Voler de ses propres ailes

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« Non ! »

« Si Ethiel, ne fais pas l’enfant »

« Tu as songé à Pa’ et Ma’ ?»

Sylea regarda Ethiel droit dans les yeux.

« Tu connais aussi bien que moi leur histoire »

« Oui .. mais .. on ne sait rien faire »

La détermination du jeune Tryker s’amenuisait au fur et à mesure de la conversation passionnée qu’il entretenait avec sa sœur.

« Nous sommes deux et nous ne sommes pas si bête, enfin, disons que je ne suis pas si bête et puis on apprendra »

« Mouais, de toutes façons tu ne pourrais pas te débrouiller sans moi ! » Ethiel bomba le torse sur de lui, Sylea se contenta de sourire. La décision était prise, il fallait maintenant tout organiser.


Quelques jours s’étaient écoulés depuis le Buta Hari des jumeaux. Ils devaient maintenant choisir une occupation utile à la communauté. La pêche, la cueillette, aider à l’entretien du village ou beaucoup d’autres choses encore. Comme je l’ai déjà pu vous faire remarquer, le Buta Hari marquait dans la vie d’un Tryker comme Sylea ou Ethiel, le moment où il fallait commencer à voler de ses propres ailes. « Voler de ses propres ailes », cette expression pouvait avoir nombre significations, participer activement à la vie de la communauté, songer à fonder une famille ou partir. Chaque individu de la communauté faisait son choix, personne ne reviendrait dessus. Ceci étant, pour ce qui concernait un départ éventuel, la communauté se devait malgré tout d’essayer de l’en empêcher. C’était ainsi que cela se passait. Le départ devait être vécu comme une fuite, c’était juste une question de saveur et de détermination.

Sylea avait fait son choix, Ethiel, lui aussi avait son choix. Inconsciemment il avait pris la même décision que sa sœur, comment pouvait il en être autrement ? En revanche, il se devait de lui apporter la contradiction, comme tout bon frère qui se respecte.


« Alors on va faire comme cela … » Commença Sylea.


Il s’en suivit une longue discussion animée parfois, ponctuée par une bagarre fraternelle. Que voulez-vous, Sylea a vraiment un sale caractère et sur l’échelle des sales caractères établie par Ethiel, elle atteignait le rang maximum. A vrai dire il n’y avait qu’une seule personne sur cette échelle et c’était sa soeur, mais pour lui cela suffisait amplement.

Une touffe de cheveux en moins, une dent ne tenant plus très bien sur son support, une jolie griffure au visage et un câlin après, la journée était réglée, planifiée comme peut l’être la journée d’un Tryker.

Première étape, le vol de cartes.

Ethiel avait pour mission de lâcher les amarres d’une embarcation et faire sortir Limié, le responsable des quais, de sa cahute. Liémié était un vieux marin, tout le monde savait qu’il possédait de cartes marines assez détaillées qu’il avait lui-même établies tout au long de ses voyages. Il avait aussi les cartes des meilleurs coins pour la pêche, les cartes des ports et de leurs meilleures tavernes, les cartes de certaines îles aux trésors, du moins c’est ce qu’il prétendait après une soirée assez arrosée.


« Liémié , Liémié !!!! Il y a un de tes bateaux qui fugue !!! »

« Liémié !! Liémié viens vite m’aider !! » Ethiel criait, il était allongé sur le quai et à bout de bras s’accrochait à une embarcation qui pour le coup avait vraiment décidé de prendre un peu de repos, l’occasion était trop belle pour ce petit bateau qui avait vraiment trop travaillé ces derniers temps.

Sylea l’observait de loin avec un petit sourire de satisfaction.


« Pas si empoté que cela finalement »

Liémié quant à lui, sortit en furie de sa cahute, visiblement dérangé en pleine sieste, il chercha du regard la personne qui avait osé crier aussi fort. Il tourna sa tête de droite à gauche, et repéra enfin Ethiel et le bateau fugueur. Il couru aussitôt dans leur direction. Sur l’échelle des coureurs d’Ethiel , Limié atteignait aussi péniblement le second rang, mais à sa décharge il commençait à se faire vieux.

(à suivre ...)
(suite)
Sylea, comme prévu, profita de l’absence de Li émié pour aller fouiller sa cahute. Contrairement à toute attente, et contrairement à ce que le personnage de Limié pouvait laisser paraître, la cahute était parfaitement en ordre. Tout y était rangé, propre, à tel point que Sylea en resta bouche bée. Ethiel, aurait évalué ce rangement assez haut dans son échelle du rangement.

« Comment je fais pour chercher moi si c’est rangé ! Cela ne va pas du tout »

« Il doit être malade le vieux Liémié, il n’y à pas d’autres explications plausibles »

Se remettant de son étonnement, elle commença a fouiller la pièce. Elle chercha dans le coin cuisine, sous le lit, sans succès.


« Un peu de logique Sylea ! Un peu de logique ! »


Alors elle fit ce qu’elle faisait toujours dans ces cas là. Pour être franc elle n’a jamais été dans cette situation, mais c’est ainsi qu’elle aurait toujours agit si plus souvent elle avait eu à fouiller une pièces. Elle ferma les yeux et laisse son instinct agir.


« Pam ! » « Ouille » Ah , c’était la table

Après deux trois tentatives infructueuses, elle ouvra les yeux et se retrouva devant une étagère qui faisait face à la porte d’entrée. Sur cette étagère toute une série de cartes y étaient posées. Très vite elle s’en sait d’un paquet et sorti de la cahute aussi silencieusement que possible.

Du côté d’Ethiel et Liémié, la situation se réglait doucement. Le bateau avait repris sa place bien malgré lui et Liémié regagnait doucement sa cahute, lieu privilégié de son repos quotidien.

