Provient du message de Hannibal da GimpZor
Les postulats sont vrais lors de la phase d'appel d'offre, mais si dans 10 ans il est avéré que l'entreprise A est meilleure que B ... il y a alors monopole puisque le jeu de la libre concurrence va amener les clients à acheter les produits de l'entreprise A.
Et le systéme est alors rapidement foutu en l'air.
D'un, le raisonement n'est pas tout à fait bon (il se limite a 2 entreprises, pour N entreprises, il en restera n (avec n<N evidemment) toutes en concurrence, vendant chaque meme article au meme prix p, et chaque entreprise aura un profit nul. On est en situation d'equilibre général, ou plus rien ne bouge, et ou aucune entreprise n'a interet individuellement a changer quoi que se soit).
[edit : evidemment ce raisonement ne marche que dans le cas de rendements decroissants, une des hypotheses de base du raisonement neoclassique, qui pourtant est archi faux. Rendements decroissants, cela signifie que plus on produit, et moins cela coute, mais que cette baisse du coup diminue. Autrement dit, en passant de la production d'1 sucette a 2 sucettes, je vais peut etre reduire mon cout de 60%. Puis si je passe a 3, je ne le reduis plus que de 30% et ainsi de suite. Au final, il existe un moment ou ca ne m'arrange pas de produire plus, et par consequent, je ne peux produire assez pour toute la demande, et donc une autre entreprise doit le faire a ma place. Si les rendements etaient croissants -ce qui est tres souvent le cas dans pas mal de domaines- on justifie le monopole, qui produira donc toujours moins cher que plusieurs entreprises.]
De 2, l'ecole autrichienne a créé le principe de "marché contestable". Un monopole n'est pas nefaste si le marché est contestable, c'est a dire qu'il n'y a ni barrieres a l'entrée, ni barrieres a la sortie du marché, et qu'ainsi, une autre entreprise peut a tout moment s'installer et faire concurrence. Il y a donc une pression sur l'entreprise en monopole, qui vend a un prix tres proche du prix concurrenciel, pour eviter de couler si une autre entreprise s'installait.
Mais evidemment, comme tout le raisonement classique et neoclassique, tout se passe sur une "tete d'epingle". C'est a dire en raisonant sans l'espace et instantanément. C'est dingue de penser que les institutions comme le FMI se basent encore sur ces theories sans fondements.
En parlant de fondements, et puisqu'on est dans le libéralisme, il me semble qu'une explication des fondements du libéralisme (philosophique, politique puis economique) permettront a beaucoup d'y voir plus clair, et de mieux comprendre d'ou vient ce mouvement tant décrié.
Je vais donc poster ici un petit dossier que j'ai rédigé pour mon cours d'Histoire de ma licence de Sciences eco. Je dis petit, parceque j'ai raccourci, mais il doit encore faire l'equivalent de 2 pages doubles, une fois ecrit a la main... Donc seuls ceux qui sotn vraiment interressés le liront, ce qui veut dire pas beaucoup
mais je le poste quand meme.
N'hesitez pas pour toute reaction/commentaire.
Sinon, je dois avouer que Alamankarazieff m'a coupé l'herbe sous le pied, puisque je souhaitais faire sur JoL pendant les vacances quelques threads a but purement informatifs sur les grands points et les grandes questions de l'economie de nos jours, comme des sortes de fiches sur l'economie du travail, sur l'economie environementale, sur l'intégration de l'espace dans l'economie, ou encore sur l'histoire.
Si jamais ca interresse des gens, faites m'en part, je m'y attelerais. Sinon, tant pis, je gagnerai du temps
Attention, commencage de dossier, postage par accoups.
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Les fondements du libéralisme.
Le libéralisme, courant majeur de la pensée politique et économique, qui place la liberté de l’individu au-dessus de toutes les valeurs, se confond avec l’histoire des progrès de la tolérance et de la démocratie. La supériorité du « laisser-faire » sur le protectionnisme, du marché sur la planification, que les théories libérales affirment avec force, semble confirmée par la fin du communisme européen. Le libéralisme n’en est pas moins confronté avec des problèmes inédits posés par une économie aux implications planétaires.
