Chapitre XIX: Il va y avoir du sport...

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Ca y est, voici le chapitre XIX.
Je n'ai jamais été très à l'aise pour décrire des scènes de maladie. Ca se ressent dans le style, qui ne doit pas être très bon... J'espère que vous aimerez quand même


Introduction
Chapitre I
Chapitre II
Chapitre III
Chapitre IV
Chapitre V
Chapitre VI
Chapitre VII
Chapitre VIII
Chapitre IX
Chapitre X
Chapitre XI
Chapitre XII
Chapitre XIII
Chapitre XIV
Chapitre XV
Chapitre XVI
Chapitre XVII
Chapitre XVIII

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Dani n'avait pas souhaité venir.
"C'est gentil, mon mignon, mais je ne serais pas vraiment à ma place dans ce palais, tu vois, c'est trop luxueux, c'est froid, c'est glacé. La mode est aux minces, en ce moment. Je ne crois pas que je peux passer pour une noble, même si je m'habillais correctement"
"Puisse passer pour une noble" avait rectifié Rekk d'un air absent. "Ce n'est pas grave. Tes informations m'ont été très précieuses, et je suis sûr que Laath pourra identifier la personne qu'il a vue. Ne t'inquiète pas, et essaie plutôt de retrouver un endroit sûr pour t'y établir." Il avait hésité un instant avant de rajouter: "Je suis désolé pour ta maison. Partout où je vais, je sème la destruction. Je n'aurais pas dû chercher à te revoir"
"Mais tu l'as fait, et j'en suis bien content, mon grand ! Et si jamais tu te sens seul, dans le grand nord, rappelle-toi que tu peux toujours me demander de venir. Un peu de frais me ferait le plus grand bien." Elle lui avait caressé le bras, et il avait rougi. Rekk, le Banni, le Démon Cornu, l'Epée de Flammes, avait balbutié quelques remerciements comme un adolescent, avant de se détourner dans un mouvement de cape et de marcher à grands pas vers le palais.

Malek, Shareen et Laath étaient sur ses talons. Ils avaient tous profité de quelques heures de sommeil, et ils avaient désormais l'air plus en forme. Malek avait bouclé avec fierté son épée sur son haubert aux couleurs des Licornéens. Laath portait le même blason: il avait dû emprunter les vêtements de rechange du jeune homme pour pouvoir espérer résister à l'examen des gardes du palais. Un va-nu-pieds habillé comme il l'était n'aurait eu aucune chance, autrement. Et Rekk ne tenait pas particulièrement à attirer l'attention avant même d'entrer.
Shareen jetait des regards à Laath, à la dérobée, alors qu'ils marchaient dans les rues. C'était stupéfiant ce qu'un bain matinal dans le Verdoyant, et des habits corrects, pouvaient changer un homme. Il n'avait certainement pas le maintien d'un noble, et encore moins leur arrogance naturelle, mais il pourrait certainement faire illusion. Au moins ne paraîtrait-il pas déplacé.
"Et si nous tombons sur ton père ?" s'était enquis Shareen.
"Il sera compréhensif… du moins je l'espère" avait murmuré Malek en retour. "En tout cas, cela ne sert à rien de se tracasser avant. Tous mes habits sont frappés de mon blason, de toute façon."
"Voilà bien la noblesse" avait persiflé Shareen.
Elle s'était enfuie en riant, et il lui avait couru après. Laath les avait regardés se chamailler avec une expression incrédule, et avec ce drôle de petit sourire en coin qu'il arborait en permanence.

