[Texte court] Devenir grand...

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Petit plaisir que celui-ci, petit texte écrit rapidement, mais réellement différent des précédents. L'image montrée est pour moi une absurdité, qui peut créer débat, pourquoi pas.

Le ton est mélangé, entre souvenirs d'adulte et songes d'enfant. J'espère simplement que cela ne nuira pas à votre lecture.


Franck.

Citation :
« As-tu compris ce qu’ils t’ont expliqué ? »

« Qui ? »

« Les médecins, et tes parents peut-être aussi. »

« Ils ont dit que je devais arrêter le sport, donc le basket aussi… »

« Mais as-tu compris pourquoi ? »

« A cause de mes malaises, le docteur a dit que c’est parce que mon cœur est fatigué. »

« C’est vrai oui… et qu’en penses tu toi ? »

« J’aurai préféré pouvoir jouer le dernier match, on était en finale en plus… j’ai demandé mais ils ne veulent pas attendre. »

Le sourire d’un médecin de plus, qui pour une fois était sympathique, lui au lieu de quelques tests offrait de quoi écrire et lire. Encore qu’après réflexion, c’est un dessin qu’il attendait de moi, mais est ce important aujourd’hui ? Cela date, les mots ne sont plus certains, mais voici qu’il me plait à les conter sur cette page… il aurait bien rit en me voyant en cet instant répondre aux questions d’il y a tant de temps. Mais pourquoi pas ? Il faut bien le faire un jour…

La pièce était assez simple, lui de son coté son bureau et sa chaise, moi du mien sur un tabouret devant une table basse. Quelques jouets sur le coté, mais j’étais bien trop grand ne serait ce que pour y penser, ou bien trop fier peut-être… cela commence à dater pour s’en assurer. Les murs blancs, la pâleur des choses présentes, tout rappelait l’hôpital, même l’odeur y était ! Cette odeur étrange que tous soutiennent qu’elle n’existe pas, ce fut l’une des premières fois qu’elle me dérangea autant, et bon sang qu’il m’eut plu que ce soit la dernière ! Dur de tout avoir.


« Et sais tu ce que cela signifie ? »

« De ? »

« Et bien... que ton cœur soit fatigué. »

« Que je vais mourir. »

« Humm… »

C’est un visage d’enfant que l’on doit supporter, je n’aimerai pas être à la place de celui qui assis sur sa chaise doit faire comme s’il comprenait. Quelques gestes de la tête, comme bien des gens, ces mouvements lorsque l’on veut de donner consistance. La voix n’est pas tremblante, mais peu s’en faut. Interrogative, c’est le mot qu’il faut utiliser je crois… un peu comme lorsque votre professeur du temps de l’école vous demandait d’expliquer votre pensée, parce qu’il n’ose dire faux ce qu’il ne connaît.

« Sais tu ce qu’est la mort ? »

« Oui, c’est comme Papy, l’on ne voit plus les gens. »

« Et tu n’as pas peur de cela ? »

« J’ai pas envie de répondre… et pas envie de partir… »

« Que désires tu toi ? »

« Jouer la finale, mais ils ne veulent pas attendre. »

Bon, peut-être cette partie est elle rajoutée, j’avoue n’en avoir qu’une très vague idée. La question est cet empressement de pousser l’enfant vers ces besoins d’adultes, avoir peur de la fin, alors que le début même n’est pas compris. Est il réellement choqué avant que la question n’ait été posée ? Comprend il seulement ce qu’est le néant ? Difficile de savoir… c’est une affaire de grands. Et puis le spécialiste est là, celui qui offre le papier, pour dessiner.

« Pourquoi je suis malade ? »

« Malade ? Comment ça ? »

« Bah je viens ici souvent, et t’es médecin non ? »

« Je suis médecin oui, mais je ne soigne pas le corps, juste l’esprit des gens. »

« Ca veut rien dire, j’ai pas de médicaments. »

« Parler parfois aide beaucoup, n’as-tu rien à me dire ? »

« Non… juste que les gens me regardent comme si j’étais différent… comme si j’étais malade. »

« Je comprends… et si je te demande de me dessiner quelque chose, tu penserais à quoi ? »

Là on cherche comment lui dire, ce n’est pas que ce n’est pas sympathique en maternelle, mais maintenant qu’on est grand, les fleurs, les arbres et les nuages, on s’en moque un peu. A quoi ça sert de dessiner, surtout s’il ne donne pas de sujet ? Et vraiment, pourquoi il essaie de trouver d’autres problèmes que ceux qui existent déjà ?

« Pourquoi je vais mourir ? »

« Et bien… »

« J’ai pas été sage ? »

« Tu sais, ce n’est pas de ta faute, c’est une maladie… en quelque sorte. »

« Alors pourquoi ma mère elle pleure le soir ? Je l’entends souvent… »

« Parce que c’est difficile aussi pour elle, même les grands parfois pleurent. »

Sans doute la chose qui me faisait le plus peur lorsque enfin je le comprenais… seuls mes parents en pleuraient. Forcément l’on a fait quelque chose de mal, la dernière fois que c’était arrivé c’était quand plus petit j’avais dit que jamais je ne les aimerai. Mais pourtant à sept ans c’est différent, l’on est grand. Alors pourquoi est ce différent ?

