soin de refermer la porte à clés.

¹ Lire Analyse celle-là!
« Je vous écoute, Sarah... ça ne vous dérange pas si je vous appelle Sarah?

- Non
, répondit brièvement Sarah.

- Bien. A chaque début de thérapie, je me dois de poser la même question à mes nouveaux patients... Qu'est-ce qui vous amène ici?

- Je... j'ai du mal à trouver le sommeil ces derniers temps... »
répondit-elle, hésitante.

Le docteur Lilly lui présenta un sofa situé en face de sa chaise. Elle s'allongea, un peu embarrassée par cette manière d'échanger des mots.

« Depuis quand vos troubles du sommeil durent-ils?

- Quatre mois.

- Vous avez songé à consulter votre médecin généraliste avant de venir me voir?

- Oui.

- Il a détecté quelque chose d'anormale?

- Bien sûr que non
, répondit-elle sèchement, c'est pour cette raison qu'il m'a envoyée voir un psy.

- Si je vous demande tout ça, c'est pour votre bien Sarah. Il serait inutile de débuter cette séance si votre problème est d'origine physiologique.

- Me voilà rassurer alors...

- Mon domaine, c'est la psychologie. Cela peut vous paraître idiot, mais il y a des résultats. Donc si maintenant vous pouvez répondre à mes questions, et avec le sourire, je serais d'autant plus heureuse de vous aider. »


Sarah se tourna vers la psy et fit un de ses plus beaux sourires forcés qui ne trahissait en rien son agacement face une situation qu'elle qualifierait de stupide.

« Continuons. Depuis quand datent vos derniers rapports sexuels?

- Pardon?
demanda la jeune fonctionnaire interloquée.

- Vous savez, quand deux êtres, généralement un homme et une femme...

- Merci, je sais ce qu'est un rapport sexuel mais je ne vois pas la relation avec mes insomnies.

- Simple question de routine.

- Ca vous dérange si je ne réponds pas?

- Oui. »


Sarah jeta un oeil sur sa montre. Les aiguilles lui indiquaient trente cinq. Elle souffla, décontenancée qu'il restait quarante longues minutes à tenir.

« Sarah
, reprit le docteur, vous n'êtes pas obligé de rester.

- Vraiment?

- Vous êtes libre de partir quand vous voulez.

- Hé bien dans ce cas...

- Mais cette décision ne résoudra en rien votre problème. Vous continuerez à mal dormir, les insomnies s'aggraveront avec le temps et je sais que ce n'est pas ce que vous voulez. »


La psy lui tenait la main, en guise de confiance. Sarah se mordillait la lèvre. Elle n'était pas du genre à se confier, elle détestait plutôt ça même. Elle n'avait qu'une hâte, c'était de partir mais le docteur avait raison, et la raison, c'est bien la seule chose qu'elle voulait à tout prix sauver dans ce monde de fous.

« Je savais que vous ferez le bon choix
, dit la psy en voyant sa patiente se réinstaller confortablement dans son fauteuil. Revenons à nos moutons. Alors?

- Quoi? vous souhaitez vraiment savoir?

- Oui. »


Sarah lui répondit. Puis, suite à la demande du docteur Lilly, elle commença à déballer sa vie. Son déménagement, son nouveau poste, la pression endurée, puis ses rêves et ses appels qui venaient la troubler. Elle lui raconta tout.

« Intéressant...

- Vous pensez que je délire?

- Non, je pencherai plutôt sur des troubles affectifs. Je vous prescrit comme hyptoniques des arkogelules eschscoltzia en attendant notre prochaine rencontre. Vous verrez, ce sont des petites pilules. Elles sont soit bleues, soit rouges. Vous avez le choix. »
Sarah fixait l'écran, plongée dans ses pensées.
Alors c'est comme ça que je vais mourir hein? Ce n'est pas du tout de cette manière que j'imaginais partir.
C'étaient les derniers mots de Oscar Gabe, son détenu.