Mais maintenant, le temps n'était plus aux rires. Le palais se dressait devant eux, encombré de carrosses et de chevaux dans toutes ses allées. Les serviteurs et les gardes couraient en tous sens pour assister les nobles des principales maisons, pour les aider à ranger leur véhicule, et les inviter à entrer.
"Je n'avais jamais vu autant d'agitation par ici" murmura Malek, incrédule. "Alors, ce serait vrai ? L'empereur serait mourant ?"
"C'est ce que je vous avais dit, non ?" fit Rekk sans ralentir le pas. "Visiblement, la rumeur se confirme. Allons bon. Voilà qui ne va pas simplifier les choses"
"Vous ne pensez qu'à votre vengeance" grinça Malek, furieux. "Mais c'est bien le moindre des problèmes si jamais l'empereur meurt ! Vous imaginez les problèmes de succession ! Ca va être une catastrophe !"
"Je suis bien placée pour savoir qu'il avait un fils" fit Shareen, acerbe. "C'est cet enfant de catin qui va monter sur le trône, non ?"
"Normalement, oui… du moins, si Rekk ne décide pas soudain de se jeter sur lui pour le décapiter"
"J'y ai pensé" fit doucement Rekk.
"Je le savais… mais je ne suis pas sûr que ce soit une bonne solution. En ce moment, la moitié des nobles doivent être en train de chercher un moyen soit de l'assassiner, soit de s'attirer ses bonnes grâces"
"Et l'autre moitié ?" demanda doucement Laath
"Elle n'est pas encore au courant"
"Oh" fit Laath. "Je vois. Vous êtes tous comme ça, dans la noblesse ?"
"Parce que tu vas me dire qu'il y a plus d'honneur dans les bas-fonds de la ville, peut-être ?"
"Silence, les gamins. Nous arrivons"

Pour l'occasion, la garde du palais avait été triplée. On voyait des soldats partout, armés de leur sempiternelle lance et de leur bouclier arborant l'aigle de feu. Ils paraissaient nerveux, et cela se comprenait. La quasi-totalité des gouverneurs de province étaient venus avec une escorte, et tous ces gens ne faisaient pas forcément bon ménage.
On pouvait voir dans un coin quelques guerriers Koushites, sombres et élancés comme des lianes, tapant rythmiquement leur sagaie contre le sol et agitant leurs boucliers de manière menaçante vers un groupe de soldats de Sharnel. Ces rudes montagnards en kilt avaient déjà plusieurs fois répondu aux provocations, et seule la garde impériale avait empêché le combat. De même, les soldats Veeshites, vêtus de leurs habituelles cottes d'écailles peintes en rouge, toisaient les autres avec indolence et insolence, et les réactions violentes n'étaient pas rares.
Rekk avisa rapidement la personne qui coordonnait la garde. Il n'était pas difficile à trouver: c'était le seul officier à cheval, rouge à force de s'époumoner, agitant les bras en tous sens pour ordonner aux soldats de s'activer, de calmer les rixes, et d'organiser tout ce petit monde. Rekk le connaissait, pour avoir été son supérieur durant plus d'un an lors des guerres Koushites. C'était le capitaine Milons. Un homme habituellement calme et composé, mais qui paraissait pour une fois dépassé par les événements. Rekk rabaissa le capuchon de son manteau avant de l'approcher.

"Le bonjour, capitaine. Je suis le Baron Gaffick. Le précepteur a-t-il laissé des ordres me concernant ?"
Le manteau était inutile: Milons ne baissa pas même les yeux pour le dévisager, occupé qu'il était à observer deux Veeshites en train d'aiguiser ostensiblement leurs longs cimeterres.
"Baron, oui, tout à fait. Séparez-les, bande de larves ! Si jamais je vois le moindre sang couler entre eux, je vous déchire le dos à coups de fouets ! Que disiez-vous ? Le précepteur ? Oui, oui, allez dans l'antichambre, il m'a parlé de vous. Vous êtes accompagnés, non ? Deux personnes, il a dit. Voilà le marquis de Griffon, les enfants ! Il commande les marches du sud, alors ça risque de saigner avec les Koushites ! Vous me les mettez loin les uns des autres ! Plus vite, par le Sang, plus vite !" Il tourna brièvement son regard vers Rekk. "Vous êtes quatre ? Ce n'était pas prévu, ça. Bah, peu importe. Passez. Vous voulez une escorte ?"
"Non merci, Capitaine. Je connais le chemin" fit le Banni sur un ton apaisant.
"Parfait, parfait. Ca m'aurait ennuyé de me priver de quelques hommes juste pour vous protéger. Sans offense, hein, Baron ?"
"Ne vous inquiétez pas, je sais me protéger" murmura Rekk, amusé, avant de dépasser le barrage de gardes. Les lances s'écartèrent pour eux. "Eh bien, je serai content de me retrouver à l'intérieur, je peux vous dire. Quel vacarme…"
"C'est ici que je vais vous laisser" murmura Laath. "Je vais aller me promener un peu autour, histoire de voir si je ne retrouve pas l'homme que Deria et moi avions croisé, celui qui lui avait donné le rendez-vous"
"Tu ne viens pas avec nous ?" fit Malek, surpris.
"Non, je pense que je serai plus utile comme ça. Si jamais je ne vous revoie pas, je serai à la caverne. A bientôt !"

