[BG] Broc - Hibernia - Pure Douceur

 
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<Assise près du feu en cette fraîche nuit d’automne, Pure raconte son histoire>

Les récits de ma petite enfance m’ont été rapportés par ma tante Kitty. Quand j’étais trop petite ou… <Pure rosit légèrement> les détails que j’ai préféré occulter de mes souvenirs.

Je suis née il y a quelques vingt-cinq années dans les collines entourant Tir Na MBeo, dans la petite maison de ma tante. C’était, et c’est d’ailleurs toujours, une grande guérisseuse et mes parents qui ne voulaient vivre sous nul autre toit que la voûte étoilée, avaient sollicité son aide. Ma tante murmure souvent que c’est la douce pluie de printemps, qui vint arroser mon front aux premières secondes de ma vie, qui m’offrit la bénédiction de la nature, ma mère ayant refusé de me mettre au monde sous l’abri des quelques planches de la hutte. Il est vrai, ma foi, que toujours j’ai su comprendre et apaiser les douleurs des bêtes comme des hommes et entendre dans les murmures du vent la venue de la pluie.

Dès que ma mère fut remise, mes parents repartirent. Ils étaient éperdus d’aventure et de connaissances. Sous l’insistance de ma tante, ils acceptèrent de s’installer dans une maison pour l’hiver prochain, un abri où je serais protégée du froid et des bêtes. Nul ne sait où ils allèrent cet été-là, mais d’après les lettres qu’a reçu ma tante, mes premiers mois furent un long voyage d’un bout à l’autre d’Hibernia, plein de dangers et d’aventures sans doute… Mais dont je n’aurais jamais connaissance…

Les premiers froids venant du nord, ils décidèrent donc de nous établir. Ils choisirent une petite hutte abandonnée au cœur des collines de Bri Leith. Ils la réparèrent ensemble et les rares souvenirs que j’en ai me montre un nid douillet, confortable et sûr. Mon père chassait, ma mère gagnait quelques sous en ville contre des soins ou des enchantements, ils erraient beaucoup chacun leur tour dans les collines et vivaient en adéquation avec la nature. Ma tante m’affirme que dans les visites que nous lui rendions, mes parents respiraient le bonheur et que j’étais une enfant pleine de vie, bruyante, curieuse et touche-à-tout, ce qui avait le don de l’exaspérer ! <Pure rit>

Ma mère était volontaire et aventureuse, toujours prête à aider ou à foncer. Mon père était calme, réfléchi et déterminé, rien ne pouvait l’arrêter quand il avait pris une décision. Ils trouvaient naturellement leur équilibre, ma mère créant les initiatives, mon père, toujours séduit par sa fougue, la soutenant de son mieux. Il formait un couple heureux, assoiffé de découvertes et d’expériences nouvelles. Ils veillaient sur moi comme un couple de loups, toujours au moins un des deux pour me surveiller ou jouer avec moi, j’étais couvée et relativement libre de mes mouvements à la fois, tant qu’ils m’accompagnaient, ils ne refusaient jamais que j’aille me balader ou jouer comme un jeune chien a poursuivre les papillons.

C’est lors d’un hiver précoce que les problèmes advinrent. Je n’ai aucun souvenir précis mais ma mère était plus souvent absente, il y avait des soucis en ville. J’ai de vagues réminiscences d’une nuit où ils étaient restés tout deux debout à discuter. Je n’arrivais pas à dormir tellement la tension était palpable. Jamais un mot ne fut plus haut que l’autre mais leur désaccord m’a troublé… Au petit matin, ma mère vint m’embrasser dans mon lit, sa chevelure blonde étincelante dans la lumière de l’aube, son regard rassurant et plein d’amour, ses lèvres souriantes m’assurant de son retour bientôt… C’est là les seuls souvenirs nets que j’ai d’elle. Car je la voyais alors pour la dernière fois.

Quelques jours plus tard, mon père qui commençait à vraiment s’inquiéter, veillait auprès de la porte quand un homme apparu à la lisière de la forêt autour de la hutte. Voyant mon père sortir pour l’accueillir, l’homme l’arrêta d’un geste et sortant un arc, tira une flèche, assortie d’un message, à ces pieds. Mon père chancela en lisant le message. Pour la première fois de sa vie, il me hurla dessus quand je m’approchais pour voir ce qu’il se passait. Il jeta la lettre et la flèche au feu, se lava longuement les mains dans un broc d’eau bouillante avant de venir me voir.