Elle pressa le bouton d'un doigt. Son ordinateur se mit en route. Elle se posa sur son siège, épuisée par la rude journée de travail qui venait de se terminer. Elle avait eu pour obligation d'assister à la condamnation d'un de ses détenus. L'individu, considéré comme extrêmement dangereux, était recherché depuis plusieurs mois pour multiples homicides et divers actes de piraterie informatique. Il s'était déjà échappé une fois de prison. Personne ne sait à ce jour comment il s'y était pris mais après son évasion, il a commis plus d'une dizaine de meurtres et pour les autorités, il n'était plus question que l'homme aille plus loin. C'est Sarah qui réussit à l'arrêter dans sa frénésie. Elle n'eut aucun mal à lui mettre les menottes. Depuis ce jour, elle fut souvent contrainte de lui rendre visite dans la prison de haute sécurité où il était incarcéré pour compléter le dossier qu'elle reconstituait. Au fil des visites, elle entreprit de décrypter le profil de Oscar. Elle avait l'habitude de ce genre d'individu mais elle sentait qu'avec lui, tout était différent. Il était calme, posé, conscient, rien qui pouvait faire penser que cet homme était un redoutable tueur. Il était tout à fait équilibré. Mais ce qui l'intriguait le plus chez lui c'est qu'il ne cessait jamais de répéter la même phrase : rien de tout ça n'est réel Sarah, rien de tout ça n'est vrai.
Aujourd'hui, elle devait faire face à lui pour une toute dernière fois. Elle observa le médecin injecté la substance léthargique par voie intra-veineuse sur son détenu. Quelques secondes passèrent, ses paupières commencèrent à se fermer, et dans un dernier effort, il prononça à voix basse ses derniers mots. Le cardiogramme qui oscillait de plus en plus doucement, s'arrêta. Oscar était mort.

De la sueur suintée sur son front. Les chaleurs excessives du mois d'août l'obligeait à déboutonner régulièrement le col de sa chemise. Elle prit la bouteille d'eau posée sur son bureau et but une gorgée pour se rafraîchir. Elle s'empara en même temps de sa boîte de cachets qui traînait parmi la paperasse. Sa déception fut grande, lorsqu'elle remarqua que la boîte était vide. Merde ! dit-elle à voix basse. La psy lui avait prescrit des pilules pour remédier au stress qu'engendrait son nouveau poste. Elle se sentait beaucoup mieux depuis son traitement. C'était devenu vital pour elle. A un point qu'elle continuait à prendre ses gélules alors que sa cure était terminée depuis un mois. Seulement c'était le seul moyen pour elle de surmonter quotidiennement les difficultés de son travail et d'avoir enfin des nuits plus paisibles.
Sarah qui tenait la boîte entre ces mains, l'examina méticuleusement.
Citation :
Neuroslum

Lire attentivement la notice avant utilisation.
NE LAISSER NI À LA PORTÉE,
NI A LA VUE DES ENFANTS.

Pas de précaution particulière de conservation.

Composition :
Phenibut, Piper Methysticum, Melatonin, Hydroxypropyl Methylcellulose, Peppermint Oil, Menthol, FD&C Yellow No. 5, Modified Starch, Carboxymethyl Cellulose, Propylene Glycol, Polysorbate 80, Arabic Gum, Glycerol, Glyceryl Monostearate, Sucralose - 12.1mg.

Fabricant :
Ashford Foundation
One Watergate Avenue
MegaCity, MC 10280, USA


Médicament autorisé n°355 823.4
Satisfaite d'avoir trouver ce qu'elle cherchait, elle lança son navigateur web et effectua une recherche sur le Net. 'Neuroslum' pour une vie sans stress. Elle ajouta le produit dans son panier virtuel. Elle créa son compte afin de s'enregistrer comme client, compléta le formulaire mais à chaque fois, elle butait face au même problème.

Mot de passe invalide. Votre mot de passe doit contenir au moins 6 caractères.

Sarah observa autour d'elle en espérant trouver une solution. Elle ne voulait pas risquer de mettre n'importe quoi car elle savait qu'elle ne s'en souviendrait plus. Ces yeux se posèrent sur la boite vide de pilules. Elle saisit à nouveau son nouveau mot de passe et un sourire illumina son visage lorsqu'un message lui félicita que son compte a bien été enregistré. Elle se détendit sur son siège. Cet effort bien que sommaire avait épuisée toutes ces ressources. Elle profita de ce moment pour fermer les yeux et se reposer un peu. Elle n'avait qu'une hâte; c'était ces pilules.
Les mois s'écoulèrent sans que vraiment rien d'excitant n'arrive dans sa vie. Elle restait des heures, des jours, obnubilée devant son écran, avec sa boîte de pilules à ses cotés. Elle poursuivait ses recherches sur ces "terroristes" mais elle avait plus l'impression de traquer des fantômes qu'autre chose. Avec le temps, ces derniers se sont montrés plus discrets, ralentissant considérablement l'enquête, qui en était retournée au point mort.
Elle lisait et relisait les tonnes d'articles de presse qui jonchaient sur son bureau, à l'affût du moindre indice pouvant relancé les recherches. Parfois même, elle passait du temps sur les chats privés où hackers se côtoyer. Elle espérait que ces derniers puissent la renseigner. Mais rien. Plus le temps passait, plus elle voyait s'envoler l'espoir de retrouver ces "terroristes".
Le moral à zéro, elle était sur le point de renoncer. Ajouter à cela, les trips occasionnels dont elle suspectait ses pilules d'en être à l'origine. En effet, durant ses interminables nuits blanches, elle se mettait à avoir des hallucinations; des cryptogrammes fluorescents s'écoulaient sur son écran.