A moitié marchant, à moitié courant, le jeune cambrioleur disparut au détour d'un mur. Rekk haussa les épaules; son regard était pensif.
Le bruit disparut progressivement alors qu'ils avançaient dans les couloirs du palais. Les soldats restaient à l'extérieur, et leurs disputes stériles avec. Ici, tout n'était que tapis épais et pas feutrés, comme il seyait à l'antichambre d'un malade. Ils croisèrent quelques nobles de différentes maisons éparpillés en petits groupes, commentant les dernières nouvelles qu'ils avaient pu avoir. Visiblement, les choses avaient évoluées en une dizaine d'heures. Plus personne ne semblait de soucier de la victoire brutale du Baron Gaffick, et personne ne les arrêta jusqu'à ce qu'ils parviennent devant la chambre de l'empereur. Deux gardes du régiment spécial de l'empereur étaient plantés devant la porte, repoussant fermement les quelques nobles qui cherchaient à voir à l'intérieur. Rekk avança entre les lances sans ralentir.
"Hola, où croyez-vous aller ?"
"Mandonius m'attend"
"Ne bougez pas, alors. On va aller le chercher"
Rekk regarda avec intérêt la pointe de la lame qui lui effleurait le ventre.
"Faites donc, faites donc…"

Il ne fallut que quelques instants pour que le précepteur apparaisse, entrouvrant doucement la porte à doubles battants.
"Re… Baron Gaffick ! Je t'ai cherché toute la nuit ! Où est-ce que tu étais passé ?"
"J'attendais que l'agitation se calme" maugréa Rekk. "Et je réfléchissais à ce que tu m'avais dit. Comment va l'empereur ?"
"Viens, marchons un peu. Il y a des oreilles qui traînent un peu par… tu as trois écuyers, maintenant ?"
Mandonius venait de croiser le regard de Laath. Le jeune garçon baissa les yeux, intimidé.
"Je t'expliquerai. Mais ils viennent avec moi. Je ne veux pas risquer de me séparer d'eux, surtout pas maintenant. Moi aussi, j'ai des choses à t'expliquer"
"Plus tard, plus tard"
Le précepteur poussa le petit groupe hors de l'antichambre, avant d'emprunter à grands pas le couloir qui menait au jardin intérieur du palais.
"Je ne suis pas sûr d'avoir envie d'admirer des fleurs pour l'instant" grommela Rekk alors que la porte s'ouvrait devant eux.
"Que c'est beau !" glapit Shareen.
Ca l'était. Le jardin intérieur avait été construit pour le bon plaisir de l'empereur Bel, mais c'était Marcus qui l'avait rendu aussi vivant, et l'avait élargi sur deux arcades de plus. Partout où l'on posait les yeux, ce n'était qu'une orgie de bleu, de rouge, de jaune, de violet. Des fleurs exotiques poussaient dans tous les coins, et un chemin pavé d'argent permettait de se promener sans encombre entre différentes fontaines incrustées de pierreries.

