La saga de Danjel

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Jusqu'aux évènements qui bousculèrent cruellement son existence, sa vie de toute jeune fille n'avait été vouée qu'à servir ses parents.
Elle se prénommait Agneta.
Son père, Hrolf le chasseur, et sa mère Sigurd, bonne épouse cimmérienne, habitaient une misérable masure nichée au plus profond de vallée de Conall.
Les chasseurs et les guerriers rôdaient souvent dans les alentours car il se disait que la fille était une des plus blondes et des plus belles de toute la contrée. Mais, à leur grand dépit, l'arc et la lame du père étaient autant craints qu'était convoitée la beauté de sa descendance.
Agneta resta donc vierge jusqu'à l'aube de sa vie d'adulte, en dépit des désirs qu'elle suscitait.
La vie des membres de la petite maisonnée était rude, simple, mais paisible.
Ils survivaient avec courage aux atroces rigueurs de l'hiver, bénissant à l'occasion la vigueur que Crom leur octroyait par l'appartenance à leur race.
Ils survivaient à la faim aussi. La faim qui parfois tenaillait les estomacs quand les bêtes elles-même ne survivaient plus.
Ils survivaient à la peur de l'inconnu, à la peur de la sorcellerie, omniprésentes dans l'atmosphère et les esprits.
Leur destin aurait pu être aussi banal et glorieux de simplicité que bon nombre de leurs ancêtres, si un jour ...
...un jour où les vanirs surgirent.
Aussi silencieux qu'ils étaient cruels.
Les torches vives et flamboyantes embrasèrent la misérable masure au plus noir de la nuit.
Hrolf, surpris dans un profond sommeil, périt avant même avoir pu saisir son épée. Une hache bien aiguisée, qui n'en était pas à son premier méfait, lui défonça proprement le crâne.
La mère et la fille furent les proies innocentes d'une cohorte d'envahisseurs ivres de sang et de luxure.
Les vanirs tuèrent la mère, par pure cruauté, après en avoir longtemps abusé.
Pour on ne sait quelle raison, ils épargnèrent la fille qui resta prostrée de longs jours, souillée de leur infâme semence.
Irrémédiable fausse note à un massacre sans pitié ...
La première fois que j'ai planté ma lame dans le torse d'un vanir, j'ai souffert au moins autant que ma victime.
Sauf qu'elle est morte, et que moi je suis toujours en vie ...

Toujours en vie avec un corps, un coeur et une âme.
Une âme noire.

J'ai pris son casque, son haubert, sa ceinture à l'étrange motif sur la boucle.
Pas ses jambières.
Elles puaient vraiment trop.

J'ai pris aussi sa hache. Sa hache souillée du sang des miens.
Mais qui sont vraiment les miens ?
Ces cimmériens qui m'ont rejeté comme un bâtard ?
Ces barbares contre lesquels je m'acharne à lutter.

Il y a dix lunes que ma mère Agneta a été emportée par la peste noire.
Dix lunes que je m'acharne à lutter après avoir entendu sa confession sur son lit de mort.

L'épée de Hrolf est entre mes mains.
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