[nouvelles] Je vous présente...

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Non ce n'est pas de ma plume, il y a quelqu'un qui fait cela beaucoup mieux à mes côtés en ce moment. Il est très timide, mais je ne désespère pas lui faire avoir un compte ici.
Il aime les encouragements

*il se marre à côté*

Bon alors c'est l'histoire de Gounzganz et Alamankarazieff.
Ces textes sont un peu crus je vous l'accorde, mais j'aime bien Si vous voulez en savoir plus, ces chroniques viennent tout droit du forum d'un jeu en ligne, gratuit, que vous trouverez ici : combattre-ou-mourir
Alors je vous laisse avec ces deux héros, un peu particuliers. J'espère que vous apprécierez.

Citation :
Courir. Courir. Ne pas s’arréter. Courir dans le brouillard vert de la forêt. Courir dans la nuit, fouetté par les branches, sentir le vent balayer mes joues, faire claquer mon uniforme. La course fait battre l’étui de mon arme. Elle, elle est dans mes bras, si serrée que je ne pourrais sans doute plus jamais la lacher. Je cours, je cours comme un dératé, et mes doigts me font mal à force de tenir cette crosse comme si ma vie en dépendait. Je cours si vite, dans l’obscurité de la nuit, c’est un miracle que je ne me sois encore rien cassé. Mes yeux me brûlent, ces saletés d’implants corrigent ma vision nocturne, la lumière change comme si un dieu fou réglait les couleurs du téléviseur dans ma tête. Non, je ne veux pas voir, laissez moi courir dans le noir. Je ferme la paupière de l’œil greffé, elle a du mal, je la tire vers le bas avec une grimace, ça fait mal, mais les ténèbres valent le coup. Y voir ça serait comme m’arréter. Ca serait réaliser ce que je fais, et si je fais ça je crève net. Je cours comme si je fuyais, et pourtant l’ennemi est devant moi. Là-bas à l’orée de la forêt, il y a le reste de ma compagnie, qui m’attend, mais quelque part je n’y crois pas. C’est comme à Bucarest, quand j’étais gosse : on devait se retrouver au coin de la rue, mais on tombait jamais sur les potes, toujours sur les flics ou les bandes rivales. La police nous tirait pas dessus, parce que nos os valaient pas le prix d’une balle. Les gangers eux nous caillassaient, quand on les caillassait pas avant. C’est ça plonge toi dans ton enfance pourrie, pour oublier ta vie de merde. Et t’arrête pas. De toute façon tu sais qu’il n’y aura personne de l’autre côté du mur, pas visage ami, pas de frères. Juste le vide, la haine et les ennemis. Ca fait un mois que je m’entraine et que je soûle tout le monde parce que je veux partir au front. J’étais à deux doigts d’être nommé caporal chef, ça voulait dire nouveaux implants, matos moins pourri, mais la paperasse trainait : c’est le problème des ST, on est nombreux alors ça rame. Alors comme un gros connard j’ai préféré partir au front tout de suite, partir et courir. Alors je cours, je cours, et je