"Je ne suis pas sûr que ce soit le meilleur endroit pour discuter, mais au moins nous serons loin de ces querelles de succession stériles" soupira Mandonius.
"Querelles de succession ? L'empereur est mort ?" balbutia Malek, atterré.
"Pas encore, mais ça ne saurait tarder. Il est tombé brutalement malade lorsque je suis allé libérer Rekk de l'académie. Et ça n'a fait qu'empirer durant la nuit. Je ne sais pas où tu étais passé, Rekk, mais c'était l'émeute ici alors que tous les nobles tissaient des plans pour essayer de profiter au mieux de la situation. Il a fallu que je fasse venir plusieurs régiments de garde en renfort, pour tenter de maîtriser la situation. Je ne suis pas sûr qu'elle soit tellement meilleure qu'avant, d'ailleurs. Plus nous faisons de démonstration de force, plus les gens sont convaincus qu'il s'agit de masquer la faiblesse de l'empereur. Et le pire, c'est que c'est exactement ça"
"Epargne-moi toutes ces considérations" soupira Rekk. "Est-ce qu'il va mourir, oui ou non ?"
"Il crache du sang depuis plusieurs heures, c'est tout ce que je peux te dire. Les guérisseurs se succèdent à son chevet, mais ce sont des incapables de la pire espèce. Ils prescrivent une saignée. Une saignée ! Alors qu'il est déjà faible comme un nourrisson !"
"Je ne comprends pas" fit Malek, interrompant leur discussion. "Comment a-t-il pu tomber malade aussi brutalement ? Il était pourtant capable de chasser, hier !"
"Poison" firent les deux hommes en même temps. Mandonius hocha la tête en signe d'approbation pour Rekk, puis continua: "Je ne sais pas qui ni comment, mais il est certain que c'est l'œuvre d'un poison quelconque. Un poison très violent, par ailleurs, au vu de la vitesse à laquelle il perd ses forces"
"Il est condamné, alors ?"
"Probablement…" Mandonius ferma les yeux et frappa une fontaine de frustration. "Par tous les démons gelés, ce n'était vraiment pas le moment !"
Rekk haussa un sourcil.
"Pas le moment ? Comment ça ?"
"Peu importe, maintenant. Toujours est-il que les choses risquent de prendre une tournure inquiétante. Si jamais l'empereur venait à mourir, ce serait le prince Theorocle qui monterait sur le trône; ce serait une catastrophe"
Le banni hocha la tête.
"Quoi qu'il en soit, il n'y resterait pas longtemps. Je pense que le prince et moi avons beaucoup à nous dire"
Mandonius lui lança un regard acéré.
"Comment ça ? Tu veux dire que… ?"
"Simplement ce que j'ai dit: nous avons besoin d'une petite conversation, l'héritier et moi"
"Il est sous bonne garde. Une vingtaine d'hommes dévoués le protègent des tentatives d'assassinat. Ce n'est probablement pas le meilleur moment. Mais dis-moi, tu as appris autre chose pour être soudain aussi sûr de toi ?"
"Je suppose que tu peux savoir…" fit Rekk, dubitatif.
En quelques mots, il expliqua l'histoire que Laath avait racontée, l'homme qui avait donné le rendez-vous et l'attaque de la jeune fille par les dix garçons.
"Je vois" Mandonius s'était troublé. "Vu ce que je t'ai dit hier, il est compréhensible que tu penses que ce soit le prince"
"Oui, je ne vois pas qui d'autre. En tout cas, cela vaut la peine de lui poser quelques questions. J'aimerais bien connaître l'identité de l'homme, également. Laath est justement dans le palais en ce moment pour essayer de le trouver"
"Intéressant…" murmura Mandonius. "Il a bien vu l'homme ? Vous pensez qu'il pourra l'identifier ?"
"Il a dit qu'il en serait capable. Nous verrons bien."
"Oui, je serais moi aussi intéressé par savoir de qui il s'agit. Quoi qu'il en soit, ce n'est pas le problème pour l'instant. L'empereur veut te voir. Je pense qu'il ne va pas survivre la journée. A vrai dire, si le poison continue à se propager comme ça, les choses risquent de s'accélérer en fin de matinée.
"Voilà des nouvelles réjouissantes, dis-moi…" murmura Rekk.
"Le poison est très violent. Je ne comprends pas comment il a pu être administré. L'empereur a toujours un goûteur avec lui pour éviter ce type d'incidents, et le goûteur est en parfaite santé."
Le Banni haussa les épaules.
"Bon. Je suppose que je vais devoir attendre un peu pour mettre la main sur le petit démon, alors. Allons voir l'empereur, j'aimerais lui parler s'il est encore conscient"
"J'allais te le proposer" Mandonius hocha la tête. "C'est vraiment une catastrophe"
Ils reprirent les couloirs dans le sens inverse. Cette fois-ci, ils entrèrent dans la chambre.
Shareen manqua pousser un glapissement, et Malek siffla entre ses dents avant de pouvoir s'arrêter. Le spectacle était stupéfiant – et répugnant.
Tous avaient eu l'occasion de voir l'empereur comme il était à peine deux jours auparavant, vieux, mais encore énergique et plein de vie, tissant ses plans et manipulant les pions comme son père l'avait fait. Mais le roi venait de s'effondrer, sur l'échiquier de la vie. Il était pâle comme un linceul, allongé sur son lit à baldaquin, et la lumière du soleil se réverbérait sur un côté de son visage, le rendant encore plus cadavérique, si cela était possible. Une bassine était posée près de lui, rouge du sang qui lui coulait des lèvres. Son corps était secoué de spasmes, alors qu'une odeur pestilentielle régnait dans la pièce.
