Se faire au rythme de vie d'une telle ville fut difficile. D'autant plus que je n'avais aucun point de chute, aucune famille en Ascor. Une fois passée l'admiration des premiers instants, je me guidais dans les rues pavées à la vue de la Tour de Melandru. En effet j'avais pensé que c'était certainement l'endroit où je pourrais le plus facilement demander conseil.
À force de parcourir les ruelles, je me rendis compte que j'attirais l'attention. Sans doute à cause de mon apparence...j'étais simplement vêtue de mes habits de druide que je porte habituellement quand je sors en forêt. Je portais mon arc dans mon dos et une simple besace en cuir battait ma hanche droite au rythme de mes pas. Je ressentais non seulement les regards qui se détournaient à mon passage, mais j'étais également sûre qu'on me suivait. Ignorant totalement les motivations de mes poursuivants, je continuais ma route sans me retourner. En pressant légèrement le pas, je tournais dans une ruelle plus sombre, déterminée et préparée. Une fois bien avancée, je m'arrêtai et me baissai, opérant rapidement. Très vite, je vis quatre hommes m'entourer. Ils se tenaient droits, voulant m'écraser de leur supériorité tout acquise qu'ils avaient dans cette situation. Je me relevai doucement, ramassant un petit papier au sol que j'avais laissé tomber. Les regards de ces individus étaient sournois et vicieux, et surtout intéressés. Un petit sourire accompli ornaient leurs visages plus ou moins soignés selon les cas, tandis qu'ils regardaient un peu plus bas que mon visage. Je cherchai rapidement des yeux une cinquième personne car j'étais certaine qu'ils étaient plus nombreux à me suivre, mais en vain. Mon intuition m'avait certainement trompée, cela ne m'étonnait guère car l'environnement était totalement nouveau pour moi.
Mais à ce moment, il n'y avait plus de temps à perdre, je devais réagir avant que ça ne tourne mal. Je m'élançai en arrière entre deux des types, prenant un appui fugace sur une marque presque invisible sur le sol. Je me retourne immédiatement après, pour protéger mon visage, et au même instant un nuage de poussière s'éleva de là où je me tenais quelques fractions de secondes auparavant. Mon piège avait parfaitement fonctionné, les quatre malappris étaient aveuglés, les mains crispées sur leurs visages, leurs yeux les faisant profondément souffrir. Sans prendre plus le temps de m'apitoyer sur leur sort, je retourne vers la rue principale d'Ascor.
Arrivée aux abords du petit carrefour, je dû m'arrêter de nouveau. Un homme couvert d'une armure de plate bleutées, une épée longue à l'abri dans un fourreau dans son dos, bloquait l'accès à la grand-rue. Cette fois, ce n'était pas possible de refaire la même chose. De plus la retraite était coupée, car les hommes d'avant se remettaient...le regard inquiet, je parcourais les environs, mais il n'y avait que des murs et des cloisons. Je ne pouvais prendre que deux directions, et les deux étaient bloquées. L'appréhension se transforma vite en panique. Je n'avais aucune idée de comment je devais réagir en un tel lieu, tout était tellement nouveau pour moi. À cet instant, je ressemblais certainement plus à une bête apeurée qu'à une jeune fille civilisée. J'ai pendant de longues secondes fixé l'homme en face de moi. Mes yeux verts plongeaient dans ses iris d'un bleu d'azur, et inversement. Ce regard m'a semblé rassurant...et il m'a donné le courage. Le courage de me précipiter vers lui, en visant le carrefour, en espérant follement lui passer au travers. Ce qui bien évidemment n'arriva pas. La dernière chose dont j'ai eu conscience avant de sombrer fut la douleur de se heurter contre un mur, lancée à pleine vitesse.
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