vais pas tarder à crever. Si ce n’est pas une balle qui le transperce, mon cœur va lacher tout seul. Mais je ne peux pas m’arréter, si je m’arrête je suis foutu. Peut être bien que je fuis après tout. Je fuis ma trouille, je fuis ma frousse qui me colle au cul. Le sol se dérobe, je fais un vol plané, je frappe un arbre de plein fouet qui cède sous le poids de ma barbaque couturée. Je voudrais sombrer dans l’inconscience, ne jamais me réveiller, mais j’ai trop mal pour ça. J’ouvre un œil, et je ferme l’autre de force. Il fait noir et la terre me porte. Je voudrais rentrer en elle, dans cette terre chaude et humide, m’y enfouir comme dans une femme, m’y engloutir et ne ressortir qu’à la fin de tout ça.
Je regarde devant moi : la forêt continue indéfiniment, noire, noire et hostile. Je m’attends à ce que les buissons parlent chinois, mais ils se taisent. Dans le silence, on entend que le chuintement de mon communicateur qui s’est allumé pendant ma chute. Je ramasse mes affaires, j’essaye de me calmer. J’ai atrocement mal au coude, je n’ai pas laché mon arme, et je me suis ruiné le bras. Je ne l’aime même pas, je n’attends qu’une chose c’est d’en changer. Elle est laide et imprécise, mais pour le moment elle est tout ce que j’ai. Je ne me suis rien cassé, je sens la tension, s’écouler hors de mon corps comme une bienfaisante hémorragie. Je me surprends à prendre une respiration presque normale. Une branche craque derrière moi. Je suffoque, mon ventre se noue, tous mes muscles se tendent. Avant même de réaliser ce que je fais, je suis déjà en train de courir, de nouveau en plein élan. Je n’ai pas honte de ma peur. C’est grâce à elle que je suis en vie. Je la laisse derrière moi et je m’enfonce dans le noir, toujours plus loin dans l’obscurité. Je croise une odeur de charogne, je n’ai pas le temps de vérifier, pas envie. Un animal, ou un soldat. Quelle importance ? je n’aime pas les cadavres. A Bucarest, j’en ai trop vu. J’en verrais encore beaucoup. J’essaye de me raisonner, de faire en sorte que mon petit bout de cerveau valide essaye de parler au reste. J’ai déjà vécu ça, je suis déjà parti au combat. J’ai déjà attendu dans l’ombre pour égorger un homme. Mais ce n’était pas pareil. C’était des jeux d’enfant. Je suis un homme, un homme qui court pour fuir son enfance, qui court vers la mort face à des dieux-titans. J’ai entendu tant de légendes sur mes ennemis, je sais que les plus terribles des combattants de l’Empire sont là bas. Et pourtant quand je les évoque, j’en ressentirais presque des frissons d’excitation. Ce n’est pas eux qui me font peur. Alors pourquoi est-ce que je cours comme ça ? pourquoi est ce que j’ai l’impression que mon ventre va éclater, remplir mes poumons, que mes yeux vont sortir de mes orbites ? Je ne sais pas, je ne saurais peut être jamais. Mais je ne m’arrête pas pour autant.