Apercevant Mandonius, les trois guérisseurs au chevet de l'empereur s'inclinèrent bien bas, laissant de la place pour qu'il s'approche.
"C'est bien un empoisonnement, Seigneur" murmura le premier.
"A la racine de therebence, Seigneur" précisa un second. "C'est inodore, et ça n'a aucun goût, mais ses urines ne mentent pas."
"Epargnez-moi les détails" grimaça Mandonius. "Est-ce qu'il a une chance de s'en sortir ?"
Les guérisseurs baissèrent la tête, hésitants.
"Faibles, seigneurs, très faibles. La quantité de poison était très importante, semble-t-il, et l'empereur n'est plus tout jeune. Le fil de sa vie est bien proche de se déchirer"
"Epargnez-moi vos âneries et vos histoires de fil ! S'il meurt, ce sera quand ?" gronda le précepteur.
"Je peux encore t'entendre, Mandonius" murmura l'empereur, se soulevant à moitié sur sa couche. Il cracha de nouveau du sang. "Je ne suis pas encore mort"
"Je suis désolé, Votre Grâce" fit le précepteur en s'agenouillant au chevet du souverain. "Je ne voulais pas…"
"Tu n'as pas à t'excuser, Mandonius. Je sais que je n'en ai plus pour longtemps" Marcus toussa de nouveau, agitant faiblement sa main pour qu'on lui approche la bassine. Il cracha. "On me dit que c'est du poison. Je veux savoir qui c'est, Mandonius. Je veux que tu trouves le coupable avant que je meure. Je veux le voir écorché vif devant moi"
Rekk avança d'un pas, un sourire froid aux lèvres.
"Ca, c'est mon travail"
Les yeux de l'empereur s'écarquillèrent en reconnaissant le Banni, et il fut prix d'une toux violente. Les guérisseurs se précipitèrent à son chevet, mais il les repoussa avec un peu de son ancienne fougue.
"Je me sens seul" murmura Marcus, misérablement.
"Nous sommes là" fit doucement Mandonius, lui prenant la main malgré une grimace de répulsion. "Nous sommes là, et nous avons besoin de vous"
"Erina" fit l'empereur.
Rekk détourna les yeux avec dégoût. Le poison était une arme vile et lamentable, capable de vaincre tout homme sans qu'il ait la chance de combattre, ni même de voir d'où venait le coup. Le banni n'avait aucune tendresse pour l'empereur, qui l'avait manipulé et cherchait de nouveau à tirer parti de lui. Pourtant, il ne pouvait s'empêcher de plaindre l'épave qui se tortillait sur ce lit souillé.
Erina.
Il se souvenait de la reine, lorsqu'elle était encore en vie, avant qu'elle ne tombe enceinte de Theorocle. C'était une belle femme, douce et aimante, dont l'empereur avait été follement amoureux. C'était elle qui l'avait détourné de ses rêves de conquête pour l'inciter à d'abord pacifier son empire, et à venir en aide à son peuple. C'était sous son influence que Rekk s'était fait bannir par Bel; elle ne le supportait pas, lui et tout ce qu'il représentait. Mais il ne lui en avait jamais tenu rigueur.
Il s'était souvent demandé pourquoi l'empereur ne s'était jamais remarié après qu'Erina soit morte en couches. Il avait maintenant la réponse. Dix-sept ans après sa mort, lui-même proche de la tombe, l'empereur pensait encore à elle. Il avait été vraiment amoureux, semblait-il. Quelle pitié que d'un tel amour soit sorti un démon comme Theorocle. Il soupira. Le jeune garçon aurait-il tourné ainsi si sa mère avait été encore en vie ? Personne ne le saurait jamais.
"Erina" murmura de nouveau l'empereur.
Son teint était encore plus cireux. Il ne survivrait pas longtemps. Et la seconde même où la nouvelle de sa mort se répandrait, les différentes factions se mettraient en branle.
"Il y aura probablement une opposition forte à Theorocle, n'est-ce pas ?" fit Rekk, trop bas pour que le gisant les entende. "Est-ce qu'une des maisons a assez de puissance pour pousser quelqu'un sur le trône ?"
"J'en doute fort" répondit Mandonius sur le même ton. "Certaines pourraient y parvenir en s'alliant, mais elles ne le feront pas. Elles sont trop habituées à se battre et se déchirer pour essayer de s'entendre, même sur quelque chose d'aussi capital. Et cela veut dire probablement qu'il accédera au trône sans grand problème. C'est l'héritier légal, après tout. Il aura forcément les griffons derrière lui, et les dragons, et probablement les basilics. Je pense que son ascension sur le trône ne fait aucun doute"
"Je vois…" murmura Rekk. Il se préparait à poser une autre question, mais un râle s'échappa alors de la bouche de l'empereur, un cri étouffé, un hurlement d'agonie, alors que le sang coulait de nouveau de sa bouche.
"Aidez votre empereur !" hurla Mandonius, désespéré.
"Il est en train de mourir, Seigneur ! On ne peut rien faire" rétorqua un des guérisseurs, tentant malgré tout d'ingurgiter une potion de force au vieux souverain. Le liquide se renversa à moitié sur le ventre de l'empereur.
"Eh bien essayez quand même !" gronda le précepteur.