Un peu plus loin, comme un peu plus tard, se tenait une étrange discussion entre deux Trykers


« C’est bon je les ai , moi je vais les regarder et les étudier et toi tu fais le plein de provisions, et essayes d’être discret »

« Non ! je suis pas d’accord »

Binnng !


« Bon d’accord je vais faire les provisions » se résigna Ethiel en se tenant la joue encore toute rouge.

Sylea, enfin tranquille se pencha sur les cartes et commença à les étudier. Elle en choisit une qui devait selon toute vraisemblance devait correspondre aux cotes non loin du village. Pour tout dire elle n’y comprenait pas grand-chose, c’était assez nouveau pour elle, mais disons qu’elle avait du flair. Elle réussi à repérer les récifs à éviter, et en passant sur une autre carte sélectionna ce qui semblait être un port. Leur premier arrêt serait ici.
Selon elle, il y avait trois ou quatre jours de navigation en longeant les cotes. C’était plus long qu’en piquant vers le large pour changer de cap peu après, mais cela semblait le plus sur chemin. Elle était tout joyeuse de vivre cette aventure, d’autant plus joyeuse de la vivre aux côtés de son frère, bien qu’il aurait été difficile de lui faire avouer cela.


La journée se passa plutôt bien, Ethiel récoltait les différentes baies, Sylea étudiait patiemment les cartes, très concentrée sur son travail. La nuit, comme le jour à une particularité. Elle arrive toujours à l’heure, à son heure, différente chaque nuit, mais à l’heure quand même.

C’est le moment qu’avaient choisi les deux jumeaux pour partir, tout le monde serait en train de se restaurer. Personne ne prêterait attention à deux jeunes qui avaient un peu de retard pour venir à table. Voilà donc qu’ils s’approchent des quais, Sylea les bras chargés de cartes, Ethiel les bras chargés de provisions. Le bateau était tout choisi. C’était le même qui avait voulu prendre quelques vacances dans l’après midi. Ils y grimpèrent, s’installèrent sans un bruit, et Ethiel, au signal de sa sœur, détacha les amarres. La grande aventure pouvait commencer …

Ils s’éloignaient doucement du village, sans regarder derrière eux. S’ils l’avaient fait, ils auraient pu voir leur parents, leurs amis, leur parrains les observer et leur faire des petits signes de au revoir… Tout le village était forcément au courant de leur départ, mais personne n’en avait rien dit. C’était ainsi.


« Revenez moi vite mes enfants » furent les seuls paroles prononcées par la mère de Sylea sur cette plage.


Les premiers jours du voyage se passaient sans encombre (oui, oui, vous vous en doutez, lorsqu’on commence ainsi, c’est qu’il va y avoir une catastrophe d’ici peu. On ne peut rien vous cacher, mais laissez moi poursuivre). Sylea naviguait, et sur une échelle des bons navigateurs, Ethiel l’aurait classé à l’un des plus hauts rangs. Ceci étant, il n’y avait que sa sœur sur cette échelle, qui ressemblait fortement à l’échelle des mauvais caractères. Lui, en revanche, était plus doué pour la pêche. Mais alors, vraiment très doué. Sylea se demandait parfois comment il faisait, elle en était même à croire qu’il arrivait à parler aux poissons et à les convaincre de venir tranquillement s’embrocher sur sa petite pique.

Alors que les deux premiers jours s’étaient relativement bien passés, si ce n’est une petite bagarre qui entraîna un joli chavirage, le troisième jour Sylea avait un mauvais pressentiment (classé à six sur l’échelle des mauvais pressentiments). La petite embarcation s’éloignait des côtes, inexorablement et indubitablement entraînée par les courants de plus en plus forts. Sylea s’activait pour maintenir le cap, Ethiel quant à lui tentait de l’aider. Mais rien n’y faisait. La mer devenait de plus en plus capricieuse. La tempête s’annonçait. De tempête, il ne s’agissait en fait que d’une légère houle, mais pour deux Trykers encore novices dans l’art de la navigation, perdus en pleine mer c’était une vraie tempête (pour information Ethiel l’avait tout de suite classée à un rang neuf sur son échelle des tempêtes en pleine mer). Sylea bien qu’assez douée, fit un mouvement avec la barre qui se brisa net. Il n’y avait plus aucun moyen de maintenir le cap. Les jumeaux, ne pouvant vraiment plus rien faire se laissèrent aller au bon vouloir des éléments.

Se laisser aller pour eux n’était pas vraiment un problème, mais dans ces conditions c’était bien plus dangereux. Plus la journée avançait doucement, plus Sylea et Ethiel s’inquiétaient, ils s’éloignaient vraiment des côtes, la Trykette n’utilisait plus ses cartes devenues inutiles.
La nuit, comme à son habitude arriva à l’heure et la mer ne se calmait pas , bien au contraire, elle était de plus en plus furieuse (Ethiel n’arrivait plus à placer cette tempête sur son échelle).



« Là des lumières » cria t il.


Sylea regarda alors dans la direction qu’indiquait son frère. Les vents avaient au moins cet avantage, ils dégageaient assez nettement le ciel. Nos deux jumeaux agirent d’instinct, sans même se concerter, ils plongèrent exactement au même instant et nagèrent en direction de la lumière. Ils étaient bien incapables d’évaluer la distance, mais peu importe, ils se sont lancés. A bout de force, luttant contre les vagues qui voulaient les faire dévier de leur route, ils arrivèrent enfin à ce qui pouvait être de la terre ferme, épuisés et tels des enfants, ils se collèrent l’un à l’autre, s’enlacèrent et tombèrent dans un sommeil profond, sur cette plage inconnue.
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