J’aperçois la lisière de la forêt, le point de rendez vous n’est pas loin. J’espère qu’Alaman y sera, Alaman mon frère, Alaman le fou. Une lampe torche balaye les arbres, je me jette à terre sans savoir pourquoi. Quand je regarde, je bénis ma trouille. Je savais que l’escouade ne serait pas là. Ils sont là, leurs armures incroyables frémissent, les champs de force iridescents scintillent dans la nuit et crépitent quand ils se frôlent. Mon arme me semble encore plus ridicule. Vouloir les attaquer n’est plus stupide, c’est un blasphème. Les décorations sur leurs uniformes sont légion. Les entailles sur leurs armes autant de promesses de mort. Je m’adosse à un arbre. Je n’aurais pas du m’arrêter. Je sais que je vais mourir, je sens la mort autour de moi, partout, glisser sous ma chemise de jute, je me plie en deux et je vomis mes rations de survie. La flaque nauséabonde et rougêatre me rappelle les tripes de mes amis éventrés. Mon pouce gauche tressaute : réflexe cicatrice. J’avais six ans et je disputais le cadavre de ma mère à un chien. Il m’a mordu jusqu’à l’os et je lui ai crevé un œil. Au moins je sais qu’elle repose avec tous ses morceaux. Je serre mon arme et je repense à l’excitation des jeunes recrues quand ils font feu à l’entrainement. Les commentaires gras sur la trique incroyable que ça nous avait filé. J’aimerais bien le sentir à nouveau, ce feu entre mes jambes. Mon communicateur crépite. J’ai à peine le temps de connecter à mon casque. C’est Jama, sa voix est lointaine et parasitée, j’ai du mal à croire que je parle à une huile, je ne sais même plus ce que je raconte. Ce n’est pas moi qui parle de ma situation, qui envoie un cliché de reconnaissance. Ce n’est pas moi qui demande des cibles et la permission de tirer, et qui salue respectueusement à la fin. Moi je suis adossé à mon arbre à écouter les dieux parler en chinois. Je ne sais qui a utilisé mon corps le temps de cet appel. Peut être bien que c’était moi au fond. La liaison était brouillée, je crois qu’elle n’a pas compris que j’étais seul. J’attends un peu et les coordonnées de ma cible apparaissent. Mon œil crépite, j’étouffe un cri, les informations défilent et je dois me retenir de rire. Il s’appelle Arès, et parmi ses victimes, il a tué Héraclès. Je n’ai rien à faire au milieu des dieux. A Bucarest, on m’appelait le boucher. Dans mon quartier, ma réputation était terrible. Mais je n’y retournerais pour rien au monde. Je sais que je n’irais pas en Enfer, j’y suis né. Lentement, lentement, je me redresse. Je vérifie que mon arme est prête, le geste ressemble trop à une caresse à mon goût. J’essaye de reprendre mon souffle, mais c’est au dessus de mes forces. Je jette un œil : il est de dos. Je n’aurais jamais meilleure occasion. Je fais un pas, un deuxième, un troisième, et de nouveau je cours. Je devrais avancer discrètement et pourtant je hurle, je hurle comme un possédé. Il arme son fusil, le bruit me fait penser à des os qu’on brisent. Je fais feu, mon doigt dérape sur la gachette, le recul m’arrache presque l’arme des mains. La rafale le rate. Je ne vois pas son visage, la visière le recouvre. Je n’ai jamais tué quelqu’un dont je ne voyais pas les yeux. Il marque un infime temps d’arrêt et avec ce mouvement d’une terrifiante fluidité que confèrent l’interface d’arme, me met en joue. Je voudrais lever ma paupière, les utiliser finalement ces saloperies d’implant, justifier la migraine qui ne me lâche pas depuis deux semaines. Mais j’ai du froisser un muscle, et le globe de silicone reste prisonner de sa fragile barrière de peau. Je vise, je bondis, et mon arme fait feu. Les projectiles s’écrasent sur lui. Je vois son champ de force luire, et quand mon arme est vide il est toujours debout. J’ai éraflé son armure. Il n’a rien. Il doit rire. Mais je ne peux pas l’entendre. Mon hurlement s’est effondré au fond de ma gorge. Je devrais recharger, mais la trouille me terrasse. Je ne sais que ramper en arrière, en ne le quittant pas des yeux. Je vais mourir, je vais mourir, seul, comme un chien.
Alors je le vois. Je le vois qui sort du bois, lentement, sûr de lui. Et je sais que je suis sauvé, parce qu’il est mon frère, parce qu’il est fou, parce qu’il est invincible. Je le vois sortir son katana, et je l’entends haranguer notre adversaire. Celui-ci se retourne, troublé par la morgue de cet insecte. J’entends Alaman prononcer son défi rituel, je le murmure avec lui : « Je suis Alamankarazieff, Je porte le Soleil, ma peau recouvre le Monde, et mes os sont les piliers du Ciel. » Il illumine, sa haine et sa folie le rendent plus beau que jamais, son sourire me rend toutes mes forces. Je me relève d’un bond. Mes peurs se dissolvent face à sa détermination. Je ne peux mourir tant que je suis son ami, il ne peut mourir parce que la Mort ne veut pas de lui. Il charge le sabre au côté, je me replie vers le point de ralliement, je sais qu’il me rejoindra, il n’a pas besoin de moi pour vaincre. Je sais que nous triompherons, parce qu’il est à mes côtés. Nous nous sommes promis de ne jamais mourir. Je suis Gounzganz, le boucher de Bucarest et je suis homme de parole
J'en ai d'autres, je vous laisse apprécier celle-ci
J'attends vos commentaires et critiques.