Il fallut une heure de lente agonie pour que l'empereur finisse par rendre son dernier soupir. Entre temps, comme fascinés, les dix Maîtres des Maisons s'étaient introduits dans la chambre, observant avec intérêt la progression de la mort sur le visage du souverain. Theorocle était là, lui aussi, les yeux brillants d'une curiosité morbide. Plusieurs gardes l'entouraient, le visage impénétrable, prêts à le protéger de leur vie. L'héritier souriait nonchalamment, mais il croisa soudain le regard de Rekk, et le sourire disparut.

"Erina" souffla Marcus, étreignant la main de Mandonius avec force. "Assieds-toi, prends une couverture, tu dois… avoir froid"
"Je vais bien, Votre Grâce" murmura le précepteur.
"Une couverture… un feu… il faut que tu te… réchauffes"
Dehors, c'était enfin le printemps. Le soleil coulait à flots par les grandes fenêtres laissées ouvertes, et il faisait déjà bien assez chaud. Mandonius transpirait dans son bliaut de soie.
"Tout va bien, Votre Grâce. Je suis là" fit-il.
"Froid… tu te… souviens, Erina ? Tu avais toujours… les pieds… froids. Erina…"
Malgré la douleur qui lui vrillait le ventre, ce fut avec un sourire qu'il mourut, secoué d'un dernier spasme qui le laissa sans vie. Doucement, Mandonius reposa la main de l'empereur.
"Il est mort" fit-il d'une voix sans timbre. Tous se taisaient
"Alors… je suis empereur, maintenant ?" s'enquit Theorocle, d'une voix surexcitée. Son oncle griffon lui lança un regard outré, mais il ne parut pas le remarquer. "Tu joues bien le rôle de la femme, Mandonius. Tu étais très convainquant dans le rôle d'Erina"
Il y eut quelques rires polis, qui se turent bien vite alors que le précepteur se relevait.
"J'ai fait ce que j'ai pu pour adoucir les derniers instants de votre père, Héritier"
"Et c'était fort bien fait. J'y ai cru, moi-même. D'ailleurs, tu m'as tellement couvé ces dernières années que tu aurais pu être ma mère, après tout. Ca n'aurait rien changé"
"Héritier !" protesta l'un des nobles, tendant une main apaisante.
"Je ne suis plus héritier, maintenant, je suis empereur de fait ! C'est vous qui me l'avez dit !"
"Nous n'avons pas encore procédé au couronnement" murmura un autre. "Mais il est vrai qu'entre temps…"
Les yeux du prince se posèrent sur Rekk et, cette fois-ci, il ne détourna pas le regard. Il resta ainsi à l'observer puis, lentement, délibérément, il fit descendre ses yeux vers Shareen, et il se lécha les lèvres.
"Gardes !" hurla-t-il, et une dizaine d'hommes firent irruption dans la pièce. "Arrêtez cet homme, et mettez-le au donjon !"
"Quoi ? Herit… Votre Grâce, vous ne pouvez faire ça !" protesta Mandonius, indigné. "Le baron Gaffick n'a commis aucun crime." Il se tourna vers les gardes. "Sortez d'ici ! Aucune personne au sang commun n'est admise au chevet de l'empereur !"
Les gardes hésitèrent le temps de quelques battements de cœur, mais un homme s'introduisit à son tour dans la pièce, bousculant les soldats pour se glisser au premier rang. Il portait une épée à la main, et un bandeau sur son œil gauche.
"En es-tu si sûr ?" susurra Gundron. "Le Baron Gaffick n'a certainement commis aucun crime, pauvre homme, reclus qu'il était dans son château de Bertholdton. Mais le Baron Gaffick est mort voici plus de vingt ans. L'homme qui est devant vous, c'est Rekk. Rekk le Banni, recherché pour de multiples crimes !" Il haussa le ton. "Obéissez à votre empereur, soldats ! Saisissez ce monstre !"
"Rekk ?"
"Le démon cornu ? Ici ?"
"Ce n'est pas possible !"
"Rappelez-vous, il a vaincu Maître Semos…"