Il semble donc important de se pencher sur les fondements même du libéralisme afin de mieux le comprendre.
Les trois aspects qui peuvent être distingués dans le libéralisme correspondent à trois périodes de son histoire : la défense de la liberté de pensée constitue une premiere phase, la deuxieme est marquée par la promotion de la liberté individuelle politique et la troisieme par la mise en lumiere du role du marché dans la societe civile.
1) Le libéralisme philosophique, premier aspect de ce courant, trouve ses origines dans la renaissance du XVème siècle, puis au XVIIème dans la réforme protestante. John Locke, un penseur anglais, se fait alors connaître et développe rapidement des idées très libérales.
En effet, la Renaissance et la Reforme voient l’émergence de la liberté de pensée sous la forme d’un triple combat : contre le poids de la tradition, contre la domination de l’Eglise, et contre le despotisme de l’Etat. Dans ce dernier cas, il s’agit plus de fonder le pouvoir de l’Etat dans la volonté, le choix rationnel des individus.
C’est dans cette période que naquit en Angleterre J. Locke en 1632. Il peut sans conteste être considéré comme le premier en date des grands penseurs libéraux. Réagissant aux thèses absolutistes de Hobbes (1588-1679), il fut influencé par l’égalitarisme démocratique et individualiste des « niveleurs » (révolutionnaires opposés à Cromwell). L’essentiel de sa contribution au libéralisme se tient dans le « Deuxième Traité du gouvernement civil » en 1690, où il proclame le caractère inaliénable des droits de l’homme individuel à la propriété privée et à la libre participation au pouvoir politique. L’état de nature lockéen, s’opposant à Hobbes et Spinoza (1632-1677) met en place des individus naturellement libres et égaux, gouvernés par une loi naturelle : la raison. Pour lui, tout individu est ainsi « seigneur absolu de sa personne, de ses possessions, maître et propriétaire de sa personne, de toutes ses actions, de tout son travail ».Ainsi le travail donne le droit de propriété fondé antérieurement à tout pouvoir politique : on ne peut le violer. Les biens ainsi produits peuvent être librement échangés. Toutefois, cet état de nature est précaire et pour Locke, il faut l’instauration d’un « gouvernement civil » dont la fin est de remédier aux inconvénients de l’état de nature qui naissent de la liberté d’être juge de sa propre cause. On retrouve aujourd’hui les fonctions « régaliennes » de l’Etat. La philosophie de Locke va très vite irriguer la pensée libérale en train de prendre corps et exercer une influence considérable jusqu’à nos jours. Vers la fin du XVIIIème siècle, cette influence sera particulièrement sensible aux Etats-Unis, chez Thomas Jefferson, inspirateur de la Déclaration américaine des droits, et chez Thomas Paine. De plus, d’autres penseurs vont rapidement reprendre ces idées. Même Spinoza, dont on peut se demander s’il était vraiment libéral, fonde la science sur la raison et non sur l’autorité de la tradition : il propose comme condition au fonctionnement d’une cité juste, la liberté de pensée et une religion civique autorisant la liberté de culte pour chaque religion particuliere. Plus d’un siècle avant Adam Smith et sa main invisible, Spinoza écrivait dans « L’Ethique » : « Quand chaque homme recherche le plus ce qui lui est le plus utile à lui meme, alors les hommes sont les plus utiles les uns aux autres », anticipant dès lors sur la naissance d’un libéralisme politique et surtout économique.
Très vite, les idées philosophiques du libéralisme vont se propager au domaine politique, et finiront par imposer le libéralisme comme le principal agent de la construction de la démocratie parlementaire.
2) Dans la construction des libertés politiques, deux idées libérales semblent être primordiales : la limitation mutuelle des pouvoirs et le developpement de l’individualisme.