*Lui aussi il est très vaniteux*
hop posté !
Oui un peu cru mais je n'es pas eu de peine à le lire jusqu'à la fin J'ai bien aimé, et je l'encourage à venir s'inscrire ici ca fera un autre posteur honorable parmi JOL Merci
Ouah ! Ben tu pourras dire à ton ami qu'il a un réel talent !

C'est pas du Baudelaire, mais en même temps, c'est aussi vachement moins chiant !

J'ai été cramponné à mon siège tout en lisant, et j'ai eu l'impression que j'avais arrêté de respirer et que mon coeur s'était arrêté de battre.

Comme tu le dis, le langage est un peu cru, mais justement, je trouve que ça nous (enfin moi en tout cas) permet de nous projeter plus facilement dans la scène !

J'ai vraiment bien aimé, mici Miche Xchine !

PS : si j'ai juste un petit reproche à faire, c'est l'aération du texte. C'est un peu cossu tout ça, faudrait ajouter des paragraphes, pasque franchement, j'ai eu du mal à respirer tellement les phrases semblaient soudées les unes aux autres, m'empêchant de faire une pause !
Citation :
Provient du message de KINDER

PS : si j'ai juste un petit reproche à faire, c'est l'aération du texte. C'est un peu cossu tout ça, faudrait ajouter des paragraphes, pasque franchement, j'ai eu du mal à respirer tellement les phrases semblaient soudées les unes aux autres, m'empêchant de faire une pause !
Pareil. taper "enter" ne coute pas si cher
Citation :
Provient du message de Aloïsius
J'ai cherché sur le forum en question (avecmon efficacité coutumière ), quel est le titre du fil dans lequel on trouve la suite ?
Ben le problème c'est qu'il faut se logger.. donc créer un compte.
Mais bon, je vais en mettre d'autres ici si ça vous plaît.
La mise en page est voulue...
J'adore.

L'écriture est haletante et riche. L'histoire intéressante, on veut connaître l'enchaînement des événements.

Il a vraiment besoin d'encouragement? Il a les miens.
J'attends d'autres de ses histoires, ça sera avec un réel plaisir que je me plongerai dedans.

//edit: pour ce qui est de la mise en page, surtout il ne faut rien changer, ça participe aussi, en plus du style d'écriture à faire en sorte que le souffle soit couper en même temps que le narrateur court, on est ainsi à ses côtés.
Citation :
Provient du message de Xeen
Ben le problème c'est qu'il faut se logger.. donc créer un compte.

Ah ? Même en lecture ? J'ai pasessayé de cliquer sur un fil, mais avec le titre je devrais trouver.
Citation :
Mais bon, je vais en mettre d'autres ici si ça vous plaît.
La mise en page est voulue...
Serait quelqu'un que je connais qui est l'auteur ? Il y a quelques personnes capable d'écrire qui fréquente ce local enfumé... Et ce genre d'astuce graphique...
Citation :
Provient du message de Xeen
Ben le problème c'est qu'il faut se logger.. donc créer un compte.
Mais bon, je vais en mettre d'autres ici si ça vous plaît.
La mise en page est voulue...
Oui et qu'il s'inscrive lui même pour les mettre On va l'accueillir avec les honneurs qu'il se doit
Il dit que depuis qu'il a reçu la réponse de son concours d'instit' il a pas trop le temps.. vous inquiétez pas je suis très persuasive

Non Aloïsius il ne fait pas partie du club
En voyant la bloc je me suis dit "outch! ça va pas être la joie à lire" mais ça va, c'est assez logique comme arrangement, sinon j'aime bien le texte... en même temps chuis pas très bon critique littéraire
........
Ca me fait vraiment beaucoup beaucoup penser à du Dantec