Ma mère était morte, elle ne reviendrait jamais à la maison… Je n’ai que très peu de souvenir de la période qui suivi, si ce n’est de la visite de ma tante. Elle m’expliqua plus tard, quand j’étais plus grande, qu’une terrible épidémie ravageait alors Hibernia, que toutes les villes furent gravement atteintes. Caille, où ma mère se rendait souvent, ne fut pas épargné et face à ses talents de Druidesse et de guérisseuse, les habitants firent appel à elle. La décision ne fut probablement pas facile à prendre mais ma mère insista pour y aller, c’est de cela qu’elle avait discuté avec mon père lors de cette nuit sans fin… Il voulait l’accompagner ou rester tous ensemble mais elle refusa, elle devait faire de son mieux pour aider ces gens, mais refusait de m’exposer ou de me laisser seule ; elle fit promettre à mon père de ne pas venir la chercher et partit, ma tante affirme qu’avec les connaissances qu’elle avait, elle savait à quoi la menait son acte, qu’elle se sacrifiait en espérant trouver un remède sur place…

Lors de sa visite, ma tante a proposé de m’emmener, disant à mon père qu’il avait besoin de tranquillité et de solitude pour pouvoir surmonter ce cap. Il pourrait venir me reprendre plus tard. Mon père refusa. Il était obsédé par ma santé, il craignait de me perdre dit-il à ma tante, aussi voulait-il veiller sur moi le plus possible. Ma tante repartit bientôt car ses soins étaient nécessaires ailleurs…

Lorsque mon père allait chasser, il m’interdisait de sortir même sur le seuil de la porte. Je ne sortais guère plus d’ailleurs, obsédé qu’il était de plus en plus de ma sécurité. Il s’enfermait dans sa douleur, il s’éloignait de moi…

Il vint un temps où ses chasses se firent plus longues. Des heures, puis des jours… Je n’avais plus aucun contact avec personne, mais l’insouciance de ma jeunesse me protégeait. Je m’amusais dans la hutte plutôt que dehors, cela n’était guère plus qu’une gêne, je ne comprenais pas le reste. J’appris à me débrouiller plus par moi-même pendant ces longues absences et la vie continuait dans ma tête d’enfant, presque comme avant…

Mon père était cependant très agité, il revenait des fois avec des pointes de flèches ou des débris divers. Parfois il criait qu’ils paieraient, qu’ils paieraient tous ! Il m’effrayait de plus en plus et nous ne parlions quasiment plus… Quand il rentrait, il se plongeait dans ses cartes et marmonnait tout seul des imprécations. J’en profitais pour sortir quand il arrivait et nous ne faisions plus que nous croiser, voir parfois de nous ignorer.

Il fit l’acquisition, je ne sais comment, de plusieurs objets mystérieux, des bâtons et des potions qu’il ramenait triomphalement à la maison. Il les utilisait certains soirs dans la forêt… Je le suivais parfois à son insu. Des cérémonies où, parlant dans une langue bizarre, il dansait frénétiquement des heures durant autour de symboles tracés dans le sol…

Plus tard, j’en parlais à ma tante, et en concordant avec la seule lettre qu’elle a reçue alors, nous en vînmes à une terrible constatation. Il cherchait à se venger. Dans sa lettre, mon père lui expliquait qu’il avait trouvé un camp aux alentours de la ville, un camp de Siabras. D’après son estimation, ils s’étaient installés juste avant le début de l’épidémie, il était persuadé qu’ils en étaient responsables…Nous pensons qu’il avait essayé de rassembler les objets qui lui permettraient de remettre au jour les anciens rituels ténébreux qui lui aurait permit de se venger, renvoyer les Siabras au-delà du Voile ou pire… Il disait à ma tante se défier aussi des Elfes et des Lurikeens, qu’ils étaient alliés contre les Hommes et qu’il fallait tous les chasser d’Hibernia, ce a quoi il travaillait. Il interdisait à ma tante de venir nous voir et lui promettait qu’elle aurait bientôt d’autres nouvelles.

Elle fut évidemment très effrayée, pour moi principalement je pense, et décida de venir à la hutte au plus tôt. Mais les rituels de mon père ne furent pas innocents, plus elle s’approchait de Caille et plus les rumeurs d’un maléfice dans la forêt se faisaient entendre à ses oreilles. On disait que la forêt elle-même était devenue mauvaise…Elle pu le vérifier, car les arbres refusèrent de la laisser passer, jamais elle ne pu rejoindre la hutte, assaillie qu’elle fût par les bêtes et les esprits sylvestres, tous devenus fanatiquement mauvais.

