Bon deux choses.
La première c'est que comme le dit Ulgrim, de tels actes de violence sont amenés par une terrible perte de l'empathie : celui qui est en face de moi n'est plus "mon prochain", c'est un étranger, un autre. C'est la rupture finale du lien social.
Je pense néanmoins qu'en arriver à poignarder sur le quai d'une gare, devant de nombreux témoins, en milieu d'après-midi, montre un sévère dérangement chez ces jeunes. Ils avaient été dénoncés, ils savaient que les autorités allaient arriver, ça tient du pétage de plomb. Le plus jeune avait 15 ans, ce n'est peut-être pas votre cas, mais je sais qu'à 15 ans, j'étais plein d'une rage et d'une violence pour laquelle j'ai trouvé d'autres exutoires.
Eux pas.
Evitons quand même de croire qu'un fait divers comme celui-là est le lot commun de toutes les gares où à chaque instant on égorge et on massacre. Malgré la tristesse de l'affaire, c'est un fait divers.
Le temps que je poste ce message, il y aura au moins un mort sur les routes à cause d'un type qui aura bu un verre de trop, ou estimé que les limitations de vitesse, c'était pour les bouffons.
Comme le dit Aloysius, ils vont surement passer du temps en tôle. Pour ceux qui croient que la prison est un moment de plaisir, je ne saurais leur recommander de tester une semaine d'incarcération pour se rendre compte que c'est horrible, épouvantable et incroyablement destructeur.
De plus, la prison, c'est 80 % de récidives. Je ne sais pas vous, mais si on me donne un médicament qui échoue dans 80 % des cas, je ne me sens pas rassuré.
Et donc pour enchainer sur les merveilleuses déclarations de Kylie.
Ta logique est faussée d'emblée. Tu t'arroges le droit de tuer les gens parce qu'ils commettent un crime que tu juges intolérable. Or il n'est pas intolérable en soi. C'est en fonction de notre système juridique et de notre système moral que tuer quelqu'un est considéré comme répréhensible.
Mais un système qui pose donc comme postulat le droit à la vie, et comme crime le fait de la prendre, ne peut en aucun cas devenir criminel et la prendre.
C'est donc une réponse juridique et philosophique. "Que chacune de tes actions puisse être érigée en morale universelle."
De façon pratique : la peine de mort est une calamité parce qu'elle est un constat d'échec de la justice. Contrairement à ce que tout le monde semble croire, le rôle de la Justice n'est pas de châtier. Le rôle de la justice est de rétablir le lien social, de recréer ce qui a été brisé par l'acte criminel. En ceci, elle n'a rien à voir avec la vengeance.
C'est pour celà qu'il est essentiel dans notre système juridique que l'accusé comprenne pourquoi il est condamné, sinon le jugement ne sert à rien.
Tuer les gens n'est pas exactement propice au rétablissement du lien social... Ca ne fait que perpétuer un schéma de violence, un rapport de force : l'Etat a le droit de tuer puisqu'il est plus fort.
C'est également le danger de faire reposer l'autorité des policiers sur leurs armes. C'est confondre l'autorité et la force. Quand la force rentre en compte c'est justement que l'autorité a échoué.
Parce que si un policier n'est respecté que parce qu'il est plus fort, alors si tu es plus fort (à 12 contre un, avec des plus gros flingues) tu n'as plus de raison de lui obéir.
"Combattre le feu par le feu" ne marche pas. Un ami à moi était très fier de ses talents d'artiste martial et pensait qu'on le respectait dans son quartier parce qu'il avait éclaté à plusieurs reprises des types qui le cherchaient. Moralité, il s'est fait tomber dessus à 10 contre un (il s'en est sorti avec seulement de sévères contusions.) Est-ce que ses agresseurs avaient tort ? non, il avait placé la relation sous le signe du rapport de force. A 1 contre 10, on n'est pas le plus fort. Donc on a tort, si on place la force comme seul étalon.
La peine de mort installe un rapport de force qui est l'antithèse de ce qui fonde notre vision de l'état. Si "la peur du gendarme est le commencement de la vertu", il ne faut qu'il en soit l'accomplissement terminal. Ce qui doit fonder le "vivre ensemble", le Politique (étymologiquement parlant), c'est le respect des lois, pas la crainte du châtiment.
Aucun châtiment n'est juste : il ne répare rien. Quoi qu'on fasse à ces jeunes, Michaël sera toujours aussi mort. Et de savoir que les parents du jeune pleurent parce que leur fils a été électrocuté/gazé/injecté/forcé de regarder Nice People 72 heures d'affilée ne rendra certainement pas les parents de Michaël plus heureux.
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