[Edit pour dessous]
Citation :
C'est lecôté cyber glauque, je pense, le fait que la "morale" est écrasée par la peur et l'exhaltation guerrière.
Oui tout à fait
Re: ........
Citation :
Provient du message de Indis Aredhel
Ca me fait vraiment beaucoup beaucoup penser à du Dantec
C'est lecôté cyber glauque, je pense, le fait que la "morale" est écrasée par la peur et l'exhaltation guerrière.
La petite mort

Citation :
Je suis le nez dans la boue. C’est une mauvaise façon de commencer une journée. Pas la pire, mais j’en ai connu des meilleures. Quand en plus, on a deux balles dans le corps, on s’approche du fond. La pluie me fouette l’arrière du crâne, j’essaye de me tourner, mais tout mon corps est une masse de douleur. A travers le rideau de pluie, j’aperçois au loin les lueurs du QG 6, ses projecteurs fendent l’eau, en petites iridescences. J’apprécierais plus si je n’étais pas en train de crever. Mon communicateur grésille « Retraite, retraite ! on se remet en position ! » Je grimace un sourire. Il y a des messages qui ont le chic pour arriver trop tard. Je n’ai même pas vu qui m’a tiré dessus. Il n’a pas pris la peine de m’achever. Pourquoi faire ? je vais crever ici, les médecins sont trop loin. Un spasme dans la poitrine, mon cœur a raté un battement. Cette maudite machine est en train de me lâcher. Je prie que pour ça se termine enfin. Pour que ma misérable vie arrive à son terme. Je crèverais ainsi, le nez dans la merde, dans un assaut dérisoire contre un ennemi invincible. Je tente de bouger les doigts, mais ils sont trop loin de moi, je ne les sens plus. Je me décontracte et je pousse un dernier soupir. J’aimerais tant que ce soit le dernier…
Mais je sais que ce n’est que le début. La suite est comme un cauchemar épouvantable, un mauvais rêve, un trip avec un acide particulièrement dégueulasse. Je sais ce qui m’arrive mais je refuse d’y croire. Les programmes de secours prennent le relais de mon système nerveux, la batterie auxiliaire en bas de ma colonne se met en route. Mes muscles se contractent contre mon gré, je suis un zombie, mon corps titube jusqu’au QG. Je suis mort mais je marche. Je vois et j’entends, mais je ne peux plus rien faire, les implants me téléguident jusqu’à la maison. J’en ai déjà croisé sur le champ de bataille, ces fraichement morts, animés par la déesse science, ramper, cavaler jusqu’à la plus proche ligne de front pour se faire ramener à la vie. Pourquoi on nous laisse pas crever ? pourquoi on nous laisse pas pourrir ? tu redeviendras poussière… promesses, promesses. Au moins celle là je pensais qu’on pourrait s’y tenir. Tu parles, on ne nous laissera rien. Cette guerre nous a privé du droit de vivre, et maintenant du droit de crever.
Je vois mes frères d’armes qui s’approchent de moi, une moue horrifiée sur leurs visages, ils prennent le relais, me portent, mon corps se fige, mais l’inconscience m'échappe. La petite batterie continue son travail, m’interdit la fuite. J’ai les yeux ouverts quand on m’enferme dans un sac, qu’on me ramène au camp.
Au bout de quelques heures, le bourdonnement en bas de mon dos cesse. Et je peux sombrer dans le néant. Combien ? une heure ? une journée ? ça aurait aussi bien pu être une seconde.
Je me réveille en hurlant, je sors de ce cauchemar, tous mes sens actifs, mon corps bien vivant. Je me cogne et j’étouffe. Tout brûle, je veux gueuler mais ma bouche est pleine de cables et de tuyaux. Je sens mon cœur qui lâche à nouveau, mes organes qui défaillent. Une voix déformée me parvient : « on le perd, préparez une nouvelle décharge. » Je meurs à nouveau dans un grand crissement. La vie me bouscule avec la délicatesse d’un coup de pied dans les couilles. Je me tords de douleur, mais partout je me cogne. Je suis dans un tube de verre, une saleté d’éprouvette géante, ou alors j’ai salement rapetissé. Je suis revenu. Ils m'ont ramené. Ils auraient mieux fait de me laisser, la souffrance est insupportable. Je baigne dans un fluide puant et gluant, où se mêle mon sang et ma merde, mon corps est perforé de cables. Mon cri se perd dans le plastique enfourné dans ma gorge. Je tousse, mais un goût de sang m’en dissuade.Le verre est épais, j’aperçois à peine ce qui se passe à l’extérieur. J’essaye de me calmer, j’y arrive pendant au moins une minute, je me débats, mais chaque mouvement est une agonie. Je finis par attirer l’attention, un médecin s’approche et me gueule dessus. Je réunis assez de force pour lui tendre mon majeur. A travers le verre, j’aperçois son sourire narquois. Il me tend le sien, touche une manette et je sombre lentement dans l’inconscience.