La salle rentrait en irruption alors que les nobles s'écartaient précipitamment du Banni, stupéfaits, s'interpellant entre eux et sortant leurs armes d'apparat dans une parodie de défense.
Rekk les regarda reculer ainsi, puis reporta son regard vers les gardes qui avançaient. De plus en plus allaient venir. Gundron devait avoir ameuté une grande partie de la garde royale pour s'occuper de lui.
Il tira son épée, et la lame en quittant son fourreau émit un bruit d'acier tranchant la chair. Puis il leva la tête, et hurla sauvagement, tel un loup. Ses cheveux dansaient follement autour de son visage.
""Je suis le Banni ! Je suis le Démon Cornu ! Je suis l'Epée de Feu ! Venez mourir, et nourrissez ma légende !"
Oh pinaise un zerk !

PLANQUEEZZ VOUUUUSSSSS !!!

P.S. Aucun reproche a te faire sur le malade, c'est assez realiste et tu reussi bien a le faire oublier en le passant au second plan, mais tu devrais etoffer les autres aspects de la scene pour que ca passe encore mieux.
__________________
Sans MMO-Fixe
Un ptit up en espérant la suite pour aujourd'hui
Citation :
Ah, ben j'aime mieux comme ça, c'est déjà plus vivant
Après, c'est simplement une question de tuning.
J'en profite pour dire que j'attends avec impatience la suite des commentaires, en particulier sur les deux dernières pages dont je ne suis pas mécontente (ce qui peut être totalement faux, et s'avérer nul mais bon ).
Citation :
Provient du message de Grenouillebleue
Tiens, je viens de découvrir que tu as uppé ma photo dans l'album, Kalea.

C'est fourbe, ça...
Le prix de la célébrité .... GNIARK
__________________
Sans MMO-Fixe
Citation :
Provient du message de Ariendell
Un ptit up en espérant la suite pour aujourd'hui


J'en profite pour dire que j'attends avec impatience la suite des commentaires, en particulier sur les deux dernières pages dont je ne suis pas mécontente (ce qui peut être totalement faux, et s'avérer nul mais bon ).
Non toi tu vas aller mourir aussi paske tu as pris la sale habitude de la grenouille de couper des textes la ou il faut pas.

oui je parle des deux dernieres pages
Citation :
Provient du message de Ariendell
Meuh nan, c'est pas coupé
C'est juste que j'ai envoyé comme ça, là où j'avais fini
D'ailleurs j'écris la suite là
t'as interet à couper au moins apres leur sortie de Benaba
Y'a plusieurs chapitres prévus pour les terres Orfanc
Mais bon, déjà une petite surprise pour Benaba

Edit pour la Grenouille: bah le coup des pensées en italique, je le faisais déjà, mais j'en mettais peu ... y'a des chapitres qui en ont plus (comme celui que je fais en ce moment), et d'autres ou l'on sera plus en spectateur
Je n'ai pas eu le temps de lire la fin, Ariendell, j'avais juste jeté un oeil à la première page, qui me paraît bien mieux maintenant (mais, euh, copiteuse avec les "pensées" des personnages en italique ).

Je te promets de lire ces deux dernières pages avant ce soir.
Là, je termine le chapitre 20.
Ca va être.... sanglant
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