Depuis mon arrivée au sein du Super Groupe Astral, ma vie a profondément changé. D'abord j'ai une chambre à moi, que je ne suis pas obligée de partager avec les rats et les cafards. J'ai aussi accès à des douches super belles, et à une cuisine où la nourriture ne manque jamais ! On m'a même donné de quoi me racheter des fringues, et j'en ai profité pour faire quelques courses dans des friperies sociales. C'est cool ce qu'on peut y trouver ! Y'a des vêtements du style de la grande Amérique des années 50. J'aurais trop aimé vivre à cette époque.
Aujourd'hui, m'dame Juna Terra m'a invitée à une sorte d'entraînement, dans un parc de Downtown. Elle est prof' d'esprit pour les Young Astral dont je fais maintenant partie, et elle est vraiment sympa. Et patiente. Et pas ringarde surtout. En tout cas, elle a remarqué ma tendance à laisser ma rage prendre le dessus quand je me bats, et elle souhaite m'apprendre à la maîtriser. Autant dire que ça risque d'être méga tendu comme histoire.
Nous nous retrouvons donc dans le parc. Il fait beau, et un léger vent fait bruisser les feuilles des arbres bien entretenus de Downtown. Firefly (c'est le nom de code de Juna) fait tout pour me mettre en confiance. Elle a une sacré empathie, et même si j'ai peur de ce qui va suivre, je décide de me laisser guider. Première fois que ça m'arrive... j'ai toujours détesté qu'on me donne des ordres ou qu'on prenne les décisions pour moi.
Elle me demande de l'attaquer, de montrer ce que je sais faire. Oulà non ! Je ne veux pas. Aucune envie d'agresser quelqu'un que j'aime autant. Y'a pas moyen. Juna réfléchit, tandis que je me braque... et me propose un jeu. Elle trace une ligne sur la pelouse, et se place devant, après avoir prise la taille imposante qu'on lui connaît quand elle est en pleine possession de ses pouvoirs.
- Essaie de me faire quitter cette ligne, Maka’, me dit-elle, me provoquant du regard.
J'adore jouer, et je ne peux refuser un tel appel. Ma queue de renard se met à ondoyer toute seule, et je sens le plaisir grisant du jeu monter en moi. J'essaie de la pousser, mais comment déplacer quelqu'un qui doit peser maintenant un demi quintal ? Elle se moque de moi, elle me taquine, ce qui me titille au plus haut point. Grrr... je vais trouver un moyen. Je fais finalement appel à mes "dons", les retenant au maximum. Je lui tape doucement au creux des genoux, ce qui la fait se plier et manquer de perdre l'équilibre... malheureusement pas suffisamment.
Ses taquineries et ses moqueries se font plus vives, ce qui m'excite d'autant. Je commence à multiplier mes coups, frappant plus fort des pieds et des mains, mes coups heurtant toujours les zones les plus douloureuses. Je réfreine cependant certaines pulsions, et ne la frappe pas au visage, ni au cou. Elle encaisse d'une façon vraiment surhumaine, j'ai l'impression de taper sur un mur de brique, et ça m'énerve ! Je me sens faiblarde à côté d'elle, et mes coups se succèdent de plus en plus rapidement, la faisant vaciller puis quitter la ligne quelques instants !
Brèche ! Je saute en arrière et me propulse en avant dès que je touche le sol, BLAM ! Je la fais reculer de plusieurs pas, et m'installe sur la ligne, victorieuse ! Mon corps tremble d'excitation, alors que je la regarde fièrement. Mais elle fait un pas vers moi et me repousse au loin avant de s'installer de nouveau sur la ligne. Elle se moque de moi, et en plus elle triche ! Une vague de chaleur me submerge.
Je perd soudain la notion du temps, tout se déroule comme dans un rêve, et le son est presque étouffé. Juna fait un bond phénoménal et m’atterri dessus, me plaquant au sol. Elle me bloque les bras et les jambes, son visage moqueur au dessus du mien. Je vois rouge et la température monte. Me libérer... me libérer... mon corps tremble et mes muscles se tendent à tout rompre. J'entends mes cris qui ressemblent plus à des hurlements de rage, je tente de m'arracher à étreinte, de lui donner des coups de tête, de me tortiller dans tous les sens à m'en briser les membres. Elle pose son front contre le mien et me plaque totalement sur l'herbe, à sa merci. Elle semble me parler, mais je n'entends rien. La chaleur monte et devient insupportable, tout mon corps me brûle, alors que je continue à tirer sur mes membres comme si ma vie en dépendait. Je me cambre comme une folle, dans l'espoir dérisoire de la repousser. Juna reste calme, et me fixe de ses yeux azur, me parlant.
Le sang bat un peu moins fort à mes tempes, même si mon corps est en feu. Je ne grogne plus. Tous mes muscles sont tendus à l'extrême, et tremblent légèrement.
- Dirige ta frénésie pour la contrôler, répétait mon professeur. Laisse ta frénésie t'envahir, puis prends le dessus... je veux voir un sourire sur ce visage rouge !
Je surf sur la rage encore contenue en moi, mais je suis plus calme. Je sens au fond de ma gorge le goût si particulier de la frénésie, comme une fontaine d'adrénaline incontrôlée... mais je suis de nouveau maîtresse de moi même.
Lorsque Juna s'envole, me libérant de son étreinte, je reste allongée dans l'herbe. Je goûte cette étrange sensation, celle de la rage consciente, de la frénésie maîtrisée.
J'ai conscience du feu dans mon corps, de l'adrénaline qui coule en moi, et de tout ce qui m'entoure. C'est grisant... mais plutôt douloureux.
Suite à cela, nous avons échangé notre ressenti, assises sur l'herbe du parc. Juna semblait satisfaite de mon comportement, bien que je ne tirais aucune fierté de cet entraînement.
Trois boules de glaces au caramel offertes par ma chère professeur furent une récompense plus qu'agréable, et me firent oublier mes douleurs et ma fierté blessée.