Quand j’ouvre les yeux à nouveau, je suis nu sur une table en métal encore poisseuse de sang et de viscères. Il doit y avoir le mien au milieu. Un chirurgien sifflote un truc, il a les mains rouges, du sang jusqu’au coude. J’ai mal partout, je suis attaché par des sangles très serrées. Une seconde je suis content de voir que ma réputation me suit. Je gueule sur ces batards, des trucs sur leurs mères et des gros cochons noirs. Je ne comprends pas ce que je dis, ma langue est encore lourde. J’essaye de me débattre avec les vestiges de l’anesthésique. Le chirurgien me regarde en se marrant. Il sort un morceau de barbaque d’une cuve et me l’agite sous le nez l’air tout content. « Ton nouveau foie, soldat, fraichement cloné ! » Il plonge ses mains dans mon bide et je hurle. Ce connard me demande de la fermer. Je lui promets que je vais le tuer dès que je serais sorti de là. Il a un sourire méchant et attrape un nerf dans mon ventre. La douleur me fait tourner de l’œil. Je résiste quelques secondes, il se remet à siffloter, voyant que je bouge encore, il fait un signe et un infirmier m’injecte une dose pour me faire tenir tranquille.
J’ouvre les yeux, la puanteur me saisit à la gorge. Je suis toujours dans les quartiers médicaux. Ca sent la mort, ça sent l’Enfer, ça sent Bucarest. Je voudrais me lever, mais je suis toujours attaché. Je ne suis qu’une grosse masse de douleurs, mais je me sens étrangement en forme. J’ai toujours l’image de cet enculé de chirurgien dans ma tête, et je sais qu’il paiera. Mon œil me fait atrocement mal, je sens toutes les jonctions entre le métal et la chair comme si elles étaient chauffées au rouge. Dès que toute cette merde est finie, dès que la paix est là, je me fais enlever cette saloperie, je le fais moi même au cutter si il le faut. Le jour où je reverrais une jolie fille, je n’ai pas envie de voir s’afficher une cible sur son cœur et sur sa tête. Pas envie de voir défiler sur ma rétine, les dix meilleurs angles de tir pour la tuer. Partout en moi, leur maudite tuyauterie bouillonne et s’agite, ils ont rechargé la batterie à zombie, je suis prêt à me faire tuer à nouveau, tous mes organes remis à neuf.
Une quelconque huile entre dans la pièce, je le connais pas, et je veux pas le connaître. Il me parle et sa voix me fait penser au ronronnement d’un moteur, elle est régulière et monocorde :
- Soldat, vous êtes mort au QG 6, mais notre technologie a permis que votre expérience du terrain et vos implants ne soient pas perdus. Vous pourrez ainsi continuer à servir notre idéal de paix comme vous l’avez déjà fait, avec courage et dévotion.
La colère et la haine montent en moi :
- Chef, pourquoi vous prendriez pas votre idéal, votre courage et votre dévotion et vous vous les enfonceriez pas bien profond dans votre cul ?
Il me fait un sourire crispé, et s'approche de moi en me demandant :
- Je n'ai pas bien compris soldat.
- Tu as très bien compris connard !
Je me mets à beugler, je tire sur mes liens, mais ces sangles ne veulent pas lacher. Je voudrais l'étrangler, lui et son regard mielleux, son uniforme immaculé, je lui crache à la gueule. Bon dieu ce que j'ai mal ! Il me chope les couilles à pleine main et se met à serrer, me prouvant, contre toute attente, que je pouvais aller encore un peu plus loin dans la douleur.
- Tu as un bon esprit soldat, mais garde ta haine pour l'ennemi. Tu repars au front demain, tu as assez glandé.
Il me lache et me laisse suffoquant.