Elle demeura un moment à Caille, espérant voir l’un de nous. Mais jamais mon père ne remit les pieds en ville et jamais je n’y étais allée seule. Elle finit par repartir, les habitants refusant de s’aventurer dans la «forêt maudite».

Cependant les méfaits de mon père ne firent qu’amplifier. Mon esprit d’enfant a préféré occulter je pense, ce que je vis certains soirs, car je n’en ai aucun souvenir, mais parfois la nuit, mes cauchemars me ramènent dans cette forêt, cachée seule dans les buissons et c’est l’angoisse au ventre et le cœur au bord des lèvres que le réveil me trouve…

Mon père doit être allé trop loin, ses crimes doivent avoir eu trop de conséquences. Je n’en sais rien. Toujours est-il qu’un jour, la mort s’est invitée à la hutte… C’était le soir, un soir pluvieux et gris. La forêt sombre s’étendait à la limite de ma vue … Je sortais un instant pour récupérer l’eau de pluie dans une marmite quand je le vis… un mouvement, une ombre… On se battait là, à la limite de la forêt… Un homme, non pas un homme, membres fins, mouvements sveltes, un elfe ! Il se battait là à quelques mètres de moi contre une espèce d’esprit, un spectre qui essayait de l’enserrer de son étreinte glacée… Abattant l’esprit d’un, surnaturellement rapide, coup de dague, il s’appuya un instant contre un arbre pour récupérer et me vit. En une seconde, il fut sur moi. Il me saisit par le col et me souleva de terre, il semblait étonné de ma présence. Il sortit deux petites lianes très fines et élastiques de ses poches et me ligota.

« Le mage noir, ton père peut-être ? Où est-il ? » Me demanda-t-il avec un petit sourire cruel.

Je secouai la tête en signe d’ignorance, trop terrifiée pour parler.

Il sourit et me tendit une petite boule noire, m’ordonnant de l’avaler, j’essayais de m’y soustraire mais son regard terrible était braqué sur moi et ne me lâchait pas. J’avalais la matière molle et douceâtre et sombrais peu à peu dans l’inconscience … La dernière image dont je me rappelle, l’elfe accroupi, juste au-delà du seuil, qui semblait chercher des traces, des empreintes … disparaissant de ma vue tout à coup …

Je me réveillais dans une grande pièce lumineuse, ma tante était en train de crier contre un elfe richement vêtu qui écartait les mains en signe d’impuissance. A mon premier murmure, elle bondit à mes cotés. Nous étions à Tir Na Nog, des choses graves s’étaient passées.

Je fus sur pied le soir même et nous partîmes pour Tir Na MBeo. Elle m’expliqua quelques temps plus tard que les habitants de Caille et des environs s’inquiétaient beaucoup de ce qu’il se passait dans la forêt. Ils avaient transmit leurs inquiétudes à la capitale où il avait été décidé d’agir. Une "enquête" avait été ordonnée et le "problème" fût réglé. Je ne verrais plus jamais mon père. Je peux dire aujourd’hui que mon père, mon vrai père, était mort des années plus tôt, abattu par une flèche tirée à même le sol de la clairière et portant un message…

Ma tante restait ma dernière famille et elle me prit chez elle. Elle fut bienveillante et m’apprit nombre de remèdes dont je me sers aujourd’hui encore. Mais elle n’était pas ma mère et ne comprit jamais, comme elle n’avait pas comprit sa sœur, mon besoin d’aventure et de découverte. L’intérieur bien établi qui est son monde ne pourra jamais être le mien malgré tous ses efforts. Je l’aime tendrement, mais la voûte céleste reste mon seul toit et la lune ma seule gardienne. Je partis de chez elle à l’âge de 16 ans, j’avais hâte de découvrir le monde et les gens qui le peuple, parler, voir, boire, goûter, j’étais avide de nouveautés et d’expériences ! Elle désapprouvait, mais respecta mon choix. Je passe de temps en temps la voir et lui conte mes aventures. Ses sourcils froncés face aux dangers que j’affronte me font toujours autant pouffer et dorénavant elle rie avec moi, acceptant ma nature et ma voie.

J’ai embrassé de mon gré l’œuvre de ma mère car, sans vraiment l’avoir connue, je me reconnais en elle, je comprends ses aspirations telles qu’on me les a décrites.

Je suis Pure, Druidesse au service d’Hibernia, la route est mon refuge, le vent mon guide. Je soigne le malade et sauve le blessé, je punis les ennemis de ma terre et aide les combattants de bonne volonté.

Je suis Pure et c’est sur les terres d’Hibernia que mène mon chemin sans fin...



[hrp] Ce texte a été écrit pour moi par Calaad [/hrp]
 

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