[Orcanie] Promesse d'une ombre

 
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« La passion possède des vertus particulières, elle peut se distiller, s’apprécier, se vendre, s’échanger se partager. Mais dans chaque cas, elle pousse le client à agir contre sa volonté propre. L’Homme étant ce qu’il est il écoutera toujours ce que lui dicte ses pulsions. Utilisez cela, dans bien des cas le client fait lui même une grande part du travail. »

Le Palais au Volet Clos 11 : 28 ~


Un orage sourd et noir s’abattait sur Camelot, la nuit d’encre pesante sur les toitures d’ardoises, engloutissait les secrets inavoués des murmures passionnés étouffés par quelques pouce de pierre taillés. Les fontaines crachaient un jus brun d’eau mêlée de boue, débordant ainsi sur le pavé humide de la ville désormais endormit.

Un nez avait reniflé la peur parmi les masures qui feignaient un sommeil visant à tenir à l’écart les choses honteuses et grouillantes qui rôde parfois dans les ténèbres par des nuits comme celle-ci. Un éclair déchira le ciel en une zébrure d’argent perfide, venant presque lécher les monuments de pierre ; ce qui éclaira un instant la pièce, vaste et coquettement meublées. Il se trouvait en son milieu un lit à baldaquin dans lequel étaient lovés deux formes enlacées.

La fenêtre s’ouvrit très lentement, un braillement imperceptible dans le chaos qui se déchainait au dehors, puis se referma aussitôt dans cliquetis feutrés. Le parquet ne grinça pas, un tapis tissé de motifs complexes et intéressant le recouvrait en partie ; une ombre vola au dessus d’un guéridon et fit tinter d’un souffle amusé les quelques bijoux posés négligemment sur le bois vernis. Les ténèbres s’épaissirent dans le nid douillet des deux cœurs endormis, les ténèbres semblaient se déplacer, flotter tel un nuage de petites choses noirs, l’obscurité dansait, en un ballet de mouvement gracieux et limpide, tel un jet d’encre noir dans l’eau cristalline de la réalitée. Puis, doucement, suavement, une ombre plus noir que la nuit se dessina sur le montant de tête du lit, une ombre en-capée d’un grand manteau à capuche, une ombre accroupit au dessus des deux êtres. Elle passa son pouce sur ses lèvres en fixant l’homme bordé de songe, la sicaire portait une armure de cuir noir, ouvragée de symboles étranges blessants pour les yeux, d’où suintait par pulsion un liquide violacé odorant, dont la cadence d’écoulement était dicté par sa propre rage froide en cet instant, cependant, elle ne portait aucune arme à son coté. Le breton avait un sommeil agité lui semblait-il, des gouttelettes de sueur perlaient à son front, et bredouillait des phrases inaudibles. Le regard de l’assassin vint se porter sur la femme, les deux fentes de colère se muèrent en deux flaques de tendresse, elle effleura la joue de la belle endormit, replaça une mèche de ses cheveux noir qu’elle jugea encombrante, et remonta la couverture sur ses épaules.

Puis elle se pencha, s’étira d’une manière surnaturelle afin d’approcher ses lèvres du visage de l’homme. Elle renifla le parfum nocturne du personnage, étouffa un rire mauvais et cueillit une goutte de sueur sur son front du bout de la langue. Elle entrouvrit la bouche en souriant, dévoilant une rangée de dents blanches et fit courir son souffle près de l’oreille de l’ensommeillé :

« Menteur… Perfide… Sournois… » cracha une voix sourde, bourdonnante, pleine de venin et de rancoeur. Elle changea de position, tout son corps formait à présent une voûte d’ombre au dessus du breton dont le sommeil s’agitait de plus en plus.

« Toi, voleur, perfide » Elle étouffa un rire de plus, quelques part dans les fin fond de sa gorge.
« Voleur, entend ceci maintenant. Si tu lui fait le moindre mal, si de ses yeux les larmes coulent de désespoir par ta faute, si son cœur saigne par la lame de ta négligence, je viendrais. » Un sourire dément entaillait à présent le visage de la bretonne. Les ombres chuchotaient maintenant autour du lit comme des milliers de voix malsaines et moqueuses, le faisant baigner dans une mer de ténèbres que ne pouvait pénétrer la violente lumière des éclairs au dehors.

« Si tu détruit ceux que j’aime, je viendrais, et je détruirais à mon tour ceux qui te son cher. Je tuerais ce que tu aimes, et ce que tu n’aimes pas, creuserais le puit de ta propre déchéance, ruinerait tout les espoirs que ta vie pourrait nourrir, je viendrais, te condamner à une existence morte et froide, une existence sans chaleur ni vague, je viendrais t’offrir une mer d’huile sentimental et un néant affectif. Entend moi breton, entend ceci du fin fond de tes rêves, entend mon serment et ma promesse. »

L’homme se releva brutalement, en nage, il vérifia la présence de sa compagne et fit courir son regard dans la chambres, personne, il se leva et alla vérifier la fenêtre qu’il trouva close. Dehors les nuages de la tempête passée avait été chassé, et une pleine lune faisait miroiter l’humidité des toits en un millier de chandelles étincelantes. Il se servit un verre, et observa avec intérêt la veste de l’armure de sa dulcinée. Il s’était toujours interrogé sur la signification du soleil noir imprimé sur la poitrine de la veste… Mais une odeur étrange le travaillait, il tenta quelques instants d’en déterminer la provenance, ce qui l’amena près du lit. Sur le montant de tête, se trouvait une gouttelette d’un liquide poisseux et violacé…
Je n'ai pu décrocher de ce texte avant la fin tellement il m'a tenue en haleine.
Un frisson m'a parcouru le dos pendant ma lecture et pourtant, j'ai continué... quelle délicieuse angoisse. Encore !!!
 

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