Elle s'était prise d'affection avec certains des hackers. Elle leur parlait de ses problèmes au bureau, en veillant à ne rien révéler de sa réelle identité.
Et puis un soir, alors qu'elle avait lâché l'affaire, elle se confia et évoqua ses étranges visions sur le chat. Immédiatement, elle reçu un message privé d'un des utilisateurs connectés au salon :

Citation :
Black_Knight> Tu commences à voir la vérité...

You begin to see the truth...
Ces mots résonnèrent dans sa tête. Elle avait passé du temps à étudier les dossiers et les analyses de profilers, et certains mots, certaines phrases, étaient typiques des personnes qu'elle traquait.

Citation :
Aeriths> Suis-je folle?

Am I mad?

Black_Knight> Non. Tu n'es pas folle.

No, you're not mad.

Black_Knight> Comme beaucoup d'autres, tu n'es qu'un pion sur un vaste échiquier.

As many others, you're just a pawn on a wide chess.


Elle pianota sur son clavier, poursuivant la conversation.

Aeriths> Quel échiquier?

What chess?

Black_Knight> Celui qui est une prison pour ton esprit.

One which is a jail for your mind.

Aeriths> La Matrice?

The Matrix?
Black_Knight resta sans réponse avant de se déconnecter du salon.
Elle était figée devant son écran, encore sous le coup de l'émotion. Alors qu'elle était désespérée il y a quelques minutes, là voilà de nouveau radieuse. Elle avait réussi à entrer en contact avec l'un de ces mystérieux et populaires « terroristes ».
Elle éteignit son ordinateur, partit se coucher, le cœur encore palpitant par cette rencontre fortuite.
Son téléphone la réveilla en sursaut, la tirant d'un vilain cauchemar. Dehors, le temps était plutôt morose. Elle constata par la fenêtre l'impressionnante pluie de grêle et les violents orages qui s'abattaient sur la ville. Elle avait du mal à réaliser que c'était le matin. Elle reprit toute son attention au téléphone qui continuait de sonner.
Elle décrocha et à l'autre bout du fil, entendit la voix d'un homme.

« Venez au Maribeau Stairwalk à 8 heures 12 précises et seule. Ne soyez pas en retard.

- Qui êtes-vous?
»

On avait raccroché. Elle resta un long moment le combiné scotché à son oreille. Qui était ce type et que lui voulait-il? Elle fixa le réveil. Il était 7.45 AM. Sarah avait du mal à se lever d'elle-même ces derniers temps. Les nuits passées devant son ordinateur à retrouver Black Knight l'avait complètement épuisée.
Elle hésita à y aller un court instant. Finalement la curiosité prit le dessus. Elle ramassa ses habits traînant par terre, s'habilla rapidement et pris les clés de sa voiture.

8.10 AM. Elle se rendit en haut des escaliers et scruta les alentours. C'était l'heure de l'embauche. Les personnes qu'elle croisaient marchaient sans se soucier du monde autour d'eux, presser par le temps. Soudain, la cabine téléphonique qui se tenait à quelques pas de là sonna. Elle regarda sa montre, il était 8.12 AM. Le téléphone sonnait toujours, avec insistance. Cela l'intriguait. Elle partit rejoindre la cabine et décrocha.

« Bonjour Aeriths. »

Elle n'en revenait pas. Ses yeux étaient grands ouverts. Elle reconnaissait cette voix masculine. C'était la même que celle des enregistrements qu'elle avait eu à faire à son bureau. De l'autre côté de la ligne se trouvait l'un des plus actifs et dangereux terroristes recherché par les autorités.

« Ednix!?