Un docteur vient me voir quelques heures plus tard. Je l'insulte autant que je peux. Les mots les plus orduriers que je connaisse glissent sur lui d'un air blasé. Il a le crâne rasé des médecins militaires, mais sa barbe est blanche et ses traits sont usés. Il me tapote le bras pendant que je décris tout ce que je ferais à sa mère dès que je serais sorti. Il a l'air rigolard et m'annonce d'une voix joviale :
- Y a deux sortes de gars après les clonages : les gueulards et les chialeurs, je vois que tu as choisi ton camp.
Je me calme un peu. Je lui demande :
- C'est toujours aussi douloureux ?
- Non, tu t'en tires bien, tes blessures étaient propres, tu n'est pas tombé loin de la ligne de front. On en a ramené un qui s'était fait passer au lance flammes et que les implants avaient ramené à travers cinquante kilomètres de marais. Il est arrivé jusqu'à nous truffé de larves et à moitié bouffé par les poissons. Jamais vu quelqu'un chialer autant.
Je grince des dents. La douleur est encore présente, pale écho de ce que je ressentais dans le caisson. Je me calme lentement. Il sort une feuille et me fait la liste de tout ce qu'on m'a cloné, des implants qu'on a rajoutés. Cette litanie surréaliste a un effet étrangement relaxant. J'ai l'impression que mes organes répondent présent à chaque fois qu'il les appelle. Je prends lentement conscience que je suis encore en vie. J'ai pris deux balles de M4A2 en pleine poitrine, je me suis vidé de mon sang dans la boue du champ de bataille et je suis encore en vie. Le vieux médecin interrompt son inventaire et me lance en souriant :
- Ca y est, tu réalises ?
La douleur est toujours là, mais je ne peux pas m'empêcher de sourire à mon tour. Il défait les sangles. J'essaye de me lever, je manque tomber de la table. Il vient à mon secours et avec son aide je pose les pieds par terre. Le sol est immonde, poisseux de souffrances. Peu importe. Je laisse aller mon poids, je me redresse. Mes jambes ne cèdent pas.
Je suis debout, je suis vivant.
hop hop
pas de morale dans celle ci ?
Belle description d'action. On ressent vraiment quelque chose. Il nous emmène dans la "fuite".
Le ton est le bon, c'est celui du soldat. Rien à redire. C'est carré, c'est léché.


Je parie une flagellation aux orties fraîches que ton ami joue à Shadowrun. ............. Et j'adore Shadowrun.

Bravo et bonne continuation.

Citation :
Provient du message de Ulgrim
Belle description d'action. On ressent vraiment quelque chose. Il nous emmène dans la "fuite".
Le ton est le bon, c'est celui du soldat. Rien à redire. C'est carré, c'est léché.


Je parie une flagellation aux orties fraîches que ton ami joue à Shadowrun. ............. Et j'adore Shadowrun.

Bravo et bonne continuation.


tu es sûr ?
Citation :
Provient du message de Xeen

tu es sûr ?
Les mots "interface d'arme" ne trompent pas, ou peu. Très peu de jeux l'utilisent, sauf Shadowrun.............. Mais oui, je suis sûr ......

Juste une chose. C'est très sombre apparemment. Si ça ne parle que de guerre, pourquoi pas. Ceci dit, je le déconseille aux dépressifs
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