En effet, l’idée que le « pouvoir doit arrêter le pouvoir » commence à se répandre grâce à Locke tout d’abord, puis Montesquieu et Benjamin Constant, tous deux français. Fortement influencé par l’exemple constitutionnel anglais, Charles de Montesquieu (1689-1775) expose ce qui est considéré comme la quintessence de la tradition du libéralisme politique classique dans « De l’esprit des lois » en 1748. Pour lui, la liberté n’a de sens que dans une perspective politique : c’est celle du citoyen, et dit-il, elle ne se trouve que dans les gouvernements modérés. Ainsi, plusieurs points doivent être respectés : le respect d’une constitution, la mse en place des lois, garanties de la liberté, et surtout, le principe de séparation interne des pouvoirs qui se controlent mutuellement. Cette pluralité du pouvoir se déclinant en pouvoir législatif, représentatif et en un pouvoir exécutif. Toutefois, chez Benjamin Constant (1767-1830), les bienfaits du régime représentatifs ne doivent pas être annulés par une souveraineté illimitée du peuple qui se traduit toujours par l’oppression de la minorité. Lorsque « les masses réclament le droit d’asservir la minorité à la majorité », il n’y a là que déni du Droit : principe canonique du libéralisme.
C’est d’ailleurs chez Constant que l’on retrouve principalement l’idée qu’il ne faut jamais demander le sacrifice de l’indépendance individuelle pour établir la liberté politique. Par liberté il entend le triomphe de l’individualité. Apres la Révolution française, le décret d’Allarde, renforcé par la loi « Le Chapelier » en 1791, interdisant les corporations, refusait aux citoyens le droit de défendre de prétendus intérêts communs. On ne reconnaissait d’intérêts légitimes qu’à l’individu, et l’harmonie de ces intérêts servait l’intérêt général : ainsi naquit l’individualisme, assise philospohique et politique du libéralisme. La vraie référence étant l’individu, les valeurs trouvent leur principe dans ce qui lui est utile. Ainsi l’individualisme se prolongera-t-il plus tard dans l’utilitarisme (illustré par J. Bentham et J.S. Mill) si cher aux économistes actuels.
Mais la force du libéralisme fut, à une époque d’industrialisation, d’étayer ses revendications de liberté politique par une démonstration économique. La liberté politique sans libertés économiques conduirait le capitalisme à l’inefficacité, ce qui à la longue compromettrait la démocratie. A l’inverse, un monde de libertés économiques sans liberté politique est instable.
3) L’intégration de la notion de liberté au champ de l’économie a entraîné une véritable rupture théorique marquée par l’apparition du libre-échangisme, qui correspond à la naissance du courant classique avec les « Recherches sur la nature et les causes de la richesse des Nations » d’Adam Smith en 1776. Mais déjà avant lui, les mercantilistes et les physiocrates avaient effleuré quelques concepts proches du libéralisme.
En effet, le mercantilisme définit le cadre de l’économie comme étant celui de la nation et affirme l’importance de la possession de métaux précieux. Il faut tout faire pour exporter les marchandises. Bien que la technicité économique des textes mercantilistes soit faible, leur cadre d’analyse n’a pas été entièrement dévalorisé par la pensée libérale. On peut considérer que ce mouvement portait sa propre contradiction : il visait à la suppression des barrières internes aux Etats, mais une fois édifiée à l’abri des barrières douanières, l’industrie manufacturière semblait appeler de nouveaux marchés et une division du travail à l’échelle planétaire. La critique du mercantilisme par les physiocrates, dont la figure centrale est François Quesnay (1694-1774), accorde à la terre une valeur supérieure à tous les autres biens, y compris les métaux précieux, car elle « produit comme spontanément ». Les Physiocrates vont alors anticiper sur A. Smith ou Ricardo, car ils estiment que par ses interventions, le pouvoir politique ne peut que perturber des mécanismes économiques par lesquels le bien se fait tout seul. Ils se prononçaient d’ailleurs, à l’inverse des mercantilistes, en faveur de la liberté des prix en général, et du grain en particulier. En France, Turgot développa une politique du « laisser-faire, laisser-passer » qui le conduisit en 1774, à instaurer la liberté du commerce des grains et à supprimer, en 1776, les corporations. C’est la même année, qu’avec son ouvrage, A. Smith fut à l’origine de la pensée libérale en économie, en posant les bases du libre-échangisme.