- En personne. Tu as visé juste.

- C'était donc toi la fois... mais comment as-tu fait pour me retrouver?

- C'est un peu compliqué à expliquer maintenant. Nous manquons de temps toi et moi. Je vais donc être bref; une Audi noir est stationnée de l'autre côté de la route. Tu la vois?

- Oui.

- Monte à l'intérieur. Mon équipe t'y attend.
»

Elle raccrocha le téléphone et se dirigea, sans plus attendre, vers la voiture noire aux vitres teintées. Une femme aux cheveux bruns, plus jeune qu'elle, lui ouvrit la portière.

« Grimpe. »

Elle s'engouffra dans la voiture. À peine qu'elle eut le temps de refermer la portière, que deux flingues se braquèrent sur elle. Elle s'apprêtait à sortir son pistolet de sous son blouson mais la jeune femme aux cheveux bruns lui colla son arme sur sa tempe.

« N'y pense même pas. »

Cette dernière retira son arme de son holster et lui ôta son portable. Elle abaissa la vitre, et expulsa les objets hors de la voiture.

« Je comprends rien. Qu'est-ce que vous me voulez? »

Aucune des trois personnes présentes lui répondirent. Le deuxième homme armé, qui se trouvait sur la place passager, fit signe au conducteur de démarrer.

« Phibie. Fouille-là. »

La jeune femme aux cheveux bruns effectua une fouille rapide sur Sarah des pieds à la tête. Elle en sortit de la poche intérieur de son blouson un portefeuille.

« Agent Special Sarah Rush. Elle bosse pour le gouvernement, annonça celle-ci en montrant la carte de visite à son équipier.

- Il nous l'avait dit, répondit ce dernier l'arme pointée sur l'ex-inspectrice, mais elle n'est pas l'une des leurs.

Sarah resta dans l'incompréhension. Phibie sortit un étrange appareil qu'elle passa au peigne fin sur elle.

« Panique pas. C'est juste un scanner. On vérifie que tu n'aies pas ramené un mouchard ici. »

Après une rapide vérification, la jeune femme aux cheveux bruns déclara sur un ton rassurant :

« Elle est clean ».

La voiture fonça à vive allure sous un ciel obscurci par la pluie battante. Elle s'engagea dans une ruelle très étroite avant de s'arrêter quelques centaines de mètres plus loin.
Après une demi-heure de route, ils sortirent enfin de la voiture, escortant Sarah, et entrèrent dans l'usine abandonnée qui se dressait devant eux. À l'intérieur, on entendait la pluie cognait contre la taule. Sarah n'était pas rassurée, loin de là. Elle commençait à regretter de s'être embarquée dans cette galère. Le groupe se dirigea dans l'ascenseur, seul instrument encore état de marche en ces lieux désaffectés, et descendirent deux niveaux plus bas.
Les portes du sous-sol s'ouvrirent, débouchant sur une gigantesque salle où trônaient de colossales machines.
Les journaux, déchiquetés et rongés par l'humidité, s'étalaient par terre. Ils étaient dans une ancienne imprimerie, d'un siècle passé, d'une époque révolue.
Ils traversèrent la pièce.
À l'opposé, un homme semblait guetter leur arrivée. L'individu était grand, dissimulé dans un manteau noir. Le groupe qui escortait Sarah jusque là, la quittèrent sans un mot, s'éclipsant dans la pièce voisine.

Elle était seule à présent. L'individu au manteau d'ébène se tenait droit devant elle. Ses effets réagissaient comme un véritable bouclier, filtrant la moindre émotion. Et pourtant, derrière les verres miroitantes qu'il arborait, elle n'avait aucun mal à l'identifier. Ednix, le hacker suprême, une légende virtuelle, était en face d'elle, avec sa pléthore de réponses. Il l'invita à s'assoir, lui expliqua et la confronta à un choix. Celui de toute une vie; bleu, elle continue à mener sa petite vie de flic dans un monde qui ne tourne pas rond; rouge, elle descend avec eux au fond du gouffre.
Elle hésita. D'une main incertaine et tremblante, elle prit la pilule rouge et l'avala d'un trait.
Il la guida dans la salle d'à côté, où les autres l'attendaient. On l'installa. On la prépara et Sarah attendit à son tour que la vérité vienne à elle. Cette dernière la surprit, avec sa douleur, mais Sarah souriait. Elle regardait enfin à travers la réalité.



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FIN
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