« Et comment as-tu aujourd’hui ? »

« Je sais pas… j’ai pas été à l’école hier, j’étais chez les docteurs. »

« Quelques problèmes ? »

« Non, rien. »

« Dis moi… tu ressens quoi toi quand tu y penses ? »

« Je sais pas… juste je veux plus que maman pleure. »

L’on ne devrait jamais imposer ceci, perdre un enfant. Quels parents sont aptes à vivre la chose ? Qui peut se dire prêt à voir mourir ceux qu’il aime ? Et que se passe t il quand c’est soit même qui doit partir ? Je remercie le jour où cet homme me l’a expliqué, ces semaines où il me parlait, et moi j’écoutais. Je remercie cet homme qui à un jeune enfant insouciant inculquait la charge d’un adulte, celle de devoir dire au revoir, d’espérer autre chose que voir ses copains lorsqu’il s’endort le soir. C’est un merci oui, un vrai… celui d’offrir le chemin des ans à celui qui ne les verra jamais. C’était un enfant… mais la mort appartient aux grands.

« Dis moi Franck… comment réagis tu lorsque le médecin te parle de ce que tu as ? »

« J’ai peur… »

Merci à ceux qui l'auront lu, et maintenant l'un de vous saurait il expliquer pourquoi ceux qui se disent savant se permettent d'ôter l'insouciance, ce dernier cadeau que peut posséder un enfant ?


Bonne nuit à vous.
Citation :
Provient du message de Une plume
Merci à ceux qui l'auront lu, et maintenant l'un de vous saurait il expliquer pourquoi ceux qui se disent savant se permettent d'ôter l'insouciance, ce dernier cadeau que peut posséder un enfant ?


Bonne nuit à vous.
- je vais peut-être dire des conneries car je ne sais pas, je vais juste essayer de résumer ma perception de la chose.
face à la mort d'un enfant, je ne pense pas qu'un adulte, fut-il médecin et part là même, confronté plusieurs fois à ce drame, puisse s'insensibiliser au point d'en être indifférent.
la mort d'un gosse porte en elle quelque chose de révoltant, d'inacceptable.
l'adulte n'a plus accès à l'insouciance et le médecin, de part sa formation scientifique, cherchera refuge dans la rationalité même.
peut-être n'étaient-ils plus à même de concevoir ton insouciance, peut-être alors ont-ils tout simplement cherché à t'aider, à te protéger, mais à leur manière et avec ce qui leur restait : leur rationalité.
peut-être que tout ceci n'est que de la psy de programme-télé et que je ferai mieux d'aller me pieuter hein, mais ton message m'a retourné.
je me rappelle qu'enfant et devant l'incompréhension des adultes je me disais : il faudra que je m'en rappelle quand je serais grand... mais j'ai tout oublié.
comme si le passage à l'âge adulte avait effacé mes messages et interdit le retour vers mes niveaux de compréhension précédents...

alors un jour tu te retrouves devant un gosse et tu n'as plus, pour le comprendre, que l'intuition et/ou la réflexion...
quand l'intuition manque, le gamin n'a pas de bol.
Arf, ce texte...
Du point de vue du médecin, son impassibilité c'est pas vraiment de sa faute, comment vous réagiriez si vous deviez expliquer à un enfant qu'il va mourir? Lui annoncer en pleurant style chutes du Niagara le rassurerait pas, l'absence d'expression est plus facile à supporter pour l'enfant comme pour l'adulte.

Du point de vue de "l'insouciance ôtée", j'ai pas vraiment d'avis...
Un jour Eltsyr (Kronos), m'a envoyé une adresse de site. Sur ce site j'y ai trouvé un témoignage d'un couple ayant perdu leur petite Lou-Salomé qui a trois ans avait un cancer au niveau du ventre....témoignage jour après jour sur trois années d'hôpital, d'enfer, de petits espoirs.... pour finir par la disparition de cette petite enfant....

Ton histoire me rappelle celle de Lou-Salomé en beaucoup, beaucoup, beaucoup plus court.

Que dire? Un jour après la lettre d'Eltsyr, ma fille Emeraude tombait malade d'une maladie que je ne connaissais pas. Il ya la peur, les médecin, l'hôpital....que dire à l'enfant, pourquoi, ne peut elle pas bouger comme sa soeur, pourquoi elle?

C'est difficile. C'est à voir et à vivre au cas par cas....

En ce qui concerne les médecins....Il y en a qui ont du coeur, d'autres qui sont plus détachés, d'autres qui dragouillent les infirmières et qui ont leur paye à la fin du mois...que dire?
Ils en ont trop vu, ou pas assez, pour les petits nouveaux tout jeunes qui se donnent à fond, mais qui seront blasés dans quelques années...

Mes filles cotoient la mort régulièrement. Abuela y Abuelo ( mes grands parents) sont vieux, malades et l'un est atteint d'alzheimer. Demain, ils ne seront plus là, dit Jade. Emeraude dit, la mort c'est quand on voit Yahwé pour de vrai, qu'on met un cailloux sur la tombe et qu'on met un foulard noir sur les miroirs.
Emeraude me dit souvent qu'elle ne veut pas attraper une maladie comme la petite Lou-Salomé.

Que dire?
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