Selon lui, les interventions en faveur des exportations ne conduisent pas à une division optimale du travail. Il estime qu’un pays doit se spécialiser dans le type de production où il est le plus efficace : c’est la doctrine de l’avantage absolu, affinée plus tard par Ricardo et la théorie des avantages comparatifs. Par ailleurs, il propose de réduire le budget de l’Etat aux simples fonctions régaliennes, à l’éducation et la dignité du Souverain. En suivant ses recommandations, l’Angleterre se hissera au rang de première puissance mondiale au XIXème siècle. Pour Smith, la recherche par l’individu de son intérêt propre est le moteur de l’économie. Chaque être est mû par une « main invisible » qui produit un effet global non attendu : l’instauration d’un ordre meilleur que celui qu’une volonté unique aurait pu vouloir : les entraves quis eraient mises à la liberté individuelle au nom du bien commun sont illégitimes. En France, c’est J.B. Say (1767-1832) qui diffusa l’œuvre d’A. Smith. Il est à la fois chef d’entreprise et universitaire. Il compléta la pensée libérale avec trois grandes idées. Tout d’abord ce que l’on appelle la « loi des débouchés » que l’on résume par : « toute offre crée sa propre demande », inversant alors la présentation commune faisant de l’offre la réponse à une demande préalable. Ainsi pour lui, la richesse ne vient pas de la demande mais de l’offre. Ensuite il s’oppose à Smith (et plus tard à Ricardo) en refusant l’idée de « valeur travail ». Il pense au contraire qu’il n’y a pas de distinction entre prix naturel et prix de marché, puisque la valeur de la chose acquise est « égale à la valeur de la chose que l’on consent à nous donner en échange » ; c’est son utilité qui fait désirer un objet. Enfin d’après lui, il ne peut y avoir de surabondance générale et de surproduction sur le marché. Ce dernier est en rééquilibrage permanent et spontané : les offreurs s’adaptent aux conditions changeantes. Le moteur de cette autorégulation est l’intérêt personnel qui est toujours le meilleur juge. Tout le monde est nécessairement gagnant à ce jeu a somme non nulle, grâce à la concurrence. Aujourd’hui encore, les idées de Say sont reprises et fondent un « noyau dur » du libéralisme économique moderne.
En conclusion, après avoir montré en quoi les idées philosophiques sur la liberté des individus et le combat face au despotisme et le rejet de l’absolutisme fondent le vrai fondement du libéralisme, nous avons analysé les conséquences de ces pensées sur le plan politique, pour en finir par étudier les origines du libéralisme économique qui prit vraiment forme avec Adam Smith et les économistes dits Classiques.
Toutefois, au cours des 20 dernières années, le libéralisme est devenu l’alpha et l’oméga des grandes institutions internationales. Sur la même période, on constate à la fois un net ralentissement de la croissance mondiale et n profond creusement des inégalités Nord-Sud. La mondialisation libérale n’est bien sur par la seule responsable des problèmes constatés. Tout de même ne devrions nous pas, au début de ce nouveau siècle et à la lumière de nos connaissances actuelles, remettre e cause certains fondements même du libéralisme, telle la « main invisible » qui se révèle en grande partie fausse à l’échelle du globe ?
Bibliographie :
Flamant Maurice, « Histoire du libéralisme », PUF, Collection Que Sais-je ?, 1992
Laurent Alain, « Les grands courants du libéralisme », Armand Colin, 1998
Guiheneuf Yves, « Economie et Utopie, Du marxisme à l’ultra libéralisme en 31 points », L’Harmattan, Collection « Economie et Innovation », Série Clichés, 2002
« Alternatives économiques », hors série n° 51, 1er trimestre 2002
Encyclopédie Axis.